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dimanche 9 juin 2019

L'ÉMIGRATION BASQUE AU MAROC EN 1917


L'ÉMIGRATION BASQUE AU MAROC EN 1917.


Après l'émigration aux Amériques, d'autres pays, en Afrique, proposent, au début du vingtième siècle, des possibilités d'émigration aux Basques.


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PLACE DE FRANCE CASABLANCA MAROC 1917


Voici ce que rapporta la Gazette de Biarritz-Bayonne et Saint-Jean-de-Luz, dans son édition 

du 25 septembre 1917, sous la plume de Eugène Plantié.



"Société de Colonisation Basko-Marocaine.




La Gazette de Biarritz est heureuse de compter désormais parmi ses collaborateurs le nom de M. E. Plantié, ancien préfet. Voici le premier article qu’il veut bien nous envoyer et que nos lecteurs liront avec beaucoup d’intérêt : 



Les ouvrages des Reclus, des Segonzac, des Brives, des de Foucauld, etc., etc., sont fort intéressants à consulter au sujet du Maroc, mais ils sont incomplets sur certains points. Seule, la monographie de la Chaouia, par le lieutenant Segonds, qui date de 1909, forme un tout complet. Cette œuvre, publiée par la "Revue de la Société de Géographie de l’Afrique du Nord", peut être consultée avec fruit par tous ceux qui s’intéressent au développement de nos colonies. Aussi, nous proposons-nous de la reproduire intégralement, dans l’organe que nous créons sous le titre du "Poilu Colonial", qui s’applique plus particulièrement à nos Poilus du 18me corps, mais qui vise aussi bien l’ensemble de nos Poilus dont les regards après la guerre, se tourneront vers la colonisation africaine. Comme nous l’écrivait récemment l’excellent rédacteur de la "Frontière", M. Bley, si compétent et si dévoué au pays basque : "La terrible guerre que nous subissons, aura toutefois ce résultat de détourner le courant d’émigration basquaise, de l’Argentine, de l’Uruguay, du Chili et du Canada, et d’attacher à nos plateaux africains une race qui a fait la richesse et la prospérité de l’Amérique du Sud.



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COLONIE DE MATMATA MAROC 1917

Cette phrase contient tout un programme que nous voulons réaliser de point en point.




Les progrès économiques et politiques prévus par le lieutenat Segonds, se sont réalisés à la lettre au Maroc. Tous ceux qui ont suivi les rapports si intéressants du général Lyautey, sont édifiés à ce sujet. Les "Etudes", de M. Paul Leroy-Beaulieu, les conférences faites à l’exposition de Casablanca, en 1915, le remarquable exposé de René Besnard, actuelle ment sous-secrétaire d’Etat à la Guerre, enfin le rapport général sur la situation du Maroc, au 31 juillet 1914, par le résident-général, toutes ces intéressantes publications prouvent que le protectorat a atteint son but : la pacification et l’organisation des régions les plus importantes du Maroc et qu’il ne reste plus qu’à lui envoyer le nerf de la vie économique : le colon robuste et travailleur. 





Un des historiens les plus compétents du Maroc, observateur attentif et très averti, féru des questions de colonisation qu’il a mûrement étudiées en Algérie et en Tunisie, vient de publier un gros volume qui est à lire en entier, car il se lit avec la plus extrême facilité, malgré son format, tant il est clair et précis. 





Des faits économiques et des observations qu’ils ont inspirées à M. Victor Piquet, on peut conclure que le Maroc, et plus particulièrement la Chaouia, forment le pays rêvé pour une œuvre de colonisation entreprise avec le concours des Basques. Ceux-ci ont fait leurs preuves dans l'Amérique du Sud (es Amériques) ; ils ont manifestement créé la plus belle des colonies françaises et qui n’a pas coûté un centime à la mère-patrie. 


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GARE DE BER RECRID MAROC 1917



Nous nous exprimons mal, en disant que l’exode des Eskualdunac, n’a rien coûté à la métropole ; car le départ en quelques années de près de cent mille de ses enfants, les plus robustes et les plus intelligents, n’a pas été sans dommages pour la France. Et cependant, le chiffre de la population n’a guère changé dans notre pays basque, tandis que cette population diminuait si dangereusement pour nous sur l’ensemble du territoire. C’est dire quelles sont les ressources de vie et d’énergie que renferment nos montagnes délicieuses, et c’est tracer à nos compatriotes la voie qui aurait dû être suivie depuis la conquête de l’Algérie, c’est-à-dire, capter, suivant la parole de Lucien Bley, le courant d’émigration basque et le rendre doublement favorable aux émigrants et à la mère-patrie. 




Un des hommes qui, avec Chako, Etcheverry et Bley a le mieux compris le pays basque, M. Pierre Lhande, écrivait en 1910 : 

"En ce qui concerne la France, je dois avouer que je n’arrive pas à me convaincre que l’émigration a été pour elle un bien. Elle lui a fourni l’occasion d’accroître son commerce avec l’Argentine, c’est vrai ; elle a tiré une certaine gloire de la gloire de ses enfants, les colonisateurs de la pampa, c’est encore vrai. Mais qu’est cela, en regard de la double perte militaire et économique de quatre-vingt dix mille paysans dont la plupart eussent fait d’excellents soldats ou eussent aidé à l’expansion d’une saine et belle race, dans l’intérieur du pays, à l’accroissement du commerce, surtout au progrès de l’agriculture ?" 



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COURSE PEDESTRE RABAT MAROC 1917



Au lendemain de la guerre, la question de l’émigration basquaise se posera avec plus de force que jamais. Plus de 3 000 émigrants sont accourus au secours de la mère-patrie qui ne peut les laisser repartir en Amérique ; car, écrit M. Lhande : "Le jour où l'Argentine, à l’exemple du Canada, se mettra à subdiviser la propriété et à vendre par petits morceaux des terrains à bâtir, les Basques y accourront par milliers et sans esprit de retour cette fois. Qu’on y prenne garde !"




C’est donc à nous, Français, de constituer ce que les Anglais appellent le "homestead" et de fixer ce foyer sur notre propre sol. Le Basque, avec ses qualités de travail, son attachement à sa famille et à sa religion, aura tôt fait de transformer le Bled, comme la Pampa, en terre française. 




Certes, les conditions économiques que présentait le Maroc en 1909, époque où nous avons rédigé notre premier rapport, ne sont pas les mêmes en 1917. On pouvait, à cette époque déjà lointaine, acheter une propriété de 200 hectares aux portes mêmes de Casablanca, avec un cheptel de cent porcs, pour la somme de 15 000 francs. Mais le protectorat a intérêt à favoriser l’introduction des Basques au Maroc et les terres Makhzen (domaine de l’Etat) sont nombreuses et fertiles dans la Chaouia et dans toutes les régions, du reste. 



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LABOURAGE A VAPEUR EN CHAOUIA 1929

La question du cheptel, si angoissante en ce moment, se posera avec la même acuité, au lendemain de la guerre. Or, le Basque est l’éleveur par excellence ; il est le "saladero" rêvé, et c’est lui qui a le premier utilisé le froid pour la conservation des viandes. 




Le Maroc offre, à ce point de vue, la perspective la plus complète et la plus réelle qu’on puisse souhaiter. L’Oum-er-Rbia, le fleuve que Segonds appelle la "Mère du Printemps", se nomme réellement la "Mère des Pâturages", et ce cours d’eau considérable mesure, dès sa naissance, 50 mètres de largeur et plus de 100 mètres, bien avant de son embouchure. On voit, dès lors, nos Basques sous un climat égal au leur, à l’abri du sirocco si redoutable, sélectionnant les races bovines et ovines et dotant, à bref délai, ce pays d'une organisation pastorale et agricole que les frères Mannesmann avaient déjà mise en œuvre au profit de l’Allemagne. 



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PONT SUR OUM ER RBIA MAROC 1913

Les routes sont percées au Maroc ; les chemins de fer à voie étroite sillonnent le pays ; la petite propriété, celle qui intéresse nos Basques (100 h.), s’est développée merveilleusement ; la jonction de nos forces militaires à Taza assure la sécurité complète du pays. 




"En 1907, écrit M. Victor Piquet, quand nous prîmes pied pour la première fois au Maroc Atlantique, il y avait en tout, dans la partie du Maroc qui constitue aujourd’hui le protectorat français, 250 à 300 Européens résidant pour la plupart à Casablanca. En 1911, deux mille Européens résidaient dans la partie du Maroc qui constitue la "zone française." 


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HÔPITAL MILITAIRE FEZ MAROC 1917



A Casablanca, la progression fut d’une rapidité sans exemple ; de moins d’un millier d’Européens en 1907, on passe, en 1908, à 3 200, et en 1912, à 5 700 ; en 1913, on monte brusquement à 22 000, pour atteindre 30 000, au début de 1914, et 31 500 en 1915. 




L’après-guerre sera le moment le plus favorable pour aider au développement de la colonisation française au Maroc. Sur 48 555 émigrants, les Français ne comptent que pour 26 085. C’est un chiffre qu’il faut augmenter nécessairement, tout en se gardant , de certaines pratiques coloniales qui consistent à présenter de brillantes statistiques, sans que leurs auteurs se préoccupent de l' "humus humain" qui fait souvent les frais d’une colonisation plus hâtive que réfléchie. 




Nos Basques, désormais rompus au métier des armes par la guerre, et naturellement guerriers comme tous les peuples qui portant la veste courte (les Vendéens, les Mexicains), formeront un noyau de colons susceptibles d’habiter, si cela est nécessaire, les régions les plus dangereuses, car, au lieu d’être gardés comme certains colons de certaines colonies qui ne vivent qu’en tremblant et en récriminant contre ce qu’ils appellent, par un néologisme plus ou moins heureux, l'insécurité, ils se garderont eux-mêmes, et constitueront leur propre gendarmerie. 



MARRUECOS ANTES
REVUE DES COMBATTANTS MAROC 1917



Dans ces conditions, il sera aisé, par la suite, à moins que la société des nations n’ait aboli les guerres, de rétablir au profit des Basques, les conditions avantageuses consenties aux colons au début de la conquête de l’Algérie et de ne les astreindre qu’à de très légères charges militaires. Or, le service militaire étant la cause principale de l’émigration, basquaise dans le Nouveau-Monde, on se rend compte aisément des résultats heureux qui suivront l’exode de nos Eskualdunac, vers un pays où le maïs, le sorgho, la vigne et le coton lui-même poussent avec la plus grande abondance et où les forêts et les prairies naturelles abondent, tandis que le greffage des oliviers peut encore augmenter ces immenses ressources. "



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