L'AFFAIRE STAVISKY ET BAYONNE.
C'est une crise politico-économique qui secoue la France à la fin de décembre 1933, mettant en cause de nombreuses personnalités y compris en Pays Basque Nord.
Comme je vous l'ai indiqué précédemment, puisque nous sommes samedi, voici un autre article
sur le "feuilleton" de l'affaire Stavisky et ses répercussions au Pays Basque.
Voici ce que rapporta à ce sujet la Gazette de Bayonne, de Biarritz et du Pays basque, le 11 janvier
1934 :
"Le scandale du Crédit Municipal de Bayonne grandit encore.
3 nouveaux inculpés : MM. Dubarry, Bonnaure et Camille Aymard.
Le juge demande la levée de l'Immunité parlementaire concernant M. Bonnaure.
... Les juges et les avocats ont assisté à la prison de Bayonne à la confrontation. Les nouvelles inculpations. - La situation au Conseil Municipal.
Décidément, l'affaire se corse.
Ce n'est pas un jeu de mots. C'est une triste constatation.
Nous en étions hier à cinq inculpations, moins une, celle de Stavisky, tragiquement disparu. Mais aux quatre qui restaient, à midi, celles de M. Garat, de Tissier, de Darius et de Hayotte, trois autres venaient s'ajouter dans la soirée.
M. d’Uhalt a en effet lancé deux mandats d'amener contre MM. Dubarry, directeur de La Volonté, et Camille Aymard. ancien directeur de la Liberté, de Paris, qui demeura rédacteur à ce journal lors de son récent remaniement.
Le juge a demandé, d’autre part, le levée d'immunité parlementaire, en ce qui concerne M. Bonnaure, député, qui aurait largement profité des libéralités de Stavisky.
Ainsi donc, la prison de Bayonne va compter bientôt sept inculpés... en attendant les autres, car on annonce que "ça ne fait que commencer".
Le triste édifice va devenir trop petit. Et c'est tellement vrai qu'on envisage d'y empiéter sur le quartier des femmes.
Une fois de plus, on s'est demandé, devant l’ampleur prise par cette affaire, si le Parquet de Bayonne continuerait d'en être saisi et si le procès se déroulerait à Pau.
Les dernières impressions sont que le juge de Bayonne continuera de mener toute l'instruction et que c'est devant la Cour d'assises des Basses-Pyrénées que se déroulera ce retentissant procès.
La confrontation d'hier, ù la prison, ainsi qu’on le lira plus loin, n'a pas modifié les positions.
Tissier a continué d'accuser M. Garat, avec moins d'assurance, par moments, semblait-il.
M. Garat s'est défendu avec sang-froid et a même lancé un coup de boutoir. Comme on faisait état des relations familières qu'il eut avec Stavisky, le député de Bayonne répliqua qu’il n'était pas le seul et mit en cause une très haute personnalité de la police de Paris.
La confrontation sc poursuit aujourd'hui.
Et dire que le distingué magistrat qui mène l'instruction déclarait, il y a deux jours aux journalistes qui sont "sur les dents" : "Je mange toujours de très bon appétit... et je dors sur les deux oreilles" !
Hier après-midi...
A Bayonne.
La journée d'hier à Bayonne s’est déroulée lentement pour ceux qui attendaient.
Cinquante à soixante personnes se tenaient devant la prison, stationnant, allant, venant ; les journalistes purent reconnaître Darius amené en vitesse de Paris, lorsqu’il franchit le seuil de la Villa Chagrin où d'autres, tant d’autres vont bientôt le rejoindre.
En effet, vers dix heures, comme une traînée de poudre, le bruit se répandit parmi les initiés que trois arrestations étaient imminentes, dont une qui nécessitait la demande de levée de l’immunité parlementaire ; il s’agissait de M. Dubarry, directeur de la "Volonté", de M. Camille Aymard, ancien directeur de "La Liberté" de Paris, et toujours rédacteur à ce journal, et du député Bonnaure.
BUSTE D'ALBERT DUBARRY DIRECTEUR LA VOLONTE PAR LEON-ERNEST DRIVIER |
CAMILLE AYMARD DIRECTEUR LA LIBERTE PHOTO DE L'AGENCE MEURISSE |
DEPUTE GASTON BONNAURE PHOTO AGENCE MONDIAL |
Tous trois auraient été largement "arrosés" par Stavisky.
M. Camille Aymard aurait reçu une très grosse somme ; la campagne électorale de Bonnaure aurait été payée par Stavisky qui aurait, entre autres libéralités, acquitté une note de tailleur de 15 000 francs, et remis aussi une somme de 40 000 francs.
Deux de ces trois personnages, gardés à vue après les résultats de l’enquête à Paris, seront amenés à Bayonne dès la réception des mandats d’amener lancés par M. d’Uhalt.
La troisième suivra dès que la Chambre aura levé l’immunité qui le couvre.
On disait encore un peu plus tard qu’un des points intéressants de la journée d’aujourd’hui à Bayonne, avait été le fait que M. Garat, au cours de ses explications, avait été amené à dire que M. Chiappe, préfet de police, était un des familiers de Stavisky et que Stavisky et M. Chiappe avaient déjeuné ensemble. Ce bruit que nous enregistrons sous réserves ne semblait cependant étonner personne ; tout est si extraordinaire dans cette fabuleuse affaire qui ne fait que commencer, paraît-il, et qui réserverait de sensationnelles surprises.
JEAN CHIAPPE |
On s’attend à des révélations intéressantes de la part de Dubarry, dont on sait le cynisme et qui ne ménagera rien ni personne.
Quant à la journée d’hier à Bayonne, elle a été marquée par la confrontation des deux inculpés qui sont restés l'un et l’autre sur leurs positions. Tissier continue à accuser avec énergie M. Garat, disant qu’il ne pouvait nier avoir touché des sommes d’argent, M. Garat niant avec indignation.
Des explications de M. Garat.
Avant la confrontation, M. Garat a été interrogé pendant une demi-heure en présence de Me Campinchi et de Me Jacques Simonet, M Simonet père étant retenu à la Mairie.
MAITRES CAMPINCHI ET SIMONET BAYONNE LA PETITE GIRONDE 11 JANVIER 1934 |
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