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vendredi 19 juillet 2019

LA CHANSON DE ROLAND À RONCEVAUX EN NAVARRE AU PAYS BASQUE AUTREFOIS (première partie)


LA CHANSON DE ROLAND À RONCEVAUX.


La Chanson de Roland est un poème épique et une chanson de geste du 11ème siècle, comportant environ 4 000 vers.


LA CHANSON DE ROLAND RONCEVAUX
LA CHANSON DE ROLAND RONCEVAUX


Elle relate, trois siècles après, le combat fatal du chevalier Roland, marquis des marches de 

Bretagne et de ses fidèles preux contre une armée vasconne à la bataille de Roncevaux,  en 

représailles au pillage de Pampelune.



Je vous ai déjà parlé du chant d'Altabiscar dans un article précédent, voici ce que rapporta le 

journal Le Temps, dans son édition du 16 septembre 1900, au sujet de la Chanson de Roland, 

sous la signature de Gaston Deschamps :


"Commentaire de la chanson de Roland.


Roncevaux, le 10 septembre.



Il y a des noms qui sonnent fièrement, d’écho en écho, à travers les espaces infinis de l’histoire. Bouvines, Orléans, Rocroi, Fribourg, Fontenoy, Valmy, Marengo, Austerlitz, Iéna, Inkermann, Solférino prolongent de siècle en siècle un joyeux tumulte de victoire, où l’acclamation des clairons, l’orage des tambours et l’allégresse des vois humaines se mêlent au frisson des drapeaux déployés. C’est "le groupe ailé des Victoires". Ce sont les images radieuses qui jalonnent d’étape en étape la route triomphale de la patrie. 



D’autres noms, au contraire, ont une sonorité lugubre. Crécy et Poitiers racontent la détresse de l’oriflamme vaincue. Azincourt pleure sur la chevalerie humiliée. Pavie se lamente sur les déboires d’un roi captif. Rosbach se plaint de la noblesse de France. Waterloo évoque, en un tableau tragique, la formidable agonie de l’aigle impérial... 



Mais, sur les stèles funèbres qui commémorent nos calvaires et nos déroutes, il n’est point de nom plus triste que Roncevaux. 



la chanson de roland roncevaux
LA CHANSON DE ROLAND
PAYS BASQUE D'ANTAN


Charlemagne, empereur à la barbe fleurie, 

Revient d’Espagne. Il a l’âme triste. Il s’écrie : 

"Roncevaux ! Roncevaux ! O traître Ganelon !" 

Car son neveu Roland est mort dans ce vallon, 

Avec les douze pairs et toute son armée... 



Le val de Roncevaux est situé en Navarre, au versant des Pyrénées, du côté qui regarde l’Espagne, hors des frontières de France. Les Espagnols l’appellent Roncesvalles. C'est là, si nous en croyons une légende répandue dans toute la chrétienté, c’est là qu’a retenti, en un suprême appel de désespérance, le cor de Roland :


Le comte Roland sonne de l’olifant. — Hautes sont les montagnes et ténébreuses les vallées. La voix de l’olifant s’y prolonge. On entend l’écho répondre à plus de trente lieues. Charles et tous ses compagnons l’entendent. "Nos gens livrent bataille," dit le roi. — Mais non, dit Ganelon... 



Le comte Roland sonne de l’olifant. Il sonne avec tant d’effort et de peine et de vive douleur, que le sang vermeil jaillit de sa bouche, et que les veines de ses tempes éclatent. Le son de l’olifant porte si loin que Charles, qui passe aux défilés l’entend. Le duc Naymes et les Français s’arrêtent pour écouter... "C’est le cor de Roland !" dit le roi. — Mais non, dit Ganelon. Vous savez bien que, pour un lièvre, Roland va cornant toute la journée... 


chanson de roland roncevaux
ROLAND A RONCEVAUX



chanson de roland roncevaux
ROLAND A RONCEVAUX




Le comte Roland sonne de l’olifant. Il a la bouche en sang. La veine de son front est rompue. Il sonna, il sonne encore, à grand’douleur et grand effort. Charles et les Français l’entendent. Le roi dit : "Ce cor a longue haleine." Le duc Naymes répond : "Roland y est en peine. II y a bataille là-bas. Sire, le menteur qui parlait tout à l’heure, vous a trahi ! Allons, secourez votre maison. Vous entendez assez que Roland se désespère." 




Alors le roi fait sonner, sur toute la ligne : Halte !... Garde à vous... Rassemblement... Les cavaliers mettent pied à terre, afin de boucler leurs heaumes, leurs hauberts, et de ceindre leurs épées à pommeau d’or. Ils ont des boucliers très beaux, des pieux longs et forts, des gonfanons de soie vermeille, blancs et bleus. Les barons montent sur leurs hauts destriers et piquent des deux. "Pourvu, disent-ils, que nous retrouvions Roland encore en vie. Avec lui, nous frapperons de rudes coups !" Ils parlent ainsi. Mais à quoi bon ? Ils arriveront trop tard... 




C’est beau à voir, cette armée dans la clarté du matin. Les armes, bien fourbies, reluisent au soleil. Les hauberts et les heaumes brillent comme des miroirs et semblent jeter des flammes. Les boucliers sont enluminés de fleurs peintes. Les épieux d’acier ont l’air de flamber sous le ciel. Les gonfanons ont des reflets dorés. L’empereur chevauche, plein de colère. Les Français sont affligés et inquiets. Il n’en est pas un qui ne pleure amèrement et tous sont en grand alarme pour Roland. Le roi fait arrêter Ganelon... 





On sait l’affreux spectacle qui s’offrit aux regards des barons, lorsqu’ils arrivèrent dans le val de Roncevaux. Un pressentiment sinistre avait annoncé à l’empereur Charles les horreurs de ce carnage. Charlemagne pleura, et dit aux gentilshommes de sa suite : "Seigneurs, ralentissez le pas : il faut que j’aille en avant, car je voudrais trouver mon neveu. Un jour, à Aix-la-Chapelle, mes vaillants chevaliers racontaient leurs grandes batailles, leurs rudes et terribles assauts ; j’entendis Roland tenir ce propos que, s’il mourait en pays étranger, il tomberait, le brave ! en avant de ses soldats et de ses pairs, le visage tourné vers la terre ennemie, pour finir en conquérant." 




Les herbes et les fleurs des prés étaient toutes rouges du sang de nos soldats. Entre deux arbres, auprès d’une grosse pierre tout ébréchée, Roland gisait, sans vie, le corps meurtri de blessures fraîches. L’empereur descendit de cheval et courut vers son neveu, les mains tendues. Il le souleva de terre. Il le tint embrassé. Et puis, son angoisse fut si forte qu'il se pâma. Le due Naymes accourut, avec le comte Ancelin et Geoffroy d’Anjou. On soutint Charles. On le fit asseoir sous un pin. Dès qu’il revint à lui, il murmura d’une voix faible, entrecoupée par les sanglots : "Ami Roland, Dieu t’ait en sa merci ! Jamais homme n’a vu ici-bas un chevalier tel que toi, pour engager et terminer les grandes batailles. Hélas ! ma gloire est à son déclin !" Et Charles se pâma encore. Lorsqu’il reprit ses sens, il regarda son pauvre neveu, si pâle, la bouche ouverte, les yeux tournés... Alors il soupira tendrement : "Ami Roland, que Dieu fasse reposer ton âme sur les saintes fleurs du Paradis ! Quel malheur que tu sois venu en Espagne ! Il ne se passera plus un seul jour sans que je pleure... Ah ! qui sera désormais le soutien de mon empire ? Je ne me connais plus sous le ciel un seul ami !" Et il tirait, en signe de deuil, sa barbe plus blanche que l’aubépine. 





chanson de roland roncevaux
ROLAND A RONCEVAUX



Le duc Naymes dit gravement : "Charles a une profonde douleur !"





 — Sire empereur, dit Geoffroy d’Anjou, ne vous désolez pas comme cela ! Faites plutôt rechercher les cadavres des Français que les gueux d’Espagne ont tués par félonie, et ordonnez qu’on les porte dans une fosse.



— C’est juste, dit l’empereur. 

 

Les Français morts à Roncevaux furent bénis et absous par les évêques, abbés, moines, chanoines, prêtres tonsurés qui suivaient l’armée. On brûla de l’encens et de la myrrhe en leur honneur. On les enterra. Et puis on les abandonna. Que pouvait-on faire de plus ? Charles voulut, qu’on mît à part son neveu Roland, ainsi que le Comte Olivier et l’archevêque Turpin. Il ordonna qu’on recueillît leur cœur dans un drap de soie. Ensuite Thibault, Guépin, le comte Milon et le marquis Othon firent frotter de vin et de piment les corps de ces trois vaillants hommes. On les enveloppa dans des suaires de peau de cerf et on les chargea sur trois charrettes. Car l’empereur avait résolu de leur accorder une sépulture digne de leur gloire. 




Un pèlerinage au cimetière illustre où furent occis tant de preux est un devoir pour un critique littéraire qui peut être amené, par ses obligations professionnelles, à commenter la Chanson de Roland. 




J’ai donc pris le train de Bayonne à Saint-Jean-Pied-de-Port. La voie ferrée monte insensiblement vers les Pyrénées, le long d’une vallée verdoyante où coupent les eaux claires de la Nive. Un magnifique soleil d’été répand une lumière admirablement limpide sur les coteaux, parés de bruyères en fleur, sur les champs étoilés de pâquerettes, sur les collines que couronnent des façades blanches et des toits rouges. La locomotive va si lentement et s’arrête si souvent, qu’on ne manque point de loisir pour regarder le paysage. Les bois de Berniots et d’Ustarits recèlent des châteaux charmants, dont la blancheur transparaît à travers le feuillage et dont les tourelles, effilées par des toits pointus, dominent les vastes futaies. Ce chemin de fer traverse des villages et des bourgs dont les noms bizarres, inattendus, dépaysent l’esprit habitué aux vocables du pays de France. L’harmonie rauque de la langue basque retentit, aux stations, dans les noms proférés par l’intonation gutturale de M. le chef du train. J’entends : Alsou, Itxassou, Ossès, Louhossoa... Qu’est-ce que cela veut dire ? Mystère. 





basse navarre autrefois
GARE ST MARTIN ARROSSA OSSES
PAYS BASQUE D'ANTAN



Pour comprendre ces syllabes inouïes, il faudrait savoir aussi bien que M. Julien Vinson ou que le chanoine Adéma le difficile langage des Eskualdunacs (c’est ainsi, dit-on, que les Basques se désignent entre eux). Si les noms de ces bourgades et de ces hameaux, Hiribéhère, Haursam, Iatalatzia, Ourrouspouroucoborda, nous étonnent et nous déconcertent, quel ne dut pas être le désarroi des Francs, compagnons des Charlemagne, lorsqu’ils essayèrent d’échanger quelques paroles (ne fût-ce que pour des questions de logement ou de fourrage) avec les Ibères, les Vascons, les Euskariens et les Cantabres !... Cette vallée de la Nive a vu passer beaucoup de conquérants, de touristes, de vagabonds, de colporteurs, de commis-voyageurs, toutes les variétés de l’éternel chemineau. C’est un des chemins par lesquels on s’aventurait jadis vers les châteaux en Espagne. Combien de carrosses royaux, de roulottes foraines, de voitures régimentaires ont démarré, cahin-caha, sur ce sable et sur ce gravier, près de la rivière claire !... Maintenant, les automobiles et les pétrolettes emplissent de fumée, de bruit et de frivolité le recueillement de ces solitudes. Rien cependant ne peut détacher les Basques du sol antique et des coutumes héréditaires où les siècles, en s’écoulant, ne font que les enfoncer et les enraciner davantage. L’établissement thermal de Cambo, avec son arrivage annuel d’étrangers cossus, ne réussit pas à gâter l’originalité du caractère local. L’autochtone, l’homme en béret, le Basque fidèle à la terre natale, ne semble pas avoir changé d’âme depuis le traité des Pyrénées... En associant à son couvre-chef national les couleurs, un peu tristes, des confections modernes, il n’a modifié ni ses gestes, ni ses préjugés ni son parler. Le Guide Joanne affirme que la Biscaye est le seul pays du monde où l’on trouve, sur les lèvres humaines, des mots comme ceux-ci : Ochogorriganamendi, Dancharriaénéa, Larratécohéguya, Azpilcuetagaraycosaroyarenbérécollaréa... 




tourisme pays basque
GUIDES JOANNE 1912


Les compagnons de Charlemagne, en dévalant sur les pentes de Saint-Jean-Pied-de-Port, auraient voulu, sans doute, entendre un langage moins malaisé à comprendre et à prononcer. Ils aspiraient, de tout leur cœur, au charme de la "douce France". 




Saint-Jean-Pied-de-Port éparpille ses maisons blanches parmi des vignes et des peupliers, dans un décor de prairies fraîches et de montagnes vertes, près du confluent où les trois Nives, unissent leurs eaux. Depuis que ce défilé des Pyrénées a cessé d'être un coupe-gorge ou une souricière, cette coquette cité a pu déborder sa ceinture de remparts, comme une jolie fille qui s’échappe, en riant, hors de son corset. Les fortifications de Vauban ne servent plus qu’à rehausser d’un accessoire pittoresque la tranquillité de ce chef-lieu de canton. Ce port (ou passage) des invasions n’est plus qu’un rendez-vous d’alpinistes ou de muletiers. 





basse navarre autrefois
PASSAGE A LA DOUANE ST JEAN PIED DE PORT
PAYS BASQUE D'ANTAN


J’entre dans la ville, par une grande porte, dont l’ogive encadre un mulet blanc, caparaçonné de sparteries écarlates et de sonnailles argentines. Cette bonne bête semble avoir été postée en ce lieu par un peintre ethnographe, comme avant-courrière de l’Espagne prochaine. Une rue pavée, montante, étroite, me mène, en droite ligne, à l’autre issue. Mon guide, arrivé au haut de ce raidillon, me conseille de retourner la tête, afin d’admirer la perspective des maisons en surplomb, que domine un clocher de granit rose."




A suivre...


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