LE BILÇAR D'USTARITZ.
Le Bilçar (ou Biltzar) est une assemblée représentative du Labourd qui a existé pendant des siècles et perduré jusqu'en 1789.
Je vous ai déjà parlé du Bilçar d'Ustaritz, dans deux articles précédents, le 13/05/19 et le
13/06/19.
Voici ce qu'en raconta, en 1906, P. Yturbide, dans la Revue Internationale des Etudes Basques :
...Le sujet le plus fréquent des réunions était l’examen des impositions générales à payer au Trésor royal, et les charges spéciales que le Bilçar votait et, autorisait dans l’intérêt commun du Pays.
Les impositions générales étaient fixées par un abonnement discuté par le Bilçar, c’est-à-dire par une somme invariable remise chaque année aux agents du Trésor. Cette somme était répartie sur toutes les paroisses au prorata de leur population. L’abonnement se renouvelait en général tous les six ans.
Les charges spéciales au pays comprenaient certaines dépenses locales telles que : l’entretien des ponts et des routes, la poursuite des malfaiteurs, la subsistance des prisonniers, la fontaine de Cambo ; les procès que le Syndic était chargé de soutenir, l’envoi à Saragosse des indigents fous ou aliénés, les députations envoyées au roi pour les affaires du Pays, etc.
La préoccupation constante du Bilcar était de ne pas augmenter les charges qui pesaient sur le Labourd. On le voit lutter énergiquement contre les employés des Fermes, et leurs empiétements ; contre l’établissement de nouveaux impôts, contre la création du monopole des Tabacs. En général, il se montre intraitable quand le Syndic lui propose des dépenses nouvelles. Une fois il refuse la réfection du pont de Cambo, un autre jour il repousse le projet d’une route entre Bayonne et Bidache. Enfin, il décide de ne pas contribuer à l’impression d’un livre intitulé : Labourdiri Escouararen Hastapena, composé en latin et en basque par d’Etcheverry, médecin à Sare, et approuvé par le curé dudit lieu.
En résumé, on pourrait dire du Bilcar qu’il était le trait d’union de toutes les communautés du Labourd, et l’organe de toutes les assemblées capitulaires. Son rôle se bornait à constater ce qu’elles avaient décidé dans l’intérêt général du pays.
On comprend encore mieux ce qu’était en réalité le Bilcar, quand on a sous les yeux le compte rendu d’une de ses séances. C’est pour ce motif que je vais transcrire ici le procès-verbal du 18 novembre 1789. C’est ce jour-là que l’assemblée d’Ustaritz s’est réunie pour la dernière fois, après plusieurs siècles d’existence. On peut donc considérer le document qui va suivre comme son testament et l’acte de ses dernières volontés :
LETTRE DU ROI POUR LA CONVOCATION DES ETATS-GENERAUX POUR LE PAYS DES BASQUES 1789 |
"Du Mercredy ; 18 novembre 1789, à Ustaritz, au parquet et auditoire royal du Bailliage de Labourd, les sieurs maires-abbés, échevins, jurats et députés des Communautés dudit pays, assemblés en Bilçar, avec M. Pierre Eustache Dhiriart, syndic général dudit pays ; assistants MM. Jean de Hody, écuyer, lieutenant général, et Pierre Harriet procureur du roi ; sçavoir :
Urrugne, M. Martin Dornaldéguy, député.
Ascain, Martin Soubiet, maire abbé.
St Jean de Luz, Joseph Dolhabaratz, député.
Sare, Jean Miquetetz-Periz, jurat
Saint Pée, Victor Duhalde, jurat
Ahetze, Jean Duhart, maire abbé
Bidart, Martin Darguibel, maire abbé
Arbonne, Martin Garat, maire abbé
Arcangues, Jean Crutchet, maire abbé
Biarritz, André Lacadée, député
Anglet, Pierre Salenave, député
Ainhoue, Jean Damotz Urruty, jurat
Sourraïde, Jean Dolhagaray, député
Espelette, Betri Franchu, maire abbé
Itxassou, Jean Teilleri, maire abbé
Larressore, Dominique Darretche, maire abbé
Halsou, Bernard Jauretche, maire abbé
Cambo, Martin Duhart, maire abbé
Hasparren, Martin Larralde, jurat
Briscous, Jean Bidart, maire abbé
St Jean le Vieux (Mouguerre), Salvat Haran, maire abbé
Urcuit, Laurent Delissalde, maire abbé
St Pierre Dirube, Pierre Larre, maire abbé
Villefranque, Martin Darlas, député
Mendionde, Jean Larsabal, maire abbé
Macaye, Jean Sararguet, maire abbé
Guéthary, Gabriel Laffitte, maire abbé
Ciboure, Jean Detchevers, jurat
Louhossoa, Jean Larreteguy, maire abbé
Hendaye, Simon Amespil, maire abbé
Bardos, Robert Detchemendy, jurat
Urt, Pascal Dabadie, député
Guiche, Bertrand Hiriart, jurat
Bassussarry, Dominique d’Etcheverry, maire abbé
Ustaritz, M. Martin Mondutéguy, échevin
Ce requérant le sieur Syndic, le rôle des Communautés ayant été appelé par le greffier-secrétaire soussigné, et les réponses des Communautés du Pays aux propositions dudit sieur Syndic rapportées par les sieurs maires-abbés, jurats et députés lues par ledit greffier et les voix colligées, le résultat a été prononcé par mondit sieur le Lieutenant général :
1º Que le pays donne pouvoir audit sieur Syndic de prendre, avec tel nombre de députés qu’il choisira, les mesures convenables, pour empêcher l’exportation des grains hors du royaume et de faire un règlement à l’effet d’obvier aux fraudes qui pourraient se commettre.
2º Qu’il rejette la proposition de la noblesse relativement à sa réunion aux députés des communes.
3º Qu’il n’est pas d’avis de délibérer sur la retraite du député de la noblesse, pour n’y avoir aucun intérêt.
4º Qu’il adhère avec tout le respect et toute la soumission qu’il doit à l’Assemblée Nationale, à la contribution du quart des revenus qu’elle a décrétée, et promet de témoigner son zèle pour le salut de l’Etat par tous les sacrifices que ses facultés lui permettent de faire, et déclare rejeter la conversion de cette contribution en une somme fixe avec régalement sur toutes les classes d’habitants.
5º Qu’il donne plein pouvoir au sieur Syndic de solliciter de l’Assemblée Nationale la maintenue de sa constitution actuelle, et de lui demander, dans le cas qu’il ne puisse y réussir, à être réuni aux provinces de la Basse-Navarre et de la Soule seulement, avec cette condition néanmoins que les assemblées de Département seront alternées dans les trois provinces basques.»
6º Qu’il approuve le compte rendu par le sieur Haramboure précédent Syndic, lui interdisant par un arrêté particulier de la présente assemblée toute liquidation, jusqu’à ce qu’il ait satisfait à l’article 12 de l’arrêt du Conseil du 1er mai 1772, concernant la remise des titres et documents appartenant au Pays.
Le vœu formulé par le Bilçar, avant de mourir et de disparaître, ne fut réalisé qu’en partie. La constitution particulière du Labourd ne fut pas maintenue. Mais le Décret du 4 mars 1790, qui partageait la France en 83 départements, décida que le Pays Basque et le Béarn formeraient ensemble le département des Basses-Pyrénées. Pour la première fois, le Labourd se trouvait réuni à la Soule et à la Basse-Navarre, et rattaché à la même circonscription administrative.
CARTE BASSES-PYRENEES PAYS BASQUE D'ANTAN |
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