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mardi 26 juin 2018

LES FUEROS BASQUES EN FÉVRIER 1874

LES FUEROS EN 1874.


Les fueros étaient composés d'un ensemble de règles, de droit public et de droit privé, qui servaient à réguler l'administration des provinces Basques et de la Navarre.



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NAVARRE
PAYS BASQUE D'ANTAN



Voici ce que rapporta le journal Le Siècle, dans son édition du 4 mars 1874 :

"Lettres d'Espagne. (Correspondance particulière du Siècle.)


Dans la Navarre, 28 février. 


Mes dernières lettres, datées de la frontière, vous donnaient à comprendre que j'allais entrer dans le boulevard des carlistes, à savoir : dans la Navarre. Rejeté sur la frontière par les tempêtes de l'Océan et par les rigueurs carlistes, je décidai, pour couper court, d'entrer immédiatement en plein pays royal. 



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PAMPLONA - IRUÑEA
PAYS BASQUE D'ANTAN

Avant de commencer ma narration, il est bon de dire quelques mots de ces fueros, dont il est si souvent question et qui sont peut-être la cause, tout au moins le prétexte de l'insurrection. 




Dans le courant du 13e siècle, les trois provinces de Biscaye, Guipuzcoa et Alava, s'allièrent à la couronne d'Espagne, et, dans le traité résultant de cette annexion, il fut convenu que les trois provinces formeraient un Etat séparé, qu'elles conserveraient leurs franchises et leur indépendance administrative. Moyennant ces garanties, les trois provinces s'engageaient à soutenir le gouvernement de Madrid dans toute guerre contre l'étranger, et, à une époque récente, on vit en effet se former un corps d'armée spécial, qui rendit de grands services dans la campagne contre le Maroc, en 1860. Cette armée basque et vascongade se nomme tercios. Les privilèges des trois provinces constituent quelque chose de si complet que l'on ne peut s'empêcher de comprendre que l'abandon de ces libertés est chose difficile. Les trois provinces n'ont aucun impôt direct ou indirect, aucune régie ni gabelle, aucune patente de chasse ou de pêche, pas de levée militaire, pas de garnisons, sauf dans les deux villes de Saint-Sébastien et de Pampelune, et encore ces garnisons doivent-elles faire l'objet d'une demande spéciale à la députation forale de Tolosa. 



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PLAZA DE LA JUSTICIA TOLOSA GUIPUSCOA
PAYS BASQUE D'ANTAN


Le souverain d'Espagne n'est reconnu que comme le seigneur, el senor, et il est obligé de venir prêter serment de fidélité aux fueros sous le chêne séculaire de Guernica, petite ville de Biscaye, à quelques lieues de Durango et quartier général actuel de don Carlos. 



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GUERNICA - GERNIKA
PAYS BASQUE D'ANTAN.



vizcaya antes pais vasco arbol sacrado
GUERNICA - GERNIKA 1866
PAYS BASQUE D'ANTAN


Le gouvernement de Madrid doit tout à ces provinces et elles ne doivent rien, si ce n'est secours en cas de danger. Ce secours est alors complet car tous les Basques sont soldats en temps de guerre, dès l'âge de 20 ans jusqu'à 60. L'entretien des routes est cependant à la charge des trois provinces, et il se fait au moyen d'une contribution perçue pour le passage et connue aujourd'hui encore sous le nom de cattena (chaîne). L'emblème de la fédération des trois provinces, est une triple main avec cette légende basque Irurat bat (les trois ne font qu'une). 



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IRURAC BAT
PAYS BASQUE D'ANTAN



En 1841, Espartero, pour punir la rébellion, imposa aux trois provinces fédérées une ligne de douane. Au début il y eut un grand mécontentement, mais peu à peu on établit à l'abri de cette ligne quelques industries et l'on oublia le fait. Aujourd'hui beaucoup d'autres prérogatives tendent à disparaître ou à mourir oubliées au milieu des funestes complications de la guerre civile. De part et d'autre, dans les deux camps, les trois provinces ont fourni un contingent très considérable de volontaires. 



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BALDOMERO ESPARTERO
PAYS BASQUE D'ANTAN



La province de Navarre possède aussi ses fueros, analogues à ceux des provinces Basques, seulement cette province n'a pas une indépendance administrative complète, et, au lieu d'être pour ainsi dire gouvernée par le système républicain fédératif, elle avait un représentant de gouvernement, sorte de vice-roi. Quant à la levée militaire, elle faisait l'objet d'un marché assez peu édifiant et sur le compte duquel nous n'avons pas à nous prononcer. 



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GUERRE CARLISTE
PAYS BASQUE D'ANTAN



Ce sont donc, à grands traits, les fueros dont il a été si souvent question ; vous pouvez en conclure que les Basques ont toute raison de rester attachés à ces privilèges, et de ne pas vouloir qu'on y porte la main. Ce qu'il y a de fâcheux, c'est que les états-majors du parti carliste font constamment croire qu'il est question de supprimer l'état de choses actuel, ce qui est absolument faux. 




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GUERRE CARLISTE BILBAO 1874
PAYS BASQUE D'ANTAN


Ceci dit, je prends la liberté de convier vos lecteurs à pénétrer avec moi dans l'intérieur du pays carliste et au milieu de ces villages voués au sacré-cœur et à l'autorité des curés cabecillas




A l'entrée de la Navarre, les postes carlistes sont pleins de condescendance pour tout ce qui vient de France, et dans le fait ces braves gens reçoivent tant d'excellentes choses de France ! Quarante factionnaires se chauffent au soleil ; ils regardent d'un air philosophique les chalands qui traversent la Bidassoa ; ils viennent curieusement regarder les voyageurs pour se faire payer un bon droit de passage, ce qui représente le plus sûr et le plus clair de leurs recettes. Ils sont là, tranquilles, calmes, fumant leur cigarillos, vêtus de bonnes vareuses chaudes, avec parements rouges ou verts, avec de beaux boutons sur lesquels, avec une certaine stupéfaction on lit en grandes lettres : "République française" ; et sur le chef de chauds bonnets ou bérets, portant une plaque de cuivre avec les armes du roi et la devise "Dios, Patria y Rey." Leur poitrine est couverte de médailles, non pas, s'il vous plaît, de provenance héroïque ; bah ! ces braves gens aiment la bimbeloterie de Lourdes : ce sont des vierges de toutes les provinces ; puis, brochant sur le tout, le sacré-cœur. On comprend qu'avec d'aussi belles intentions, tous ces dignes défenseurs soient les enfants gâtés de certains députés. 




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PLAQUE CARLISTE DIOS PATRIA Y REY
PAYS BASQUE D'ANTAN



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MEDAILLE CARLOS VII
PAYS BASQUE D'ANTAN


Mais passons outre. Le grand pont qui établit les communications entre la France et l'Espagne a été démoli par Santa-Cruz ; il avait coûté à la députation provinciale 500 000 pesetas, plus d'un demi-million. En face, il y a les mines de fer, puis l'arbre sous lequel le pieux cabecilla a fait fusiller 24 malheureux carabiniers espagnols. A deux heures de là, on arrive à Vera, où les officiers d'artillerie, presque toujours flanqués du curé, surveillent la fonderie de boulets et d'obus. 




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CURE SANTA CRUZ
PAYS BASQUE D'ANTAN


Le commissaire royal perçoit sans pitié de gros droits de passage avec une exactitude qui prouve combien est vraie la phrase de Napoléon 1er : "L'argent est le nerf de la guerre." Les muletiers font la grimace, mais enfin ils payent, et c'est tout ce qu'il faut. L'administration a du reste complètement changé, elle est devenue royale ; poste télégraphe, état civil, douane, tout est royal. Il circule passablement de monde et beaucoup de marchandises ; le trafic qui se faisait par la ligne ferrée s'est complètement détourné, et, si je ne me trompe, la France échange des sacs postaux, ce qui n'est pas un mal, bien entendu, et il serait à souhaiter qu'on n'échangeât que cela. La poste est du reste passée au sacré-cœur. Les facteurs portent en chef le boïna de la contrée avec l'écusson : "Dieu, Patrie et Roi" ; puis, sur la poitrine, le carré de toile avec le cœur brûlant. Tout cela n'est pas très postal, mais enfin il faut savoir supporter les petites vanités de ce bas monde. La poste est pourvue de beaux timbres-poste à l'effigie du roi. Ces timbres coûtent 1 réal (26 c.), et la lettre ainsi affranchie peut aller de Durango et Guernica jusqu'au fond de la Navarre. 





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TIMBRE ESPAGNOL 1 REAL 1874
PAYS BASQUE D'ANTAN





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TIMBRE ESPAGNOL 1 REAL 1874
PAYS BASQUE D'ANTAN





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PLANCHE 4 TIMBRES UN REAL 1874
PAYS BASQUE D'ANTAN

Dans toute la contrée, on a fait la levée des jeunes gens avec une régularité parfaite; il est vrai qu'il en est beaucoup qui ont préféré passer la frontière ou aller aux avant-postes du gouvernement. Quant aux autres on les exerce avec sollicitude au métier des armes. Braves, ignorants, sobres, infatigables, ces jeunes gens ont toutes les qualités voulues pour faire d'excellents soldats. On leur dit : Marche ! et ils font dans une nuit avec leurs alpargatas, douze ou quinze lieues de chemin, sans murmurer. Voilà les adversaires que le gouvernement a devant lui, ajoutons que les alcades et les curés ont complètement fanatisé ces jeunes gens, et l'on comprendra les difficultés que rencontrent les troupes régulières pour vaincre l'insurrection. 





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ARMEE CARLISTE
PAYS BASQUE D'ANTAN


Ma prochaine lettre vous donnera quelques renseignements complémentaires sur l'intérieur de la Navarre et sur certains personnages rencontrés en route."





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