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jeudi 13 novembre 2025

LES AGOTHS AU PAYS BASQUE EN 1877 (première partie)

LES AGOTHS EN 1877.


Un(e) cagot(e), dans le Sud-Ouest de la France, était aussi appelé agote, sur le versant Sud des Pyrénées, en Espagne. Il s'agissait de termes dépréciatifs qui désignaient des groupes d'habitants, exerçant des métiers du bois, ou du fer, frappés d'exclusion et de répulsion dans leurs villages, surtout au Pays Basque.



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BENITIER DES CAGOTS
65 ST SAVIN


Voici ce que rapporta à ce sujet le Bulletin de la Société Ramond, en janvier 1877 :



"Les Agoths.



Vestige obscur, d'un passé plus obscur encore, l'Agoth (en basque Agotac) est un être qui a été mis à l'index par la société, pareil au lépreux du moyen-âge, que l'on fuyait et qu'on reléguait loin des hommes comme un être malfaisant, et dont on évitait le contact et la vue.



Les idées les plus extraordinaires et les plus contradictoires règnent sur cette race d'hommes, considérés encore de nos jours, dans certaines localités du Baztan (Navarre Espagnole) comme de vrais parias, malgré les idées de civilisation qui ont pénétré dans les hameaux les plus reculés et les plus humbles de nos montagnes.



En France, la Révolution fit disparaître l'ilotisme où étaient tenus ces pauvres déshérités, méprisés, bannis, on ne sait pourquoi, jusqu'alors. Mais en les émancipant, elle n'a point extirpé complètement les préjugés qui existaient contre eux, tant il est vrai de dire que les préjugés sont comme les mauvaises herbes des champs, que l'on arrache et détruit toujours avec plus de peines et de difficultés. Le temps seul effacera peut-être une répulsion aussi profondément enracinée dans l'esprit de nos populations Basques.



Qu'est ce que l'Agoth ? — Dans certaines contrées, l'Agoth est cet homme qui a le lobule de l'oreille adhérent à la joue, et sans intersection.


Ailleurs, c'est un être dont la muqueuse nasale est toujours sèche et sans sécrétion.


Dans les provinces Basques espagnoles, l'Agota est le descendant d'une race maudite qui n'a pas voulu croire à la Vierge Marie (Arianisme ?).


..... Serait-ce là une réminiscence de ce temps barbare, qui a tout étouffé sous l'étreinte du fanatisme, et qui a donné naissance aux horreurs des tristes jours du trop fameux Torquemada ?.......




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INQUISITEUR TOMAS DE TORQUEMADA




Toujours est-il que l'odieux préjugé attaché au nom et à l'existence de l'Agota est fortement enraciné dans l'esprit de nos paysans, et qu'il faudra bien des siècles pour faire disparaître des moeurs de nos montagnards la tache indélébile rivée à l'existence de ce pauvre déshérité.



Agoth, Cast-Agoth, Bohémiens — Diverses dénominations ont été employées, par les populations du nord de l'Espagne et de l'Ouest de la France, pour désigner l'Agota, poursuivi partout par la même réprobation et par le même mépris immérité, et soumis aux prescriptions les plus humiliantes.



Le nombre des auteurs qui ont cherché à jeter quelque lumière sur l'histoire des Agoths est fort considérables. Notre but sera très restreint. Nous essaierons d'arracher au passé de ces pauvres réprouvés, un rayon de lumière dans le chaos impénétrable dont leur origine et leur histoire sont enveloppées.



Nous ne sortirons pas des Agoths du pays Basque, laissant à nos devanciers le loisir de les assimiler aux Caqueux, Gafos, Chrestias, Cabaniers,Colliberts, Nioleurs, Cailluauds, etc, etc., et autres, autant de parias que la société a rejetés de son sein et parqués, dans un temps non éloigné de nous, comme des bêtes de somme.



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AGOTS DE NAVARRE
PAYS BASQUE D'ANTAN


Ce qui frappe tout d'abord l'attention de l'observateur, c'est la consonnance du mot Agotha. Y a-t-il un lien de parenté, une origine commune entre les Agoths et les Cast'-agoths ?



Il n'existe aucun doute, de nos jours, sur la parenté des Cast'agotac et des Gituac, connus vulgairement dans le pays Basque sous le nom de Bohémiens. Pendant que les premiers vivent au milieu de nous, dans la quiétude d'une civilisation relative, les Gituac appelés encore Gitanos, mènent une vie nomade et sont pourchassés de tous les centres populeux, à cause de leurs habitudes de rapines et de vagabondage.



Chassés d'Espagne vers la fin du XVe siècle, les Bohémiens (Gitanos) s'arrêtèrent, les uns sur notre frontière, d'autres préférèrent la vie aventurière à l'existence paisible que leurs frères avaient choisie, à Ciboure, St-Jean-de-Luz et les environs. Dans un temps peu éloigné de nous, on voyait périodiquement quelques-uns de ces parias nomades, débarquant au quartier Bordegain (commune de Ciboure) et traitant avec les Cast'-agotac en frères et amis. Les plus vieux de la tribu de Bordegain se rappelaient encore naguère d'avoir parlé avec eux la langue Bohémienne, dont il reste à peine de nos jours quelques vestiges.



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BORDAGAIN CIBOURE
PAYS BASQUE D'ANTAN


On nous pardonnera cette digression, qui n'est peut-être pas sans importance, car tandis que nous admettons sans aucune difficulté la parenté des Cast'-agotac et des Gituac, il nous répugne d'accorder, comme l'ont fait plusieurs auteurs, la même origine aux Agoths.



Il suffit, en effet, d'une inspection superficielle pour éloigner toute idée de parenté entre eux. Pendant que les Castagotac et les Gitanos, qui ont conservé le type primitif, accusent franchement une race méridionale, africaine, les Agoths qui sont en général blonds ou châtains, présentent les mêmes caractères que la population ambiante au milieu de laquelle ils vivent. Cette différence de qualités physiques suffit, à nos yeux, pour exclure toute idée d'origine commune. Nous croyons que le Basque voulant qualifier des hommes à moeurs, coutumes, civilisation différentes, les a appelés par le nom générique de Castagota, Agota, appellation impropre qui, dans l'esprit du Basque, renferme peut-être une idée de différence d'origine. C'est le Ruomi des Arabes ; car pour l'Arabe, tout ce qui n'est pas Africain est Ruomi. Les Romains eux-mêmes, dans leurs beaux jours de conquêtes, n'appelaient-ils pas Barbares tous les peuples non soumis à leurs lois !...



Le Basque qui les a assimilés dans les mêmes prescriptions, ne les confond jamais, car s'il a de la répulsion pour les Gitanos, il a de la commisération pour l'Agota.



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BOHEMIENS 19EME SIECLE


Des Agoths jusqu'à Philippe V, dit le Long— C'est du Xe ou XIe siècle que l'on entend, pour la première fois, parler des Agoths du Béarn.



Dès l'origine même, ils furent en butte à toutes sortes de persécutions, obligés de se réfugier dans les Agot-étchéac (maisons d'Agoths) : habitations pauvres et misérables où ils vivaient entassés pêle-mêle, à côté et à l'instar des Lépreux. Ils étaient tenus, sans rétribution, à la coupe du bois pour les habitants de la localité. Défense leur était faite, sous les peines les plus sévères, d'adresser la parole au Pelluta. C'est sous ce nom que les indigènes étaient désignés par les Agoths, à cause, croit-on, de la longue chevelure que portaient les paysans Basques, ce qui était un signe de noblesse. Voués à la haine et au mépris public, les Agoths furent enveloppés dans les mêmes prescriptions que les Lépreux. Ils furent même accusés de ladrerie, ou d'être affectés de la lèpre, maladie qui était considérée comme une punition directe de la main de Dieu.



Les Agoths ne pouvaient rien posséder. Ils ne pouvaient rien entreprendre que les métiers réputés vils et indigènes, tels que l'état de charpentier, bûcheron, tisserand, tourneur sur bois.



L'amende, l'exil, le fouet, les attendaient impitoyablement s'ils se faisaient menuisiers, boulangers et marchands de comestibles. Et pour qu'on pût les reconnaître à distance, ils étaient tenus de porter à leurs vêtements, à l'épaule gauche, une pièce de drap rouge en forme de patte d'oie ou de canard.



Défense leur était faite de marcher nu-pieds ; on disait, et cette croyance était devenue générale, que là où un Agoth avait posé son pied l'herbe ne croissait plus. Ils ne pouvaient point porter des armes à feu, épées, poignards, etc., ni remplir aucune fonction civile. Ils ne jouissaient point du droit de cité. Le meurtrier d'un Agoth n'était puni que d'une amende pécuniaire. Le mariage et les relations sexuelles étaient interdits entre les Agotac et les Pellutac. Divers règlements de 1581 et 1608 punissaient de mort toute infraction à cette législation.



A l'église, ils étaient traités comme des pénitents : leurs places, leurs portes et leurs bénitiers étaient différents.



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BENITIER DE CAGOTS
65 SAINT-SAVIN


Leur témoignage en justice était de peu de valeur. Sept témoins Agoths équivalaient, à peu près, à un témoin indigène.



Cette réprobation s'explique, comme nous l'avons déjà dit, par le fait qu'ils étaient accusés d'être affectés de la lèpre. Cette croyance fut enracinée jusqu'en 1600, époque à laquelle des examens faits par les médecins les plus en renom de l'époque, déclarèrent les Agoths : sains, forts, robustes et non atteints de lèpre.



Déjà, deux siècles auparavant, en 1460, on sut positivement que ce reproche était mal fondé. Les Etats de Béarn, ayant présenté à Gaston, prince de Navarre, une requête pour qu'il fût interdit aux Agoths de marcher nu-pieds de peur d'infection, et en cas de contravention, de leur percer les pieds avec un fer rougi au feu, ces demandes furent rejetées, ce qui fait beaucoup d'honneur à Gaston de Navarre.



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BOHEMIENS 19EME SIECLE


Mais malgré la protection accordée par lui et ses successeurs, les prêtres, imbus des mêmes idées que les Etats de Navarre, refusèrent formellement de les entendre en confession ; mais ils ne pouvaient leur refuser l'entrée de l'église, car ils étaient bons catholiques et surtout très pratiquants.



C'est donc dans cet état d'ignominie, que les malheureux Agoths ont traversé tant de siècles ; siècles d'ignorance et de fanatisme s'il en fût, où l'homme opprimait k'homme en le réduisant à l'esclavage matériel et moral."



A suivre...



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