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mercredi 11 juin 2025

LES BASSES-PYRÉNÉES EN 1823 PAR LOUIS GARNERAY (première partie)

LES BASSES-PYRÉNÉES EN 1823.


En 1823, Louis Garneray, peintre officiel de la Marine, parcourt les côtes de la France entière, de 1823 à 1832, à la demande du duc d'Angoulême, qui lui commande des vues des grands ports de France.



pays basque labourd autrefois garneray port peintre
VUE DE BIARRITZ
PAR LOUIS GARNERAY 1823



Voici ce que rapporta à ce sujet Louis Garneray, dans son ouvrage Voyage pittoresque et maritime 

sur les côtes de France :



"Département des Basses-Pyrénées.



Nous commencerons notre course par l'extrême frontière méridionale. Et après avoir visité les rives de la Bidassoa qui sépare la France de l'Espagne, remontant vers le nord, nous côtoierons le golfe de Gascogne, et nous visiterons toutes les limites maritimes du département des Basses-Pyrénées.



Tout ce qui frappe la vue du voyageur dans ce département est propice aux nobles inspirations, et charme également le peintre avide de sites pittoresques, le poète passionné pour les solitudes romantiques, et l'ami de la nature agreste et des plaisirs champêtres. Les monts qui le couronnent, et qui lui ont prêté leur nom, offrent une variété immense, et font naître des contrastes frappants : ici, des forêts de noirs sapins et de mélèzes pyramidaux s'élèvent en amphithéâtre du fond de la vallée féconde vers le sommet aride de quelques montagnes, où elles disparaissent, cachées par l'atmosphère humide de la région des nuages ; là, de vastes bruyères, des landes stériles, à peine interrompues par quelque végétation éphémère, plongent l'âme en de tristes méditations, que dissipera bientôt l'aspect de riches coteaux, parés des pampres verts, et des vignes pourprées qui nous donnent le vin généreux du Midi : ici, des fleuves majestueux roulent lentement leurs eaux transparentes ; là, des torrents rapides entraînent, avec leurs ondes, les sables qui bordent leurs rives. La température de ce pays bizarre participe de la diversité de son aspect : telle vallée, toujours soumise à l'influence d'une douce chaleur, est dominée par un pic élancé, que le soleil n'a jamais pu dérober à la rigueur des frimats.



Comme tous les naturels des pays montagneux, les Basques sont doués d'un esprit vif et d'un coeur chaud, qui les portent aux passions violentes et généreuses, en les éloignant des choses viles et basses. l'hospitalité est en honneur parmi eux ; l'originalité de leur esprit, la vivacité de leur imagination sont connues, et leur agilité passée en proverbe. Leur langage semble avoir peu varié depuis les temps les plus reculés, et n'a rien de commun avec les langues vivantes. Les souvenirs de ce riant pays ne sont pas sans gloire : il a acquis quelque célébrité par l'esprit d'indépendance de ses habitans, et leur résistance obstinée aux conquérans goths et maures. Strabon et Pline nous avaient déjà appris que, dans les temps antiques, les Vascons ou Vascéens avaient refusé de plier leurs fronts devant les maîtres de la terre ; et César aussi, dans ses Commentaires, parle avec éloge des Cantabres naturels de ces cantons. Le sol qu'habitent leurs descendans doit à leur vie laborieuse et à leur activité une partie de sa fécondité ; souvent, du sein d'une terre infertile et sablonneuse, leurs mais ont fait sortir d'abondantes moissons ; mais souvent aussi la nature seconde leurs travaux, et la fertilité des rives de l'Adour et de la Bidassoa a été plus d'une fois célébrée par les poètes, ainsi que la félicité de leurs pasteurs ; la Nive, la Buse, la Nivelle, le Guison et le Vert, sans avoir des noms aussi poétiques et aussi connus, n'offrent pas moins de charmes à ceux qui parcourent leurs bords : c'est la patrie des bergers des romans.



Mais notre ouvrage est spécialement consacré à donner une juste idée de nos côtes maritimes, et peut-être nous sommes-nous déjà trop étendu sur la description d'un pays que nous ne devons pas visiter en entier. Laissons de côté ce qu'il pourrait encore nous fournir d'intéressant : ses montagnes dont le flanc recèle l'argent, le blanc albâtre et le cobalt couleur d'azur, ses villes, les principales de la Navarre et du Béarn ; jetons en passant un coup d'oeil sur Pau, berceau du bon Henri, sur Bayonne, fortifiée par Vauban, mais avant de décrire cette dernière ville, sur laquelle nous devons nous étendre, arrivons devant Andaye, premier port maritime de la côte occidentale des Pyrénées, et premier village de la Biscaye française, que nous avons choisi pour notre point de départ et notre premier tableau.



Vue d'Andaye.


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VUE D'ANDAYE
PAR LOUIS GARNERAY 1823




Des hauteurs qui dominent Andaye, nous découvrons Fontarabie, sur l'autre rive de la Bidassoa qui sépare ces deux bourgades, limites des deux Etats ; leur position respective les livre l'une et l'autre à l'invasion : aussi ont-elles été souvent, tant dans les derniers siècles que dans le nôtre, le théâtre de la guerre. Le bourg d'Andaye, souvent dévasté, est aujourd'hui presque désert, et Fontarabie, privée de ses fortifications, est devenue une ville de peu d'importance.



D'intrépides marins sortis d'Andaye osèrent les premiers attaquer la baleine, à l'aide du harpon, et découvrirent, en la poursuivant, le banc de Terre-Neuve, fameux par la pêche de la morue ; au reste ce n'est pas la seule preuve que nous ayons de la bravoure hasardeuse des marins basques, peut-être Christophe Colomb leur a-t-il dû la découverte du Nouveau-Monde. Andaye était autrefois riche et commerçante ; elle fabriquait la liqueur qui porte son nom, et dont la consommation était considérable, surtout dans nos colonies ; le commerce des piastres augmentait encore sa richesse, mais le dernier incendie lui a fait perdre tous ces avantages, et elle n'offre plus aujourd'hui qu'un amas de décombres et de ruines.



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PUBLICITE  VERITABLE LIQUEUR DE HENDAYE
PAYS BASQUE D'ANTAN


Au-delà du fleuve s'offrent à nos yeux les riants coteaux de l'Espagne ; vers la droite, au milieu de la Bidassoa, et presque à son embouchure, on découvre l'île des Faisans, qui porte le nom d'île de la Conférence depuis l'entrevue des plénipotentiaires français et espagnols chargés de négocier la paix entre les deux puissances, par l'alliance de leurs princes. C'est par ce traité que le territoire d'Urgel, qui, depuis peu a obtenu une certaine célébrité, a été cédé à l'Espagne. C'est encore dans cette île, que longtemps avant, furent échangés les enfants de François 1er, donnés en otage pour la délivrance de leur père.



Au delà de l'île de la Conférence, le fleuve se perd dans la pleine mer, qui borde l'horizon, et disparaît dans un vague lointain.



Saint-Jean-de-Luz.


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PORT DE SAINT-JEAN-DE-LUZ
PAR LOUIS GARNERAY 1823



En quittant Andaye, que nous venons de décrire, et l'extrême frontière méridionale pour rentrer en France et remonter vers le nord, nous arrivons à Saint-Jean-de-Luz, dont le port, situé au fond d'une vaste baie, fait le sujet de notre second tableau.



Avant de nous arrêter devant ce port et de le faire connaître à nos lecteurs, esquissons en peu de mots ce que nous avons observé de plus remarquable dans les usages des habitants de Saint-Jean-de-Luz, qui sont généralement attachés à ces usages par un sentiment de respect presque religieux, comme tous les peuples qui conservent encore leurs anciennes coutumes, quoique la plupart de ces coutumes ne soient point exemptes de ridicule. Les Basques, remarquables par leur activité, sont portés, par cette activité même, à une passion excessive pour la chasse et pour le jeu de paume, qui les entraînent dans de très longues réunions, auxquelles les hommes assistent seuls. Leurs femmes se trouvent ainsi délaissées et solitaires, quoique leurs vertus domestiques, leur modestie et leur douceur semblent mériter un meilleur sort. L'extrême délicatesse de ces Basquèses les rend très susceptibles sur les rapports de convenances ; aussi se renferment-elles communément plusieurs années dans l'austérité du veuvage, et s'enveloppent-elles, cinq ans entiers, des crêpes du deuil, lorsque la mort frappe leurs époux, que d'ailleurs l'usage leur prescrit d'accompagner jusqu'à leur dernière demeure.



Leur costume est modeste ; elles ignorent le luxe de nos pays, nos cadeaux pour les baptêmes, nos corbeilles de mariage, et les autres coutumes nées de ce luxe que la corruption enfante. Dans toutes les saisons, elles sortent de leurs humbles retraites, vêtues de noires mantilles, dont le capuchon rabattu couvre leur tête, et les soustrait aux regards indiscrets des jeunes gens. C'est ainsi qu'au jour du repos elles vont offrir leurs hommages au Seigneur, agenouillées sur les froides dalles qui couvrent les tombeaux de leur famille, que l'usage ne permet point encore de placer au milieu des champs, tandis que leurs époux, séparés d'elles, assistent au divin sacrifice dans les galeries de bois qui environnent l'église, non que la jalousie sépare les deux sexes ; il n'est point d'exemples, au contraire, de séparation conjugale dans ce beau pays ; mais par un motif de pudeur et de modestie qu'on ne saurait trop louer dans ces femmes, et peut-être aussi dans les époux, par une indifférence que ne méritent pas leurs aimables compagnes. Mais cette indifférence ne s'étend pas au moins à toutes leurs affections ; car la piété filiale et l'amour des pères pour leurs enfants sont portés au plus haut point parmi eux, et forment un des traits distinctifs de leurs caractères."



A suivre...



Merci ami(e) lecteur (lectrice) de m'avoir suivi dans cet article.

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