LES FUEROS EN 1841.
Jusqu'en 1841, les provinces du Pays Basque Sud bénéficiaient de liberté commerciale et la barrière douanière du royaume d'Espagne s'arrêtait à l'Ebre.
Voici ce que rapporta à ce sujet la presse nationale française dans plusieurs éditions :
- le Journal des débats politiques et littéraires, le 11 novembre 1841 :
"Paris, 10 Novembre.
Nous évitons plutôt que nous ne recherchons l'occasion de nous étendre sur les affaires d'Espagne. C'est un triste spectacle que celui d'une nation voisine, liée à la France par tant de souvenirs et d'intérêts communs , plongée aujourd'hui dans un désordre plein tout à la fois de violence et de faiblesse ; et lorsqu'on n'entrevoit ni remède facile, ni solution prochaine à cette crise déplorable, ce n'est pas sans une certaine tristesse qu'on se voit obligé d'enregistrer jour par jour le bulletin monotone de cette fièvre chronique qui use ses forces et semble ajourner indéfiniment tout espoir de guérison. C'est donc bien gratuitement qu'on nous accuse de charger et de noircir comme à plaisir le tableau des événements. Ce serait un soin malheureusement bien inutile ; la réalité est déjà assez sombre par elle-même. Nous ne demanderions certainement pas, mieux que de voir les choses en beau et de nous bercer de chimériques espérances comme la plupart des journaux de l'Opposition. Ce n'est pas notre faute si cet optimisme aveugle nous est complètement refusé.
LES FORS DE BISCAYE |
Aujourd'hui cependant un de ces journaux mêle aux reproches ordinaires et en quelque sorte convenus, dont l'Espagne fournit tous les jours le texte contre nous, une accusation d'inconséquence que nous ne croyons pas fondée, et qu'il serait trop facile de retourner contre lui-même. La manière sommaire dont Espartero vient de supprimer les fueros des provinces basques ne nous a paru ni juste ni politique. On s'autorise du blâme que nous avons exprimé à cette occasion pour nous accuser de favoriser l'esprit de localité, qu'il regarde avec beaucoup de raison comme beaucoup trop puissant en Espagne, et que nous avons nous-mêmes toujours combattu. Le blâme jeté sur la suppression des fueros paraît être à ce journal en contradiction formelle avec cet esprit de centralisation et d'unité que nous avons toujours recommandé à l'Espagne. Nous allons voir tout à l'heure jusqu'où va la contradiction qu'on nous reproche ; mais prenons acte d'abord de cette adhésion aux idées d'unité et de centralisation. Cette adhésion, pour être tardive, n'en est que plus méritoire. L'Opposition aura reconnu sans doute combien elle se trompait l'an passé, lorsqu'elle appuyait la malencontreuse insurrection de septembre. A cette époque c'était également l'unité et la centralisation qui étaient en cause, et de plus la légalité et la Constitution. La loi sur les ayuntamientos, qui servit de prétexte à la levée de boucliers des juntes, avait précisément pour objet de restreindre le pouvoir excessif attribué aux autorités municipales et de les faire rentrer dans la sphère hiérarchique , en attribuant à la Couronne la nomination ou le choix des alcades. Pourquoi donc à cette époque, l'Opposition si ombrageuse en matière de centralisation, se faisait elle l'avocate de la rébellion des municipalités ? Serait-ce par hasard parce que la loi qui limitait leur autorité avait été régulièrement votée par les Cortès et sanctionnée par la Couronne ? Dans ce cas on concevrait très bien l'approbation qu'on donne à la suppression des fueros ; car ils ont été supprimés, comme nous l'avons dit, d'un trait de plume, quoique solennellement reconnus à Bergara et ratifiés par les Cortès. L'Opposition ne se montre donc inconséquente que dans ses idées sur la centralisation qu'elle combattait il y a un an avec la même ardeur qu'elle la soutient aujourd'hui ; mais du moins, en matière de légalité, elle est fidèle à ses antécédents : tendances locales, esprit d'unité, elle défendra les mesures les plus contradictoires, pourvu qu'elles soient en opposition avec les lois, avec les traités, avec la foi jurée ; quant au reste apparemment, peu lui importe.
LES FORS DE BISCAYE 1452 |
La suppression des fueros dans les circonstances présentes ne nous parait, nous l'avons déjà dit, ni juste, ni politique. Pour ce qui est de l'opportunité de ce décret et de l'habileté du régent en cette circonstance, nous ne pouvons partager sur ce point l'admiration de l'Opposition. Semer de nouveaux germes d'irritation dans des provinces, belliqueuses soumises en ce moment même à mille vexations et traitées en pays conquis, cela nous parait d'autant moins habile que l'autorité d'Espartero vient d'être cruellement outragée à Barcelone, où la citadelle a été démolie contre sa volonté formelle et malgré les protestations de ses lieutenants, et que le parti du mouvement extrême l'a déjà débordé en Catalogne. Ce n'est pas que nous prenions un souci démesuré des fautes qu'Espartero peut commettre ; mais enfin ce sont des fautes.
LIVRE LES BASQUES LEURS FORS DE J GAZTELU |
Nous ne nous montrerons pas non plus trop exigeant en matière de légalité. Pourquoi Espartero se soucierait-il plus de la légalité quand il s'agit, des fueros que lorsqu'il s'est agi des ayuntamientos ; que lorsqu'il fait fusiller sans procédure ceux de ses adversaires qui tombent entre ses mains ? Le scrupule de sa part ne serait aujourd'hui qu'une pruderie peu en harmonie avec toute sa conduite. Espartero est arrivé au pouvoir par la force matérielle, il s'y maintient par le même procédé ; c'est fort bien tant que cela dure ; mais la légalité n'a rien a voir de ce côté.
BALDOMERO ESPARTERO |
LIVRE L'ABOLITION DES FORS BASCO-NAVARRAIS |
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