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samedi 19 août 2023

L'AFFAIRE STAVISKY ET BAYONNE EN LABOURD AU PAYS BASQUE EN 1934 (vingt et unième partie)

 


L'AFFAIRE STAVISKY ET BAYONNE.


C'est une crise politico-économique qui secoue la France à la fin de décembre 1933, mettant en cause de nombreuses personnalités y compris en Pays Basque Nord.



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ALEXANDRE STAVISKY


Comme je vous l'ai indiqué précédemment, puisque nous sommes samedi, voici un autre article 

sur le "feuilleton" de l'affaire Stavisky et ses répercussions au Pays Basque.



Voici ce que rapporta à ce sujet la Gazette de Bayonne, de Biarritz et du Pays basque, le 29 janvier 

1934 :


"L'Instruction à Bayonne.

Aujourd'hui marquerait une active reprise.


On avait constaté, la semaine dernière, un ralentissement dans la marche de l'instruction. Elle avait pour cause, on le sait, le transport momentané du dossier à la Cour de Pau, saisie des demandes de mise en liberté provisoire de M. Camille Aymard et de Darius. La première de ces demandes nous l’avons dit, a été accueillie favorablement, mais la seconde n'a pas été écoutée d’une oreille favorable. 


Mais cela est déjà du passé, pour si proche qu’il soit. 


Aujourd'hui l’activité va renaître : auditions, interrogatoires, confrontations, expertises, vont se succéder au cours de la semaine. On prédit qu’ils apporteront du nouveau. On parle même de nouvelles inculpations... 


Ne nous hâtons pas trop, en si grave occurrence. Laissons, comme il a déjà été dit, la Justice poursuivre sa tâche en toute sérénité. 



Ce que fut la journée d’hier à Bayonne. 


C’était hier une radieuse journée, et par ce beau dimanche les danseurs basques ont parcouru les rues de Bayonne et de Biarritz offrant aux journalistes, aux avocats, aux experts, une distraction originale et bien éloignée de leurs habituelles préoccupations.


En ce dimanche ensoleillé, M. d’Uhalt et M. Dejean de la Batie n’ont pris qu’un repos partiel consacrant quelques heures de leur après-midi à une promenade sur les routes de la région, l’un dans sa voiture bleue, l’autre dans sa sombre conduite intérieure, mais ils ont passé la matinée et la soirée au Palais pour y étudier les dossiers. 



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JUGE D'INSTRUCTION M D'UHALT
PARIS-SOIR 16 JANVIER 1934

Ce fut "dimanche" aussi, à la Villa Chagrin, pour Tissier et pour Cohen qui ont pu recevoir la visite, le premier de Mlle Sabatier, le second de sa femme, l’une et l’autre dûment accréditées. 


Dans la matinée M. d’Uhalt a reçu au Palais, la visite de M. Aymard, accompagné de son avocat. M. Aymard qui compte se reposer quelque temps à Loudun, dans la Vienne, auprès de sa vieille mère, se rendra à la disposition du magistrat instructeur pour toutes les convocations ultérieures. 


Les avocats de M. Bonnaure, Me de Poorter et Me Flach, arrivés au Grand Hôtel, en cette journée de dimanche ont pu longuement s’entretenir avec leur client pour préparer la rude attaque qui les attend aujourd’hui à 14 heures. 


On peut présumer que ce sera une longue et rude bataille qu’ils auront à soutenir, M. d’Uhalt ayant de nombreuses et troublantes questions à poser à M. Bonnaure. 


Et cette bataille est le prélude de toutes celles qui vont suivre, cette semaine.



Les jours qui viennent... 


Mardi ce sera le tour de Hayotte. Hayotte presque oublié dans la mémoire du public, Hayotte qui, familier de Stavisky et de ses plaisirs connaît beaucoup de monde, sait évidemment beaucoup de choses et dont les révélations pourront être intéressantes. 


Et puis viendront les interrogatoires de Garat et de Tissier et leur confrontation qui certainement sera dramatique. On attend Me Campinchi, défenseur de M. Garat, qui arrivera probablement à Bayonne le 1er février. 


Bayonne va donc cette semaine, avec ce complet et poignant programme, reprendre la première place dans le domaine de l’information de l’affaire Stavisky. 



Darius à Bayonne.


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PIERRE DARIUS DIRECTEUR JOURNAL BEC ET ONGLES
AFFAIRE STAVISKY 1934


Darius, venant de Pau, est arrivé ce matin à Bayonne. Il a été reconduit à la prison. La date de son prochain interrogatoire n’est pas encore fixée. 



Une interview dramatique de M. Bonnaure.


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DEPUTE GASTON BONNAURE
PHOTO AGENCE MEURISSE

Nous lisons dans Le Matin


Le député Bonnaure se refuse, nous l’avons dit à toute déclaration précise sur les accusations dont il est l'objet. Hier soir, malgré le changement survenu dans la situation politique il persistait dans son étrange réserve. 


— Je ne veux pas vous suivre sur ce terrain, nous dit-il. Lors de la levée d’immunité parlementaire, je me suis placé sur le terrain judiciaire. J'y resterai. 


— Pourtant, insistons-nous, vous avez été mis en cause ces jours derniers de façon directe. Le public est saisi. Votre nom est le pivot d'un débat politique. Inculpé pour les mêmes délits qui motivaient les arrestations de quelques-uns, vous avez été laissé libre. On ne comprend plus ; on comprend d'autant moins que vous vous enfermez dans un silence, qui n’a pas celui-là l'éloquence. 


— Non, je ne dirai rien. Lundi seulement, chez le juge. 


— Alors, accusé sur la place publique, il vous suffira de vous expliquer en chambre noire ? 


— Qu'importe ce qu'on peut en penser. J’ai pour moi ma conscience... 


— Le gouvernement, vos amis politiques vous ont lâché. Vos électeurs... 


— Mes électeurs me resteront fidèles. 


— Voua n'aurez plus cependant pour payer les frais de votre élection les 400 000 francs de Stavisky, car c’est bien cela qui vous a valu d'être inculpé ? 


— On le dit, je ne sais pas. 


— Ces chèques dont on parle, les avez-vous endossés ? Est-il exact que 100 chèques de Stavisky trouvés au Crédit lyonnais soient à votre nom ? 


— Je ne répondrai pas.


— Vous ne dites pas non ? 


— Je ne dis oui ni non. 


— Mais vous ne dites pas non ? 


— Je vous en prie, ne me torturez pas...


Le député Bonnaure se plaint, mais ne s’indigne pas. Tout comme Garat interrogé par nous la veille de son arrestation, il combat sans grandeur et cherche à fuir. Il ne sait pas trouver les mots qu’on attend, qu’on voudrait lui souffler par pitié, ces mots qui clament une innocence. 


— J’ai pris conseil, il vaut mieux. J'ai résolu de me taire. 


— Grave décision que la vôtre. Hier, vous êtes parti libre. Demain le juge ne se montrera peut-être pas si clément. Alors, d’un cœur léger, vous allez paralyser vos mains dans les menottes. 


— Tant pis, j'ai confiance en la justice. 


— Qui donc parlera pour vous ? Si vous ne parlez pas maintenant, après il sera trop tard... Ceux qui ont franchi le seuil de la villa Chagrin devaient parler. Ils ne l'ont pas fait... 


— Ne remuez pas le couteau... J’ai juré de ne rien dire. 


— Mais ce serment vous l’avez fait à vous-même. Vous êtes libre de le reprendre. C’est le propre d’un homme intelligent de savoir revenir sur une décision prise. 


— Dites que je ne suis pas intelligent. 


— Quand donc avez-vous connu Stavisky


— En 1929. 


— Donc Stavisky et non pas Alexandre. 


— J'étais son avocat. Je me suis occupé de ses affaires qui devenaient de plus en plus importantes. 


— De ses affaires financières ? 


— Non, non, vous voulez revenir aux chèques... Je ne dirai plus un mot. 

Car les chèques sont pour le député Bonnaure la plaque tournante de la conversation. 


— Demandez-moi à quelle heure je déjeune et de quoi je me nourris, je vous répondrai. Parlez-moi d’autre chose, comme dit Lucienne Boyer. 


— Cela nous est indifférent. 


Et lui mettant sous les yeux un journal où s’étale la phrase accusatrice : "Les cent chèques de Bonnaure", nous insistons encore : 


— Le débat, le voilà. Vous n’avez rien à répondre à cela ? 


Mais, décidément, le député Bonnaure ne se montre sensible à aucun argument. Nous montrant à son tour le journal qu’il avait dans sa poche : 


— Je sais, je sais, dit-il, seulement ! lundi chez le juge, je parlerai... 


Nous verrons donc lundi. 


Ajoutons à l'interview qu’on vient de lire que l'Action Française, dans son numéro de samedi, accuse M. Bonnaure d’avoir touché 6 millions de Stavisky pour les distribuer à des parlementaires. 



Deux lettres des avocats de Tissier.


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MAÎTRE JEAN-CHARLES LEGRAND 1929
AFFAIRE STAVISKY 1934
PAYS BASQUE D'ANTAN


Me Jean-Charles Legrand et Me André Delmas, défenseurs de Tissier, ont adressé aujourd’hui à M. d’Uhalt, juge d'instruction, deux lettres. 


Dans la première lettre, les deux défenseurs demandent à M. d'Uhalt d'ouvrir une enquête sur les faits suivants

1° Mme Stavisky n'a-t-elle pas été entendue à la Sûreté générale par l'inspecteur principal Bonny ? 

2° N’a t elle pas fait des déclarations concernant un haut fonctionnaire ? 

3° N’a-t-elle pas refusé de laisser inscrire ces déclarations dans le procès-verbal de son audition ?

4° Ladite déclaration n'a-t-elle pas alors fait l’objet d'une note séparée et confidentielle ? 

5° Cette note a-t-elle été jointe au procès-verbal qu'on a dû transmettre au juge d’instruction de Bayonne


Voici la seconde lettre


Monsieur le juge d'instruction, 

A la suite de la demande d'audition que je vous ai adressée, concernant M. Guiboud-Ribaud, celui-ci a bien voulu préciser quelles auraient été ses fonctions au cabinet du ministre des Finances, M. Georges Bonnet. Les déclarations de M. Guiboud-Ribaud ont été nettes et catégoriques, mais M. Georges Bonnet, ministre des Finances démissionnaire, vient de faire publier un démenti. 



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GEORGES BONNET 
MINISTRE DES FINANCES
DU 26 NOVEMBRE 1933 AU 27 JANVIER 1934


Il ne saurait vous échapper, monsieur le juge, qu’aucune incertitude sur ce point capital de votre information ne saurait subsister. Il est indispensable de déterminer si M. Guiboud-Ribaud, avocat de Stavisky, a fait partie du cabinet de M. Georges Bonnet, ainsi qu’il l’affirme avec des précisions caractéristiques. 


Je vous demande de faire procéder à une enquête sur ce point et de rechercher, notamment, si M. Guiboud-Ribaud avait un bureau au ministère des Finances ; s'il a été en relation, dans ses fonctions, avec M. Maspetiol, chef adjoint de son cabinet ; s'il a été chargé de deux travaux concernant le contrôle fiscal et la restauration de l'étalon-or ; s’il a reçu au sujet de ces deux travaux, les félicitations personnelles du ministre.


Je vous demande de rechercher également, au besoin en interrogeant les intéressés, s’il est exact que c’est sur la recommandation de MM. Bonnaure et Dubarry que M. Bonnet a, par un arrêté en date du 7 février 1933, nommé M. Guiboud Ribaud chargé de mission à son cabinet. 


Afin de dissiper toute équivoque, je vous demande de confronter sur tous ces points M. Guiboud-Ribaud avec M. Bonnet."



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M GUIBOUD-RIBAUD
AFFAIRE STAVISKY 1934



A suivre... 





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