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dimanche 8 septembre 2024

LA FÊTE DE FONTARRABIE EN GUIPUSCOA AU PAYS BASQUE EN 1899 (première partie)

LA FÊTE DE FONTARRABIE EN 1899.


Tous les ans, le 8 septembre, est célébrée à Fontarrabie, en Guipuscoa, la victoire de ses habitants sur les troupes françaises en 1638.



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HUIT SEPTEMBRE FONTARRABIE
PAYS BASQUE D'ANTAN


Voici ce que rapporta à ce sujet le mensuel La Grande Revue, le 1er mai 1899, sous le plume de 

Louis de Robert :



"VI La Fête de Fontarabie.



Quelques heures plus tard, sur la Bidassoa que sillonne la flottille des barques. C'est dimanche et c’est la fête de Fontarabie. On est venu de Bayonne, de Biarritz, de Guétary, de Saint-Jean-de-Luz pour y assister. Les bateliers sont en joie, car la journée sera bonne. Un ciel bleu. Du soleil. Des toilettes, des ombrelles : c’est un papillonnement de couleurs sur l’eau luisante et tiède de la rivière. On dirait une jonchée de confettis.




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DEBARCADERE DE FONTARRABIE GUIPUSCOA
PAYS BASQUE D'ANTAN



Et Fontarabie ressuscite. Sa vieille rue tirée de son silence et de son oubli arbore des tentures rouges qui pendent des balcons. Des gens partout, à toutes les ouvertures. Un peu de fièvre anime ce lieu et contraste avec lui. Une fièvre de réunion mondaine. Des groupes s’abordent. On se salue. On se connaît. On est chez soi. Des bruits de parlotes s’élèvent, se croisent, se confondent, dominés par des coups de fusil qui partent à chaque instant. Pétarade belliqueuse des armes à feu. La vieille Espagne dépense sa poudre et semble convier le ciel à ses réjouissances. Voici des alguazils qui font évacuer la foule, et la rue se vide comme par enchantement. Alors une procession se forme. Des musiciens coiffés du béret rouge la précèdent. Une allègre fanfare retentit. On va chercher le clergé à l'église et on le conduit à la maison du peuple. Magie de la musique ! Les sonorités des cuivres animent toutes ces ruines. L’antique église semble de toutes ses pierres dorées de soleil participer à la fête. L’air s’électrise. Les coups de fusil ne cessent pas. C’est joyeux, ardent et farouche. Et c’est curieux aussi par la réunion de tant d’éléments contraires, toute une vie bariolée et bruyante dans cette cité d’oubli, un singulier mélange de tradition et de modernisme, la vieille croyance qui passe dans l’atmosphère artificielle de ce public élégant, et cette procession pieuse parmi ces détonations qui parlent de mort et de massacre. Toute la sauvagerie des anciens âges est là. Un sentiment cruel se lève de ce sol et domine ce peuple. L’idée de mort est associée à toutes ses réjouissances. Et la mort ici fait partie de la fête. Dans la ville, au soleil, des chevaux caracolent qui usent sans le savoir leurs derniers instants. Tout à l’heure, perdant leur sang et leur vie, échoués sur le sable de la plaza de toros, au trépignement de milliers d’êtres, un homme vêtu de rouge les achèvera.




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AFFICHE PLAZA DE TOROS FONTARRABIE 1905



Il est devenu banal de s’apitoyer sur la mort du cheval et la plupart des Français et surtout des Françaises qui reviennent d’Espagne, vous disent : "Qu’on tue le taureau, soit. Il se défend. Mais les pauvres chevaux, c’est horrible". Pourtant la volupté du spectacle l'exige. Le taureau doit au cheval son plus beau geste. Traqué, forcé par ses adversaires, il s'essouffle, il piétine, il donne de la corne à tort et à travers ; il est lourd et maladroit. Mais son heurt avec le cheval est magnifique. Il apparaît là dans sa beauté brutale, dans la violence de son instinct et la puissance meurtrière de sa force.



Le voici. On vient d’ouvrir le toril et la lumière l'éblouit. Cependant il court droit devant lui, il ne sait où, d'un élan impétueux et superbe. Tout fuit à son approche, et c'est une débandade de petits bonshommes verts, bleus, jaunes ou rouges qui se ressaisissent derrière lui. Il arrive près de la barrière et s’arrête, après une glissade de quelques mètres les jambes raidies, sur le sable. Alors il renifle et regarde. Une masse se dresse, à droite : un cavalier l’invite de sa lance, pendant qu’à gauche des capes rouges l’attirent. Il semble se recueillir et se dire : "Voyons, par qui vais-je commencer. ?" Les capes rouges présentent peu de surface et bougent et fuient. C’est un jeu de moucherons. L’adversaire à cheval est plus digne de lui. Il bondit. C’est le heurt.



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CORRIDA PLAZA DE TOROS FONTARRABIE GUIPUSCOA
PAYS BASQUE D'ANTAN



D’abord, on ne distingue rien qu’une chose confuse et désordonnée, quelque chose comme un animal monstrueux qui aurait deux têtes et huit pattes, et sur lequel serait juché un homme bardé de fer. Cela se sépare. Le cheval, soulevé à un mètre de terre, retombe. Il a un trou au poitrail, d'où coule un ruisseau de sang, et sa peau pend déchirée, comme une toile de décor derrière laquelle il n’y a rien. Surtout les chevaux blancs donnent cette impression, bêtes si maigres qu'elles semblent vides en effet, et dont le sang vous étonne. Cependant le taureau s’est éloigné. Il ne s’acharne pas sur une victime. Il est fier et court à d’autres adversaires.



Au milieu du tumulte et du délire de tout un peuple de spectateurs passionnés, j'assiste à la course qui suit la procession. Dans l'espace rond de l'arène, sous l'ardent soleil, le taureau s'affole. Un picador est tombé. Des cris d'effroi sont partis de la foule. Il s'est relevé et on applaudit. Deux chevaux sont hors de combat. L’un a la cheville cassée, et, le pied retourné, il marche sur son os. Le public manifeste pour qu'on l’abatte. Il continue de sa marche affreuse. L’autre ne peut plus se relever. Les valets d’écurie le frappent à tour de bras. Il remue seulement la tête ; son corps demeure inerte. Alors, le mors et la bride enlevés, un des valets maintient sa tête sur le sable, pendant qu’un autre lui plante une sorte de clou dans la cervelle. L’animal frémit. Ses pattes se raidissent agitées d’un court tremblement. Sa bouche s’ouvre, découvrant de longues dents jaunes. Et c’est fini.




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CORRIDA PLAZA DE TOROS FONTARRABIE GUIPUSCOA
PAYS BASQUE D'ANTAN




A ce moment, une fanfare qui retentit ordonne le départ des picadores. La foule proteste. Les chevaux s'en vont. C’est la pose des banderilles. Le jeu est gracieux. Les ors des costumes brillent sous le soleil. Un élan vers le taureau, un saut de côté : c’est fait. Et la bête exaspérée cherche vainement à s’extirper ces harpons plantés dans sa chair. Des capes dansent sous ses yeux. Il bondit, donne la corne et trouve le vide. La candeur du taureau est singulière. Il manque, si l’on peut ainsi dire, de suite dans les idées. Une cape l’invite à gauche, il y va. Une cape l’appelle à droite, il y va. Attiré de tous côtés il éparpille son effort et s'épuise. Sa défaite vient de là. S’il choisissait son homme et ne le quittait plus, en cinq minutes il serait maître du lieu.



Un nouveau coup de fanfare et voici Reverte. Il est jeune, bien pris, et, nu-tête, s’avance en souriant. Il tient l’épée qui donnera la mort et le lambeau d’étoffe rouge qui trompera la bête. Sans bouger de place, par ce chiffon rouge, il la fait bondir autour de lui, achève de la fatiguer, lui fait lever, baisser la tête, choisit son moment, et, minute décisive, tire son épée, vise. La bête a fait un mouvement. C’est manqué.




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TORERO ANTONIO REVERTE JIMENEZ



Reverte sourit toujours sous les injures dont le public l’accable. L’épée s’est à demi enfoncée dans le dos du taureau. Il est averti désormais et se méfiera. L’action devient plus périlleuse. Reverte, avec adresse, saisit l’arme par la poignée, la retire sanglante et l’essuie dans un pli du lambeau rouge où elle disparaît. Et le jeu recommence. J’admire le sang-froid de l’homme qui, parmi cette foule irritée, seul, dans celle atmosphère d’orage, demeure impassible et maître de soi. Infatigable, le chiffon rouge se déploie, flotte, ondule, s’arrête soudain, offre une surface immobile à la colère de l’ennemi. Celui-ci hésite. Cette chose qui ne bouge plus là, devant lui, n’a pas de corps. C’est une chose inconsistante et légère qui fuira sous sa corne. Il semble mesurer ses forces et chercher à déjouer les finesses dont il se sent obscurément la dupe. L'étoffe remue, frétille sur le sol. Il la suit du regard. Il semble fasciné par elle. C'est une ruse. Tout à l’heure il va bondir. Cependant l’épée luit. Nouvel éclair. Un geste, une feinte. Et la foule, prête à huer, applaudit avec fureur, car l’arme s'est enfoncée entre les deux épaules, jusqu’à la garde. 



C’est fini. Le taureau oscille un instant, veut aspirer l'air, étouffe et tombe sur le côté, comme une masse. Alors, pendant que des valets d’écurie l’entourent et l’achèvent, parmi les objets qui tombent dans l’arène aux pieds du vainqueur, un chapeau claque fait rire. Il est comique. Il part fermé, franchit l’air, tombe sur le sol et s’ouvre comme un diable. Il était plat en touchant le sable ; il déploie maintenant sa forme cylindrique. Reverte, au hasard, le renvoie à la foule. Celle-ci égayée le lui relance. Cela devient un amusement. Le chapeau part fermé et revient ouvert. Mais la plaisanterie n’est pas du goût du propriétaire qui, en habit, dans une loge, au-dessus du toril, se démène. Je le vois escalader les gradins, venir jusqu’à la barrière qu’il veut enjamber. Là, un agent de police s'interpose, et l'homme après avoir parlementé vainement doit battre en retraite. Toute l'attention est portée sur lui. Son désespoir fait la joie générale. C’est l’intermède inattendu, l'incident de l’entr’acte au cirque, l’emploi d’Auguste tenu sincèrement par un monsieur qui n’a pas payé pour ça, ce qui n'en est que plus drôle. Or, le plus curieux de l’affaire c'est qu'arrivé dans sa loge, il y retrouve son chapeau qui l'attendait, son chapeau qui, au milieu de cette foule de dix mille personnes, par miracle, tranquillement, avait regagné sa place tout seul. 


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PLAZA DE TOROS ET BIDASSOA FONTARRABIE
PAYS BASQUE D'ANTAN

 



A présent une allègre sonorité de fanfare préside au départ du taureau que traînent trois mules harnachées de jaune et de rouge et pourvues de grelots. Ce départ est triomphal. Le sable vole en poussière sur le passage de la lourde bête et les mules galopent joyeusement dans un tintement de grelots et des claquements de fouets."



A suivre...



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