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mercredi 14 avril 2021

LA LANGUE BASQUE ET LA LANGUE HONGROISE EN 1877 (deuxième et dernière partie)

 

LA LANGUE BASQUE ET LE MAGYAR.


Il existe depuis longtemps de nombreuses hypothèses sur l'origine de la langue Basque.

Vers les années 1860, le prince Louis-Lucien Bonaparte, linguiste distingué, trouve des similitudes entre les langues finno-ougriennes, dont le Magyar et la langue Basque.




pays basque autrefois litterature
ESSAI SUR LA LANGUE BASQUE 1877 
PAR JULES VINSON



Voici ce rapporta à ce sujet Jules Vinson :


"...La phonétique de l'escuara est simple ; les sons le plus généralement employés sont les sifflantes, les nasales et les gutturales dures : les consonnes douces tombent souvent entre deux voyelles. On y rencontre assez fréquemment de ces sons mixtes, intermédiaires entre les palatales et les gutturales, qu'affectionnent les idiomes du second groupe. Un des traits dominants est l'interdiction absolue de la gémination des consonnes, l'aversion des groupements de consonnes et le soin de compléter par une voyelle épenthétique les consonnes finales muettes : il est probable qu'à l'origine les mots se composaient d'une suite de syllabes régulièrement formées d'une consonne et d'une voyelle.



La dérivation formelle s'opère par la suffixation des éléments de relations ; les signes pronominaux sont pourtant aussi préfixés aux verbes. A part cette différence, les noms et les verbes ne sont pas traités de deux manières distinctes ; ils sont également susceptibles de recevoir les suffixes marquant les rapports de temps et d'espace, dont beaucoup ont conservé entières et leur signification propre et leur forme sonore antique. L'article est le pronom démonstratif éloigné. Les pronoms "nous" et "vous" ne sont point les pluriels de "je" et de "tu" ; ils ont tout l'aspect d'individualités spéciales. On ne forme point de dérivés possessifs : "ma maison" par exemple se traduit par "la maison de moi" et ne présente aucune analogie de forme avec "je mange" ou toute autre expression verbale. Il n'y a pas de genres, mais quelques suffixes sont spécialement remplacés par d'autres avec des noms d'êtres animés, et dans le verbe il y a des formes particulières pour indiquer si l'on parle à un homme ou à une femme. Il n'y a pas de duel. Le signe de pluralité s'intercale entre l'article et les suffixes, mais il peut y avoir, au singulier seulement, une déclinaison indéfinie ou indéterminée, sans article. Il convient de mentionner en outre la double forme des nominatifs, dont l'une ne sert que comme sujet d'un verbe actif ; c'est tout à fait la distinction signalée par M. Fr. Müller dans les langues australiennes entre le nominatif subjectif et le nominatif prédicatif.



La conjugaison est très compliquée. Le verbe basque sait résumer en une seule expression verbale les relations d'espace, de personne à personne, subjectives (idée de neutralité, d'action limitée à son auteur), objectives (idée d'action sur un régime direct) et attributives (idée d'une action faite au profit d'un objet indirectement visé, idée du régime indirect); les relations de temps ; les relations d'état correspondant à autant de modes distincts ; — les nuances de l'action rendues par diverses voix dérivées ; les nuances de sujets ou régimes marqués par les nombreuses formes personnelles ; les nuances de temps et d'état que traduisent les conjonctions de nos langues modernes. A chacune de ces relations ou nuances est affecté un suffixe, souvent considérablement abrégé et réduit, mais à peu près toujours sensible.



Le verbe basque primitif, c'est-à-dire complètement développé, ne différait pas de celui des autres langues du globe. Il ne comprenait que deux modes, l'indicatif et le conjonctif qui dérivait de l'indicatif par un suffixe, et trois temps : le présent, l'imparfait et une sorte d'aoriste impliquant la possibilité éventuelle. Il ne connaissait qu'une voix secondaire, dérivée par un suffixe spécial, la causative. Il joignait à ces formes les signes des régimes directs et indirects, ce qui est le caractère essentiel des idiomes incorporants.


pays basque autrefois litterature
JULES VINSON



Pendant sa vie historique, pendant sa période de décadence formelle, le verbe a éprouvé, en basque, des accidents dont on ne trouve nulle part d'exemple aussi complet. La conjugaison primitive ou, si l'on veut, simple et directe des noms verbaux est peu à peu tombée en désuétude et a été remplacée par une remarquable composition de noms verbaux, d'adjectifs et de verbes auxiliaires.



C'est ainsi que l'escuara en est arrivé à développer, dans l'ensemble de ses dialectes, onze modes et quatre-vingt-onze temps dont chacun compte trois personnes de chaque nombre ; chaque personne, variable suivant le sexe ou l'honorabilité de la personne interpellée, reçoit en outre un certain nombre de terminaisons qui jouent le rôle de nos conjonctions. De plus, de l'ensemble des auxiliaires, on a formé deux séries parallèles qui, jointes alternativement aux noms d'action, produisent les deux voix active et moyenne, ou mieux transitive et intransitive. Les auxiliaires de la conjugaison périphrastique sont presque les seuls restes du système simple primitif.



Quant à la syntaxe, le basque ressemble à toutes les langues agglutinantes. La proposition est toujours simple. Les phrases sont généralement courtes ; les pronoms relatifs sont inconnus. La complexité du verbe, qui réunit en un seul mot beaucoup d'idées, contribue à cette simplicité de la proposition, où le sujet et l'attribut tendent manifestement de leur côté à ne former qu'un tout avec leurs compléments respectifs. Ce but est atteint par l'invariabilité des adjectifs et surtout par la composition.




L'adjectif se place après le nom qualifié, tandis que le génitif précède au contraire le nom possesseur.



La composition a pris en basque assez d'extension pour que plusieurs mots juxtaposés aient pu se contracter et se réduire souvent de façon à se confondre partiellement les uns dans les autres. C'est un procédé familier aux idiomes du Nouveau-Monde ; c'est proprement ce qui constitue le polysynthétisme qu'il faut soigneusement distinguer de l'incorporation : ce dernier mot doit être réservé pour désigner plus particulièrement les phénomènes de conjugaison objective ou attributive communs aux idiomes de la seconde forme.



Le vocabulaire basque est au demeurant fort pauvre. Bien qu'il soit encore imparfaitement connu, car les anciens livres et les noms de lieux, ainsi que certaines variétés dialectales peu étudiées ont dû conserver des mots généralement oubliés, on peut affirmer que les termes réellement basques n'expriment pas d'idées abstraites. En dehors des mots gascons, français, espagnols, latins, empruntés, on ne trouve pas de traces d'une civilisation bien avancée et l'on se trouve en présence de fort peu d'expressions impliquant une collectivité, une généralisation. Point de mot ayant le sens large de notre "arbre", de notre "animal" ; "Dieu" est simplement, par anthropomorphisme, "le maître d'en haut" ; et le même terme rend nos idées "volonté, désir, fantaisie, pensée". Les mots d'emprunt sont d'autant plus nombreux que l'influence des dialectes aryens s'exerce depuis de très longs siècles ; c'est vraisemblablement par leur contact avec les races indo-européennes que les Basques, ou ceux qui parlaient le basque, sont arrivés à la vie historique.



Aussi, pour étudier ce singulier idiome, faut-il bien savoir l'histoire du devenir du latin dans la région pyrénéenne. On n'est d'ailleurs pas aidé par les documents écrits, car il n'y a pas (et il ne peut pas y avoir) de littérature basque originale. Le livre plus ancien a été publié en 1545 le second en date est le Nouveau Testament protestant de la Rochelle, imprimé en 1571 par ordre de Jeanne d'Albret.



Une autre difficulté, c'est l'extrême variabilité de la langue ; il n'est peut-être pas deux villages où l'on parle absolument de la même manière. Ceci est tout naturel du reste chez un peuple illettré et qui ne peut se mettre au niveau de ses voisins qu'en oubliant son antique langage. Ces diverses variétés se groupent aisément en dialectes secondaires : le prince L.-L. Bonaparte en reconnaît vingt-cinq qui se réduisent assez facilement à huit grands dialectes. Un examen approfondi ramène ces huit divisions régionales à trois, c'est-à-dire que les différences entre les huit dialectes principaux sont inégales et permettent des rapprochements partiels.



Les huit dialectes sont : 1° le labourdin ; 2° le souletin ; 3° le bas-navarrais oriental ; 4° le bas-navarrais occidental ; 5° le haut-navarrais septentrional ; 6° le haut-navarrais méridional ; 7° le guipuzcoan ; 8° le biscayen. Le souletin et les deux dialectes bas-navarrais forment un premier groupe, oriental si l'on veut ; le biscayen seul forme le groupe occidental ; les quatre autres constituent le groupe central.



Ces noms sont tirés des subdivisions territoriales. La Soule était une province relevant de la Navarre, qui comprenait, dans le département actuel des Basses-Pyrénées, les cantons de Mauléon et de Tardets, ainsi que quelques communes du canton de Saint-Palais, de l'arrondissement de Mauléon. Le Labourd, vicomté vassale du duché d'Aquitaine, correspondait aux cantons de Bayonne (moins cette ville et trois autres communes), de Saint-Jean-de-Luz, d'Ustaritz, d'Espelette et de Hasparren (partie), dans l'arrondissement de Bayonne. Le surplus des deux arrondissements français que nous venons de nommer composait la Basse-Navarre, subdivisée en pays de Cize, Mixe, Arberoue, Ostabaret et vallées d'Ossès et de Baigorry; c'était primitivement la sixième merindad du royaume de Navarre qui s'étendait en Espagne jusqu'au delà de l'Èbre entre Gardes et Cortes d'une part, Viana et Vera de l'autre. Le Guipuzcoa contient les partidos (cantons) de Saint-Sébastien, Tolosa, Azpeitia, Vergara. La Biscaye comprend tout le terrain entre Ondarroa et la rivière de Sommorostro, entre la Carranza et la Pena de Gorbea.



Les dialectes ne correspondent point exactement aux subdivisions territoriales dont ils portent le nom. Ainsi, le bas-navarrais occidental est parlé dans une partie de l'ancien Labourd ; le biscayen en Guipuzcoa. Enfin, sur les cartes géographiques espagnoles, on trouve une autre province basque, l'Alava : c'est à peine pourtant si l'on y parle basque, à sa limite septentrionale, le long d'une bande étroite: le dialecte des localités alavaises qui y sont comprises est le biscayen. En résumé, le dialecte biscayen est en usage dans l'Alava, la Biscaye et le tiers occidental du Guipuzcoa (Vergara et Salinas) ; le guipuzcoan, dans presque tout le reste du Guipuzcoa ; le haut-navarrais septentrional dans quelques villages du Guipuzcoa sur la frontière française (Fontarabie, Irun, etc.), et dans les territoires de Baztan, Ulzama, Lerin, Basaburua Mayor, Larraun ; le haut-navarrais méridional dans le surplus de la Navarre basque ; le labourdin dans la partie sud-ouest de l'arrondissement de Bayonne (Suivant le prince L.-L. Bonaparte, le labourdin n'est parlé que dans les dix-sept localités suivantes: I. 1. Sare, Saint-Pée, Ahetze, Zugarramurdi (Espagne), Urdax (Espagne) ; 2. Ainhoa; 3. Saint-Jean-de-Luz, Ciboure, Urrugne (et Béhobie), Hendaye, Biriatou, Ascain, Guéthary, Bidart ; II. Arcangues, Bassussary, Arbonne.) ; le bas-navarrais occidental, dans le nord-est du même arrondissement ; le bas-navarrais oriental dans le nord-ouest et le souletin dans le sud-est de celui de Mauléon."



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