L'USINE DE LICQ-ATHÉREY EN 1930.
Le Pays Basque Nord n'est pas réputé aujourd'hui pour son tissu industriel. Pourtant, de nombreuses industries existaient dans le Pays Basque d'Antan.
USINE ELECTRIQUE LICQ ATHEREY - LIGI ATEREI PAYS BASQUE D'ANTAN |
Et, en Soule, à Licq Atherey, il a existé une usine électrique qui alimentait en énergie une
grande partie du Pays Basque.
Voici ce qu'en rapporte La Gazette de Bayonne, de Biarritz et du Pays Basque, dans son
édition du 11 septembre 1930, sous la plume de Fernand Lot :
"Visite à l'usine de Licq.
Passé Mauléon, au bord du gave chantant rêvent les toits pointus de Tardets, Tardets nommée par Francis Jammes "miroir du Pays Basque". Les montagnes, désormais ont vraiment un "air montagne". La vallée tourne. La route se coule, imite tous les détours de l’eau, et si bien qu’elle ne la quitte pas un instant. Quelque part, dans la verdure, un clocher à trois pointes apparaît et disparaît, — le temps de rappeler que l’on est au cœur du pays souletin.
EGLISE TARDETS - ATHARRATZE PAYS BASQUE D'ANTAN |
On traverse Laguinge. Montées, descentes. Comment peut-on, tout là-haut, sur la tempe abrupte des rochers, entretenir ces carrés verts ?
Licq. C’est ici que l’on délivre les cartes en échange de quoi vous est remise, au seuil des gorges de Cacouetta, la clé magique qui en permet l’accès. (Car, si extraordinaire que cela paraisse, les sauvages cavernes de Cacouetta sont fermées a clé !...).
GORGES DE KAKOUETTA SOULE PAYS BASQUE D'ANTAN |
Encore trois kilomètres. Sur une pente, deux rails brillants s’imposent, surmontés, au sommet, de deux montants silhouettant une guillotine. Un funiculaire? Non pas. A mesure qu’on avance, les choses se précisent. Les rails de mercure deviennent deux tubes géants. Les inquiétants montants se transforment en une couple rassurante de cheminées oisives. Et au bas, au confluent du Larrau et de l’Uhaïtxa, carrefour de fraîcheur, un grand chalet de style néo-basque, le chapeau sur l’oreille, pose sa blancheur placide. Mais ce chalet n'est, lui aussi, qu’une apparence. S’il est voué à la solitude, il ne connait, par contre, jour et nuit, ni le silence ni le repos. Les énormes pythons gorgés d’eau vive y plongent puissamment et s’y nouent. Un bourdonnement continu en sort par toutes les portes. Et déjà le sol trépide... Sous cette figure d’habitation de plaisance, une usine travaille infatigablement.
USINE ELECTRIQUE LICQ ATHEREY - LIGI ATEREI PAYS BASQUE D'ANTAN |
M. Pellerin, son chef, a bien voulu m'en faire les honneurs. Il m’a d’abord conduit auprès des canalisations où la chute d’eau de 143 mètres exerce une pression de 14 kilogrammes par centimètre carré. Un jour, accidentellement, une ouverture grosse d’un doigt, s’étant produite, on s’amusa à tenter de traverser à coups de sabre, l’invincible jet d’eau : en vain, car la force de projection était telle que chaque fois la lame ricochait, impuissante à pénétrer le liquide fusant. Après avoir appris que les cheminées sont des soupapes de sûreté fonctionnant en cas d’excès de pression, j’ai pénétré dans la salle des machines au monotone grondement. Mon savant guide me donne ces chiffres impressionnants et sourit gentiment de mes surprises.
L’eau capturée se précipite dans une turbine pareille à une monstrueuse ammonite noire. Elle l’anime de 750 tours par minute. Auprès, la dynamo solidaire participe à ce frénétique mouvement, qu’elle absorbe, transforme. Sœur jumelle du moulin à eau, avec une régularité pareille, elle moud son électricité... 5 000 volts à ses bornes !
JONCTION DES GAVES LICQ ATHEREY - LIGI ATEREI PAYS BASQUE D'ANTAN |
M. Pellerin m’entraîne de salle en salle. C’est propre, net, — terrible comme une clinique. A chaque pas, danger de mort. Et danger absolument invisible. Voici, enfermés dans leur cage comme des cabines l’ascenseur, les transformateurs énigmatiques qui accomplissent leur formidable besogne dans le silence et l’immobilité. Chacune recèle un noyau magnétique de 14 tonnes ; en chacun dort un bain de 4 000 litres d'huile... Voici, également isolés de grillages, alternateurs, disjoncteurs. Je lève les yeux. Au plafond brillent d’étranges porcelaines, courent d’innombrables fils, s’enroulent des solénoïdes. Nous passons devant le "tableau". Des manettes, des volants, toute une exposition de cadrans aux aiguilles frémissantes. Un gardien veille là, debout, les yeux fixés sur un voltmètre, la main sur un volant, pareil à un pilote à la barre de son navire. L’aiguille danse autour du chiffre 5 000, qu’elle ne doit pas quitter. L’homme a mission de l'y maintenir. Un coup de klaxon. Une auto au premier étage ? Non, le téléphone, simplement. Avec le bruit des moteurs, une sonnerie ordinaire grelotterait en vain. Je reste seul un instant, fort rêveur en présence de certain mince jet d’eau, soigneusement encagé, auquel il ne faudrait pas "toucher" : 45 000 volts y passent ! Et me fascine le parafoudre, — un petit cylindre de fonte qui ne fait d’embarras que lorsque l’orage fait des siennes. Il reçoit l’éclair dans un fantastique feu de Bengale vert et l’on s’aperçoit alors que cet objet de rien du tout ne manque pas de personnalité...
USINE ELECTRIQUE MINOTERIE GOUT PAYS BASQUE D'ANTAN |
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