LE VOL DU TRÉSOR DE PAMPELUNE EN 1935.
En 1935, a lieu un événement très important dans la capitale de la Navarre : le vol du "trésor" de la cathédrale Sainte Marie.
JOSE OVIEDO DE MOTA SUSPECT DU VOL DU TRESOR DE PAMPELUNE |
Voici ce que rapporta la presse à ce sujet, dans le journal Paris Soir, le 18 août 1935, sous la
plume de Louis Delaprée :
"Le vol du trésor.
Entre ses remparts Pampelune unanime bouillonne de colère... contre José Oviedo de Mota.
Comte de noblesse incertaine mais escroc incontestable, il avait gagné la confiance des habitats
et du clergé par l'édifiant spectacle de sa piété.
Pampelune, 17 Août (par téléph.)
Pendant que toutes les polices d'Europe cherchent le comte Oviedo de Mota, dont la noblesse est incertaine et les méfaits incontestables, Pampelune tout entière, avec ses cireurs de bottes, ses mendiants aveugles, ses mantilles et ses yeux noirs, bouillonne de colère entre ses remparts couleur de mirabelle.
Dans les jardins de la Taconera, les éventails ont arrêté leur palpitation d'oiseaux captifs. De la citadelle à la basilique Saint-Ignace, on ne parle que de la cathédrale pillée. Les chaisières jurent comme des muletiers. Les prêtres passent en serrant les lèvres sur une moue de rage froide.
CHAPELLE CATHEDRALE STE MARIE PAMPELUNE PAYS BASQUE D'ANTAN |
José a volé le trésor, José ce saint homme, si pieux, si généreux pour les bonnes œuvres et les couvents, José s'est sauvé en France avec toutes les richesses de la cathédrale — plusieurs millions de pesetas au poids de l'or et des pierreries — après avoir trompé le Chapitre, l'archiprêtre, les confréries et le bedeau lui-même.
Que les ciboires, les croix, les ostensoires, qui depuis la fondation de la cathédrale par Charles III de Navarre en 1397, s'étaient déposés sur les rayons de la sacristie comme des sédiments au fond des mers, aient été vulgairement barbotés par un escroc international, c'était déjà une catastrophe pour Pampelune. Mais que l'auteur du cambriolage ait été justement José Oviedo de Mota, qui tous les jours faisait deux chemins de croix, lustrait son pantalon en prières, édifiait les nonnes par ses génuflexions et confondait les théologiens par ses connaissances, cela est trop, vraiment trop. Pampelune ne peut point le supporter. Le vol prend l'horreur de la trahison et bien des cœurs dressent en secret un autodafé pour le comte.
— Mais comment diable a-t-il fait, dis-je au bedeau, pour vous tromper ainsi ?
Le concierge de la maison du Seigneur, aux joues de reps bleu, fixe sur moi un sombre regard navarrais.
— Il est venu. Il s'est installé modestement, mais il a dépensé avec faste. Il donnait deux pesetas au "limpia bottas" (cireur), des vêtements aux galopins et des culottes aux petites filles trop court vêtues. Il parlait des courses de taureaux comme personne. Mais c'était son seul divertissement profane. En dehors de cela, il n'y avait pour lui que la religion. Du matin au soir, il était à la cathédrale. Bien souvent, la nuit tombée, je le trouvais effondré dans la pénombre d'une chapelle. Il poussait de gros soupirs et j'avais presque peur en regardant ses yeux écarquillés où l'on voyait remuer la lueur des cierges. Ah ! monsieur, comme il nous a trompés ! Tenez ! je sais que je fais un péché, mais tant pis. Je souhaite que le comte meure à l'instant même, sans confession et qu'il soit damné !
CATHEDRALE STE MARIE PAMPELUNE TOMBEAU DES ROIS DE NAVARRE PAYS BASQUE D'ANTAN |
Le bedeau me montre alors d'un doigt maigre les profondes armoires vidées par une main sacrilège, puis les vitraux aux jointures de plomb descellé.
— Mais à quoi bon aurait-il joué cette comédie de la piété, puisque le vol a été commis avec effraction ?
— Ses complices ne sont peut-être pas entrés dans la sacristie, señor periodisto. C'est lui qui leur a passé le trésor par ce trou dans le vitrail. Les gens de la Seguridad (la Sûreté) m'ont dit qu'il opérait toujours ainsi.
C'est vrai, ce vol porte bien la même marque que les cambriolages ou les tentatives de cambriolages de Mota — énumérés hier par "Paris-soir" à Bergame, Caravaggio et Rome.
JOSE OVIEDO DE MOTA "JE N'AI PAS VOLE LE TRESOR" |
Mais José de Motà, pilleur d'églises, n'est pas un banal malfaiteur spécialisé dans l'effraction des sanctuaires. Vous allez voir que c'est aussi un redoutable théologien.
Le cambrioleur pourvoyeur de l'inquisition.
Pendant que j'examinais la façade plâtrée sur l'illustre cathédrale par un architecte du XVIIIe siècle qui crut l'embellir et ne réussit qu'à se déshonorer, un prêtre passa.
CATHEDRALE STE MARIE PAMPELUNE PAYS BASQUE D'ANTAN |
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