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vendredi 14 mai 2021

LA LANGUE BASQUE ET LA LANGUE HONGROISE EN 1877 (troisième partie)

LA LANGUE BASQUE ET LE MAGYAR.


Il existe depuis longtemps de nombreuses hypothèses sur l'origine de la langue Basque.

Vers les années 1860, le prince Louis-Lucien Bonaparte, linguiste distingué, trouve des similitudes entre les langues finno-ougriennes, dont le Magyar et la langue Basque.




culture littérature basque
JULIEN VINSON






Voici ce rapporta à ce sujet Jules Vinson :



"...Aucun de ces arrondissements, aucune de ces provinces n'est entièrement basque, au point de vue linguistique, si ce n'est le Guipuzcoa ; la Navarre espagnole ne l'est même qu'à moitié ; l'Alava n'entre que pour un dixième dans la région des dialectes basques dont un peu moins du quart de la Biscaye doit être distrait ainsi que quelques villages gascons des arrondissements de Mauléon et Bayonne en France. Ni Bayonne, ni Pampelune, ni Bilbao ne sont basques. Voici d'après les excellentes et admirables cartes du pr. Bonaparte la liste des localités formant la limite du pays linguistique basque : 

Bidart, Arbonne, Bassussary, Saint-Pierre-d'lrube, Lahonce, Urcuit, Bardos, Charritte-Mixe, Ilharre, Arbouet, Domezain, Etcharri, Aroue, Arrast, l'Hôpital-Saint-Blaise, Esquiule, Haux et St-Engrace en France ; puis en Espagne :

Isaba, Garde, Vidangoz, Iciz, Gallues, Izal, Aristu, Arizcuren, Usoz, Asnoz, Beortegui, Laboa, Legun, Elia, Sagaseta, Sabaldica, Ezcaba, Berriosus, Loza, Orcoyen, Arazuri, lbero, Muniain, Izurzu, Orendain, Soracoiz, Viguria, Arguinano, Goni, Torrano, Lizarraga, Ciordia, Cegama, Elguea, Larrinzar, Marieta, Urbina, Ciriano, Erive, Ondalegui, Olano, Urgoiti, Barambio, Llodio, Zollo, Basauri, Begofia, Abando, Deusto, Lejona et l'embouchure de la rivière de Bilbao. En menant une ligne continue de chacun de ces points au suivant, on aura le périmètre suffisamment exact de la région où le basque est encore le langage naturel de la majorité des habitants.



CARTE LINGUISTIQUE EUSKARA LL BONAPARTE 1865



Mais en dehors de ces limites, on trouve sur beaucoup de points une zone intermédiaire où le basque n'est plus connu que de la minorité des gens du pays ; cette zone doit néanmoins être com- prise dans la surface géographique de l'idiome, puisque les personnes qui y parlent le basque le savent de naissance et ne l'ont jamais appris. Les principaux villages de cette zone sont les suivants en Biscaye, Baracaldo ; en Alava, San Roman, Luyando, Lezama, Astoviza, Berricano, Buruaga, Luco, Ullibarri-Gamboa, Landa, Nanclares, Zuazo, Otaza, Ozaeta, Herinua, Larrea ; en Navarre, la zone mixte est beaucoup plus large et je ne donnerai que les villages extrêmes : Iturgoyen, Estenoz, Garisoain, Artazu, Puente-la-Reina, Garinoain, Orisoain, Iriberri, Iracheta, Equisoain, Ibarzabalza, Abinzano, Izco, Besolla, Guerguetiain, Indurain, Turrillas, Artajo, Mugueta, Uli, Larequi, Ongoz, Adoain, Racas alto et Burgui. On remarquera que toutes ces localités sont espagnoles : il n'y a pas en France de zone mixte analogue, et comme dit le Dr Broca (Sur l'origine et la répartition de la langue basque, 1875, p. 39), "la démarcation est brusque et peut être indiquée par une seule ligne". Le pays basque offre d'ailleurs à ce point de vue de curieux sujets d'étude : "Les Roncalais entre eux parlent espagnol ; avec les Roncalaises, ils parlent basque, ainsi que les Roncalaises entre elles. On observe à peu près la même chose à Ochagavia en Salazar. Cet usage n'a pas lieu toutefois dans les localités roncalaises d'Uztaroz et d'Isaba, où les hommes entre eux se servent aussi bien du basque que du castillan » (L.-L. Bonaparte, Études sur les dialectes d'Aezcoa, etc., p. iij).



La description qui précède justifie l'opinion ci-dessus émise : le basque est un idiome agglutinant qui doit être placé, au point de vue morphologique, entre la famille finnoise simplement incorporante et les langues américaines incorporantes et polysynthétiques.



Mais il n'en faudrait pas conclure que l'escuara soit un proche parent du finnois ou du magyare, de l'algonquin ou de l'iroquois. La parenté de deux ou plusieurs langues ne saurait en effet résulter uniquement d'une même physionomie extérieure ; pour conclure à une communauté d'origine, il est indispensable que, comparés à un même degré de développement, leurs principaux éléments grammaticaux soient non seulement analogues par leur fonction, mais encore qu'ils se ressemblent phonétiquement d'une manière suffisante pour rendre admissible l'hypothèse de leur identité primitive. Il sera sage de ne point affirmer que ces langues proviennent de la même source, si, de l'une à l'autre, les racines significatives, qui sont après tout le fonds propre, la haute origine du langage, se trouvent être totalement différentes. Jusqu'à présent, aucune langue n'a présenté avec le basque une similitude de racines analogue à celle qu'on a depuis longtemps constatée entre le sanscrit, le grec et le gotique ou entre l'arabe et l'hébreu.


ESSAI SUR LA LANGUE BASQUE 1877 
PAR JULES VINSON


Il existe pourtant de par le monde des esprits tellement voués au culte des entités, tellement épris de rêveries métaphysiques, tellement pleins de foi dans la nécessité de l'unité du langage, qu'ils ont pris l'habitude de torturer les radicaux et de les rendre flexibles et variables au delà de tout ce qu'on peut imaginer. Ils passent leur vie à faire des étymologies, de celles que Schleicher appelait etymologizirungen ins blaue hinein, et à découvrir des merveilles de phénomènes phonétiques. Dignes enfants de ces travailleurs des derniers siècles qui, dans l'incertitude générale de la science, rattachaient toutes les langues à l'hébreu, les esprits aventureux dont je parle ont inventé la théorie des langues dont le vocabulaire se renouvelle sans cesse et ont formé la grande famille "touranienne" où doit entrer, bon gré mal gré, tout ce qui n'est ni aryen, ni sémitique, ni chinois. Dans cette olla podrida où le japonais heurte l'esquimau, où l'australien coudoie le turc, où le tamoul fraternise avec le hongrois, on n'a eu garde de manquer de placer le basque. Beaucoup d'amateurs plus hardis même ont rattaché l'escuara, ou du moins ceux qui le parlent, aux tribus soi-disant khamitiques de l'Egypte ; d'autres les ont apparentés aux Phéniciens antiques ; d'autres ont vu en eux les descendants des Alains ; d'autres encore en font, grâce à l'Atlandide, une colonie d'Américains ; il y a très-peu de temps qu'on affirmait de la meilleure foi du monde que les Basques et les Celtes, Gallois ou Bretons, se comprenaient et pouvaient causer longuement entre eux en se servant chacun de leur langue naturelle. Je renvoie ces derniers au poète Rulhière :

La contrariété tient souvent au langage :

On peut s'entendre moins, parlant un même son,

Que si l'un parlait basque et l'autre bas-breton.



Les plus sérieux de ces ennemis des solutions négatives, de ces abstracteurs de quintessence, affirment que les ancêtres des Basques sont incontestablement les Ibères. Je ferai remarquer tout d'abord que cela fut-il prouvé, les Basques ou, si l'on veut, les Ibères n'en seraient pas moins isolés; car, en quoi l'ibère serait-il plus que le basque parent du celte ou du carthaginois ? Mais cette théorie ibérienne n'est point encore scientifiquement établie ; elle repose principalement sur l'a priori suivant : les Ibères ont occupé jadis toute l'Espagne et le midi de la Gaule, or l'escuara vit encore au pied des Pyrénées, donc l'escuara est un reste de la langue des Ibères. Le vice de ce syllogisme est évident ; la conclusion ne s'impose point et se déduit mal des prémisses. Quant aux preuves directes, elles se réduisent à des essais d'interprétation soit d'inscriptions dites ibériennes ou celtibériennes, soit de légendes monétaires, soit de noms propres et surtout de noms topographiques.



CARTE LINGUISTIQUE EUSKARA LL BONAPARTE 1863



Les inscriptions et les légendes sont écrites à l'aide de caractères d'origine manifestement phénicienne, mais dont le déchiffrement n'est rien moins que certain : toutes les traductions par le basque proposées par MM. Boudard, Phillipps et autres, sont contestées par les linguistes qui étudient aujourd'hui le basque.



Les noms recueillis par les auteurs anciens forment une base plus solide ; mais les explications proposées par W. von Humboldt et après lui par beaucoup d'étymologistes sans méthode, sont également pour la plupart inadmissibles. M. van Eys a consacré à ces étymologies un bon article dans la Revue de linguistique (juillet 1874, p. 3-15). M. Fr.-M. Tubino, de Madrid, combat également la théorie ibérienne dans la brochure qu'il vient de publier (Los aborigenes ibéricos o los Beréberes en la Peninsula, Madrid, 1876) : il tend à apparenter, anthropologiquement parlant, les Basques aux Kabyles, Berbères et Touaregs de l'Afrique."



A suivre...



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