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mercredi 16 mai 2018

LE SPORT NATIONAL AU PAYS BASQUE EN DÉCEMBRE 1903


LE SPORT NATIONAL AU PAYS BASQUE EN 1903.


La pelote Basque est le sport national du Pays Basque, depuis de très nombreuses années.



pays basque 1900
LA PELOTE BASQUE A NEUILLY


En effet, ce sport existe depuis des centaines d'années.



Voici ce que rapporta La Petite Gironde, dans son édition du 28 décembre 1903, sous la plume 

de C. Béguin :

"La paume basque n'a pas eu comme la paume française des Garsault et des Barcellon pour retracer son histoire. Ce que nous savons du jeu et des joueurs d’autrefois — je parle ici de la période antérieure au dix-neuvième siècle — nous a été transmis en grande partie par la tradition orale et se réduit à fort peu de chose. Peut-être, cependant, les archives locales contiennent-elles à cet égard des renseignements intéressants. La question mériterait la peine d’être élucidée, et je me permets d’indiquer ce sujet d’étude aux chercheurs qui se sont attachés à faire revivre sous nos yeux l’ancien pays basque. Ceci dit, je reprends mon récit où je l’avais laissé. 




pays basque avant
LE JEU DE LONGUE PAUME
PAYS BASQUE D'ANTAN


Vers la même époque à peu près où se distinguaient chez nous Perkain et Azantza, brillait parmi les Basques d’Espagne le joueur Baptiste, appelé aussi le fils de Simon, du village de Arroyoz, dans la vallée de Baztan. Sa réputation d'habileté était si fameuse que Ferdinand VII, en 1821, le manda à Madrid avec quelques-uns des meilleurs joueurs du Guipuzcoa pour donner à la cour le spectacle d’une partie de rebot. On cite de lui un trait d’adresse peu ordinaire exécuté au cours de cette partie. "La première balle que je lancerai, avait-il dit à un de ses compagnons avant de commencer, passera à la droite du roi ; la seconde, à la gauche de la reine, et la troisième, entre les deux." Et il fit, paraît-il, ainsi qu’il avait dit. Mais si l’habileté du fils de Simon était hors de pair, son manque de scrupules et de sens moral ne l’était pas moins. Il lui arrivait parfois de jouer à dessein d’une façon déplorable ; à chaque passo, il s’approchait alors de son père et lui disait à voix basse : "Donnez-moi deux onces, ou je perds la partie." Tout d’abord, celui-ci refusait, et Baptiste perdait point sur point ; puis, lorsque le père avait cédé, le joueur entrait subitement en action et triomphait de ses adversaires avec une facilité stupéfiante. 



L’épisode suivant, qui mit un terme à la carrière de Baptiste, et où il dut au hasard seul d’avoir la vie sauve, mérite d’être rapporté. Pendant l’été de 1823, à l’occasion de la fête patronale, une grande partie de rebot fut organisée à Saint-Sébastien. Une foule énorme se pressait autour de la vaste place, et de grosses sommes avaient été pariées en faveur de Baptiste, dont la victoire, paraissait assurée. La partie commença, et celui-ci accumula les maladresses avec une préméditation si évidente, que de véhémentes protestations ne tardèrent pas à se faire entendre dans le public, sans que le joueur, du reste, y prêtât la moindre attention. Le succès de son camp semblait irrémédiablement compromis. A ce moment, un spectateur quitta sa place, s'avança vers Baptiste, et, sortant un pistolet de sa poche, il lui dit ces simples mots : "Si tu perds encore un quinze (un point), tu mourras ici même." Ce discours produisit sur Baptiste un effet immédiat. Il se mit aussitôt à jouer comme lui seul savait le faire, et, par une série de coups foudroyants, il regagna l’avance prise par ses adversaires. En présence du scandale causé par ce revirement subit, les autorités ordonnèrent la suspension de la partie, et le public se dispersa, non sans avoir manifesté son mécontentement. Cette interruption ne faisait pas l’affaire de l’homme au pistolet, qui, sans doute, avait escompté de gros profits. Le soir même, il se rendit à l'auberge où logeait Baptiste et, s’étant fait désigner la chambre qu’il occupait, il y pénétra. Celui-ci dormait profondément ; mais le malheur voulut qu’un camarade nommé également Baptiste reposât à ses côtés. Au milieu de l'obscurité, l’inconnu s’approcha du lit à tâtons, toucha le premier corps à sa portée et demanda : "Est-ce toi, Baptiste ?" Sur une réponse affirmative, il déchargea son pistolet et prit la fuite, sans s’être aperçu que sa vengeance s’était trompée d’adresse. Quant au vrai Baptiste, il jugea prudent de disparaître et se réfugia, dit-on, à Cuba. 



pays basque autrefois
PARTIE DE REBOT
PAYS BASQUE D'ANTAN


L’âge d'or de l’antique jeu de rebot, ce fut la période qui s’étend entre 1840 et 1860 ou 1865. Alors apparut sur les places de paume une pléiade de joueurs incomparables, dont les exploits, au dire des contemporains, n’ont pas été renouvelés, et au premier rang desquels brillait le fameux Gaskoïna, le roi des joueurs du temps. Cette époque fut celle des grands tournois de Navarrais contre Guipuzcoans, de Labourdins contre joueurs de la Soule et de Français contre Espagnols, où on se rendait de toute la région environnante, et qui excitaient l’intérêt à plusieurs lieues à la ronde. Saint-Jean-de-Luz, Hasparren, Urrugne, Saint-Etienne-de-Baïgorry, Saint-Sébastien, Pampelune, Tolosa, Irun furent le théâtre de ces luttes qui demeureront à jamais célèbres dans les annales du peuple basque. Parmi les joueurs français d'alors, on cite, après Gaskoïna, Etchepare, Arriaga, les trois frères Borotra, dont le plus connu, Mathieu ; Mercapide, surnommé le Meunier de Mauléon, qui n'avait pas son égal comme refileur, et auquel est attribué l’allongement du gant de cuir qui permit de lancer la balle avec plus de force. Du côté des Espagnols, Urchalle, Melchor, el Zurdo (le gaucher), d’Hernani, doué d'une force de bras incroyable ; Arroshko, Manuel Antza, Iribarren, curé de Lesaca, en Navarre, etc... 




guethary autrefois
PARTIE DE REBOT
PAYS BASQUE D'ANTAN


Dans l’existence des Basques de cette époque, une partie de pelote au rebot constituait un événement considérable. Il s’agissait, en effet, de véritables défis appuyés d’enjeux élevés, où les joueurs étaient stimulés non seulement par l’intérêt pécuniaire, mais aussi et surtout par le patriotisme local, facteur qui donnait à ces luttes un caractère de véritable grandeur. Au jour fixé, de longues théories de paysans, les uns à cheval, le plus grand nombre à pied, en manches de chemise, la veste ou la blouse jetée sur l’épaule, la courte pipe à la bouche, s’acheminaient par les sentiers tracés dans la montagne vers le lieu de la rencontre. Les prêtres étaient mêlés à leurs ouailles. Puis, après la célébration de la messe, la foule se dirigeait, vers la place de pelote et prenait d’assaut les gradins de pierre qui s’étendaient à droite et à gauche du grand mur. Les gens du même village ou de la même région se groupaient ensemble. Des paris importants avaient déjà été conclus ; on voyait sortir des ceintures les onces d'or et les napoléons que recueillaient des amis obligeants ou même de simples inconnus chargés de veiller sur le gage jusqu'au résultat final. Il n’était pas rare que des paysans sans engageassent sur l'adresse et la vigueur du champion favori leurs moissons, leurs champs, leurs bestiaux et, parfois, leurs maisons et leurs meubles. Avant la lutte, chaque joueur jurait solennellement sur un crucifix de remplir son devoir jusqu'au bout et d'aller jusqu'à l'extrême limite de l'effort pour remporter la victoire. De leur côté, les juges de la partie prêtaient le serment de ne pas trahir leur conscience et de juger les coups d’une façon noble, loyale et conforme aux usages.




saint palais autrefois
PARTIE DE REBOT
PAYS BASQUE D'ANTAN


Ces formalités terminées, les joueurs gagnaient leurs postes, et la partie commençait, déroulant ses péripéties dans une atmosphère toute saturée d’excitation. Aux applaudissements frénétiques et aux cris de colère succédaient de longs silences interrompus seulement de temps à autre par une voix sonore offrant un pari et par la mélopée du marqueur : quintzé trenta errestua ; hau da arraya yaunac ! (quinze à trente pour le refil ; c’est ici que se trouve la voie, Messieurs). Le dernier point joué, les compatriotes du camp victorieux se livraient à des manifestations délirantes d’enthousiasme, et, de nouveau, on assistait à l’échange des onces d’or, des billets de banque et des napoléons. Mais malheur au joueur sur lequel eût pesé un soupçon de déloyauté. Mathieu Borotra, dit-on, fit parfois l’expérience de ce qu’il en coûtait. On raconte notamment qu’à l’issue de certaine partie de rebot jouée à Saint-Jean-Pied-de-Port ou à Saint-Etienne-de-Baïgorry, — je ne saurais préciser, — et qu’il perdit, ses partisans, qui avaient parié sur lui plusieurs centaines de moutons, le déshabillèrent en pleine place publique et l’obligèrent à fuir dans cette tenue sommaire. Une aventure semblable lui arriva, paraît-il, à Tolosa. Il est juste d’ajouter que les cas de ce genre étaient extrêmement rares.



pelote basque autrefois
PARTIE DE REBOT
PAYS BASQUE D'ANTAN


Dans les dernières années de l’Empire, commença la décadence du rebot, détrôné peu à peu par le jeu de blaid, aujourd’hui en honneur. Cependant, avant de disparaître, il brilla d’un dernier éclat avec Gregorio, l’organiste d’Espelette ; Yats, Chillar, Larrondo et, à une époque plus rapprochée de nous, avec Irun, Beloqui, le Manchot de Villabona, Larralde, Beheran et Otharré. Mais ces derniers étaient déjà des adeptes du blaid. Depuis une quinzaine d’années, les parties de rebot sont devenues très rares. Le rebot a subi le sort de bien des institutions traditionnelles du pays basque; comme elles, il a été emporté, et seule aujourd’hui la dalle de pierre qui, sur les places, désigne l’endroit où se dressait le butoir rappelle aux générations actuelles les gloires passées du vieux jeu national." 






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