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vendredi 7 avril 2023

LE PREMIER VENDREDI SAINT SOUS LA RÉPUBLIQUE ESPAGNOLE À FONTARRABIE - HONDARRIBIA EN GUIPUSCOA AU PAYS BASQUE EN MARS 1932

VENDREDI SAINT À FONTARRABIE EN 1932.


La Seconde République espagnole est proclamée à la suite des élections municipales le 14 avril 1931.




pais vasco antes guipuzcoa calle iglesia
CALLE MAYOR FONTARRABIE GUIPUSCOA 1932
PAYS BASQUE D'ANTAN



Voici ce que rapporta à ce sujet le quotidien Le Figaro, dans son édition du 30 mars 1932, sous la 

plume de Louis Daney :



"La saison à Fontarabie.



 — Le premier vendredi saint de la République espagnole


— A Fontarabie, la procession du vendredi saint n'a pas eu lieu... 



Elle était cependant célèbre. On peut dire, sans irrévérence, qu'elle faisait partie des attractions de la Côte Basque. Il n'était pas un touriste en villégiature à Biarritz pour les fêtes de Pâques qui ne traversât la Bidassoa pour la voir. A quelques centaines de mètres de la frontière on pouvait se croire au cœur de l'Espagne. 



Le pittoresque de la petite ville en gradins, où des vestiges du moyen âge atténuent d'un peu d'âpreté la grâce féminine du Guipuzcoa, favorisait l'illusion. 



Malgré la Renaissance frivole qui lui enleva de l'austérité, l'église de Nuestra Señora de l'Asuncion conserve un peu de la hautaine beauté, très espagnole, que le onzième siècle scella autour de ses ogives ; et la Calle Mayor, avec ses vieilles maisons à balcons et à miradores, ornées d'écussons, fait devant elle un décor propice à des cortèges d'imageries saintes. 



pais vasco antes iglesia calle guipuzcoa
CALLE MAYOR ET EGLISE FONTARRABIE GUIPUSCOA
PAYS BASQUE D'ANTAN



De chaque côté de la rue étroite pendaient bannières, guirlandes, tapis et draperies. Les pierres saillantes faisaient des creux d'ombre qui, avec les ors et les pourpres flottant aux fenêtres, oscillant sur la foule en marche, donnaient à la lumière du ciel basque, presque pastellisé, les reflets du jour sévillan. Il y avait là, comme dans le Sud, une atmosphère moyenâgeuse de mysticisme primitif et de foi populaire dont la tiédeur moderne — après l'aridité luthérienne — a, malheureusement peut-être, débarrassé le catholicisme chez nous. 



On conçoit que cette procession, chaque année, attire la foule. Les balcons sur le parcours se louent à prix d'or. Fontarabie regorge de monde ; les commerçants font des affaires et aubergistes et cabaretiers voudraient que la fête se renouvelât sans cesse. 



Les organisateurs d'une caravane pascale de journalistes français et étrangers sur la Côte Basque ne pouvaient manquer d'inscrire, à leur programme la procession du vendredi saint à Fuentarrabia. D'autant que le trajet lui-même, de Biarritz à la frontière, la traversée de la Bidassoa, la vue sur la vallée et les monts que chanta Loti constituaient une utile illustration à la publicité de ce pays nuancé. 



Hélas, les journalistes sont venus ; ils n'ont rien vu, ou presque rien. 



La procession n'est pas sortie. 



pais vasco antes religion iglesia guipuzcoa
INTERIEUR EGLISE FONTARRABIE GUIPUSCOA
PAYS BASQUE D'ANTAN



Tiene la culpa la Republica, me dit une vieille femme que j'interroge... 



Les rues ne sont pas pavoisées. Sur la place, au bas de la calle Mayor, à peine quelques voitures avec nos cars. Les touristes ne sont pas venus. Les balcons sont vides. Seul celui du "Centro republicano" est occupé ; des jeunes gens et quelques jeunes filles affichent une joie goguenarde. 



La procession de Fontarabie n'est pas sortie... 



Si cette innovation lui enleva de la pompe et priva les visiteurs d'un spectacle curieux, elle ne refroidit pas le zèle des âmes pieuses. 



La procession de 1932 en se déroulant à l'intérieur de l'église se dépouilla de son aspect parfois un peu carnavalesque, pour ne garder que le caractère d'une splendide manifestation de foi et de fidélité.



L'église était pleine, non de curieux, mais de fidèles. 



Dans la rue, quelques éléments équivoques compromettent toujours un peu la dignité du cortège. Cette année, la procession, tout en conservant son traditionnel défilé de statues habillées, ses soldats romains casqués, en culottes roses, la lance au poing, semblait, avec ses beaux chants liturgiques, le silence respectueux des assistants, vouloir, dans une sorte de repli sur elle-même, s'épurer, puiser dans ses origines une force nouvelle. 



Les corporations n'étaient pas présentes, en costumes ; la municipalité en corps n'y paraissait pas ; les confréries et leurs bannières ne pouvaient étirer leur défilé. Mais, par une petite porte étaient entrés le maire et la plupart de ses adjoints et conseillers, les représentants qualifiés de chaque métier. Et tous, en jaquette, en veston ou en blouse, suivaient le cortège qui tournait en rond entre les murs, devant la croix d'où, théâtralement, des moines venaient de descendre l'image du Fils de Dieu. 



La foule était recueillie, le prédicateur qui jetait sur elle, à gestes secs, de rudes mots basques mâchés avec véhémence, montrait une exaltation si communicative que nous avons, tous, participé à l'émotion de ces gens dont nous espérions une distraction sans banalité. 



Nous avons perdu un spectacle ; nous avons peut-être gagné une leçon. 



La religion n'est pas morte en Espagne."






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