LES ENTREPRISES MARITIMES BASQUES DE SOCOA.
C'est en 1918 qu'est créé à Socoa un chantier de construction navale, les Entreprises Maritimes Basques.
E.M.B. SOCOA PAYS BASQUE D'ANTAN |
Ce chantier, appartenant à M. Ernest Plisson, s'installe dans les anciens hangars d'hydravions
utilisés pendant la première Guerre Mondiale.
Ces Entreprises Maritimes Basques regroupent, outre le chantier, un armement de pêche au
chalut, une activité de mareyage et une conserverie.
M. Plisson fait faillite, semble-t-il, assez rapidement et le chantier est ensuite repris par une
Société Anonyme dont le Directeur Général est M. Pommereau.
Les Entreprises Maritimes Basques (E.M.B.) sont au départ une Société Anonyme de
Constructions Navales et de Pêcheries à Participation Ouvrière, au Capital de 1 million de
francs, avec un siège à Socoa, commune de Ciboure (Basses-Pyrénées).
Aux termes d’un acte sous signature privée fait double à Saint-Jean-de-Luz le 16 mars 1918, dont l’un des originaux a été déposé au rang des minutes de Me Moyne, notaire à Paris, suivant acte reçu par lui le 20 avril 1918 et l’autre est demeuré annexé à la minute d’un acte de déclaration de souscription et de versement reçu par M. Petit, notaire à Saint-Jean-de-Luz, le 25 avril 1918, et ci-après énoncé, il a été établi les statuts d’une société anonyme dont extrait littéral suit :
- Article 1er : Il est formé par les présentes, entre les souscripteurs ou les propriétaires des
actions ci-après créées et de celles qui pourront l’être ultérieurement, une société anonyme française, à participation ouvrière qui sera régie par les lois françaises en vigueur sur les sociétés anonymes à participation ouvrière, ainsi que par les présents statuts.
- Article 2 : La Société a pour objet :
De faire en tous pays toutes opérations et toutes entreprises généralement quelconques pouvant concerner directement ou indirectement :
La construction, l’achat, la vente, la revente, la location, la gérance, l’échange, l’armement, l'affrètement et l’exploitation directe ou indirecte de tous navires, bateaux, pontons, chalutiers, gabares et chalands.
L’établissement et l’exploitation de pêcheries maritimes.
L’industrie et le commerce de tous produits à provenir de l'exploitation de pêcheries, ainsi que de tous sous-produits et dérivés tels notamment que le séchage, le traitement, l'achat, la vente, la revente des poissons, la fabrication du guano et tous autres sous-produits, leur achat, leur vente et leur revente.
L'établissement et l’exploitation d’usines de fabrication de conserves de toutes sortes (poissons, viandes, légumes, fruit, lait, etc., etc.) , l'établissement et l’exploitation de laiteries, beurreries, fromageries, fabriques de glace, etc., etc.
Et comme conséquence des stipulations ci-dessus, mais sans que l’énumération qui va suivre soit limitative :
L'édification de toutes usines, constructions, maisons d’habitation, etc.
La création, l’acquisition sous toutes formes, l’apport, l’échange, la vente, la revente, la location tant comme preneuse que comme bailleresse, à court ou à long terme et avec ou sans promesse de vente, la gérance, la transformation, l’aménagement, la mise en valeur et l’exploitation directe ou indirecte de tous immeubles bâtis ou non bâtis, concession de toute nature, chutes d’eau, barrages, sources, voies de communication et de tous moyens de transports, etc., ainsi que de tous établissements industriels et commerciaux.
L’exécution de tous travaux et installations publics ou particuliers.
L’étude, la recherche, la prise, l’acquisition sous toutes formes, l’apport, le dépôt, la cession et l’exploitation directe ou indirecte de tous brevets, marques et procédés, l’acquisition, la concession, l’apport et l’exploitation également directe ou indirecte de toutes licences de brevets;...
FORT DE SOCOA 1920 PAYS BASQUE D'ANTAN |
- Nommés premiers administrateurs de la Société dans les termes des statuts :
M. Borja de Mozota (Antoine), Ingénieur, demeurant à Paris, rue Copernic, n. 3.
M. Bertaux (Maurice-Jules), Général de Brigade (cadre de réserve), demeurant à Bergerac (Dordogne).
M Boyd (Henry) Ingénieur de Constructions Navales, demeurant 68-70 Fenchurch Street, Londres E. C. 3. ,
M Hiribarren (Marcel) Ingénieur, demeurant à Saint-Jean-de-Luz (Basses-Pyrénées).
M. Letamendia (Vincent), Constructeur de Navires, demeurant à Ciboure (Basses-Pyrénées). ,
M. Cardon (Louis-Jacques) Négociant, demeurant à Neuilly-sur-Seine, rue de Longchamp, n°. 94 bis.
Et M. Plisson (Ernest) Armateur, demeurant à Paris, rue de Mogador, n°. 27. 3...
Voici ce que rapporte le journal L'Homme Libre, le 8 juillet 1920, à propos de la mise à l'eau
de trois bateaux de pêche, construits par les E.M.B. :
"Contre la vie chère organisons la pêche.
Les côtes françaises peuvent fournir deux cent mille tonnes de poisson. Voilà un élément d'opposition à la vie chère qui a son poids, surtout à l'heure où le sous-secrétariat d'Etat de la marine marchande constate avec amertume la décroissance du cheptel et oriente son activité dans le sens du développement et du transport intensifié de la marée fraîche.
Il s'agit donc de pourvoir nos populations maritimes de tout l'outillage nécessaire. C'est le but que se sont assignées les Entreprises maritimes Basques qui, dimanche dernier, mettaient à flot trois nouveaux bateaux de pêche à moteur dans le port de Socoa, localité des Basses-Pyrénées.
A l'occasion de la fête qui fut donné à cet honneur, un banquet eut lieu, qu'honoraient de leur présence, les maires de Ciboure et de Capbreton et le général Berteaux. Ce dernier a porté un toast très applaudi, buvant au succès des trois navires lancés, auquel toast notre confrère et ami M. Eugène Lautier, maire de Benesse-Maremne, répondit dans les termes suivants :
"Je remercie les Entreprises maritimes Basques et tout spécialement mon ami Ernest Plisson d'avoir accepté de donner le nom de Gisses à ce joli bateau de fière allure, aux formes si élégantes, au maintien si hardi. Ce nom de Gisses est un peu, le mien. Il désignait une terre appartenant depuis des lustres et des lustres à ma famille. Quand je songe à mon enfance très lointaine je me vois protégé contre les chaleurs de l'été par l'ombre du frêne séculaire. Tout près, une source chantait donnant la réplique aux cigales, Elle arrosait les jardins d'alentour, car Gisses était comme une oasis parmi nos coteaux secs et nos garrigues balayées par le mistral. Même la source. formait une mare où s'abreuvaient les bêtes et que mon imagination avait élevée à la dignité d'un étang.
J'ai fait mes débuts d'armateur en y lançant des petits bateaux en papier que chavirerait la plus maigre de vos sardines. Mais il faut un commencement à tout, Ô Gisses, Gisses, quel chemin parcouru! Quelle audace est la nôtre! De la source bruissante jusqu'à la mer grondeuse, quel changement! Mais vous voici grandi, solide et fort. Des hommes habiles et savants vous ont donné l'impulsion. Vous palpitez d'impatience devant le vaste océan dont vous voulez labourer les profondeurs et affronter les caprices. Je n'ai point de craintes, mon cher Gisses, vous nous ferez honneur à tous.
Et d'abord vous êtes moderne. Qui serait, comme on dit, du dernier bateau si ce n'est point, vous? L'espèce à laquelle vous appartenez était rare il y a quelques années. Dans les comptes de la marine marchande, c'est en 1910 — il y a 10 ans à peine — qu'apparaissent les bateaux de pêche à propulsion mécanique. On les inscrivait dans le même total avec les bateaux à vapeur. On commence à les séparer dès 1911 à cause de leur nombre déjà intéressant. Ils sont en effet 358 contre 291 bateaux à vapeur. En 1913, à la veille de la guerre, ils sont 433.
Bien que l'éloquence des chiffres soit supérieure à tout, et particulièrement à ma faible parole, je n'ai pas l'intention de vous citer la statistique des années suivantes, 1914 et 1915. Années du début de la guerre où tout est en désarroi, où tout est bouleversé. La marine marchande subit le contre-coup des événements. Les zones de pêche sont atteintes même dans nos eaux territoriales et l'ennemi n'hésite pas à narguer les côtes de France. Le personnel des pêcheurs est singulièrement réduit, une grande partie est appelée à de grands devoirs et s'en acquitte de façon glorieuse. Les filets pendent au repos délaissés pour des engins moins pacifiques.
En 1916, il n'y a plus que 84 vapeurs et 260 bateaux à moteur. En 1917 le nombre des vapeurs est stationnaire (85) comme celui des voiliers; mais le nombre des bateaux à moteur a passé à 331, malgré que la guerre ne soit pas encore terminée. C'est qu'il faut vivre. C'est que l'on s'habitue à tout. Et puis disons aussi que les circonstances mettent en lumière déjà quelques-unes des qualités du bateau à moteur, qualités précieuses en temps de paix, et que la guerre souligne. Est-il besoin de les indiquer ? Elles sautent au yeux, selon l'expression populaire, et elles captivent la raison. Plus rapide que le voilier, le bateau à moteur a un rayon d'action beaucoup plus étendu. Il est plus docile et plus maniable. Enfin, il a sur le vapeur l'avantage qui résulte du remplacement d'un combustible encombrant et lourd, combustible que la guerre précisément a rendu coûteux et rare.
L'essor est donné! Par une rencontre singulière et singulièrement heureuse, alors que de nouveaux besoins se révèlent, on voit apparaître l'instrument qui pourra les satisfaire. Quels besoins? Hélas, le plus impérieux, le plus inéluctable, le besoin de vivre, le besoin de fournir à la machine humaine l'énergie nécessaire au labeur quotidien. C'était, pendant les hostilités le problème brutalement posé du ravitaillement; c'est toujours ce problème avec une complication : la vie chère. Nous avons dans le monde une telle réputation de gens voluptueux et soumis à tous les appétits; nous nous laissons peindre tous de si laides couleurs par les peuples hypocrites et jaloux, que nous passions pour les gens les mieux nourris et sans doute aussi les plus gourmands de l'univers. La vérité c'est que nous étions parmi les plus sobres. Si je prends par exemple la viande, je note qu'avant 1914 chaque Français ne consommait en moyenne que 35,5 kilos de viande par an. Les Allemands, ces bons Allemands qu'on disait affamés, manquant de tout et contraints de conquérir la belle France pour ne pas mourir de faim, ces Allemands qui vivaient de travail acharné et de sentimentalité pure mangeaient 46,5 kilos de viande par habitant et par an, à peu près un tiers de plus que des Français, ces jouisseurs, ces raffinés qui ne se refusaient rien et qui s'abandonnaient à la mollesse! Pour ce qui est de ta mollesse, on le leur a bien fait voir!
PORT ST JEAN DE LUZ - DONIBANE LOHIZUNE 1918 PAYS BASQUE D'ANTAN |
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