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lundi 12 août 2019

LE CARABINIER DE RONCEVAUX - ORREAGA EN NAVARRE AU PAYS BASQUE EN JANVIER 1932


LE CARABINIER DE RONCEVAUX EN 1932.


Roncevaux (Orreaga en Basque) est un village frontière, lieu de passage, entre la Navarre et la Basse-Navarre


DOUANE RONCEVAUX 1905
PAYS BASQUE D'ANTAN



Voici ce que rapporta à ce sujet la Gazette de Bayonne, de Biarritz et du Pays Basque, dans son 

édition du 9 janvier 1932, sous la signature d'Hervé Lauwick :


"Le carabinier de Roncevaux.



En ce temps, où chacun souhaite la paix, les guerres de tarifs, causes prolifiques de combats véritables, se font plus vives, et de tous côtés, l’on renforce le douanier. Si nous demandions l’autre jour la modification de l’article 24 de la loi aérienne, c’est qu'aucun texte de ce genre ne peut empêcher l’aviateur de mauvaise foi de déposer ce qu'il voudra, où il voudra, au risque d’être en contravention, ce dont il se moquera bien s'il est malhonnête. Que ne traite-t-on l'avion privé comme le canot à moteur, auquel il ressemble légalement à tous les points de vue ? 




Le douanier est pratiquement désarmé centre l'avion. Mais le douanier terrestre est redoutable, et c’est toujours un amusement nouveau pour nous que de passer des frontières, rien n’étant plus facile et plus drôle, que de juger les peuples dès ce premier accueil. En comparaison, de la façon dont on était reçu naguère en Allemagne, on trouvait l'entrée en France souriante, de même que ce doit être la grande joie des habitants du purgatoire que de lire chaque jour le bulletin de température de l’enfer.... 




L’Espagne est bien gentille, et l’est restée pour les Français. On nous a conté de terribles histoires de dames déshabillées et de voitures fouillées, mais c’était au moment de la révolution et seulement à la sortie, pour les "ci-devant". Les Français ne furent jamais molestés. Il faut savoir seulement, si on entre en Espagne, qu'il convient de choisir sa porte, car les grandes s’ouvrent vite et comme avec lassitude, les petites sont ravies de vous garder et de faire la causette. Cette remarque est vraie de tous les pays... 




Sortez par Arnéguy et Roncevaux. Vous y restez deux heures, en face d’un petit fronton blanc sur cette montagne d’un vert aigu. Le douanier français est le premier content de vous connaître, puis le carabinier vous reçoit comme un frère et engage un long palabre... Le pont passé, c’est à la "douanière" qu’on a affaire. Une jolie fille, petite Raquel Meller de province, qui a l’air de faire tout le travail et manie les tampons et exige des pesetas d’une voix volubile, tandis que son gros mari se repose et bâille largement. On a l’impression qu'elle prend des notes sur les robes des dames, et on arrive à Pampelune, avec un fort retard. 

DOUANE ARNEGUY
PAYS BASQUE D'ANTAN



C'est à Roncevaux que je vis Marcel Michelin, l’homme qui fait du 120, à l’heure sur les rails, arrêté par un carabinier, car, à cette époque, on écrivait non seulement les marques mais les numéros des accessoires.




  — Michelin Neumaticos ? C’est vous qui faites ces pneus-là ?

 — Si, si, dit-il à tout hasard. 

— Ah ! ah ! dit le carabinier. Pouvez-vous me réparer ma chambre à air de bicyclette ? 




Le grand industriel en pâlit. On ne lui avait jamais dit ça ! 



A Béhobie, cela passe tout seul, des douaniers habillés en amiraux anglais vous donnent du "caballero" à chaque mot, et vous expédient comme aux portillons du Métro. Morale : choisissez toujours une grande douane ! 


GENDARMES ET CARABINIERS BEHOBIE
PAYS BASQUE D'ANTAN



Les petites sont trop satisfaites de vous voir. Il y a ainsi un douanier à Llivia, la fameuse commune libre des Pyrénées, qui n’a jamais rien à faire, qui gèle dans sa guérite, et vous invitera à dîner et à rester si vous avez l’imprudence de lui adresser la parole ! 




Les grandes douanes ont le coup d'œil rapide et beaucoup d’indulgence. C’est ainsi que dans le train-bloc de Bruxelles, il est rare que les douaniers français ou belges soient assez brutaux pour exiger beaucoup de droits sur les jouets qui circulent entre les deux pays au moment de Noël. 




L'un d’eux, comme je revenais chargé de jouets, me dit un jour : 


— C’est pour les gosses ? C'est sacré... 




Un défaut des grands postes, c’est qu’ils connaissent trop bien les tarifs et qu’il ne faut pas les affronter si on essaie d’introduire en France ou en Angleterre un éléphant blanc. A un petit poste, le douanier ne trouvant pas l’objet dans sa nomenclature, on pourrait s’en tirer... 




L'été dernier, entre la Belgique et la Hollande, vers Berg-op-Zoom, je trouvai un poste si caché derrière un tahlus, que je passai de Hollande en Belgique sans le voir. Je dus revenir, voyant devant moi le douanier belge sans avoir ma "sortie" hollandaise. Mais avec inquiétude, car le douanier hollandais m’apercevant "venant de Belgique" eût pu jurer que je ne venais pas de l’autre sens ! 




Pour comble, il ne parlait aucune langue connue, sauf la sienne. J'aurais pu y demeurer un an... 




Nous nous débrouillâmes le mieux du monde. La veille, je m’étais bien entendu avec un bègue hollandais. (Je vous recommande ça comme exercice de langues vivantes !...)" 




Cette connaissance des tarifs par les grands postes est empoisonnante. Lorsque la première roulotte anglaise pénétra en France, elle ne paya que 2% parce que M. Poincaré n’en sut rien. Puis, quelqu’un de méchant dut prévenir M. Poincaré, parce que les importateurs suivants furent écrasés de 52% ! Aux grands postes, impossible de blaguer. Et pourtant le public, les femmes surtout, truquent avec furie. Chez elles, c’est un plaisir aident. Un porteur, sur le quai de Calais, devant le charmant petit avion jaune de la "Caf", me disait avoir vu surprendre la veille, sur l'"Autocarrier" une dame qui n’avait pas pensé descendre de son auto et qui, requise de le faire, vida d’un seul coup, sur le plancher, tout ce que sa jupe tenait de cigarettes...




Les Anglais à Douvres sont très sévères. L’un d’eux sonda une fois toutes les garnitures de ma voiture. Ils vous demandent des déclarations effrayantes. C’est pourquoi l’avion reste le moyen le plus rapide et le plus agréable par beau temps, de voyager sur des frontières... On ne retarde pas les voyageurs à la douane, on sait bien qu’il ne faut pas leur faire perdre des heures gagnées. 




Les douaniers sont des hommes et ils lisent les journaux. On est donc reçu selon les relations qui existent à ce moment entre deux pays, le vôtre et le leur. Certains vous accueillent par des plaisanteries plus vieilles que la côte de Picardie. D’autres sont farouches. D’autres, gais et aimables. Sur le quai du Havre, au pied de l'"Ile-de-France", je vis une dame poser ses colis et rougir. 


— Rien à déclarer ? dit le douanier. Hein ! Bien vrai ? Allons, pour votre première parole en France, il ne faut pas mentir. C’est ça qui ne serait pas chic ! 




Et pour cette phrase si gentille et drôle, à mon retour en France aussi, j’eus envie de lui serrer la main !"





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