CARTES POSTALES , PHOTOS ET VIDEOS ANCIENNES DU PAYS BASQUE. Entre 1800 et 1980 environ.
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jeudi 26 juin 2025
lundi 26 mai 2025
LES "BASQUES ESPAGNOLS" EN SEPTEMBRE 1893 (première partie)
LES "BASQUES ESPAGNOLS" EN 1893.
Jusqu'en 1841, les provinces du Pays Basque Sud bénéficiaient de liberté commerciale et la barrière douanière du royaume d'Espagne s'arrêtait à l'Ebre.
Voici ce que rapporta à ce sujet La Revue Hebdomadaire, le 16 septembre 1893, sous la plume de
Gustave Guiches :
"Les Basques espagnols.
Fontarabie, septembre.
C'est au cri de "Vivent les fueros" que le peuple des provinces basques d'Espagne menace de se soulever comme il le fit en 1833 et en 1873, pour ne citer que les plus récentes insurrections. Ces fueros représentent un ensemble de coutumes, de privilèges et de franchises consacrés par la tradition et dont l'origine, — d'après les très savantes recherches de M. Julien Vinson, — remonte aux premières associations territoriales que les guerres contre les Maures imposèrent aux chrétiens.
La liberté du commerce, l'administration par les juntes ou assemblées provinciales et par des fonctionnaires indigènes, le payement d'un impôt unique, l'exemption plus ou moins large du service militaire, tels étaient les principaux avantages qu'accordait cette législation de faveur. Ces exceptions s'harmonisent on ne peut mieux avec le caractère singulièrement indépendant du Basque espagnol et ce qui reste d'un ensemble de privilèges déjà fort réduits est défendu, à chaque menace, avec un désespoir héroïque, à l'égal de la dernière liberté.
Les juntes se réunissaient, tous les ans, dans des endroits spéciaux, sous le porche des églises ou sur les places publiques, et l'on observait pour la tenue de ces assemblées un cérémonial rigoureux. Le plus célèbre lieu de réunion fut, en Biscaye, le chêne de Guernica. C'est ce fameux arbre foral qui a inspiré l'hymne national des Basques "l'Arbola guernicaco" entonné, comme chant de guerre, par les insurgés d'aujourd'hui.
Les rois de Navarre, à leur avènement au trône, devaient prêter serment, sur les Evangiles, de maintenir les fueros, et don Carlos, pendant l'insurrection de 1873-1876, renouvela cette solennité. Ce fut, de la part du prétendant, un acte d'excellente politique, car il groupait ainsi, autour d'une cause définie, des éléments dispersés, et il donnait, en même temps, comme un drapeau de guerre sainte à des troupes sans discipline, mais toutes accessibles à l'enthousiasme religieux.
L'idée carliste s'est sensiblement affaiblie dans ces populations du nord de l'Espagne. Les Basques se montrèrent d'abord mécontents du rôle purement contemplatif que s'était attribué don Carlos. Ils avaient espéré le voir à leur tête, les conduisant, lui-même, à des combats dont ils ne savaient que trop le sort réglé d'avance, mais entraînant les volontés défaillantes, payant de sa personne, chevaleresque autant qu'ils s'imaginaient ce chef de partisans. Le prince préféra diriger les opérations à distance. Loin des montagnes peuplées de guérillas, il étudiait des plans de bataille, combinait des manoeuvres irréalisables et préparait d'illusoires armements. Il multipliait les proclamations et les ordres du jour. Il haranguait dans la plus noble langue militaire, ses "fidèles Basques" et ses "braves généraux". Mais les "fidèles Basques" trouvaient que les exhortations leur arrivaient de trop loin et que les paroles royales perdaient de leur accent à n'être plus que des échos.
Cette inaction du chef provoqua dans les troupes carlistes des divisions que l'insuffisance des armements, l'incapacité des généraux, le goût du pillage et l'impression produite par les premiers échecs ne tardèrent pas à propager. Aussi la plupart des provinces se rallièrent-elles au gouvernement libéral, et si le mouvement actuel parvenait à se généraliser, il est certain que le sentiment républicain dominerait et que la révolution se ferait uniquement pour le maintien des fueros.
Le carliste conserve néanmoins des partisans nombreux, surtout dans le Guipuzcoa où, à l'intérieur de la plupart des habitations, le portrait du prince est épinglé au mur, comme une sainte image, au-dessus du fusil toujours prêt à le servir. C'est que l'influence du prêtre est toute-puissante dans cette contrée, et le prêtre du pays basque espagnol reste dévoué à don Carlos en qui se place tout son espoir d'une restauration complète de l'esprit religieux.
Il aime le peuple, dont, le plus souvent, il est issu. Il s'associe à sa vie intime, prend part à ses souffrances et se mêle à ses plaisirs en joyeux compagnon. Il n'est guère de repas de mariage auquel le curé de la paroisse ne préside avec une large gaieté. S'il est jeune, il fraternise avec ses fidèles. S'il est âgé, il exerce sur eux une sorte de paternité mystique. Il est le padre très vénéré qui peut commander et à qui l'on obéit toujours. C'est de ce réciproque abandon que le prêtre recueille son autorité. La religion qu'il prêche est l'interprétation même de l'idéal populaire. Elle est merveilleuse, guerrière, et maintient les âmes dans un perpétuel état d'exaltation. Il faut, pour comprendre toute l'intensité de l'influence ecclésiastique sur ces milieux, avoir assisté à la célébration d'une messe paroissiale dans une église du pays guipuzcoan.
Sur une plate-forme élevée, l'autel resplendit comme un buisson ardent d'orfèvreries, au milieu duquel, dans le foyer le plus incandescent et parmi des colonnes de flammes, apparaît un Christ barbare, grotesquement affublé d'un jupon descendant à mi-cuisses, une silhouette de guérillero attaché à un arbre de justice et, si l'on grandit l'apparition, un rédempteur révolté contre l'horreur du supplice, sachant que cette atroce rédemption ne suffira pas au monde dont il emporte les péchés.
Les femmes sont prosternées sur le parquet de la nef, le visage disparu dans l'ombre de leurs mantilles, et ce parquet s'étoffe d'une multitude de lueurs qui sont les flammes de menus cierges brûlés ainsi, à ras de terre, en commémoration des trépassés. Les hommes occupent les gradins superposés en tribunes, des deux côtés.
A l'heure du prône, les rideaux des fenêtres sont tirés. L'obscurité s'épaissit. Le prêtre prend la parole et, tout de suite, éclat, dans ces ténèbres recueillies, une éloquence fulminante, emportant, en un galop de torrent, fureur, prières, reproches, menaces, anathèmes et bénédictions. C'est la prédication de la croisade, c'est l'appel aux armes. A voir ces hommes agenouillés, serrant à deux mains la bordure de leurs bérets, le cou tendu, humant ce souffle de guerre, on sent qu'un mot les dresserait, tout à coup, criant le "Dieu le veut !" et, de même, l'on sent, qu'au sortir de l'église, le padre, soutane retroussée et revolver à la ceinture, prendrait le commandement des guérillas.
Je ne crois pas que ce caractère militant du culte catholique, chez les Basques espagnols, se manifeste avec plus de vigueur et d'éclat qu'en cet anniversaire de la Nativité de la Vierge célébré, chaque 8 septembre, par les habitants de Fontarrabie. Cette fête est d'ailleurs la commémoration d'une date précieuse au patriotisme des Basques, celle de l'évacuation de leur territoire par les troupes françaises qui, de juillet 1794 au 31 août 1813, occupèrent cette entière région.
La ville entière se rend, ce jour-là, en pèlerinage au sanctuaire de Notre-Dame de la Guadeloupe juche au sommet d'une montagne d'où la vue d'emplit d'un admirable paysage, du chaos noir des Pyrénées espagnoles, des plaines vertes de la Bidassoa et des bleues étendues de la mer. Le cortège se forme aux alentours de l'église, près du château de Charles-Quint. Tout ce qu'il y a de comique et de touchant dans la démonstration d'un peuple pauvre et vaniteux se donne là rendez-vous. C'est la fantasmagorie grotesque, naïve, émouvante pourtant, confine l'enthousiasme d'une foi délirante, la parade presque primitive d'une sorte de carnaval militaire et religieux.
L'imagination locale s'est efforcée de reconstituer le spectacle historique d'un régiment de l'occupation. Il y a les sapeurs coiffés, en guise de bonnets à poil, de la toison de brebis qui ombrage le joug des boeufs, une barbe en poils de bouc collée au menton, le tablier de cuir des tonneliers, noué autour des reins et, sur l'épaule droite, une hache de charpentier. Le cuisinier se signale par une vaste gamelle resplendissant comme le disque d'un bouclier qui serait, ainsi que pour protéger la retraite, porté sur le dos. Les fantassins en bérets rouges, foulards multicolores, vestes sombres, pantalons de toile blanche et les alpargates attachées aux chevilles, sont armés de carabines, de fusils à baguettes, de mousquets, d'escopettes et de tromblons.
Les officiers à cheval caracolent sur les flancs des troupes, brandissant des cimeterres et criant des ordres, tandis que le galop de leurs montures fait un large battement d'ailes avec les basques de leurs redingotes galonnées. Les cantinières marchent entre les rangs. Elles sont choisies parmi les plus jolies filles de la ville, gracieuses et du charme le plus vif sous le loquet de velours, le corset pris dans le boléro brodé d'or, la taille serrée par le cotillon de chaperon rouge découvrant les nerveux mollets espagnols aux fines attaches et les pieds de haute cambrure chaussés de minuscules brodequins."
A suivre...
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mardi 13 mai 2025
UN VOYAGE A ANDAYE-HENDAYE EN LABOURD AU PAYS BASQUE EN SEPTEMBRE 1857 (troisième partie)
ANDAYE-HENDAYE EN 1857.
En 1857, la ville d'Hendaye, en Labourd, compte environ 430 habitants et son Maire est Joseph Lissardy.
Voici ce que rapporta à ce sujet le quotidien La Presse, le 21 septembre 1857, sous la plume de
Frédéric Thomas, Avocat à la Cour impériale :
"Courrier du Palais.
XXIII.
... Il emprunta une allumette à un fumeur, et puis, ayant détaché le rat, il l'alluma. Le malheureux animal, excité par l'action du feu, s'échappa pétillant et fumant ; mais bientôt sa course se ralentit, puis s'arrêta ; la flamme l'avait dévoré : ce n'était plus qu'un charbon.
Méchant gamin, tu ne pensais guère, à ce moment-là, que tu renouvelais pour ce rat un supplice décrit par Juvénal, Tacite, Sénèque, et que les Romains, particulièrement sous Néron, infligeaient aux chrétiens dont ils faisaient des martyrs.
Un instant après, mes compagnons me rejoignirent, et nous allâmes ensemble à l'Hôtel-de-Ville. C'est le plus large des édifices qu'on rencontre vers le milieu de cette grande et magnifique rue dont nous avons parlé.
Les armoiries de la cité, comme une plaque sur un uniforme, étalent leur relief au milieu de cette façade de pierre.
Presque tout le rez-de-chaussée de l'édifice est ouvert du côté de la rue et forme, sous le premier étage, une sorte de place découverte soutenue par deux piliers sur lesquels on placarde les affiches du gouvernement. L'architecte a ainsi ménagé cet enfoncement, tenant du porche et du péristyle. Un banc circulaire en pierre massive, et faisant cops avec le bâtiment, règne des trois côtés de cette place obscure. Vers le milieu, l'Hôtel-de-Ville et la principale porte, et à côté l'oeil plonge avec terreur dans une salle obscure à travers une fenêtre armée de barreaux formidables qui décèlent la prison. Nous eûmes la curiosité d'y entrer.
Un homme du peuple qui était couché par là, et dont nous ignorons encore la qualité, nous introduisit dans un corridor, et, tournant à gauche, il fit grincer des verrous de mélodrame. Une porte cuirassée de fer hurla sur la rouille de ses gonds. Nous étions dans une salle basse toute en pierre, et sur le pavé de laquelle il n'y avait exactement qu'une litière de paille.
La lumière n'arrive dans ce réduit qu'en traversant la place couverte qui sépare de la rue le rez-de-chaussée de l'édifice. Cette lumière avare est encore interceptée par les larges barreaux que nous avons déjà signalés ; si bien qu'un jour crépusculaire pénètre avec peine dans cette première pièce de la prison. Mais c'est bien pis quand, au fond de cette salle et à l'endroit le plus obscur, l'oeil découvre une autre porte aussi épaisse que la première. C'est la porte d'un cachot, et cette porte fermée, le cachot devient un véritable sépulcre, car il ne reçoit d'aucun côté ni air ni lumière.
Nous regrettions, ce qui nous avait paru le superlatif du genre, les humides caveaux de la prison de Pampelune.
Dans le cachot de Fontarabie, même quand la porte en est ouverte, on ne voir exactement rien, et il nous fallut recourir aux allumettes pour éclairer ces ténèbres absolues. Ici il n'y a plus de paille ; mais les deux tiers de cette salle sont envahis par une estrade en bois à hauteur de genou, scellée au mur et disposée un peu comme un lit de camp ou un pupitre. C'est là-dessus qu'on allongeait les prisonniers : il y avait place pour plusieurs. On les maintenait là en enfermant leurs jambes dans une machine de l'espèce des ceps et dont voici le mécanisme. L'extrémité basse de l'estrade est bornée par un rebord de bois en saillie. Ce rebord est formé par une forte planche verticale divisée en deux parties. La partie supérieure de cette planche est mobile, tandis que l'autre est clouée à l'estrade. Mais toutes les deux sont percées d'entailles circulaires formant la demi-lune sur chacun des côtés, et par conséquent la lune complète quand les deux côtés de la planche se rapprochent et s'ajustent. La plupart de ces ouvertures rondes offrent une dimension suffisante pour contenir une jambe ; mais il en est deux plus considérables que les autres. Celles-là servaient à cravater le cou du captif comme la lunette de l'échafaud. Dans ce cas, le patient était couché au rebours, les pieds en haut, la tête en bas, ce qui ajoutait à la douleur de l'étreinte l'étouffement de l'asphyxie. Ces impressions nous étaient trop pénibles à tous pour les prolonger, nous sortîmes avec bonheur de ces voûtes sombres qui oppressaient notre poitrine.
Alors, nous arrêtant un moment sous le péristyle de cet hôtel-de-ville, l'un de nous lut une inscription qui défend de jouer à la pelote dans cette place sous peine d'une amende d'un réal : Meno la multa d'un reale.
Pourquoi ce rabais ? L'année dernière, cette même inscription, que je copiai très fidèlement, punissait la même infraction de deux réaux : Bajo la pena de dos reales.
D'où vient donc que depuis cette année il en coûte la moitié moins pour violer la loi ?
Et aussitôt les suppositions de trotter. A-t-on voulu encourager les infractions et pousser aux amendes ? Le Trésor aurait-il besoin d'argent ? A-t-on imaginé qu'à un seul réal par contravention, on jouerait davantage et que la recette se rattraperait sur la quantité des délits ? Ou bien n'est-ce pas plutôt qu'une administration paternelle a voulu mettre le fruit défendu à la portée des bourses les plus mal garnies ? Enfin, cette amende d'un réal ne remplace-t-elle pas ce prélèvement qu'on met sous le chandelier pour payer les cartes ?
L'un de nous proposa un excellent moyen de lever tous nos doutes et de répondre à toutes nos questions. Pour cela, il ne fallait que jouer nous-mêmes une partie de paume. Nous n'avions qu'à enfreindre la loi, et, au moyen de vingt-cinq centimes d'amende, nous obtenions d'abord une autorité locale pour percevoir le real, et, par dessus le marché des éclaircissements sur les variations de l'inscription. Ce projet allait être adopté lorsque les plus timides de la troupe nous firent observer que nous ne savions pas assez d'espagnol pour commettre un délit à l'étranger. On craignit qu'un malentendu ou un mal-expliqué nous fit jeter sur la paille trop sèche de la prison voisine. Et il fut décidé qu'il valait mieux garder nos inquiétudes et partir. Cet avis prudent ayant prévalu, la troupe sortit de Fontarabie, que le lecteur connaît suffisamment pour apprécier combien le bombardement de 1794 fut peu dommageable à cette ville.
Les blessures de la guerre ont été pour Fontarabie plutôt un ornement qu'une mutilation. La mitraille lui a imprimé ces cicatrices qui ne défigurent pas, mais qui apitoient. La ville y a gagné une coquetterie de tristesse et une grâce du délabrement qui intéressent et vont au coeur.
Si Andaye est un cadavre, Fontarabie est un invalide..."
A suivre...
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vendredi 18 avril 2025
VENDREDI SAINT À FONTARRABIE EN GUIPUSCOA AU PAYS BASQUE EN AVRIL 1931
VENDREDI SAINT À FONTARRABIE EN 1931.
Depuis de très nombreuses années, la semaine sainte est très importante, en Pays Basque Sud, et en particulier à Fontarrabie.
Voici ce que rapporta à ce sujet l'hebdomadaire  la page, le 2 avril 1931, sous la plume de P.
Pascal :
"A Fontarabie en suivant la procession du Vendredi Saint.
La ville de Fontarabie est connue de tous par le siège fameux qu'elle eût à subir, en l'an 1638, de la part des Français, siège qu'elle repoussa victorieusement et qui lui mérita, du roi d'Espagne, les titres de "cité très noble, très loyale et très vaillante".
Elle est connue encore par la beauté incomparable de son site. Vrai pays d'Arcadie, elle attire écrivains, artistes, touristes, qui la célèbrent à l'envi pour son caractère moyenâgeux, pittoresque, nettement espagnol. Placée au nord de l'Espagne, séparée seulement de la France par la Bidassoa, elle donne l'impression d'une ville d'Andalousie par ses "couleurs de cuivre et de basane". L'expression est de Pierre Loti qui, vivant en face, à Hendaye, l'a aimée particulièrement et l'a décrite dans plusieurs de ses ouvrages avec une prédilection marquée.
Mais Fontarabie est connue aussi pour ses fêtes religieuses ; notamment celle du 8 septembre, qui commémore sa victoire sur les Français, et, davantage encore, les cérémonies du Vendredi-Saint.
Depuis des siècles déjà, on vient assister à ces dernières cérémonies, non seulement d'Espagne, mais de France et d'ailleurs. Pour les touristes de Biarritz, de Saint-Jean-de-Luz, de Bayonne, de Pau, c'est la grande attraction du jour. Personne ne veut manquer ce spectacle ; c'est par milliers qu'on y vient par tous les moyens de locomotion. Les Anglais s'en montrent particulièrement friands, surtout depuis qu'Edouard VII, alors en villégiature à Biarritz, voulut venir y assister.
Saint-Sébastien, la superbe capitale du pays basque espagnol, a aussi sa procession du Vendredi-Saint, depuis quelques années ; procession d'un déploiement autrement fastueux que celle de Fontarabie, mais il lui manque un cachet d'antiquité et surtout un cadre simple, pieux, pittoresque, que sa tournure de grande ville moderne lui donnera difficilement. C'est pourquoi les gens viennent ici plutôt que là-bas.
Voici un rapide aperçu de ces fêtes religieuses :
Le Jeudi-Saint, au matin, l'ayuntamiento (le corps municipal) sort de la casa consistorial et, accompagné d'une troupe de soldats romains, choisis dans la population (Et Dieu sait si le type basque est représentatif !), se rend en cortège à l'église paroissiale. Après la Messe, quand le Saint Sacrement a été transféré dans le tabernacle du reposoir, ces soldats monteront la garde devant le "tombeau", immobiles comme des statues, appuyés sur leurs lances. Ils se relayeront d'heure à heure, six par six, jusqu'à l'Alléluia du Samedi-Saint.
Vendredi-Saint. — Les rues de la ville, surtout la rue centrale, la si belle Calle Major, sont noires de monde. Les alguazils et miquilets se multiplient pour maintenir l'ordre et, tout à l'heure, pour faire dégager les avenues par où doit passer le cortège. Les balcons regorgent de personnes privilégiées qui ont réussi à s'y installer (non sans peine ni sans accroc à leur porte-monnaie ! Ne dit-on pas qu'un seul balcon a été retenu 300 fr.) ?
L'église, elle aussi, est remplie de fidèles et de curieux, désireux d'assister à la descente de croix, drame religieux qui rappelle les célèbres mystères du moyen âge. Malgré l'obscurité presque complète de l'édifice (c'est de rigueur en Espagne, surtout pour ce genre de cérémonies), on peut voir devant l'autel une grande croix sur laquelle gît un Christ à bras articulés. Des soldats romains, centurion en tête, scandant leur marche en frappant de leur épée sur leur bouclier au son d'une mélopée étrange, viennent se ranger auprès de cette croix. A 3 heures sonnantes, le prédicateur, du haut de la chaire, pousse le cri Lamma Sabacthani, comme pour annoncer le moment précis de la mort du Christ. Il parle ensuite, d'une voix dramatique, de la Passion de l'Homme-Dieu, s'adressant de préférence à la Vierge des Douleurs, dont la statue se trouve dans le sanctuaire, près de la croix, et lui rappelant les souffrances qu'elle endura dans son coeur pendant l'agonie de son divin Fils.
LA CROIX EGLISE DE FONTARRABIE PAYS BASQUE D'ANTAN |
Il parle de la condamnation inique, de l'inscription placée au-dessus de la tête de Jésus ; à ce moment, on décloue cette inscription...
Il parle de la couronne d'épines ; on l'ôte de dessus la tête du divin Supplicié...
Il parle des plaies des mains et des pieds ; aussitôt, on entend de lugubres coups de marteau et les bras décloués tombent le long du corps. Ensuite, tout le corps est détaché de la croix ; il est reçu par des religieux Capucins qui, avec infiniment de respect et de dévotion, le déposent dans une grande châsse.
Maintenant va commencer la procession funèbre ou funérailles de Jésus à travers les rues de la cité.
Le cortège est ouvert par un Saint Michel tout cuirassé d'or, qui s'avance d'un pas rythmé, se protégeant derrière un bouclier d'argent. Vient ensuite une immense statue de Jésus au jardin des Oliviers, portée par des pénitents en cagoules brunes.
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ARCHANGE PROCESSION SEMAINE SAINTE FONTARRABIE PAYS BASQUE D'ANTAN |
Puis voici Jésus à la colonne de la Flagellation, porté par des pénitents rouges et encadré par des soldats romains. Derrière cette statue marche un peloton de carabiniers en grande tenue.
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PROCESSION SEMAINE SAINTE FONTARRABIE PAYS BASQUE D'ANTAN |
Les autres groupes de la Passion, tous portés par des pénitents de diverses couleurs, sont celui de la Véronique, étendant devant elle le linge où s'imprima la Sainte Face ; celui de saint Jean, le disciple bien-aimé, qui fut fidèle à Jésus jusqu'au bout ; celui de Marie-Magdeleine qui, au pied e la croix, étreignait avec amour les pieds sanglants de son Sauveur ; celui de Notre-Dame des Sept-Douleurs, d'une toilette extrêmement riche, quoique en grand deuil.
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SANTA MARIA MAGDALENA PROCESSION SEMAINE SAINTE FONTARRABIE PAYS BASQUE D'ANTAN |
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LA VERONIQUE PROCESSION SEMAINE SAINTE FONTARRABIE PAYS BASQUE D'ANTAN |
NOTRE-DAME DES DOULEURS PROCESSION SEMAINE SAINTE FONTARRABIE PAYS BASQUE D'ANTAN |
Une des curiosités du cortège qui attire le plus l'attention des assistants est le groupe des douze apôtres, vêtus de toges romaines aux teintes bariolées, tenant chacun en main un insigne qui rappelle la nature de leur martyre respectif. Pour cet office, on choisit des pêcheurs qui, chaque année, tiendront, comme à un honneur exceptionnel, à remplir ce rôle de choix. Ils sont âgés en général, d'un type basque très prononcé : visage rasé, basané, couvert de rides profondes. Il sont superbes à voir, tant leur démarche a de gravité, de piété et de sérieux. Ils sont bien de la race de ces Basques dont Raymond Escholier dit dans le dernier numéro de la Revue des Deux-Mondes que lorsqu'on les voit, "conduisant leurs boeufs, la tête haute, la face rasée sous le béret, on les prendrait pour des proconsuls romains".
Le dernier groupe de la procession, le plus important, est celui du Christ porté dans sa magnifique châsse d'argent et de cristal, qui le laisse voir étendu dans son cercueil, tout blême et sanglant. Les Espagnols affectionnent le réalisme dans l'art, surtout dans l'art religieux. Toutes les statues de cette procession sont expressives à souhait. La châsse est entouré des marins du stationnaire le Mac-Mahon, suivie des religieux de toute robe, des prêtres de la paroisse revêtus de lourdes et riches chapes noires, du maire et son Conseil, des autorités militaires et maritimes. (Quand reverrons-nous ceci en France ?)
LE SAINT SEPULCRE VENDREDI SAINT FONTARRABIE PAYS BASQUE D'ANTAN |
Sur tout le parcours de la procession, les différents groupes de la Passion sont encadrés de deux files d'hommes portant d'énormes cierges presque aussi grands qu'eux et qu'ils tiennent horizontalement. Les femmes n'ont pas ce droit ; elles suivront pieusement et modestement, la tête recouverte de la mantille noire, derrière le clergé et les autorités.
Pendant tout le trajet, le chant du Miserere alterne avec des marches funèbres exécutées discrètement par la fanfare municipale. La foule des curieux est houleuse, bruyante ; mais, on ne peut le nier, lorsque s'approche la châsse du Christ, de ce grand mort qui est l'éternel vivant, tout le monde se découvre et il se fait un religieux silence fort impressionnant. A combien de milliers faut-il évaluer cette foule ? Il serait difficile de le dire. On constate seulement que, chaque année, elle va croissant et que les barquiers chargés de faire passer la Bidassoa aux étrangers se font ce jour-là des émoluments sérieux.
Signalons, pour finir, un usage touchant. Le dimanche de Pâques, de grand matin, quand l'aube commence à poindre, le Saint Sacrement sort processionnellement de l'église. A un point nommé arrive, en sens inverse, la statue de la Sainte Vierge portée par des hommes robustes et entourée de soldats romains. Lorsque ce groupe se trouve en présence du Saint Sacrement, les soldats fléchissent le genou, la statue s'incline par trois fois. C'est Marie adorant son Jésus ressuscité..., c'est la rencontre du Fils et de la Mère après les jours d'angoisse. Bien des yeux se mouillent d'émotion à ce spectacle.
Dans les armes de Fontarabie, on lit les titres glorieux que lui donna le roi d'Espagne, lors de son triomphe contre les Français en 1638 : "La muy noble, muy leal y muy valerosa ciudad de Fuenterrabia... La très noble, très loyale et très vaillante cité de Fontarabie." A ces titre, on en ajouté un autre encore plus enviable : "Muy santa... la très sainte cité de Fontarabie."
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