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vendredi 18 avril 2025

VENDREDI SAINT À FONTARRABIE EN GUIPUSCOA AU PAYS BASQUE EN AVRIL 1931

VENDREDI SAINT À FONTARRABIE EN 1931.


Depuis de très nombreuses années, la semaine sainte est très importante, en Pays Basque Sud, et en particulier à Fontarrabie.




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PROCESSION DU VENDREDI SAINT A FONTARRABIE
PAYS BASQUE D'ANTAN



Voici ce que rapporta à ce sujet l'hebdomadaire  la page, le 2 avril 1931, sous la plume de P. 

Pascal :



"A Fontarabie en suivant la procession du Vendredi Saint.



La ville de Fontarabie est connue de tous par le siège fameux qu'elle eût à subir, en l'an 1638, de la part des Français, siège qu'elle repoussa victorieusement et qui lui mérita, du roi d'Espagne, les titres de "cité très noble, très loyale et très vaillante".



Elle est connue encore par la beauté incomparable de son site. Vrai pays d'Arcadie, elle attire écrivains, artistes, touristes, qui la célèbrent à l'envi pour son caractère moyenâgeux, pittoresque, nettement espagnol. Placée au nord de l'Espagne, séparée seulement de la France par la Bidassoa, elle donne l'impression d'une ville d'Andalousie par ses "couleurs de cuivre et de basane". L'expression est de Pierre Loti qui, vivant en face, à Hendaye, l'a aimée particulièrement et l'a décrite dans plusieurs de ses ouvrages avec une prédilection marquée.



Mais Fontarabie est connue aussi pour ses fêtes religieuses ; notamment celle du 8 septembre, qui commémore sa victoire sur les Français, et, davantage encore, les cérémonies du Vendredi-Saint.



Depuis des siècles déjà, on vient assister à ces dernières cérémonies, non seulement d'Espagne, mais de France et d'ailleurs. Pour les touristes de Biarritz, de Saint-Jean-de-Luz, de Bayonne, de Pau, c'est la grande attraction du jour. Personne ne veut manquer ce spectacle ; c'est par milliers qu'on y vient par tous les moyens de locomotion. Les Anglais s'en montrent particulièrement friands, surtout depuis qu'Edouard VII, alors en villégiature à Biarritz, voulut venir y assister.



Saint-Sébastien, la superbe capitale du pays basque espagnol, a aussi sa procession du Vendredi-Saint, depuis quelques années ; procession d'un déploiement autrement fastueux que celle de Fontarabie, mais il lui manque un cachet d'antiquité et surtout un cadre simple, pieux, pittoresque, que sa tournure de grande ville moderne lui donnera difficilement. C'est pourquoi les gens viennent ici plutôt que là-bas.



Voici un rapide aperçu de ces fêtes religieuses :


Le Jeudi-Saint, au matin, l'ayuntamiento (le corps municipal) sort de la casa consistorial et, accompagné d'une troupe de soldats romains, choisis dans la population (Et Dieu sait si le type basque est représentatif !), se rend en cortège à l'église paroissiale. Après la Messe, quand le Saint Sacrement a été transféré dans le tabernacle du reposoir, ces soldats monteront la garde devant le "tombeau", immobiles comme des statues, appuyés sur leurs lances. Ils se relayeront d'heure à heure, six par six, jusqu'à l'Alléluia du Samedi-Saint.



Vendredi-Saint— Les rues de la ville, surtout la rue centrale, la si belle Calle Major, sont noires de monde. Les alguazils et miquilets se multiplient pour maintenir l'ordre et, tout à l'heure, pour faire dégager les avenues par où doit passer le cortège. Les balcons regorgent de personnes privilégiées qui ont réussi à s'y installer (non sans peine ni sans accroc à leur porte-monnaie ! Ne dit-on pas qu'un seul balcon a été retenu 300 fr.) ?



L'église, elle aussi, est remplie de fidèles et de curieux, désireux d'assister à la descente de croix, drame religieux qui rappelle les célèbres mystères du moyen âge. Malgré l'obscurité presque complète de l'édifice (c'est de rigueur en Espagne, surtout pour ce genre de cérémonies), on peut voir devant l'autel une grande croix sur laquelle gît un Christ à bras articulés. Des soldats romains, centurion en tête, scandant leur marche en frappant de leur épée sur leur bouclier au son d'une mélopée étrange, viennent se ranger auprès de cette croix. A 3 heures sonnantes, le prédicateur, du haut de la chaire, pousse le cri Lamma Sabacthani, comme pour annoncer le moment précis de la mort du Christ. Il parle ensuite, d'une voix dramatique, de la Passion de l'Homme-Dieu, s'adressant de préférence à la Vierge des Douleurs, dont la statue se trouve dans le sanctuaire, près de la croix, et lui rappelant les souffrances qu'elle endura dans son coeur pendant l'agonie de son divin Fils.




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LA CROIX EGLISE DE FONTARRABIE
PAYS BASQUE D'ANTAN



Il parle de la condamnation inique, de l'inscription placée au-dessus de la tête de Jésus ; à ce moment, on décloue cette inscription...



Il parle de la couronne d'épines ; on l'ôte de dessus la tête du divin Supplicié...



Il parle des plaies des mains et des pieds ; aussitôt, on entend de lugubres coups de marteau et les bras décloués tombent le long du corps. Ensuite, tout le corps est détaché de la croix ; il est reçu par des religieux Capucins qui, avec infiniment de respect et de dévotion, le déposent dans une grande châsse.



Maintenant va commencer la procession funèbre ou funérailles de Jésus à travers les rues de la cité.



Le cortège est ouvert par un Saint Michel tout cuirassé d'or, qui s'avance d'un pas rythmé, se protégeant derrière un bouclier d'argent. Vient ensuite une immense statue de Jésus au jardin des Oliviers, portée par des pénitents en cagoules brunes.



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ARCHANGE PROCESSION SEMAINE SAINTE 
FONTARRABIE
PAYS BASQUE D'ANTAN



Puis voici Jésus à la colonne de la Flagellation, porté par des pénitents rouges et encadré par des soldats romains. Derrière cette statue marche un peloton de carabiniers en grande tenue.



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PROCESSION SEMAINE SAINTE FONTARRABIE
PAYS BASQUE D'ANTAN



Les autres groupes de la Passion, tous portés par des pénitents de diverses couleurs, sont celui de la Véronique, étendant devant elle le linge où s'imprima la Sainte Face ; celui de saint Jean, le disciple bien-aimé, qui fut fidèle à Jésus jusqu'au bout ; celui de Marie-Magdeleine qui, au pied e la croix, étreignait avec amour les pieds sanglants de son Sauveur ; celui de Notre-Dame des Sept-Douleurs, d'une toilette extrêmement riche, quoique en grand deuil.



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SANTA MARIA MAGDALENA 
PROCESSION SEMAINE SAINTE FONTARRABIE
PAYS BASQUE D'ANTAN



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LA VERONIQUE
PROCESSION SEMAINE SAINTE FONTARRABIE
PAYS BASQUE D'ANTAN




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NOTRE-DAME DES DOULEURS
PROCESSION SEMAINE SAINTE FONTARRABIE
PAYS BASQUE D'ANTAN



Une des curiosités du cortège qui attire le plus l'attention des assistants est le groupe des douze apôtres, vêtus de toges romaines aux teintes bariolées, tenant chacun en main un insigne qui rappelle la nature de leur martyre respectif. Pour cet office, on choisit des pêcheurs qui, chaque année, tiendront, comme à un honneur exceptionnel, à remplir ce rôle de choix. Ils sont âgés en général, d'un type basque très prononcé : visage rasé, basané, couvert de rides profondes. Il sont superbes à voir, tant leur démarche a de gravité, de piété et de sérieux. Ils sont bien de la race de ces Basques dont Raymond Escholier dit dans le dernier numéro de la Revue des Deux-Mondes que lorsqu'on les voit, "conduisant leurs boeufs, la tête haute, la face rasée sous le béret, on les prendrait pour des proconsuls romains".



Le dernier groupe de la procession, le plus important, est celui du Christ porté dans sa magnifique châsse d'argent et de cristal, qui le laisse voir étendu dans son cercueil, tout blême et sanglant. Les Espagnols affectionnent le réalisme dans l'art, surtout dans l'art religieux. Toutes les statues de cette procession sont expressives à souhait. La châsse est entouré des marins du stationnaire le Mac-Mahon, suivie des religieux de toute robe, des prêtres de la paroisse revêtus de lourdes et riches chapes noires, du maire et son Conseil, des autorités militaires et maritimes. (Quand reverrons-nous ceci en France ?)



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LE SAINT SEPULCRE
VENDREDI SAINT FONTARRABIE
PAYS BASQUE D'ANTAN



Sur tout le parcours de la procession, les différents groupes de la Passion sont encadrés de deux files d'hommes portant d'énormes cierges presque aussi grands qu'eux et qu'ils tiennent horizontalement. Les femmes n'ont pas ce droit ; elles suivront pieusement et modestement, la tête recouverte de la mantille noire, derrière le clergé et les autorités.



Pendant tout le trajet, le chant du Miserere alterne avec des marches funèbres exécutées discrètement par la fanfare municipale. La foule des curieux est houleuse, bruyante ; mais, on ne peut le nier, lorsque s'approche la châsse du Christ, de ce grand mort qui est l'éternel vivant, tout le monde se découvre et il se fait un religieux silence fort impressionnant. A combien de milliers faut-il évaluer cette foule ? Il serait difficile de le dire. On constate seulement que, chaque année, elle va croissant et que les barquiers chargés de faire passer la Bidassoa aux étrangers se font ce jour-là des émoluments sérieux.



Signalons, pour finir, un usage touchant. Le dimanche de Pâques, de grand matin, quand l'aube commence à poindre, le Saint Sacrement sort processionnellement de l'église. A un point nommé arrive, en sens inverse, la statue de la Sainte Vierge portée par des hommes robustes et entourée de soldats romains. Lorsque ce groupe se trouve en présence du Saint Sacrement, les soldats fléchissent le genou, la statue s'incline par trois fois. C'est Marie adorant son Jésus ressuscité..., c'est la rencontre du Fils et de la Mère après les jours d'angoisse. Bien des yeux se mouillent d'émotion à ce spectacle.



Dans les armes de Fontarabie, on lit les titres glorieux que lui donna le roi d'Espagne, lors de son triomphe contre les Français en 1638 : "La muy noble, muy leal y muy valerosa ciudad de Fuenterrabia... La très noble, très loyale et très vaillante cité de Fontarabie." A ces titre, on en ajouté un autre encore plus enviable : "Muy santa... la très sainte cité de Fontarabie."








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