LE GRAND-DUC DIMITRI PAVLOVITCH EN 1928.
Dimitri Pavlovitch de Russie, grand-duc de Russie, cousin du tsar Nicolas II, a fait partie de la conjuration pour assassiner Raspoutine, le 30 décembre 1916.
Voici ce que rapporta à ce sujet La Gazette de Biarritz-Bayonne et du Pays basque, le 20 juin 1928 :
"Raspoutine, le Grand-duc Dimitri et le prince Yousoupof.
L’action de la fille du moine.
Quels mobiles l’incitent à l’intenter ?
On a vu comment la fille de Raspoutine, ce moine qui tint une si large place dans les conseils du tzar et de la tzarine avant la révolution russe, intentait un procès en vingt-cinq millions de dommages et intérêts au grand-duc Dimitri et au prince Yousoupoff, qui furent les justiciers de son père. On a lu aussi l’interview prise, à Biarritz, au grand-duc Dimitri, qui est l’hôte habituel de la grande station.
Quels mobiles guident la fille de Raspoutine ? C’est ce que se demande la Rumeur. Et voici ce que dit ce journal à ce sujet :
"Quels sont les vrais mobiles et qui sont les gens qui ont influencé la fille de Raspoutine pour que celle-ci se décidât à intenter une action en dommages-intérêts ? Toutes les suppositions sont permises.
Maria Sakoloff, dirait-on, aurait tenté cette suprême manœuvre pour assurer son avenir et celui de ses deux fillettes. Mais, pour mener à bien un procès d’une telle envergure et pour plaider contre un adversaire aussi puissamment armé, il faut de l’argent, et beaucoup. Or, Maria Raspoutine est presque indigente.
MARIA RASPOUTINE |
Il faut donc que quelqu’un ait avancé les fonds. Qui est-ce, et pour quelles raisons l’a-t-il fait ? Un bailleur de fonds aurait-il eu le courage d'affronter une aussi longue procédure, quand les risques sont énormes et les chances de réussite presque nulles ? Certes non. Maria Raspoutine a donc, derrière elle, des gens qui la soutiennent, soit par vengeance à l’égard du prince Youssoupoff, ou du grand-duc Dimitri, soit parce qu’un puissant intérêt politique les anime.
Cette dernière thèse est d’ailleurs celle de l’entourage du prince Youssoupoff.
PRINCE FELIX YOUSSOUPOV 1903 ET SA FEMME ZENAÏDA |
Les ennemis de Youssoupoff peuvent évidemment être nombreux et de toute sorte. En premier lieu on pourrait soupçonner le gouvernement bolcheviste. Mais il ne se compromettrait jamais à s'aboucher avec la fille de Raspoutine, et quel intérêt pourrait-il avoir à anéantir ce prince déchu qui n’a aucun titre pour se poser en candidat au trône ?
Le prince est au mieux, dit-on, avec certains milieux pétroliers. Il est possible qu’un groupe concurrent veuille le mettre dans l’impossibilité d’agir, mais il est encore plus probable que ses ennemis se recrutent dans les milieux qui étaient jadis dévoués à Raspoutine.
En effet, Raspoutine a jusqu’à l’heure actuelle encore des amis et des fidèles.
Cet homme extraordinaire, dont le caractère demeure incompréhensible aux gens de l’Occident, où les intérêts, les ambitions et les haines sont tempérées par le rythme d’une vie sans heurts, cet homme tout en contradictions continue à vivre dans la mémoire de ceux qui l’aimèrent et il hante leur sommeil.
Quoi qu’il en soit, il y a lieu de croire que le procès ne se plaidera jamais, et que les tribunaux français se déclareront incompétents. En effet, et c’est l’avis de plusieurs spécialistes de droit international que nous avons consulté les tribunaux français peuvent citer à comparaître tous les justiciables qui habitent la France, sans distinction de nationalité. Ils jugent des étrangers entre eux d’après les lois ou sur la base des usages établis. Dans des cas de meurtre, commis sur un territoire étranger, on applique, d’ordinaire, la législation en vigueur dans ce pays.
Or, d’après la législation russe, il y a prescription, car le meurtre a été commis en 1916 et le délai de la prescription était, en Russie, de dix ans.
Enfin, la demande de 25 millions de francs n’est pas justifiée, car la loi russe exige, pour l’établissement des dommages-intérêts, un relevé exact des revenus. L’évaluation des dommages dits "moraux" n’entre en ligne de compte que subsidiairement. Bien entendu, les revenus avoués de Raspoutine étaient de peu d’importance. Le procès eût été — car il n’aura pas lieu — à la vérité très passionnant.
Ajoutons que jusqu’ici aucune assignation n’est parvenue à M. Youssoupoff, malgré la déclaration faite à l’avocat du prince Me de Moro-Giafferi, par l’avocat de Mme Salovieff, Me Garçon.
MAÎTRE VINCENT DE MORO-GIAFFERRI |
On ne saurait en tout cas, négliger un détail assez piquant : c’est que avant que s’ouvre toute procédure, un film doit être tourné, dont on a déjà parlé, d’ailleurs, qui s'appellera : "La Fille de Raspoutine" et dont... la fille de Raspoutine jouera naturellement, le premier rôle.
Faut-il établir une corrélation quel conque entre cette proche éventualité et l’action judiciaire qu’on annonce ?
Et la description que font nos interviewers de la belle plaideuse — "trente ans, blonde aux yeux bleus, regard volontaire" ne ressemble-t-elle pas au signalement qu’on donne lyriquement de celles qui vont paraître à l’écran ?
Il semble bien que la question ne soit pas de savoir si la vedette slave obtiendra ses vingt-cinq millions, mais si le film qu’elle va tourner rapportera pareille somme à la firme qui l’entreprend...
Le Prince Youssoupoff déclare.
M. Polounine, fondé de pouvoir du prince Youssoupoff, après avoir eu un entretien avec ME de Moro-Giafferi, a déclaré à la presse, au sujet du procès intenté par la fille de Raspoutine contre le prince :
— "L’affaire est très compliquée au point de vue droit. Nul mieux que Me de Moro-Giafferi ne saura défendre les intérêts du prince dont il est l’avocat attitré.
En tuant Raspoutine, le prince Youssoupoff et ses amis ont pensé accomplir un acte de justice. Raspoutine étant considéré par eux, par tous les vrais Russes, comme un homme néfaste pour la Russie et le régime impérial.
Le prince avait les meilleures raisons de croire Raspoutine agent de l’Allemagne, conscient ou inconscient.
On ne saurait trop le répéter, le prince Youssoupoff croyait, en décembre 1916, servir son pays et la cause des alliés.
Depuis cette date, le prince n’a pas vu ses convictions ébranlées par les ouvrages parus sur ce sujet ou par les faits qui se sont déroulés dans notre malheureux pays.
Pleinement conscient du rôle qu'il a joué, de la responsabilité qu’il a assumée en commettant un crime, il a tenu à publier un livre, dernièrement paru, qui est en quelque sorte la justification de son acte.
LIVRE LA FIN DE RASPOUTINE PAR LE PRINCE YOUSSOUPOFF |
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