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mercredi 27 décembre 2017

LE CIDRE DE NORMANDIE FUT-IL INVENTÉ PAR LES BASQUES ?


LE CIDRE NORMAND A-T-IL ÉTÉ INVENTÉ PAR LES BASQUES ?


En 1942, un article de la Gazette de Bayonne, de Biarritz et du Pays Basque pose la question.


pays basque 1900
CIDRE DE CONTRABANDE ASCAN -AZKAINE
PAYS BASQUE D'ANTAN

Pour un Basco-Normand comme moi, la question est d'importance.

Voici ce que rapportait le journal, dans son édition du 31 juillet 1942, sous la plume de René 

Cuzacq :

"Le cidre de Normandie fut-il inventé par les Basques ?


En bordure de l’Océan, le Pays Basque est un verdoyant pays bocager, où le pommier donne sans peine son fruit abondant, près des Pyrénées. Rappelez-vous Rostand : "Je les ai parcourues de la Rhune à Venasque, des pays catalans jusqu’à ce Pays Basque dont les pommiers sont pleins de gui." 


A Bayonne, au Moyen Age, la pommade était la boisson populaire et bon marché, servie dans les gobelets d’étain des tavernes : le vin des vignes nombreuses, plans directs à la production limitée, apparaissait comme une bois son plus noble et autrement coûteuse, dont la vente et le commerce étaient soigneuse ment réglementés. 


Au Pays Basque français, le cidre ne représente plus guère qu’une survivance. Il n’en est pas de même au Pays Basque espagnol, où les branches des pommiers se recourbent au souffle humide du golfe de Gascogne. 


Les géographes prétendent que le pommier fut originaire de cette même côte cantabrique au sens large ; quant aux linguistes, ils ont un argument de nom euskarien qui conclut à l’invention du cidre par les Basques et non par les Normands... Je ne saurais l’exposer ici, ni rechercher l’étymologie du mot, mais la nom gascon et bayonnais du Moyen Age, celui de "pomade" sera compris de tous le cidre, c’est le jus ou la boisson de pomme... 





PAYS BASQUE AUTREFOIS
BRASSAGE DES POMMES EN NORMANDIE

Il y aurait mieux encore. Divers et changeants furent les rapports de nos pays avec la grasse Normandie : les invasions normandes commencèrent par détruire le vieux Lapurdum ; en compensation, peut-être, Rouen envoya à Bayonne saint Léon qui convertit pêle-mêle les Normands de l’Adour, les Gascons et les Basques de nos contrées. 


Après quoi, beaucoup plus tard, au XlVe siècle, la maison de Navarre mettait la main sur Evreux et les fiefs voisins : les ambitions de Charles le Mauvais n’en furent que plus grandes... 


Laissons là cette féodale histoire, liée aux mariages et alliances du temps. Dès ce XlVe siècle, les pommiers couvraient la Normandie ; sans doute, appelée à fournir le vin de messe, la vigne poussait alors jusque dans ces parages, au delà de sa limite actuelle, au nord de Nantes. Bientôt les Normands s’intéressèrent au liquide doré que donnait le jus de la pomme ou de la poire : la curiosité des érudits de la Renaissance rechercha les origines de la boisson nationale. 




AVANT PAYS BASQUE
CIDRE EN NORMANDIE


Et c’est ainsi qu’à Caen, en 1589, rééditant le "Traicté du vin et du cidre", de Julien de Paulmier, le médecin Jacques de Cahaignes y ajouta de son cru, une "Apologie du cidre". 


Or, cet authentique Normand y écrit les lignes qui suivent : "Il est autant impossible de dire qui en ait esté le premier inventeur (du dict cidre) qu’il est difficile de composer le différend qui est entre les Normands et les Biscains pour la première possession que l’une et l’autre partie se prétend attribuer de quay, toutes fois, jamais homme que je sache n’a laissé aucune chose par écrit."


Deux siècles plus tard, en 1781, l'abbé Rozier donnait son "Cours complet d’agriculture ou Dictionnaire d’agriculture" : il croyait que le pommier ne fut planté en Normandie qu’au quatorzième siècle, époque où les rois de Navarre, comtes d’Evreux, avaient de grands domaines ; dans plusieurs cantons de Normandie, le pommier à cidre portait le nom de "biscait" (de Biscaye). 


Le médecin Cahaignes ou l’agromane Rozier auraient pu ajouter à la gloire du cidre, qu’il guérit force maladies : notamment celles des reins et du système qui s’y rattache ; mais leur apologie se tenait ici, sur le plan des vagues généralités. Que faut-il penser toutefois des étonnantes nouvelles qu’ils nous apportent ? Tout d’abord, il ne semble pas qu’il faille limiter le mot au sens étroit de Biscayen : originaire de la province de Biscaye. La même province qui donna aussi à l’art de la guerre, le "biscayen" rejoignait par exemple les forges réputées du Guipuzcoa, au 16e siècle, les fabriques d’armes et les Creusot du temps. Voyons-y le sens de Pays Basque espagnol en général, aussi propice au pommier que la grise Normandie. Jusque dans Molière, le mot "biscaïen" aura plus tard le sens de Basque en général.





PAYS BASQUE AVANT
CIDRE EN NORMANDIE

Il n’en est pas moins certain que le Moyen Age multiplia les relations entre Rouen et les ports de Biscaye et de Guipuzcoa, où se formait une rude race de marins. Et pour cause : contre l’Anglais, maître de la Guyenne et de l’Aquitaine, l’alliance spontanée du roi de Castille et de la royauté capétienne se nouait sans cesse, multipliant du même coup les rapports entre la côte basque espagnole et les ports normands dépendant du roi de Paris. 


Il n’en était pas de même avec Bayonne : les attaques incessantes entre marins bayonnais et marins normands sont à l’origine de bien des guerres franco-anglaises au temps de l’Aquitaine anglo-saxonne. Mais les paix et les trêves ramenaient aussi les relations commerciales. 


"On expédia longtemps du cidre de Bayonne à Rouen", écrit le géographe normand Sion. Rien ne s’oppose donc à ce que Bayonnais et Basques aient appris aux Normands l’usage du cidre au Moyen Age. 


Mais que sait-on, d'autre part, de l’histoire indigène du cidre en Normandie même ? Le Moyen Age connut la vieille cervoise, à base d’orge, comme la boisson populaire et répandue. Quant à la boisson de pomme, de vieux mots la désignent en Basse-Normandie : c’est ici, si l’on peut dire, le centre d'expansion du cidre vers tous les pays normands. En 1284, le terme de "sidre" est cité. Vers 1550, l'usage du cidre est général en Normandie. Tel est le résultat de toute une évolution sur place, ayant eu les pommes sauvages comme point de départ. Car, écrit M. Sion, "le pommier est indigène en Normandie, malgré la tradition (ci-dessus rapportée), qui le fait venir du Pays Basque". Mais que certaines variétés de pommiers soient venues de la Guyenne, de la Gascogne et du Pays Basque (grâce aux relations maritimes, ou même par l’entremise de la maison d’Evreux-Navarre), il se pourrait fort. Telle est l’opinion de M. Sion : elle paraît être la vérité. 


La place nous faisant défaut, nous n’épiloguerons pas davantage là-dessus ; mais il convenait du moins, qu’à Bayonne et au Pays Basque, soit connu le "merveilleux récit" qui a pour auteurs des Normands eux-mêmes."

 




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