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mardi 25 juin 2019

LE "TORO DE FUEGO" À HENDAYE-HENDAIA EN LABOURD AU PAYS BASQUE EN AOÛT 1929


LE "TORO DE FUEGO" À HENDAYE EN 1929.


La coutume du "toro de fuego" est très ancienne au Pays Basque.

labourd autrefois
COUCHER DE SOLEIL HENDAYE 1929
PAYS BASQUE D'ANTAN

Voici ce que rapporta à ce sujet le journal L'Intransigeant, dans son édition du 22 août 1929, 

sous la plume d'Henry Musnik :



"Réjouissances au pays basque.


Hendaye, août 1929 (de notre envoyé spécial).



 — Le soleil a jeté ses derniers feux, dans sa splendeur coutumière, derrière le mont Jaizquibel, de l’autre côté de la Bidassoa, vers Fontarabie, en Espagne. Le ciel devenu rose, puis violet, s’est teinté de bistre et le phare du Cap Figuier à allumé son pinceau tournant. 



Dans les rues escarpées d’Hendaye, une foule joyeuse s’en va lentement vers la place. 



Grandes réjouissances ce soir !... Le Toro de Fuego (le taureau de feu) et le fandango puis l'arin-arin (cette dernière danse dont le nom, en basque, signifie léger-léger — n’est-ce pas charmant ?... tout à fait typique...) 



Le kiosque à musique est déjà peuplé de jeunes gens à la chemise blanche, à la boïna (béret basque) rouge. Les garçons et les filles ont mis leurs plus beaux atours. Hélas ! trop de talons hauts, de cheveux coupés et de robes "à la mode". Trop de pantalons larges et de cheveux gominés... Cependant, ici et là, des sur sauts de couleur locale. Les bérets sont encore légion — mais peut-être parce que Paris les mit à la mode ? — et les grandes blouses noirs qui tombent jusqu’aux genoux sont arborées par de grands gaillards au visage tanné et aux traits comme creusés au couteau dans quelque souche. 


pays basque autrefois
KIOSQUE A MUSIQUE HENDAYE
PAYS BASQUE D'ANTAN

Et, quel bonheur ! beaucoup d'espargates aux pieds. Les espargates, ce sont les espadrilles. Demandez beaucoup de concessions à un Basque, mais ne lui demandez pas de trahir ses espargates... Surtout quand il s’agit de danser !... Et ce soir, la danse est reine... 



Neuf heures et demie... Les étoiles se sont allumées au ciel. Il y a des masses grouillantes sur la place. Cris... Rires... Interpellations joyeuses... La vieille église d’Hendaye qui découpe sa tour noire sur le bleu sombre du ciel voit envahir peu à peu son parvis, de commères et de brave vieux qui s'installent à l’envi sur un mur bas. Des petits enfants dont certains braillent avec des coups de gorge extraordinaires, sont tenus dans les bras. Que fait donc là cette marmaille dont la place, à cette heure, serait au lit ?... 


labourd autrefois
PLACE DU MARCHE ET EGLISE HENDAYE
PAYS BASQUE D'ANTAN

Hé, pardi ! Les petits veulent voir le Toro de Fuego, tiens ! ... 



Mais, enfin... qu’est ce Toro de Fuego qui revient sans arrêt dans toutes les conversations, qui fait briller les yeux et provoque des frissons de plaisir et de peur, à l'avance ?... 




toro de fuego pays basque autrefois
TORO DE FUEGO
PAYS BASQUE D'ANTAN

— Patience ! me dit la jolie Basquaise qui me guide. Vous allez voir ! 



Le dixième coup de dix heures a retenti au clocher. 



Un homme est venu dire quelque chose à l’oreille du chef d’orchestre, lequel a souri. La musique a entamé un air endiablé. La foule qui depuis quelques minutes venait voir à chaque instant où en était la cérémonie du Toro, assiégeant la porte de la mairie, derrière laquelle il se passe quelque chose, mais qui reste obstinément fermée, se remet à tourbillonner, et... trois pétards énormes éclatent coup sur coup. 



Hurlements de joie... Fuite éperdue... Comme une fourmilière dans laquelle quelqu'un aurait donné un coup de pied, la place, en un instant, est sillonnée d’êtres affolés qui courent dans tous les sens, se heurtent, se bousculent, se repoussent et continuent...



Fausse alerte. Le Toro de Fuego n'est pas encore sorti. Tout ceci est destiné à surexciter, comme il convient, les nerfs de la foule, pour obtenir un paroxysme, tout à l’heure, quand il bondira en avant. 



Les danses ont repris, une fois de plus. Je commence à m’énerver. Je tape du pied. Je fais la moue : 

— Va-t-il venir, oui ou non ?... 



Et ce que je ressens, nous sommes des centaines, peut-être bien deux ou trois milliers à l’éprouver.




La porte de la mairie s'est ouverte, soudain, à deux battants. Un être fantasmagorique en a jailli, cornes en avant. 




— El Toro !... El Toro !... 



Ça y est !... Voilà le Toro de Fuego !... 



Il porte tout un attirail de feux d’artifice sur le dos, et d’énormes fusées jaillissent à droite et à gauche, faisant une pluie d’étoiles de feu autour de lui. 



Certes, ce n’est qu’une carapace, sous laquelle deux hommes de bonne volonté de bonne volonté ! Que dis-je ?... Ils ne céderaient pas leur place pour un billet de mille francs chacun ! — cavalcadent, s’inclinent, sautent à droite et à gauche, et traversent de préférence, les groupes do danseurs. 



Et Pssch !... Psschpscchpssch !... Les fusées, les soleils, les chandelles romaines s’allument tour à tour, et les gens se pâment, et les danseurs se cassent en deux, et les danseuses se trouvent quasi-mal... C’est que l’énervement, la surprise, la suggestion de la foule aidant, il est diabolique, ce taureau qui s’acharne à poursuivre ceux qui le craignent !... Vous l’avouerai-je ?... Quand il est arrivé au galop devant moi, je n’ai fait ni une ni deux. J’ai détalé comme un rat !... Comme tout le monde !... Mais déjà le taureau était loin, ailleurs, provoquant de nouvelles et sensationnelles paniques !... 



Bref, cela dure une demi-heure environ. Et puis la carcasse est placée sur une table et le bouquet final du feu d’artifice est tiré parmi les bravos et les acclamations. Une sorte de couronne monte en tourbillonnant d’entre les cornes de la bête et patapoum !!! C’est son âme qui éclate là-haut, faisant fuir une chouette affolée qui s’était réfugiée près des cloches de la tour. 



La joie est à son comble. La fête ne fait que commencer. 



En place pour le fandango et l’arin-arin !... (A suivre.) ."







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