Libellés

dimanche 11 avril 2021

L'ABBÉ BELIARDI EN VOYAGE AU PAYS BASQUE EN 1765 (première partie)

UN VOYAGE AU PAYS BASQUE EN 1765.


En 1765, l'abbé Béliardi, pendant le ministère de Choiseul, se rend en Espagne, en tant qu'agent de la marine et du commerce.


CARTE VOYAGES EN FRANCE



Voici ce que rapporta à ce sujet le journal Les Langues néo-latines, le 1er octobre 1957 :



"Voyage de Paris à Madrid (du 13 mai au 12 juin 1765). 



Lundi 3 (juin) (page 85). Parti de Saint-Jean-Pied-de-Port à six heures et demie par Roncevaux. J'avais dix bœufs attelés à ma voilure, et quoiqu’elle fût fort légère et que tout le monde fût à pied, la montée est si rude qu’ils avaient bien de la peine à tirer. Nous sommes arrivés à ce qu’on appelle le haut de la montagne, à dix heures. Les bouviers (sic) ont donné à manger aux bœufs et tout le monde a déjeuné. A onze heures, j’ai fait avancer mon cuisinier à Roncevaux pour me préparer à souper. Je suis arrivé à huit heures et il m’y a fait trouver une bonne soupe, des côtelettes et de l’agneau à la broche. La couchée m’a coûté 22 lt. 10 s. (22 livres tournois et 10 sols).



Le Révérend Père Cano, trinitaire, qui était passé à Paris pour l'élection du Général des Mathurins, m’a rejoint vers les sept heures. Nous avons été voir ensemble l'église abbatiale. Roncevaux est une abbaye desservie par des chanoines réguliers au nombre de huit. Ils vivent tous séparément avec leurs ama et criadas. Les prébendes valent de 300 à 400 ducats la place. Mais l'endroit placé dans un fond, plongé (sic) partout par des montagnes très hautes, doit être humide et l’hiver fort triste. Roncevaux a une trentaine de maisons, celles des chanoines et des prêtres desservant l'église comprises. J'ai fait dresser, pour la première fois mon lit.



J'oubliais de remarquer que la Nive, qui passe à Bayonne, traverse Saint-Jean-Pied-de-Port et qu'elle a son origine dans les montagnes que j'ai traversées. Le père Cano, qui est venu par la route des chevaux, m'a dit avoir côtoyé presque toujours cette rivière qui fait des nappes d'eau très amusantes par le plus beau pays du monde. Il a fait, en cinq heures, le chemin que j'ai tardé à faire en dix heures.



Nous avons eu la pluie presque toute la journée ainsi que tous les autres jours depuis notre départ de Bayonne.



Le 4, mardi. Nous sommes partis de Roncevaux à six heures du matin pour aller dîner à Zubiri. Le chemin toujours par des gorges est fort mauvais. Il n'y a d'autre passe en Espagne, pour ce grand chemin, que celui que les eaux , en se faisant passage au travers des montagnes, ont frayé. On le trouve, en conséquence, chargé de toutes les pierres, que les eaux détachent des montagnes et charrient, et il y a des endroits où l'on se précipite comme sur des échelons. Depuis Roncevaux jusqu'à Pampelune, nous sommes venus par ce chemin. Les limites de la France et de l'Espagne, entre St-Jean-Pied-de-Port et Roncevaux, sont une petite barrière que le courant de l'eau a formée sur la hauteur, à une heure de chemin, avant d’arriver à Roncevaux et après laquelle le chemin se perd dans un bois. En côtoyant et tournant la montagne pour descendre, on trouve sur la route, entre Roncevaux et Pampelune, des petits bourgs tels que Burguete, presque au sortir de Roncevaux. J'ai été arrêté ici par des gardes de la douane qui m'ont demandé si j'avais des marchandises qui dussent des droits au roi d'Espagne. Je m'en suis délivré en leur donnant 2 lt. 10 s. En tournant le Burguete j'ai été complimenté par deux autres gardes qui m'ont fait le même compliment et que j'ai envoyé promener sur le chemin. J'ai trouvé un homme avec un fusil qui avait l'air d'un chasseur. Il s'est annoncé pour un gardien de la douane et il m'a demandé si j'avais quelque chose, ou mes domestiques, qui dût des droits. J'en ai été quitte pour un compliment. J'ai dîné ensuite à Zubiri, qui (sic) m'a coûté 16 livres 10 s. Entre Zubiri et Pampelune, le chemin est dans une vallée fort étroite où coule avec rapidité le torrent qui forme la petite rivière qui passe à Pampelune. La vallée est assez jolie, tout habitée avec des maisons semées çà et là, et bien cultivée. A Larrasoaña, village à une lieue de Pampelune, j ai trouvé des gardes de la douane qui m'ont harangué et, sur ce que j’ai tiré une pièce de 2 lt. 10 s. de ma poche pour la leur donner, l'harangueur m'a dit qu’ils n'étaient là que pour faire leur devoir et pas pour tirer de l’argent des passagers. En attendant, une main d'un jeune homme s'est approchée de moi sur laquelle j'ai fait tomber une pièce de 50 s. L’harangueur l’a grondé fort et lui a dit hardiment de me rendre l’argent, mais le jeune homme lui a répondu que le lui ayant donné volontairement, il pouvait le prendre. Sur cela, j'ai fait signe au voiturier d'aller.



Je suis arrivé à Pampelune à quatre heures. J'y ai fait acheter pour 13 lt. 10 s. de provision en viandes. La couchée m'a coûté, en tout, 14 livres.



J'ai été visité par M. le Chevalier de Bonac d’Aiguillon que j'ai fait placer au service d'Espagne dans les ingénieurs. Il est destiné à la place de Pampelune pour travailler sous M. Gilman, ingénieur, pour reconnaître et lever le plan du chemin, depuis Pampelune jusqu'à la frontière de France par St-Jean-Pied-de-Port. Il paraît que M. le marquis de Grimaldi étant venu par cette route, il y a été tellement cahoté qu'il a mis beaucoup de feu à la réparation de cette route.



Il y a trois routes qui débouchent de l'Espagne en France. L'une est celle de la poste à franc étrier et qui est le chemin des courriers qui passent par Vitoria et va déboucher à St-Jean-de-Luz. L'autre est celle qui de Pampelune va directement, et par le chemin le plus court, à Bayonne par Elizondo, Baztan et Ainhoa. Cette route est suivie par le commerce. La troisième est celle de Roncevaux qui va déboucher à St-Jean-Pied-de-Port et qui est suivie par les passagers qui vont en voiture. Des trois, la plus courte est celle du milieu que le commerce a suivie de tout temps. Elle a l'agrément d'être ouverte et praticable dans toutes les saisons, n'étant jamais arrivé, à cause des neiges, de voir fermer ce passage. Les Bayonnais désireraient infiniment que l'Espagne dirigeât sa nouvelle route par Ainhoa..."



A suivre...





Merci ami(e) lecteur (lectrice) de m'avoir suivi dans cet article.

Plus de 5 000 autres articles vous attendent dans mon blog :

https://paysbasqueavant.blogspot.com/


N'hésitez pas à vous abonner à mon blog, à la page Facebook et à la chaîne YouTube, c'est gratuit !!!

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire