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lundi 5 juillet 2021

LES CIMETIÈRES DES ANGLAIS À BAYONNE EN LABOURD AU PAYS BASQUE (deuxième et dernière partie)

 LES CIMETIÈRES ANGLAIS À BAYONNE.


Lors du siège de Bayonne, du 27 février au 5 mai 1814, il y a eu de nombreux blessés et morts des deux côtés.



CIMETIERE DES ANGLAIS BAYONNE
PAYS BASQUE D'ANTAN



Voici ce que rapporta à ce sujet la revue La Côte basque : revue illustrée de l'Euzkalerria, le 19 

avril 1925, sous la plume de F. Morel :



"Le cimetière anglais.


Episode du blocus de 1814.



...Arrêté aussitôt et désarmé sans résistance, cet homme demanda à être conduit devant le général en chef ; sa prière était si insistante et les quelques mots qu'il adressa au commandant du poste si significatifs, qu'on n'hésita pas à le faire. Le général Hope avait établi son quartier général au Boucau, à portée du pont qui pouvait le ramener sur la Bidassoa et de la flotte nombreuse qui entretenait la sécurité et l'abondance de son armée. Le pauvre et chétif village de l'Adour était devenu une riche et populeuse résidence ; le luxe anglais avait déjà transporté sur ce terrain sableux et désert les pacotilles de fantaisie dans des magasins élégants et des tavernes confortables où pour le genièvre ou le champagne, soldats et officiers étaient les bienvenus.



Tout dormait, hommes, chevaux et navires, la flotte anglaise se pressait le long des jetées de pierre, le petit havre était encombré de chaloupes et d'embarcations et le fleuve noir et paisible réfléchissait seulement quelques feux éloignés. Le déserteur français fut conduit à travers les affûts, des canons, des voitures et des boutiques portatives, dans une maison d'assez belle apparence devant laquelle deux sentinelles se promenaient régulièrement.



Dans un salon du rez-de-chaussée, sur une table à jeu, une carte déployée laissait voir un plan de Bayonne, de la citadelle, des camps retranchés, etc...Des épingles noires et rouges, plantées dans la carte, déterminaient les positions occupées par l'armée assiégeante et les avant-postes de la garnison. Deux bougies consumées à moitié attestaient un travail récent, et, dans un coin obscur du salon, sur un canapé, dormait un officier d'ordonnance anglais tout armé et éperonné. C'est là que le déserteur français se trouva en présence du maréchal Hope que l'aide de camp avait fait prévenir et qui s'était levé à la hâte. C'est là que, moyennant un prix convenu, il révéla au général la sortie projetée de la garnison, le nombre d'hommes qui devaient composer les colonnes d'attaque et l'heure de la sortie ; le général donna aussitôt des ordres ; les officiers d'ordonnance coururent aux diverses positions occupées par les troupes anglaises, mais il n'était plus temps ; les tambours et le canon se faisaient entendre, et les troupes françaises se précipitaient au pas de charge.



En effet, on n'avait pas tardé à s'apercevoir à la citadelle de la disparition du déserteur, et la sortie, fixée à cinq heures, avait eu lieu immédiatement (trois heures du matin). Les postes avancés de l'ennemi étaient seuls sous les armes, et avant que les colonnes du Boucau et de Hayet eussent eu le temps de se rallier et de marcher sur le théâtre du combat, la garnison avait repris vaillamment, et au fil de la baïonnette, toutes les positions dont elle avait été maîtresse avant le 27 février. Sur le plateau de Montaigut avait eu lieu le combat le plus terrible et le plus longtemps disputé ; la maison Monet et les retranchements anglais, pris et repris quatre fois, se pavèrent de cadavres, enfin le terrain resta aux braves bataillons français des 32e, 26e et 76e de ligne. Les troupes anglaises culbutées dans les revers de Montaigut, se retirèrent alors dans le petit vallon dont nous avons parlé au commencement de cet épisode. Le déserteur qui venait de vendre lâchement la garnison servait de guide au général Hope, lorsque les balles des voltigeurs du 82e, abattirent le chef anglais et tuèrent le traître sur place.



Les batteries de la citadelle dirigeaient, en même temps, un feu terrible sur le petit vallon où les troupes des 1er, 2e et 3e régiments de la grade royale anglaise et du 66e de ligne se retiraient en désordre ; malgré les plis du terrain, les boulets creusaient les rangs et frappaient sans relâche les officiers, les soldats, les chevaux et les arbres qui se trouvaient sur le chemin de leurs terribles ricochets.



Un magnifique cerisier s'élevait à gauche du petit vallon, sur une pente couverte de hautes fougères foulées et déchirées. Le terrain fut rapidement couvert de cadavres et le tronc de l'arbre garda merveilleusement le boulet, comme pour y conserver la date d'un combat et d'une époque mémorables. Autour de cet arbre furent ensevelis les officiers tués à ses pieds dans la journée du 14 avril, et c'est là l'origine de ce modeste et historique cimetière, si paisiblement caché dans la commune de Saint-Etienne. Pendant seize années, quelques pierres grossièrement taillées signalèrent seules aux habitants et aux visiteurs la sépulture des officiers anglais. Les soldats avaient été enterrés pêle-mêle là où ils étaient tombés, et les paysans montrent encore sur toutes ces hauteurs, jusqu'au Boucau, de petits tertres protégés par une croix et abrités le plus souvent par des taillis ; c'est le dernier souvenir du blocus de 1814.



En 1830, une sorte de souscription fut ouverte dans le 2e régiment de la garde royale anglaise, appelée "Coldstream", et M. Harvey, consul à Bayonne et ancien capitaine dans ce même régiment, fut chargé d'acheter le terrain où reposaient ses compagnons d'armes et d'y faire construire un mur de clôture. Bientôt, en effet, le cimetière s'éleva ; quelques arbres y furent plantés, et une sorte de pierre tumulaire, placée debout à une des extrémités du monument, rappela le nom des morts et la date de la sortie de la garnison de Bayonne. On lit les noms suivants sur les tombes distribuées sans ordre dans le cimetière :

G. Callier et H. Sullivan, baronnet et membre du parlement, lieutenants-colonels du régiment de Coldstream, 2e de la garde.

W. G. Grofton et W. Burroughs, capitaines dans le même régiment.

F. Vachell et J.-B. Shiffner, capitaines, et F. Halbourne lieutenant dans le 3e régiment de la garde.

J. Hamilton, lieutenant dans le 60e de ligne.



Voilà ceux qui ont obtenu les honneurs de l'épitaphe et qui dorment paisibles, à 300 lieues de leur patrie, sur quelques pieds de terre qui leur appartiennent et qu'ils ont achetée à un assez haut prix, pour que notre susceptibilité française ne puisse pas s'en offenser. Le monument du "Coldstream Guards" est devenu, depuis 1830, le but de pèlerinages d'une foule d'Anglais que leurs affaires ou leurs goûts cosmopolites ont amenés dans nos contrées.



On assure même que quelques-uns d'entr'eux, sous l'influence d'une pensée exclusive de pitié nationale, ont fait le voyage de Londres pour contempler un instant la tombe de leurs compatriotes et pour en emporter des feuilles ou des fleurs mémoratives qu'ils plieront précieusement dans leur album, et qu'ils classeront plus tard dans leur musée domestique, entre un fragment de lave que l'action du feu a capricieusement tordu et quelque onyx de Bengale. Il y a quelque chose, en effet, d'aventureux et de bizarre dans la destinée de ces hommes du Nord, que la fatalité a retenus pour toujours au fon de notre France méridionale, et les fleurs qui croissent sur leurs tombes valent bien la peine qu'on en enrichisse l'album d'un artiste ou d'un oisif."




Merci ami(e) lecteur (lectrice) de m'avoir suivi dans cet article.

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