LE FILM "GACHUCHA FILLE BASQUE" EN 1922.
C'est un film muet, en noir et blanc, de 45 mn, réalisé en 1922 par Maurice Challiot et projeté pour la première fois le 9 février 1923.
Le scénariste de ce film est Charles Torquet.
La société de production est Natura Films.
Les principaux acteurs sont : Ninon Balzan, Hugues de Bagratide, Paulette Ray et Raoul Paoli.
Le synopsis de ce film est le suivant : Gachucha veut venger la mort de son frère, le contrebandier, qu'une dénonciation a envoyé en prison. Elle est fiancée à un honnête garçon, mais courtisée par un homme habile qui lui promet de livrer le mouchard s'il est choisi comme époux. Adroitement ce rival arrive à compromettre le fiancé de Gachucha...
Depuis 2017, je vous ai parlé de plusieurs films tournés au Pays Basque ou avec des histoires se
passant au Pays Basque, tels que Euskadi (1936), l'Appel du stade (1941), la Robe Rouge (1933),
Au Pays des Basques (1930), Emak Bakia (1925), le Pays basque espagnol (1931), Sinfonia Vasca
(1936), El Mayorazgo de Basterretxe (1928), Im Lande Der Basken (1944), Odette (1928), Vicenta
(1920), Le Mariage de Ramuntxo (1947), Gure Sor Lekua (1956), l'Athlète aux mains nues (1952),
The Land of the Basques (1955), La Reine de Biarritz (1934), Haut-le-Vent ou Air Natal (1942),
Ramuntcho (1938), le film "Véronica" (1923) et le film "Gachucha fille basque" (1922).
Voici ce que rapporta au sujet du film "Gachucha fille basque" l'hebdomadaire Le Film Complet,
le 6 mai 1923 :
"Gachucha par Jean Morlaix. — (Natura-Film).
... Et son doux visage se couvrit d'une expression implacable qui surprit Mme Loris. Ces violences de sentiments et ces désirs de vengeance, si naturels à leurs voisins espagnols, ne sont pas habituels chez les Basques. Bien que tenaces, ils sont modérés de caractère, doux et peu passionnés, si ce n'est d'ambition.
Elle dit :
— Vous feriez bien mieux de ne plus penser à la triste fin de votre frère. Il est assez probable que, désormais, vous ne trouveriez plus de preuves de cette trahison, si trahison il y a eu. Vous en arriverez à vous prendre de soupçons contre quelque innocent et à nuire à qui ne le méritera pas.
— C'est ce que me dit ma mère elle-même, madame, mais, voyez-vous, cela ne se peut pas.
Gachucha se remit à travailler silencieusement. Mme Loris avait développé sa boîte à couleurs qui lui servait également de chevalet et elle peignait. Deux heures peut-être s'écoulèrent ainsi et puis l'Angelus sonna.
Têtes inclinées, bérets à la main, tout le pays fut en prière. Mme Loris refit son petit paquet de peintre et elle allait s'éloigner quand elle s'arrêta à la vue d'un tableau qu'on rencontre à chaque pas en pays basque et qui, toujours, enchante les amateurs de pittoresque. Un char à boeufs, avec ses roues pleines et son aspect mérovingien, s'avançait au pas lent de son bel attelage. Parvenu à la hauteur de la maisonnette, celui qui le conduisait, un homme aux traits durs, aux cheveux trop noirs sous son béret exigu, étendit son aiguillon, arrêta ses boeufs et se dirigea vers Gachucha.
Il suffisait de jeter les yeux sur la jeune fille pour constater que la visite ne lui plaisait que médiocrement. L'homme vit le mouvement de contrariété qu'elle ne put retenir, mais il feignit de n'avoir rien vu et, en esquissant son sourire le plus aimable, empreint malgré tout son effort, d'une expression à la fois sarcastique et agressive, il salua et dit :
— Eh bien, mademoiselle Gachucha, comment ça va-t-il ce midi ?
— Très bien, Mendiaz, je vous remercie, répondit-elle en se contraignant.
Et puis, une gêne s'empara d'eux. Les deux interlocuteurs restaient l'un devant l'autre. Mendiaz, déconcerté, ne savait plus que dire, tandis que Gachucha cherchait, par son silence, à terminer au plus tôt une conversation qui ne pouvait lui être agréable. Depuis longtemps, Mendiaz tournait autour d'elle. Mais les manières à la fois mielleuses, hypocrites et brutales du toucheur de boeufs l'impressionnaient désagréablement. Outre qu'elle aimait José-Miguel, elle éprouvait, à l'égard de Mendiaz, une sorte de répugnance instinctive qu'en dépit de sa bienveillance naturelle elle ne parvenait pas à vaincre.
Mendiaz n'était pas bon, mais il n'était point sot. Il se rendait très nettement compte de ce qui se passait en la jeune fille. Il se sentait détesté, mais, tenace, il ne se rebutait pas, bien déterminé à la conquérir par un moyen ou par un autre et prêt à tout. Avec une grimace, il se tourna vers Mme Loris et lui dit, pour parler :
— Un beau temps, aujourd'hui, madame.
Tout en répondant d'un signe de tête, Mme Loris se demandait dans quelle circonstance elle avait dû le rencontrer précédemment sur quelque route, mais sans pouvoir préciser en quelle circonstance. Elle prit congé de Gachucha et s'en alla. Alors, le sourire de Mendiaz se fit plus amer et, tremblant un peu, il dit à la jeune fille :
— On dirait que vous ne pouvez pas me sentir !
Elle se récria de son mieux :
— Mais non : vous vous trompez, Mendiaz. Je n'ai pas d'amour pour vous, parce que mon coeur est à un autre. Mais je n'ai aucun mauvais sentiment à votre égard. Seulement, voyez-vous, avec un fiancé comme José-Miguel, on ne voit seulement pas les autres hommes.
Au seul nom de son rival, Mendiaz tressaillit comme si elle l'eût piqué de l'aiguillon dont il menait ses boeufs. Son rictus s'accentua et il murmura :
— C'est vrai : je ne suis pas marin, moi, ni champion de pelote !
En regardant cette face pâle, elle comprit que le coeur de ce Mendiaz bouillait de haine et de fureur. Elle eut peur et voulut l'amadouer :
— Vous ne recevrez jamais mauvais accueil ici, Mendiaz, et la porte vous sera toujours ouverte. Seulement je vous demande de ne plus me parler d'amour. Je vous ai dit honnêtement, pourquoi.
Il se redressa, la toisa et reprit :
— Non, vous me détestez : c'est un fait. Mais je vous dis que je vous conquerrai.
Il parlait d'une voix tranchante. Quand ce fut dit, il salua encore, s'en retourna près de ses boeufs et, reprenant son aiguillon, illes remit en marche. Au même moment, il vit Gachucha qui s'éloignait d'un pas pressé. Dès qu'elle était pressée, il savait bien où elle allait. Tous ses traits se crispèrent et il eut un mouvement de rage.
Sur la plage, en compagnie de ses compagnons de pêche, José-Miguel, se préparant à "sortir", commençait à tirer son embarcation vers la mer et d'y mettre de l'ordre. Il savait que Gachucha allait venir le soir avant son départ. Mme Loris le lui avait dit en passant et il en était tout heureux, aussi heureux que la première fois. A distance, les hommes reconnurent Gachucha qui venait vers eux. Un petit sourire, moitié indulgence, moitié amicale moquerie, se dessina sur leurs faces basanées et, du coin de l'oeil, tout en travaillant, ils guettèrent José-Miguel qui, lui, ne regardait plus ce qu'il faisait, car il en était bien profondément épris de sa Gachucha, la plus charmante fille du pays, comme il en était lui-même le plus beau garçon.
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HEBDOMADAIRE LE FILM COMPLET 6 MAI 1923 FILM GACHUCHA LA FILLE BASQUE 1922 |
Dominant les autres hommes de toute la tête, large d'épaules, tout en muscles, il avait des traits réguliers, une face bonne et honnête, un sourire qui disait toute la simplicité droite de son coeur. Fort à battre quatre hommes, il n'avait jamais abusé de sa puissance. Il était la patience même et s'employait à apaiser les querelles qui pouvaient naître entre les autres. Gachucha s'approcha. Elle salua les pêcheurs et dit :
— Voilà deux jours qu'on ne s'est vu, José-Miguel. J'ai beaucoup à travailler. Veux-tu m'accompagner pour un petit moment que je prends sur le temps du déjeuner ?
José avait beau être patron, à bord d'un bateau-pêcheur, tout le monde travaille également. Il se tourna donc vers ses hommes et leur demanda de l'autoriser à s'éloigner quelques instants. Naturellement, les autres acquiescèrent et les deux amoureux s'éloignèrent vers les chemins qui montaient de la plage dans les terres. Heureux d'être ensemble, ils marchaient côte à côte sans parler. La présence leur suffisait. Au tournant du chemin, Gachucha, sans lui demander son avis, s'assit sur un banc de gazon et il s'assit auprès d'elle. Et, de nouveau, Gachucha retomba dans son absorption. José la regardait avec inquiétude :
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