LE BILÇAR D'USTARITZ.
Le Bilçar (ou Biltzar) est une assemblée représentative du Labourd qui a existé pendant des siècles et perduré jusqu'en 1789.
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CHÂTEAU D'HAITZE LABOURD
PAYS BASQUE D'ANTAN |
Voici ce qu'en raconta, en 1906, P. Yturbide, dans la Revue Internationale des Etudes Basques :
...Aussi ne faut-il pas s’étonner qu’un écrivain basque de notre temps ait laissé déborder son enthousiasme et son patriotisme, en nous décrivant l’assemblée d’Ustaritz :
"Près de ce château (de Haïtze) on voit encore l’antique bois de chênes où se réunissaient jadis les états de Labourd. Cette réunion s’appelait en langue basque bilçar, ou assemblée des anciens. L’étymologie du mot bilçar est exactement la même que celle du mot, latin senatus. C‘est au bois de Haïtze que se rendaient les propriétaires, les chefs de famille pour régler les affaires administratives de toutes les communes du Labourd. Là, debout, adossés à des arbres séculaires, appuyés sur leurs bâtons de néflier, ils discutaient, ils délibéraient en toute liberté ; ils rendaient des décisions qui ont fait, plus d’une fois, plier la volonté des rois de France et de Navarre, en vertu des privilèges du Pays. Deux blocs de roche servaient de sièges au président et au secrétaire. Un autre bloc dont la surface avait été grossièrement polie, était la table sur laquelle s’inscrivaient les délibérations et les arrêtés pris par l’assemblée. L’origine du bilçar se perd dans la nuit des temps. On la croit antérieure à l’établissement du Christianisme parmi les Basques. Ce qui donne beaucoup de fondement à cette opinion c’est que les prêtres s’en trouvaient exclus, bien que le pays fût profondément religieux. Sans doute qu’on n’avait pas cru devoir toucher à la constitution primitive (du pays) qui réglait l’administration des affaires publiques.
Malgré toute la poésie de cette description, il faut bien reconnaître qu’une confusion s’est produite dans l’esprit de son auteur. Le Bilçar ne se tenait pas en plein air, comme les assemblées capitulaires des paroisses. Il se réunissait dans le château de Lamothe, qui était le siège du bailliage de Labourd, et qui est devenu aujourd’hui la mairie d’Ustaritz.
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CHÂTEAU DE LAMOTHE USTARITZ
PAYS BASQUE D'ANTAN |
Mais outre le Bilçar il y avait à Ustaritz l’assemblée locale et paroissiale, telle qu’on la trouvait dans les autres communautés. C’est elle, l’assemblée des habitants, qui se réunissait dans le bois de Haïtze; et ce qui le démontre c’est que cet endroit s’appelle encore capital-harria (la pierre du Chapitre). Or nous savons que le mot capitala, désignait spécialement les réunions paroissiales.
Une grande particularité à relever dans le Bilçar, c’est qu’il ne délibérait pas par lui-même. Les membres qui le composaient n’avaient pas à émettre des votes. Ils se bornaient à rapporter le vote de leurs communautés, et voici comment les choses se passaient dans les réunions d’Ustaritz :
Quand le Syndic du Pays croyait une convocation nécessaire, il en informait le Lieutenant du bailliage et lui soumettait le texte écrit de ses propositions, c’est-a-dire des questions qu’il comptait proposer à l’examen du Bilçar. Ce texte était soumis au visa du procureur du roi, qui pouvait faire opposition à tout ou partie des questions projetées. Cette opposition était fort rare. Quand elle se produisait et que le Syndic refusait de s’y soumettre, le différend était tranché par une Ordonnance du Lieutenant qui maintenait ou modifiait le texte présenté par le Syndic.
Une fois que les propositions étaient définitivement arrêtées, le Lieutenant fixait le jour de la réunion et le Syndic convoquait aussitôt les abbés des paroisses. Ceux-ci se rendaient au siège du bailliage, où le Lieutenant leur faisait connaître les propositions du Syndic. Les abbés repartaient alors dans leurs paroisses pour revenir à Ustaritz huit jours après.
Dans cet intervalle les assemblées capitulaires se réunissaient partout et votaient sur les propositions du Syndic. Quand au bout des huit jours les abbés revenaient au Bilçar, la séance s’ouvrait par l’appel des communautés. Celles qui n’avaient pas envoyé de représentant étaient condamnées à une amende de six livres. Le greffier lisait ensuite les réponses des paroisses telles que les abbés les avaient rapportées. Le Lieutenant en faisait le décompte et, suivant que la majorité des réponses se prononçait pour ou contre, les propositions du Syndic étaient adoptées ou rejetées. Le greffier du bailliage dressait le procès-verbal et le signait en prenant le titre de Secrétaire général du Pays de Labourd. Ce système avait cela de remarquable que chaque paroisse comptait pour une voix et que toutes les paroisses, grandes ou petites, avaient un droit de vote exactement pareil. En mai 1789, Espelette et Hasparren demandèrent qu’il fût tenu compte dans les votes de la population de chaque paroisse et de ses impositions. Mais cette innovation fut repoussée.
Il faut aussi noter le partage en deux séances de chaque réunion du Bilçar. Pourquoi appelait-on les abbés à Ustaritz pour leur faire connaître les propositions du Syndic ? Pourquoi ne pas envoyer à chaque paroisse le texte écrit de ces propositions ? Ceci ne peut s’expliquer que par l‘extrême répugnance que les Basques ont toujours eue pour écrire. Il me paraît certain que primitivement et avant l’Ordonnance de 1660, les propositions à soumettre au Bilçar n’étaient jamais écrites ; que les abbés venaient à Ustaritz pour les entendre de vive voix, et que c’est aussi de vive voix qu’ils rapportaient leurs réponses. Plus tard l’usage des deux séances fut maintenu en vertu de cet attachement à la tradition qui est inhérent au caractère basque.
Une autre différence entre le Bilçar et les assemblées analogues du Béarn, de la Soule et de la Navarre, c’est qu’il n’y avait rien de fixe ni de régulier dans ses réunions. Le Syndic du pays le convoquait quand il le jugeait convenable, ou quand plusieurs communautés lui en faisaient la demande. En fait, le Bilcar se réunissait deux ou trois fois par an, d’ailleurs aux époques les plus différentes. Il y a eu même des années où il ne s’est pas réuni du tout."
Bayonne, octobre 1906.
P. YTURBIDE."
A suivre...
(Source : WIKIPEDIA et http://www.euskomedia.org/PDFAnlt/riev/01/01074083.pdf)
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