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jeudi 29 juillet 2021

UN GUIDE POUR LE VOYAGEUR EN GUIPUSCOA AU PAYS BASQUE EN 1877 (quatrième partie)

 

GUIDE DE VOYAGE EN 1877.


Vers la fin du 19ème siècle, apparaissent des guides de voyage pour les voyageurs désirant se rendre en Hego-Alde, dans les  provinces Basques du Sud.




pais vasco antes guipuzcoa
GUIDE DU VOYAGEUR EN GUIPUZCOA 1877


Voici ce que rapporta à ce sujet, M. L. Capistou, en 1877 :



"Province du Guipuzcoa.


Itinéraire.

La Bidassoa. — Ile des Faisans. — Béhobie. — Enderlaza. - Irun. - Fontarabie. - Renteria.— Lezo. — Oyarsun (vallée d'). — Passages (les). — Alza.



Un peu en arrière de San Marcial, vers la Bidassoa, se voient les restes de la batterie royale, de laquelle partit le premier coup de canon tiré sur Irun par les carlistes, le 4 novembre 1874, à sept heures du matin.



Don Carlos vint ce même jour recevoir les félicitations de ses volontaires... La distance et le bruit l'empêchèrent d'entendre les malédictions des habitants d'Irun, dont il faisait si inutilement détruire les demeures.



La batterie des mortiers carlistes, qui fit beaucoup plus de mal à la ville que les Vavasseurs et les Withworth, était à Ybaeta, petit monticule situé entre San Marcial et Irun.



Le petit village de Béhobie (côté d'Espagne) n'est, en somme, qu'une agglomération de quelques maisons à moitié détruites durant la dernière guerre, toutes portant plus ou moins des traces de projectiles. La route qui conduit de Béhobie à Irun a été diverses fois, durant cette guerre, le théâtre de sanglants combats entre libéraux et carlistes.


pais vasco antes ayuntamiento
GRAVURE D'IRUN 1850
PAYS BASQUE D'ANTAN



Irun.



Après avoir franchi la Bidassoa, la voie ferrée traverse un marais peu étendu, puis coupe une petite colline avant d'arriver à la station d'Irun.



Une différence de largeur (0m,20) existant entre la voie française et la voie espagnole, les trains venant de France poursuivent leur route jusqu'à Irun, et ceux venant d'Espagne conduisent les voyageurs à Hendaye. Le transbordement se fait durant le déchargement des bagages, lesquels sont livrés aux investigations minutieuses de la douane. Tout est visité, malles, sacs de nuit, cartons à chapeaux, au grand désespoir des dames, qui voient fouiller et retourner impitoyablement les mille objets de leurs fragiles toilettes.



L'heure officielle des chemins de fer du Nord de l'Espagne est en retard de 25 minutes sur celle des chemins de fer du Midi de la France.



La station d'Irun a une grande importance comme tête de ligne ; située à un kilomètre environ de la ville, un service de voitures transporte les voyageurs et leurs bagages. Dans la salle même de distribution des billets, à la gauche du guichet, se trouve un bureau de change de monnaies (cambio de monedas), où les personnes allant vers l'intérieur de l'Espagne feront bien de s'adresser, si elles veulent s'éviter les désagréments d'une forte perte à la monnaie.



Un buffet, parfaitement servi à la française, est établi dans la gare d'Irun. On a le temps d'y bien manger, pendant que se forment les trains et qu'on décharge les bagages ou les marchandises procédant de France.



La formalité des passeports, sévèrement exigés sur la frontière d'Espagne, ne doit pas être méconnue des voyageurs. Il est toujours prudent d'avoir un document qui constate l'identité et la nationalité, afin de pouvoir l'exhiber à réquisition.



La petite ville d'Irun n'a rien de bien curieux à montrer aux touristes. Sa situation de ville frontière en a fait un centre de trafic important. Elle possède une administration centrale de douanes, une administration postale et un bureau télégraphique.



La Casa consistorial ou mairie a une belle façade ; le bâtiment situé à sa gauche, sur la place de la Constitution, et que l'on désigne sous le nom de Palacio de Doña Vicenta, est une solide construction qui ne manque pas d'une certaine beauté. C'est la propriété de M. Tirso Olazabal, un des plus ardents partisans de la cause carliste. Ces deux édifices eurent beaucoup à souffrir du bombardement de novembre 1874.



pais vasco antes ayuntamiento
MAIRIE D'IRUN GUIPUSCOA
PAYS BASQUE D'ANTAN


La petite colonne surmontée d'un saint Jean-Baptiste et flanquée d'armoiries, que l'on voit à l'angle de la place de la Constitution et de la rue qui descend vers Béhobie, a une curieuse origine. En 1476, le sire d'Albret, envoyé par Louis XI, pénétra en Espagne pour soutenir les droits de la princesse Jeanne, fille de Henri IV (la Beltraneja). Les Français occupèrent Irun, Oyarsun, Renteria, etc., assiégèrent Fontarabie et Saint-Sébastien, mais se retirèrent lorsque la princesse fit abandon de ses droits à la couronne. Le 24 juin 1476, l'arrière-garde du sire d'Albret, dont l'armée était déjà en France, fut surprise dans Irun par les forces provinciales du Guipuzcoa et mise en fuite après avoir perdu bon nombre des siens. C'est en commémoration de ce fait d'armes que la petite colonne surmontée de saint Jean-Baptiste fut élevée sur le lieu même du combat.



L'église paroissiale d'Irun, sous le vocable de N. D. du Juncal, fut édifiée en 1508. L'intérieur de cet édifice est somptueux, comme le sont, du reste, tous ceux des églises basques.



pais vasco antes iglesia
EGLISE D'IRUN
PAYS BASQUE D'ANTAN


Les sépultures qu'on remarque en entrant sous le porche sont celles du général de marine Zubiaur et de son épouse. Dans la sacristie de l'église se trouve une fontaine d'eau vive, qui fut d'une grande utilité aux défenseurs de la ville, durant les divers sièges qu'elle eut à soutenir.



En 1836 et 1837 Irun fut au pouvoir des carlistes. Elle leur fut enlevée d'assaut, par les forces du général Evans et les chapelgorris de Guipuzcoa.



Dans la dernière guerre elle fut constamment bloquée par les guerrillas du prétendant. Elle soutint un bombardement de sept jours (4-11 novembre 1874), défendue seulement par quelques compagnies de troupes de ligne, deux compagnies de miquelets et les volontaires sous les ordres du coronel Arana, actuel gouverneur militaire de la place. Les fortins del Parque et de Mendivil, armés chacun de deux canons, furent démantelés dès le premier jour ; le lendemain, les pièces furent démontées.



Sur la frontière française, il y avait une foule considérable de curieux, venus de fort loin pour assister au bombardement de la malheureuse petite ville. La Compagnie des Chemins de fer du Midi avait dû organiser des trains supplémentaires pour les transporter.



Bien que dans Irun les dégâts ne fussent pas en rapport avec le bruit fait par les assiégeants, ils n'en étaient pas moins très importants. Quelques incendies s'étaient déclarés et l'on avait pu difficilement les éteindre.



Don Carlos et plusieurs princes de la maison de Bourbon se trouvaient, le 6 novembre, dans les batteries de San Marcial. L'assaut de la ville fut décidé et l'on tira au sort pour savoir quels bataillons formeraient la colonne d'attaque. Evidemment les carlistes, quoique forts d'environ huit mille hommes, se faisaient illusion sur le degré de résistance que les défenseurs d'Irun pourraient opposer. Ils hésitèrent et perdirent un temps précieux car, pendant qu'ils couvraient Irun de projectiles, une armée libérale débarquait à Saint-Sébastien et au Passage avec les généraux La Serna, Loma et Portilla.



Le 10 novembre, les miquelets du capitaine Dugiol occupaient la formidable position de San Marcos, ce qui permettait à La Serna de menacer le flanc des positions carlistes du côté d'Oyarsun. Le lendemain, le général Portilla, longeant le Jaizquibel, occupait Gainchurisqueta, et les carlistes, débordés, enlevaient précipitamment leur artillerie de San Marcial et de Ibayeta. Le soir même, l'avant-garde des libéraux entrait dans Irun.



L'armée du général La Serna déshonora son succès par les actes de vandalisme dont elle se rendit coupable : elle incendia plus de cent fermes (caserios), entre Renteria et la frontière.



... Les carlistes firent retomber sur le général Ceballos, qui commandait en Guipuzcoa, la responsabilité de leur insuccès devant Irun. Ce chef fut traduit devant un conseil de guerre qui l'acquitta.



Depuis la fin de la guerre, Irun a repris son activité d'autrefois. Les dégâts qu'elle a subis disparaissent peu à peu et bientôt il n'en paraîtra plus rien. La population totale de cette ville s'élève aujourd'hui à environ cinq mille âmes.



Jusqu'en 1766, Irun fut une des localités relevant administrativement et judiciairement de Fontarabie, qui était alors le chef-lieu d'un district important.


pais vasco antes hondarribia
FONTARRABIE EN 1878
TABLEAU D'ALFRED DUMONT


Fontarabie.



A deux kilomètres en aval de la station d'Irun se dresse pittoresquement la petite cité (ciudad) de Fontarabie. L'étymologie basque de son nom, Ondarrabia, a été longtemps recherchée. On en est arrivé aujourd'hui à dire qu'il signifie : ruisseau abondant en sable.



Par les services qu'elle a rendus à l'Espagne, Fontarabie mérita les titres de Très-noble, Très-loyale, Très-valeureuse et Toujours fidèle, qui lui furent successivement octroyés par les rois de Castille et qui forment la légende de son écusson.



Son origine historique remonte au dixième siècle, mais il est hors de doute qu'elle existait avant cette époque, comme dépendance de la vallée d'Oyarsun, ainsi qu'elle fut désignée plus tard, dans la délimitation des évêchés de Bayonne et de Pampelune (980-1027). Le roi Alphonse VIII, après l'union volontaire du Guipuzcoa à sa couronne, érigea Fontarabie au rang de cité, la fit fortifier et lui donna administrativement tout le territoire compris entre la Bidassoa et le ruisseau d'Oyarsun, avec la montagne du Haya pour limite du côté de la Navarre.



Comme toutes les villes importantes de la province, Fontarabie eut droit à l'envoi d'un député spécial auprès du gouvernement de Madrid. Elle fit et défit ses traités spéciaux avec la Navarre en 1245 et en 1293 ; en échangea divers avec Bayonne et Saint-Jean-de-Luz alors au pouvoir de l'Angleterre, ainsi qu'il résulte de documents ayant différentes dates, de 1309 à 1420.



Placée en sentinelle avancée sur la limite extrême de la frontière espagnole, Fontarabie a eu à supporter le premier choc de toutes les attaques venant de France. Elle a soutenu des sièges mémorables, entr'autres ceux des années 1476,1521,1638, 1719 et 1794. Ses fortifications furent plusieurs fois détruites, puis ré-édifiées. En ce moment, elles ne sont que des ruines.



... En 1638, Condé fut chargé de pénétrer en Guipuzcoa avec une armée de vingt-cinq à trente mille soldats, pendant que François de Sourdis, archevêque de Bordeaux, opérerait sur les côtes de la Biscaye avec une puissante flotte.



Le 1er juillet de la dite année, le prince franchit la Bidassoa, occupa Irun, et envoya le chevalier Despenan s'emparer du Passages, mission dont ce dernier s'acquitta parfaitement ; puis il mit le siège devant Fontarabie, qui était défendue par une garnison de 900 hommes.



Par suite de rivalités existant entre le duc de La Valette et l'archevêque, la désunion et la mésintelligence se plissèrent dans les rangs des assiégeants. Condé, manquant d'énergie, menait le siège avec lenteur, et tout faisait présager un mauvais résultat à l'entreprise, d'autant mieux que les assiégés se défendaient avec une grande énergie, enthousiasmés par D. Diego de Butron, alcalde de la ville, et par le gouverneur Eguia.



C'est pendant ce siège que la flotte espagnole, forte de douze vaisseaux et huit galions, qui venait au secours de Fontarabie sous les ordres de l'amiral Lope de Hoces, fut brûlée par de Sourdis, dans la baie de Guétaria (22 août 1638).



Les assauts contre la place furent tous vigoureusement repoussés, et finalement, le 7 septembre, l'armée française dut repasser la Bidassoa, abandonnant un important matériel de siège, et perdant, en outre, plus de deux mille hommes dans la retraite.



Le duc de La Valette fut condamné, par contumace, à avoir la tête tranchée, comme coupable de trahison.



Le maréchal de Berwick prit Fontarabie, le 17 juin 1719, après un siège de trois semaines.



En 1794 (le 1er août), Frégeville reçut les clefs de Fontarabie qui capitulait après un bombardement de huit jours, mené avec vigueur depuis le fort de Hendaye.



Onze ans plus tard, un décret royal séparait Fontarabie de la province de Guipuzcoa (26 septembre 1805) et l'incorporait à la Navarre. Le 1er octobre 1810, Napoléon 1er annula ce décret.



L'aspect actuel de cette ville est assez pauvre. La plupart de ses édifices sont en ruines, mais il existe dans la grande rue quelques belles demeures. Sur la place se trouve l'antique palais de Charles-Quint, vaste construction carrée, sans architecture, percée çà et là de baies irrégulières, couverte par une plate-forme que supportent de puissantes voûtes. On attribue la construction de cet édifice à Sancho Garcia, qui fut roi de Navarre, sous le nom de Abarca 1er (Xe siècle). L'hôpital et la Casa consistorial ont été édifiés vers le milieu du siècle dernier.



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CASA CONSISTORIAL FONTARRABIE
PAYS BASQUE D'ANTAN




L'église paroissiale n'est pas dépourvue d'un certain mérite architectural. Comme dans tous les temples du pays basque, les autels sont chamarrés d'ornements et couverts de dorures. Les sculptures du maître-autel sont fort belles, quoique chargées de couleurs un peu vives et criardes.


pais vasco antes guipuzcoa iglesia
EGLISE DE FONTARRABIE GUIPUSCOA
PAYS BASQUE D'ANTAN


Dans la sacristie se trouvent quelques meubles antiques servant de chasubliers, et des bas-reliefs en bois détachés l'on ne sait d'où, à demi rongés par le ver, qui pendent accrochés à la muraille, dans le plus déplorable désordre, mais qui sont, suivant l'expression d'un artiste de talent qui les vit l'an passé, de véritables Rubens sculptés.



Du balcon de cette sacristie l'on jouit d'un point de vue admirable. L'on a, à ses pieds, la Bidassoa et ses sables mouvants ; en face, Hendaye et les coteaux de la Croix-des-Bouquets ; à gauche, la mer, se brisant sur les roches de la côte ; à droite, la petite plaine d'Irun, entrecoupée de chenaux, et la chaîne dentelée des Pyrénées, sur le profil de laquelle se détachent les masses imposantes de La Rhune, du Mandal et du Haya.



Entre Fontarabie et la mer se dresse le mont Jaizquibel (mont Oiarso des Romains), dont l'une des ramifications, s'allongeant vers le nord, forme le cap Figuier, à l'extrémité duquel se trouve la petite île d'Amuco. Dans un des replis du promontoire, à l'embouchure même de la Bidassoa, se voient les ruines de l'ancien fort Figuier, détruit en 1638 par la flotte française.



C'est à mi-côte du Jaizquibel, environ à deux kilomètres de Fontarabie, que se trouve le célèbre ermitage de la Guadalupe, lieu de grande vénération parmi les populations maritimes de la côte basque. Durant la dernière guerre, la vierge de la Guadalupe fut transportée dans l'église de Fontarabie par les volontaires libéraux. Au mois de novembre 1874, les carlistes mirent accidentellement le feu aux bâtiments attenant à l'ermitage, lesquels sont aujourd'hui reconstruits.



La population de Fontarabie est d'environ 3 000 habitants, en y comprenant le quartier de la Marina, lequel est entièrement peuplé de pêcheurs.



pais vasco antes barrio hondarribia
QUARTIER DE LA MARINA FONTARRABIE GUIPUSCOA
PAYS BASQUE D'ANTAN



Hors des murs actuels de la ville, c'est-à-dire à gauche de la porte du chemin d'Irun, existe depuis quelques années une magnifique habitation entourée de terrasses complantées d'ombrages : c'est le Casino-Kursaal de Fontarabie, propriété d'une Société dirigée par M. Dupressoir, ex-fermier des jeux à Bade, à laquelle la ville, la province de Guipuzcoa et le gouvernement espagnol ont concédé le privilège des jeux pour trente années.



Momentanément ce Casino est fermé au public, par suite des mesures extraordinaires de l'état de siège sous lequel se trouvent placées les provinces basques."



A suivre...



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