LA PÊCHE DANS LE GOLFE DE GASCOGNE EN 1923.
En 1922, est introduit à Saint-Jean-de-Luz le filet tournant ou bolinche.
PORT ST JEAN DE LUZ - DONIBANE LOHIZUNE PAYS BASQUE D'ANTAN |
Voici ce que rapporta Le Figaro, dans son édition du 10 juin 1923, sous la plume de Joseph
Lacoste :
"La pêche a toujours été pratiquée par les habitants du littoral du golfe de Gascogne. Ils y ont tout d'abord cherché leur alimentation et y ont trouvé par la suite une source de bénéfices. Le commerce du poisson s'est étendu de la plage au bourg, du bourg à la ville voisine et son aire de rayonnement se prolongeant constamment, les procédés de pêche ont dû, peu à peu se modifier.
Longtemps, ce fut au long des côtes que les pêcheurs capturèrent le poisson. Encore aujourd'hui, pendant la belle saison, à Hendaye, Saint-Jean-de-Luz, Guéthary, Biarritz, Capbreton, Mimizan, Biscarosse, Arcachon, des marins propriétaires d'embarcation pêchent au palet, à la senne, à la fouenne et vendent leurs prises aux habitants indigènes et aux citadins venus en villégiature estivale. Mais suivant la saison et selon les passages ou les migrations du poisson, ils apportent, des quantités parfois importantes de sardines aux usines de conserves établies dans les localités du bassin d'Arcachon, ainsi qu'à Capbreton et à Saint-Jean-de-Luz. La pêche à la sardine donne des résultats très différents suivant que l'on rencontre des "bancs" plus ou moins abondants. Dans un même port, les mêmes pécheurs qui auront pris tel jour 100 000 poissons n'en auront le lendemain que 25 000, ou peut-être beaucoup moins. Remarquons ce signe caractéristique de la modernisation de la pêche : de nombreuses équipes "vont à la sardine" avec des pinasses à moteur. On nomme pinasse une embarcation effilée et relevée aux extrémités, qui semble avoir des liens de parenté avec le "prao" malais.
PINASSE ARCACHON |
La sardine, jadis cantonnée sur la côte de Bretagne, est peu à peu descendue dans le golfe de Gascogne; c'est la raison pour laquelle on trouve aujourd'hui des organisations modèles de pêche et de fabrication de conserves à Gujan Mestras (Arcachon) et Saint-Jean-de-Luz. Dans les usines, de nombreuses Bretonnes travaillent à la préparation du poisson. Il est curieux de voir dans la jolie ville de Saint-Jean-de-Luz les coiffes des Armoricaines se mêler aux "foulards" des Basquaises et d'entendre parler en même temps ces deux langues, qui se sont maintenues intactes à côté du français, le basque et le celtique.
CONSERVERIE GUJAN MESTRAS |
Des embarcations à vapeur de petit tonnage se livrent également à la pêche de la sardine, qui se double à certains moments de celle de l'anchois. Les pêcheurs ont cependant d'autres objectifs que la fourniture aux usines de conserves. En été, ils retirent des bénéfices intéressants de la capture du thon, de la langouste, du homard, de l'araignée de mer. C'est principalement dans le sud du golfe que se pratiquent ces pêches. Le thon y est à certains moments fort abondant; l'on en prend parfois qui atteignent le poids de quarante à cinquante kilos. En dehors de sa valeur commerciale, la capture de la langouste est une des attractions qu'offrent à leur clientèle de touristes les stations balnéaires comprises entre Capbreton et la Bidassoa.
PÊCHEUR DE LANGOUSTES PAYS BASQUE D'ANTAN |
Avec le développement du commerce du poisson, vint l'amélioration des procédés de capture. En 1866, M. H. S. Jonhston fonda la première pêcherie industrielle opérant à l'aide de chalutiers. Cet établissement, véritable précurseur, situé à Arcachon, existe encore, quoique ayant subi des transformations. C'est aujourd'hui la Société anonyme des Pêcheries de l'Océan, dirigée par M. Ch. Olivari, que le Figaro est heureux de remercier ici de l'accueil aimable, qu'il a bien voulu réserver à son rédacteur.
On désigne sous le nom de chalutiers des vapeurs de 20 à 100 tonneaux et plus pêchant au "chalut", filet à gueule triangulaire maintenu ouvert par des panneaux, et raclant le fond de la mer.
CHALUTIER PAYS BASQUE D'ANTAN |
Il faut bien reconnaître que ce mode de pêche a le grave inconvénient d'écarter le poisson des lieux sur lesquels il est pratiqué. En effet, bouleversant les fonds, broyant les algues qui constituent parfois de véritables forêts sous-marines, il fait disparaître les abris naturels où se trouvent le frai et les alevins. Les poissons ne retrouvant plus leurs habitats s'en vont plus loin chercher la tranquillité et le repos. C'est ce qui explique que les chalutiers, qui primitivement demeuraient à proximité des côtes, ont dû peu à peu étendre leur champ d'action. Mais le voyage jusqu'aux lieux de pêche plus éloignés, le retour fréquent entraînaient des frais de charbon et de salaires qui devenaient très onéreux, par suite du temps perdu en allées et venues improductives. Pour les éviter, on a augmenté le tonnage des chalutiers pêcheurs, ce qui, tout en leur permettant de s'éloigner davantage des côtes et d'aller soit au Maroc, soit très au large dans l'Atlantique, soit dans la mer du Nord, leur a donné également, la possibilité de prolonger leur absence. D'autre part, ou a armé des bateaux de moindre importance, qui vont à tour de rôle et à intervalles réguliers chercher le poisson déjà pris, le rapportent aux pêcheries, lesquelles peuvent ainsi faire des expéditions quotidiennes, pendant que les chalutiers continuent leur travail. Certaines entreprises ont toutefois conservé les errements d'antan et pêchent près des côtes. Leurs bateaux demeurent seulement trois ou quatre jours dehors, alors que les grands chalutiers ne rentrent qu'une fois par mois environ. Des aménagements frigorifiques, ou l'embarquement de grandes quantités de glace assurent à bord la conservation absolue du poisson.
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