C'est dans les villages très isolés, à Hasparren, à Sare ou à Urrugne qu'il faut voir ce peuple fidèle à ses traditions, chez qui tout, jusqu'au jeu, emprunte aux coutumes des âges disparus un caractère grave et presque religieux.
Dans la vie locale, la pelote basque tient une large place. Ici, vraiment, le sport national apparaît dans toute sa beauté, avec tout son charme pittoresque et inédit : auprès de l'église, l'antique fronton et la cancha où fleurit, entre les dalles, la scabieuse d'automne ; à l'horizon, la ligne harmonieuse et ferme des montagnes, trapues comme la race.
L'incomparable paysage se nuance de couleurs chaudes, sous la lumière d'or, sous le ciel d'une pâleur ardente tandis que le noble sport enchante nos regards.
A Urrugne, durant les fêtes, on organise de grandes parties de pelote qui se jouent à l'ancienne mode : au "rebot".
TABLEAU PARTIE DE REBOT PAYS BASQUE D'ANTAN
La partie commence au sortir de la grand'messe : les deux camps français et espagnol tirent au sort le "but", et la lutte s'engage, vive, ardente, passionnée.
Attentive au spectacle, la foule parée des dimanches s'étage sur les gradins de granit rouge. On voit de vieux Basques qui descendent de leurs montagnes, une ou deux fois l'an, pour assister à ces fêtes de la tradition nationale ; on y trouve aussi des Espagnols à la figure rasé qui ont fait un long trajet pour encourager de la voix leurs compatriotes. Et parmi ces hommes sérieux, dont le regard semble fasciné par la balle, Gatchucha ou Marie-Jeanne sourit...
A la fin d'un "point" particulièrement disputé, l'enthousiasme déborde, les applaudissements crépitent, les jeunes gens lancent leur béret sur la cancha et le "compteur", très digne, vient annoncer que les joueurs sont à égalité. Il se découvre et psalmodie sur deux notes élevées : "A dos, Jannac, à dos", mots qu'il fait parfois suivre, par fantaisie, d'une petite chanson fleurant bon le terroir : "Cathaline ttu ku ttun, Cathaline ahina..."
Mais voici que sonne l'Angelus de midi. La partie s'interrompt ; les conversations cessent ; l'assistance entière se lève, et les pelotaris, tête nue, attendent, pour reprendre le jeu, la bénédiction du pasteur avec le dernier tintement de la cloche.
Vient le soir, les Basques, toujours alertes, se reposent de la partie de pelote par des danses, à la fois provocantes et pudiques : le Fandango, le Saut basque, le Quadrille basque et l'"arin-arin", ce qui veut dire "léger, léger".
SAUTS BASQUES PAYS BASQUE D'ANTAN
La ceinture de laine rouge ou noire cambrant la taille, le mouchoir de soie passé en pointe autour du cou, la courte veste sur l'épaule, le béret posé en arrière, ils vont ainsi, par bandes joyeuses, vers le village en fête.
Ils chantent l'hymne national, le Guernikako arbola, le chant de la Liberté, qui représente la fierté, le courage et la foi, toute la vertu des sept provinces unies : "Zazpiak bat", ou bien ils poussent en signe de réjouissance un "irrinzina" (cri rauque er un peu sauvage qu'ils feront entendre par les nuits sans étoiles, pour s'appeler, se prévenir d'un danger, ou encore pour défier les carabineros après la réussite d'une entreprise de contrebande.
CHANT "GUERNIKAKO ARBOLA" PAYS BASQUE D'ANTAN
Par son respect des coutumes, à cause même de son isolement et des difficultés de sa langue, la race est resté forte et une.
Par l'élégance de ses ports, par sa tempérance et ses moeurs rustiques, le Basque s'est conservé robuste, souple et argile.
Plus que quiconque, le Basque a l'amour du pays et le culte du foyer. Lorsqu'il s'expatrie, cherchant fortune "aux Amériques", il garde, enraciné au coeur, l'espoir du retour, et, afin que ses descendants viennent prier sur sa tombe, de génération en génération, son plus cher désir est de reposer en terre bénie, à l'ombre de ce même clocher qui l'a vu naître.
Mais combien de temps cette race vigoureuse maintiendra-t-elle, ferme et vivante, la tradition ?
Dans la Basse-Navarre, on raconte l'épisode des quinze soldats basques qui, pendant les guerres du Premier Empire, quittent l'armée du Rhin sans permission, viennent jouer à la pelote le jour de la fête de leur village, puis rejoignent leur régiment, à Austerlitz. Leur brillante conduite, au cours de la bataille, racheta leur désertion.
Il y a quelques années, le fameux "zaguero" basque-espagnol Ayestaran, engagé pour une saison, au fronton du Cercle Saint-James, à Paris, ne consentit jamais à vivre loin de sa chère province de Guipuzcoa. Tous les dimanches soir, après la partie, il reprenait le train pour Irun, tandis que les autres pelotaris, moins fortunés, erraient tristement dans les rues de Neuilly.
PELOTARI AYESTARAN
A l'inverse du sage d'Ayestaran, Chiquito tenta de se parisianiser. Il fit l'emplette d'une jaquette, d'un somptueux melon et d'une superbe paire de gants : mais le champion du monde, qui, de sa vie, ne ganta que le chistera, s'empressa bientôt d'enfouir sa défroque mondaine qui le gênait si fort et l'habillait si mal."
Merci ami(e) lecteur (lectrice) de m'avoir suivi dans cet article.
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