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jeudi 7 décembre 2017

UN CONCOURS DE BEAUTÉ BASQUE À SAINT-JEAN-DE-LUZ EN LABOURD AU PAYS BASQUE EN SEPTEMBRE 1928


UN CONCOURS DE BEAUTÉ À SAINT-JEAN-DE-LUZ EN 1928.


Le 29 octobre 2017, j'ai publié un premier article consacré à l'annonce de ce concours de beauté féminine en 1928.

pays basque 1928
CHEMINS DE FER DU MIDI
ST JEAN DE LUZ - DONIBANE LOHIZUNE
PAYS BASQUE D'ANTAN


Je vous ai informé que je vous publierai le compte-rendu de ce concours.

Le voici donc, extrait de La Gazette de Bayonne, de Biarritz et du Pays Basque, dans son 

édition du 24 septembre 1928, sous la plume de Louis Daney :

"La Plus Jolie Basquaise.

Mlle Marthe Larramendy de Saint-Jean-de-Luz a été élue hier.

On a vivement acclamé Mlle Solange Bonney qui fut classée deuxième par le jury.

Choisir! Avez-vous parfois réfléchi au rôle que joue ce simple verbe dans la vie des peuples et dans celle des hommes? 

Sans ce mot l’existence serait facile, bien des soucis nous seraient épargnés, bien des regrets, bien des efforts. L’histoire, sans lui, serait toute plate, aucun récit de guerre et de batailles ne l'animerait; elle réjouirait un pacifiste. Choisir! Si Paris avait connu la valeur des mots, s’il avait su tout ce qu'ils renferment de terrible parfois, croyez-vous qu'il n’aurait pas laissé la pomme sur son pommier? 



pays basque 1928
MALLET STEVENS ST JEAN DE LUZ - DONIBANE LOHIZUNE
PAYS BASQUE D'ANTAN


Choisir! Vous savez ce que c’est, mesdames qui passez votre temps dans les grands magasins. Vous n'ignorez pas les petits tracas que ce mot vous a causés. Encore ne s’agissait-il que de choisir des frivolités. Aucune de vous cependant n'a songé à plaindre les pauvres hommes chargés de choisir... une femme. Oh! pas pour eux. Cela eût été beaucoup plus facile. Lorsqu’on s’est trompé, ma foi, on peut divorcer. Une femme pour l’offrir à l’admiration des foules en leur disant : "Voilà la plus jolie femme du pays." C’est très grave. C’est très dangereux, pour la réputation des juges. Quelquefois pour la vaisselle. 


Dans un concours de beauté il y a un rôle peut-être plus difficile à tenir que celui de juge, c'est celui de candidate. Entrer d’une démarche aisée dans une salle, passer devant dix messieurs laids qui vous regardent avec l'air de regarder pour la première fois de leur vie passer un train - un train de plaisir, bien entendu — sourire, faire trois petits tours et s’en aller, cela nécessite un certain courage. Il faut être pour le moins mannequin professionnel pour le faire avec satisfaction. Mais lorsque l’on est venu vous chercher dans votre ferme, dans votre village paisible, dans votre atelier où il vous suffisait d'un ruisseau clair, d'un miroir de poche ou même d'un jeune danseur de fandango pour vous dire que vous êtes jolie, l’envie doit vous prendre, impérieuse, de vous enfuir. 


Les organisateurs du concours qui a eu lieu hier au casino de Saint-Jean-de-Luz avaient, il est vrai, pensé à cela. Ils avaient délégué auprès des concurrentes pour vaincre leur timidité, leur donner de l’assurance, les aider à se présenter, la plus délicatement attentionnée, la plus aimable et la plus gracieuse des conseillères, Mme de Waleffe. Mais ils avaient oublié de donner aux membres du jury quelque énergique mentor, délégué par le public, pour corriger leurs hésitations. Et ceux-là ont été beaucoup plus à plaindre. 


Ils furent pourtant de bons juges et des juges impartiaux. Comment ne l’auraient-ils pas été? Ils délibéraient à huis-clos. Rien ne pouvait les distraire de leur tâche, pas plus l’admirable spectacle de la baie de Saint-Jean-de-Luz, propre à hausser l'enthousiasme, que les jeux capricieux de la lumière sous la tente de la terrasse. Ils ne pouvaient se laisser influencer par aucune agitation, par aucun de ces courants de sympathie qui naissent autour des concurrentes lorsqu’elles ajoutent à leur grâce ce charme naturel, quotidien, donné par la confiance et l’amitié. Le bruit des jazz et la griserie des danses n’avait pu altérer leur sérénité. Puis ils avaient été choisis parmi des gens que leur métier a accoutumé à se familiariser avec la beauté. Il y avait parmi eux des peintres, de grands peintres, dont les yeux savent sous les apparences de la perfection, discerner l'imperceptible défaut qui échappe aux profanes, des artistes, des écrivains. Tous savaient que la perfection n'existant pas, il fallait rechercher l'ensemble des qualités dont la somme s’en rapprochait le plus.


Maurice de Waleffe qui participa avec dévouement et tact à l’organisation de ce concours, après avoir été organisateur ou juge de tant de grands concours internationaux, présidait le jury. Afin qu’ils puissent être maudits pendant vingt-quatre heures encore ou loués pour l’éternité, il convient de citer les noms de ses complices. (Je demande personnellement à n’être jamais poursuivi que pour des complicités de cette nature.) 


pays basque autrefois
MAURICE DE WALEFFE
PAYS BASQUE D'ANTAN

Je cite au hasard des places que nous occupions autour de la table dangereuse sous les pieds de laquelle quelque explosif aurait bien pu être dissimulé : Claude Farrère, le marquis d’Arcangues, Abel Gance, Ribera, le comte de Rivière, Jacques Thibaud, E. Clemansin du Maine, Mallet - Stevens, Koubitsky, Le Tanneur, Tillac, Abel Deval, Plumon, Pierre Haristoy, Fouchou, Chantecaille, Pédezert. 


pays basque 1928
CLAUDE FARRERE ST JEAN DE LUZ - DONIBANE LOHIZUNE
PAYS BASQUE D'ANTAN


PAYS BASQUE AUTREFOIS
ABEL GANCE
PAYS BASQUE D'ANTAN

Tous ces noms sont trop familiers au lecteur pour qu’il soit nécessaire de les faire suivre des titres et qualités de leurs possesseurs. M. d’Aubigny remplissait les fonctions de secrétaire général. 


Le jugement ne devant être proclamé qu’à dix heures du soir, pendant le dîner, le public calma son impatience de le connaître en défilant — c’était bien son tour — à l’heure du thé, devant les concurrentes. Chacun alors, on s’en doute, s’empressa de se faire une opinion. Il y eut des commentaires et de courtoises discussions. Si les organisateurs avaient eu la pensée de faire alors procéder à un vote, il y aurait sans doute eu quelques difficultés à dégager un verdict. La Gazette ne publierait certainement pas aujourd'hui le résultat. 


Il y avait foule à dix heures dans la salle du restaurant. 


Tous les dîneurs avaient hâte de savoir si le jury, pensant comme eux, avait quelque compétence. 


A l'heure dite, Maurice de Waleffe prit la parole. Il le fit avec élégance, ce qui est tout naturel de sa part. 


Il rendit tout d’abord hommage à la race basque et aux Basquaises en particulier qu’une fierté naturelle faisait hésiter à affronter les regards d’admirateurs trop nombreux. Il oublia de dire avec quelle charmante diplomatie Mme de Waleffe sut les décider. Puis, en racontant comment il avait été appelé à aller lui-même voir les concurrentes dans leur village, à leurs travaux, auprès de leur famille, il eut ce mot digne d’être retenu : "En cherchant des qualités physiques nous avons trouvé des qualités morales." 


Avant de proclamer les résultats, il tint à mettre le public au courant des délibérations du jury. 


Le plus grand nombre de voix fut obtenu par une charmante jeune fille, fort belle, inscrite sous le n. 19. Au fait, pourquoi ne pas la nommer, puis que cela constitue pour elle la seule récompense : Mlle Germaine Laborde. Quoique née de grands-parents et de père basques, mais hors de la région, elle ne remplissait pas exactement les conditions du règlement. Par un scrupule très légitime, la majorité basquaise du jury demanda qu'elle fût placée hors concours. Cette consécration permettra à Mlle Laborde de triompher dans une nouvelle sélection interrégionale. 


Le premier prix revint à Mlle Marthe Larramendy, née à Saint-Jean-de-Luz, Basquaise pur sang, qui méritait par l’ensemble de ses qualités physiques l’excellent verdict du jury. 


Comme pour prouver que le choix était bien difficile et afin que sans doute, par un de ces sentiments spontanés de justice dont est coutumière la foule, les plus jolies candidates fussent toutes d’une façon ou d’une autre, récompensées, une magnifique ovation accueillit à l’appel de son nom la délicieuse Mlle Solange Bonney. Des fleurs lui furent jetées, et tous ses nombreux admirateurs qui en voyant, dans la journée, le pur ovale de son visage et ses yeux splendides avaient fait d’elle l’élue de leur choix, demandèrent avec chaleur qu’elle fût la première. Le jury, avec raison, ne revient pas sur sa décision. La Gazette, aux bureaux de laquelle appartient Mlle Solange Bonney et qui de ce fait eût éprouvé quelques compréhensibles scrupules à ce que cette jeune fille fût l’élue de ce concours, se réjouit de ce nouveau verdict dont elle est heureuse de féliciter sa jolie collaboratrice. Il m’est agréable d’être, par un opportun concours de circonstances, l’interprète des sentiments de la Gazette


De nouveaux bravos saluèrent Mlle Marie-Jeanne Inda, de Ciboure, proclamée ensuite. Cette jeune fille, belle fleur des champs, qui représente bien le type robuste et sain de la noble race paysanne de ce pays, eût été digne, comme ses camarades, d'en être la déléguée lors des prochaines sélections. La charmante basquaise, modeste et fine, qui portait le n. 2, choisie ensuite par le jury, a droit aussi aux hommages flatteurs qui lui furent décernés. 


Chacune ayant eu sa récompense, l’élégant public qui garnissait la salle fut satisfait. Il le manifesta... en dansant. La danse n’est-elle pas faite pour exprimer tous les sentiments? Quand la soirée s'acheva, fort tard, elle ressemblait à un rite de quelque culte oublié. Celui de la beauté que l’on pratique de nouveau sur les plages, au tam-tam des jazz, par le sacrifice des cocktails et des bouteilles de dry. Hier soir il eût fallu des "chioulettas" et des "arreïtas" en place des saxos et des trombonnes. 


Claude Farrère eût joué le rôle du Grand Prêtre. Jacques Thibaud aurait accompagné les chants de Koubitzkv. Et nous, nous aurions prié... qu’on nous pardonnât."








Merci ami(e) lecteur (lectrice) de m'avoir suivi dans cet article.

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