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mardi 12 mars 2024

LES CAGOTS AU PAYS BASQUE EN 1877 (troisième et dernière partie)

 

LES CAGOTS AU PAYS BASQUE EN 1877.


Un(e) cagot(e), dans le Sud-Ouest de la France, était aussi appelé agote, sur le versant Sud des Pyrénées, en Espagne. Il s'agissait de termes dépréciatifs qui désignaient des groupes d'habitants, exerçant des métiers du bois, ou du fer, frappés d'exclusion et de répulsion dans leurs villages, surtout au Pays Basque.



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LIVRE HISTOIRE DES RACES MAUDITES DE LA FRANCE ET DE L'ESPAGNE
DE FRANCISQUE MICHEL




Voici ce que rapporta à ce sujet le Journal officiel de la République française, le 9 juin 1877, sous 

la plume de Frédéric Béchard :



"Etudes historiques.

Les races maudites de l'Europe.

(2e et dernier article). 



... Il nous est impossible, on le comprend, de suivre l'auteur dans tous les détails scientifiques de sa démonstration. Bornons-nous à constater aussi exactement que possible, sans accompagner les bohémiens dans leurs stations plus ou moins longues en Grèce et dans les contrées slaves, la date de leur arrivée en Occident.



Il est question d'eux en Allemagne dès l'année 1417. Voici, traduit du latin, le récit d'un témoin presque contemporain de leur entrée dans cette partie de l'Europe : "Dans le cours de l'an de J.-C. 1417, parurent pour la première fois en Allemagne des hommes horribles par leur noirceur, brûlés par le soleil, immondes dans leur vêtement, sales en toute chose, adonnés au vol, surtout leurs femmes qui font vivre les hommes de leurs pilleries. On les appelle Tartares ou Gentils, en Italie Ciani. Ils ont à leur tête des hommes qui se distinguent par leur costume et par les titres de ducs, comtes, chevaliers, et qui nourrissent des chiens de chasse à la façon des nobles.



Ils changent souvent de chevaux, mais le gros de la troupe marche à pied. Les femmes sont portées sur des juments avec les enfants et les ustensiles. Ils colportent des lettres du roi Sigismond et de quelques autres princes pour qu'il leur soit permis de passer sains et saufs par les villes et les provinces. Ils prétendent courir le monde par pénitence et être sortis de l'Egypte mineure. Mais ce sont là des fables. L'expérience démontre que cette espèce de gens née dans le vagabondage et vouée à l'oisiveté ne connait pas de patrie. Ils n'ont aucune religion, bien que parmi les chrétiens ils aient l'habitude de faire baptiser leurs enfants. Ils accueillent çà et là des mauvais sujets des deux sexes qui se mêlent à leur compagnie et forment cette étonnante tourbe humaine, parlant toutes les langues..." 



Un an après on les trouve en Suisse, et en 1422 en Italie. "Le dimanche d'après la mi-août, qui fut le dix-septième jour d'août 1427, dit Pasquier dans ses Recherches de la France, vinrent à Paris douze tenanciers, comme ils disaient, c'est à savoir un duc, un comte et dix hommes, tous à cheval, et lesquels se disaient très bons chrestiens et estant de la Basse Egypte, et encore disaient que n'avait pas grand temps que les chrestiens les avaient subjuguez et tout leur pays et tous fait chrestienner ou mourir ceux qui ne voulaient estre... Presque tous avaient les oreilles percées et en chacune d'elles un annel d'argent ou deux en chacune et disaient que c'étaient gentillesses en leur pays. Item les hommes étaient très noirs, les cheveux crespés, et les plus laides femmes que l'on peut voir et les plus noires... et néanmoins leur pauvreté, en leur compagnie avaient des sorcières qui regardaient ès-mains des gens et disaient ce qui advenu leur était ou à l'advenir et mirent contens en plusieurs mariages, car elles disaient : "Ta femme t'a fait coup"..., tant est que la nouvelle en vint à l'evesque de Paris, le quel y alla et mena avec lui un frère prêcheur nommé le petit Jacobin..." C'est en 1447 qu'ils firent leur apparition en Catalogne. "Le 14 juin de cette année-là, fit son entrée dans Barcelone une troupe commandée par des chefs qui prenaient les titres de duc et comte et qui avançaient les mêmes impostures qu'en France, d'où ils venaient probablement."



Il est facile de se rendre compte de l'effet produit, en ces siècles naïfs, sur les imaginations populaires, par l'arrivée de ces mystérieux nomades, au teint cuivré, au regard flamboyant, montés sur de maigres chevaux ou traînés dans des charrettes attelées d'ânes ou de mulets, se donnant entre eux les titres de duc, de comte, et porteurs de lettres de l'empereur ou même, murmurait-on tout bas, du pape lui-même. On n'est pas parvenu encore aujourd'hui à fixer d'une manière exacte le lieu de leur berceau et l'époque de leur exode. Descendent-ils, comme l'affirment certains historiens, de ces premiers habitants de l'Inde qui forment ce qu'on appelle le rameau proto-hindou ou dravinien et qui furent dépossédés par l'invasion aryenne ? Sont-ils, au contraire, les résultats de plusieurs émigrations partielles, diverses et successives ?



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GITANS REMPAILLEURS A HENDAYE
PAYS BASQUE D'ANTAN


Représentent-ils simplement la postérité multipliée de ces 27 000 déportés bysantins dont parle M. de Goëje ? S'il est impossible, de nos jours, d'arriver sur aucun de ces points à la moindre certitude historique, on comprend à quelles invraisemblables légendes dut donner naissance, au Moyen-Age, le mystère qui planait sur leur origine. Protégés par l'ignorante crédulité du peuple, ce fut pour les bohémiens l'âge d'or. Il ne dura pas longtemps. Leurs déprédations, les voleries de leurs femmes appelèrent bientôt sur eux les sévérités des gouvernements occidentaux. Ferdinand et Isabelle la Catholique durent prononcer contre eux un décret d'expulsion. En France, Louis XII ordonna, le 27 juillet 1504, de les chasser du royaume.



Depuis ce moment, les rigueurs ne se ralentissent pas. Un édit de Louis XIV, de 1675, ordonne "de leur courrir sus par le fer et le feu". Au siècle suivant, on leur donne la chasse comme aux loups ; leur capture est payée d'une prime. Au commencement de notre siècle, enfin, tous les bohémiens du pays basque se virent un jour (6 décembre 1802) enveloppés comme dans un immense filet par ordre du préfet Castellane et enfermés provisoirement dans les citadelles de Saint-Jean-Pied-de-Port et de Bayonne.



Mesures inefficaces ! sévérités inutiles !



Les bohémiens de tous les pays ont survécu aux décrets d'expulsion, aux condamnations, aux proscriptions, et vers 1840, nous voyons une véritable croisade s'organiser contre eux dans nos départements pyrénéens. "La vie errante, disait alors un des journaux les plus importants de cette contrée, le Mémorial des Pyrénées, leur est inhérente comme la paresse et la débauche... Après leur première communion, les enfants quittent le village qui les a vus naître, qui applaudissait, en sa simplicité, à cette entrée dans la famille citoyenne et chrétienne, et vont porter ailleurs leur nullité de croyance, leur obéissance passive à un naturel dépravé. Les filles suivent les mêmes errements, commettent le même sacrilège, quittent l'Eglise pour une prostitution immédiate. La bauge natale est d'habitude le lieu choisi pour leur initiation à la débauche et au libertinage."



Dans cette levée de boucliers, la magistrature s'unit à la presse. "Une bohémienne du pays de la Soule, qui avait été la reine de fa tribu, dit, le 3 novembre 1863, le premier avocat-général près la cour de Pau, à l'audience de rentrée, résumait ainsi sa morale : 

Prendre ce dont on a besoin n'est pas voler.

On tue quand on ne peut pas faire autrement.

La fidélité dans le mariage est affaire de cœur. 


Une telle situation, ajoutait le magistrat, exige un remède énergique."



La vitalité de ces tribus vagabondes, la persistance de ces individualités fainéantes et pillardes, malgré les mesures sévères dont elles sont l'objet, au milieu des populations stables et laborieuses de l'Europe, s'expliquent jusqu'à un certain point par la complaisante indifférence avec laquelle les bohémiens s'accommodent de toutes les religions et par la facilité avec laquelle ils parlent toutes les langues, tout en conservant leurs mœurs et leur idiome particuliers. Le phénomène n'en est pas moins curieux à constater et intéressant à étudier. Ce problème, l'auteur qui a si bien réussi à définir l'origine des cagots, n'en donne pas la solution complète dans son livre. Après lui, comme avant, le berceau des bohémiens reste enveloppé d'une ombre impénétrable, mais M. de Rochas, a réuni une foule de détails qui jettent quelque jour sur l'histoire de cette race errante. Il est allé les visiter dans leurs tanières, comme il avait visité dans leurs cabanes les familles de cagots ; il nous offre, dans son intéressant et instructif ouvrage, la statistique des bohémiens du pays basque français en même temps que le tableau des mœurs, des habitudes, des danses, des cérémonies matrimoniales des bohémiens de tout pays ; il nous initie, enfin, en mettant sous nos yeux une sorte de grammaire et de dictionnaire bohémiens, aux variétés de leur dialecte et réussit à démontrer la communauté d'origine des gitanos, des zingari, par les analogies de leur langue mieux encore que par celles des traits et du teint.



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LIVRE LES PARIAS DE FRANCE ET D'ESPAGNE
DE V ROCHAS


Contrairement aux cagots, qui ne représentent pour lui que des castes, les Bohémiens constituent à ses yeux une race.


"La France, dit en finissant l'auteur du livre que le lecteur nous remerciera de lui avoir signalé malgré l'aridité de certains détails de philologie, la France est de tous les grands pays de l'Europe celui qui compte le moins de bohémiens ; à peine en trouverait-on un millier dispersés dans le Midi, car les gitanos rayonnent des Pyrénées-Orientales jusqu'à Bordeaux et Valence, tous en relations, tous ligués pour exploiter la bonne foi des chalands ou la crédulité des esprits incultes, sauf quelques honorables exceptions. Leurs pères sont venus chez nous dans un état social qui ne leur permit pas de se fondre dans la population ; l'écart entre les deux races et les deux états sociaux était trop grand. Ils ont donc fait souche de parias et livré à la société qui les repoussait de son sein une guerre acharnée. Mais de part et d'autre les mœurs se sont adoucies ; les bohémiens ont cessé aujourd'hui d'être un danger public et la loi d'exception qui pesait sur eux a été abrogée. Ils ont été conviés au bénéfice de la qualité de citoyens. Un tiers à peine en a profité pour se transformer ; le reste est encore pour la société une nuisance. Il appartient au gouvernement de faire cesser cet état de choses, et il y arrivera, croyons-nous, sans violence, par deux moyens, l'instruction primaire et le service militaire. Nous avons déjà le second ; il reste à l'appliquer plus exactement à des gens qui se déplacent sans casse, il est vrai, mais dont un nombre infime dépasse la frontière pour échapper à la loi de recrutement ; quant au premier moyen, plus efficace encore que le deuxième auquel il servirait de préparation, nous espérons qu'on pourra bientôt en faire profiter les bohémiens, et que, d'ici à la fin du siècle, il n'y aura plus en France que des Français."




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lundi 12 février 2024

LES CAGOTS AU PAYS BASQUE EN 1877 (deuxième partie)

LES CAGOTS AU PAYS BASQUE EN 1877.


Un(e) cagot(e), dans le Sud-Ouest de la France, était aussi appelé agote, sur le versant Sud des Pyrénées, en Espagne. Il s'agissait de termes dépréciatifs qui désignaient des groupes d'habitants, exerçant des métiers du bois, ou du fer, frappés d'exclusion et de répulsion dans leurs villages, surtout au Pays Basque.



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LIVRE HISTOIRE DES RACES MAUDITES DE LA FRANCE ET DE L'ESPAGNE
DE FRANCISQUE MICHEL




Voici ce que rapporta à ce sujet le Journal officiel de la République française, le 9 juin 1877, sous 

la plume de Frédéric Béchard :



"Etudes historiques.

Les races maudites de l'Europe.

(2e et dernier article). 


IV 

Dans son Histoire des races maudites de France et d'Espagne, M. Francisque Michel passa en revue, province par province, département par département, les cagots des Pyrénées, les cagots de Gascogne, les colliberts du Bas-Poitou, les cacous de Bretagne et de Paray-le-Monial, les chuetas de Majorque, les vaqueros des Asturies, etc., etc., et discute un à un les divers systèmes à l'aide desquels on a essayé d'expliquer leur origine. Il réfute l'opinion de Marca, qui voit en eux des descendants des Arabes et des Sarrazins et qui attribue à cette origine syriaque le soupçon de ladrerie et de puanteur dont ils étaient atteints. Il n'admet pas davantage qu'ils soient les petits-fils des Goths vaincus à Vouillé, malgré la vraisemblance que donne à cette origine l'apparente étymologie de leur nom (ca-gots, chiens de goths). Le système qui en fait des réfugiés espagnols ou d'anciens ariens lui paraît également contraire à la vérité. Il combat tour à tour Court de Gébelin, leur donnant une origine albigeoise, et le Bordelais Venuti, prétendait, en vertu de l'homonymie des mots chrestians et lépreux dans la plupart des documents relatifs aux ladreries, qu'ils sont des chrétiens partis pour la croisade, d'où ils auraient rapporté la lèpre. L'idée qu'à la suite de ces controverses il finit par adopter, c'est qu'ils sont les héritiers de ces Espagnols compromis pour la cause de Charlemagne, qui se virent forcés, après la défaite de Roland à Roncevaux, d'émigrer dans le Midi de la France, et qui, mal accueillis et molestés par les indigènes, durent recourir, comme on sait, à la protection de Charlemagne d'abord, de Louis le Débonnaire et de Charles le Chauve ensuite.



M. V. de Rochas, dans son volume sur les Parias de France et d'Espagne, n'a pas de peine à faire ressortir tout ce que cette dernière thèse présente de spécieux. A son tour il examine les divers systèmes déjà analysés par M. Francisque Michel et s'applique à faire ressortir la logique et la vraisemblance de ceux qui font descendre les cagots des lépreux.




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LIVRE LES PARIAS DE FRANCE ET D'ESPAGNE
DE V ROCHAS


"L'année 1555, dit Jean Darnal, avocat au Parlement et jurat de Bordeaux, MM. les jurats firent ordonnance que les gahets qui résident hors de la ville, du côté de Saint-Julien, en un petit faubourg séparé, ne sortiraient sans porter sur eux, en lieu apparent, une marque de drap rouge." Un autre document du seizième siècle, un règlement des corps et métiers de Bourdeaux, relatif à l'estat des pasticiers et en date de 1557, met les gabets à côté des ladres proprement dits. Enfin le Parlement de Bordeaux, par ordonnances des 12 août 1581, 9 décembre 1592 et 7 décembre 1596, fit défense aux gahets de toucher aux vivres des marchés et de sortir sans porter sur leur poitrine un signe rouge en forme de patte de canard, sous peine du fouet : ordonnances applicables aux capots de Labourd et de Soule (en pays basque) qui relevaient du Parlement de Guyenne.  



Le parlement appliquait, on le voit, aux gahets les mêmes lois qu'aux lépreux. Toutefois il se gardait de les confondre. Ce qui le prouve, c'est son ordonnance du 14 mai 1578 qui prescrivait aux officiers et consuls de Casteljaloux et autres lieux de "policer ladres et gahets et, de leur faire porter la marque et le signal qu'ils ont accoutumé en tout temps, savoir : auxdits lépreux, les clignettes, et aux capots et gahets un signal rouge à la poitrine en forme de pied de canard". C'est sur cette distinction entre les ladres réels et "cette espèce de ladres, non du tout formez, mais desquels la conversation n'est pas bonne, qui sont charpentiers et bons travaillants et qui gaignent leur vie en cet art dans la ville et ailleurs" que M. V. de Rochas fonde sa théorie. 



Il consacre son premier chapitre aux léproseries et mentionne les mesures terribles prises contre les lépreux : "Sis mortuus mundo sed sempervivus pro Deo." Plus sévère que la législation juive, celle du Moyen-Age n'admettait pas que le malade pût guérir. Bien plus certaines coutumes frappaient de déchéance sa famille tout entière. En retranchant le lépreux de la société, la loi visait l'hérédité plus encore que la contagion. "Lospros et mesetz ne se entremescleran ni se maridaran ab los aoutros." Ces sages rigueurs de nos pères, en circonscrivant le mal et en l'anéantissant à sa source, nous ont délivrés de l'effroyable fléau, mais elles créèrent une véritable population de maudits. L'horreur qu'inspiraient les lépreux retomba sur leurs enfants et, dans toutes les provinces où avait sévi l'affreuse maladie, on vit se perpétuer des générations en quelque sorte frappées d'anathème. Le préjugé avait survécu au péril.



Après avoir historiquement démontré, à l'aide d'authentiques et nombreux documents, que les cagots ne sauraient être considérés comme des petits fils d'hérétiques, de Sarrazins ou de Visigoths, M. de Rochas constate que les divers termes sous lesquels ils ont été désignés dans les différentes provinces répondent tous à l'idée de lépreux. Ainsi, en Bretagne, tous les dictionnaires donnent au nom de cacous le sens de ladres. M. Hersart de la Villemarqué a publié une chanson où le mot de caqueux est synonyme de celui de lépreux. En Espagne, le dictionnaire de l'académie espagnole, le vieux for de Navarre, le Romancero du Cid s'accordent à appeler un ladre gafo et une ladrerie gaferia. Lest mots de gafets (gahets) et ladros (ladres) sont indistinctement employés dans les coutumes du Midi de la France. Celui de Chrestians, quelle qu'en soit l'origine, était synonyme de gahets, ainsi que l'atteste une ordonnance des jurats de Bordeaux au seizième siècle, par laquelle "il est statué qu'aucuns de ceux que l'on nomme chrestiens ou chrestiennes, ou autrement dit Gahets, de quelque lieu qu'ils soient, ne pourront sortir de leurs maisons". Quant à l'étymologie de cagot, il suffit de suivre les transformations du mot celto-breton cacous ou caquous, dont le radical est le mot celtique kakodd qui signifie ladre, pour se l'expliquer. L'étymologie de cassot et capot est encore plus facile à trouver, puisque cassot (cassalus en latin) en basse latinité, séparé, (cassati, les séparés du monde), et que capot désigne évidemment la casaque à capuchon, la cape que portaient les lépreux. Tous ces mots sans exception expriment, on le voit, l'idée de ladrerie ; tous, sauf deux, sont des dérivés directs du mot kakodd. Aux yeux de M. V. de Rochas, les parias de France et d'Espagne étaient donc des descendants de lépreux sur qui, par la transmission du préjugé, héréditaire comme le mal lui-même, l'épouvante et l'aversion populaires ont fait peser, même après que tout péril de contagion a eu disparu, la malédiction dont avaient été frappés les pères.




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THEODORE HERSART DE LA VILLEMARQUE



A l'appui de son système, M. de Rochas invoque une considération d'une grande valeur. Il fait observer que les idiômes des différentes variétés de cagots sont complètement indépendants l'un de l'autre. Ils n'ont pas même de radical commun. Chacun d'entre eux est la langue même du pays où il est parlé : basque, languedocien, gascon, breton, suivant les lieux. C'est donc sur place qu'a pris naissance la caste dont il est le langage ; aucune question de race n'a rien à voir dans cette question toute locale. Comment admettre que les enfants d'une même famille, même dispersés sur les sols les plus divers, n'auraient pas gardé, dans l'expression de quelques-uns de leurs sentiments ou de leurs idées, un souvenir quelconque de l'origine commune ? Les Juifs ont-ils jamais cessé de parler l'hébreu? Les bohémiens, disséminés sur la surface de l'Europe, ne se relient-ils pas tous les uns aux autres, malgré l'altération qu'a subie forcément leur dialecte dans les différents pays où ils ont été jetés, par d'incontestables analogies de grammaire et vocabulaire ?



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GITANS REMPAILLEURS A HENDAYE
PAYS BASQUE D'ANTAN


Portée sur ce terrain par M. V. de Rochas, la question, si longtemps débattue, de l'origine des cagots, nous semble avoir fait un grand pas. L'histoire, l'anthropologie, la linguistique s'y trouvent d'accord. Sans doute, il est permis de se demander comment des gens atteints de cette effroyable maladie ont pu exercer les métiers de charpentier ou de cordier auxquels ils étaient voués, et conclure, par exemple, un marché avec le vicomte Gaston Phoebus pour les œuvres de charpente du château de Montaner. Mais il ne faut pas oublier qu'il existait plusieurs catégories de malades, — à côté de l'éléphantiasis, la simple lèpre blanche, — et que si les léproseries s'ouvraient aux plus atteints, d'autres victimes de la contagion avaient le droit d'habiter des maisons isolées, à condition de ne se mêler à la foule, ni dans les églises, ni dans les processions, ni dans aucun autre lieu public. C'est en ceux-ci que M. V. de Rochas voit les ancêtres des maudits dont il vient de nous retracer la savante et désolée histoire.



Dans son étude sur les cagots, l'auteur des Parias de France et d'Espagne, a été devancé par M. Francisque Michel. Pour les Bohémiens, il n'a eu guère à consulter, en dehors des intéressants mémoires publiés sur ce sujet par M. Paul Bataillard dans la Bibliothèque de l'école des chartes et dans la Revue critique, que des ouvrages étrangers.




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LIVRE AUX BOHEMIENS DANS L'EUROPE ORIENTALE
DE PAUL BATAILLARD



"Jusqu'à la fin du siècle dernier où parut le livre de Grellmann, dit M. de Rochas, on n'avait que des conjectures sur l'origine des bohémiens... Grellmann rassembla un nombre assez considérable de mots bohémiens et il trouva que le tiers environ était hindou. Rapprochant alors la construction grammaticale de la langue bohémienne de celle des idiomes de l'Inde, il y trouva une analogie non moins frappante et en conclut que les bohémiens étaient venus de ce pays. Il alla plus loin encore, car, en cherchant parmi les principaux dialectes de l'Hindoustan celui qui avait le plus de rapports avec la langue parlée par les bohémiens, il s'arrêta à celui de Surate au N.-O. de l'Inde. C'était, du premier coup, approcher singulièrement de ce qui paraît être aujourd'hui la vérité. En effet, des travaux considérables, entrepris depuis lors dans la même direction, ont fixé le berceau des nomades connus dans les anciens pays de l'Europe sous les noms de Zincani, Zigucuner, Tchinguiânés, Tziganes, Gypsics, Gitanos, Bohémiens, chez l'ancienne tribu des Djatt ou Jatt, établis près de l'embouchure de l'Indus, dans le pays désigné aujourd'hui, comme le fleuve, par le nom de Sind. Cette solution du problème, entrevue dès 1849 par Bataillard chez les vieux annalistes arabes et persans, a été étayée par les travaux postérieurs de Trumpp et de Burton sur les idiomes du bas Indus."




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LIVRE HISTOIRE DES BOHEMIENS
DE H.M.G. GRELLMANN



A suivre...




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vendredi 12 janvier 2024

LES CAGOTS AU PAYS BASQUE EN 1877 (première partie)

 

LES CAGOTS AU PAYS BASQUE EN 1877.


Un(e) cagot(e), dans le Sud-Ouest de la France, était aussi appelé agote, sur le versant Sud des Pyrénées, en Espagne. Il s'agissait de termes dépréciatifs qui désignaient des groupes d'habitants, exerçant des métiers du bois, ou du fer, frappés d'exclusion et de répulsion dans leurs villages, surtout au Pays Basque.



cagots france espagne agots bohémiens histoire navarre
LIVRE HISTOIRE DES RACES MAUDITES DE LA FRANCE ET DE L'ESPAGNE
DE FRANCISQUE MICHEL




Voici ce que rapporta à ce sujet le Journal officiel de la République française, le 31 mai 1877, sous 

la plume de Frédéric Béchard :



"Etudes historiques.

Les races maudites de l'Europe.


Parmi les phénomènes historiques, un des plus intéressants est l'existence de ces races sur qui a pesé, à travers les siècles, comme un mystérieux anathème et qui, des temps les plus reculés au commencement de ce siècle, ont traversé les peuples et les civilisations sans s'y confondre, toujours proscrites, persécutées et vivaces.



Dans l'extrême Orient, les diverses classes de parias sont nombreuses ; en Europe, depuis l'avènement du christianisme, on n'en compte que deux : les Cagots sous leurs dénominations diverses : Gahets, Cacous, etc., et les Bohémiens : Egyptians, Zingaris, Tziganes, Gitanos, Caraccos, Gypsies.



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GITANS REMPAILLEURS DE CHAISES HENDAYE
PAYS BASQUE D'ANTAN


Les Cagots, depuis une soixantaine d'années, se sont fondus dans la masse de la population et, en Gascogne par exemple, les noms de quelques fontaines, de quelques maisons, de quelques hameaux, en perpétuent seuls le souvenir, souvenir plus effacé encore en Languedoc que dans les départements de la Gironde, du Gers et des Landes. En Bretagne, l'aversion dont les cacous étaient l'objet au Moyen Age tend aussi, à disparaître, bien qu'elle y soit plus tenace que dans le Midi de la France. Seuls, les bohémiens ont gardé leur personnalité bien distincte. Leur physionomie est toujours tout aussi caractérisée ; leurs mœurs n'ont guère changé ; ils mènent toujours la même vie nomade, et les gouvernements contemporains, témoin la récente circulaire du ministre de l'intérieur, sont obligés, comme les rois de France et d'Espagne du quatorzième et du quinzième siècles, de protéger contre les méfaits de ces tribus vagabondes la population de nos campagnes. Même chez eux, cependant, on peut saisir une amélioration, à la vérité presque imperceptible. C'est ainsi que, dans son livre intéressant sur les Parias de France et d'Espagne, M. V. de Rochas cite quelques familles de Boumians, celles entre autres de deux riches marchands de chevaux de Perpignan et de Béziers qui, dans leur vie sédentaire, donnent l'exemple de toutes les vertus bourgeoises.



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LIVRE LES PARIAS DE FRANCE ET D'ESPAGNE
DE V ROCHAS



Mais ce n'est là qu'une exception excessivement rare encore, contre laquelle protestent les nombreuses bandes de caraccos, campées dans le Midi, sous les arches des ponts, le long des fossés des grandes routes, à l'ombre des oliviers ou sans abri contre un ciel de feu, les pieds nus dans la poussière grise : jeunes gens au teint cuivré, vigoureux et larges de poitrine, aux cheveux d'un noir brillant, aux dents blanches comme des dents de nègres ; enfants gambadant sans chemise ; jeunes filles à la chevelure luxuriante, quelquefois fort jolies sous le hâle qui brunit davantage encore leur brun visage, au regard profond et brillant, aux formes harmonieuses, au moins jusqu'à la première couche ; vieilles femmes aussi horribles que les jeunes pour la plupart sont belles, ratatinées, à l'œil scrutateur et méchant, aux rares boucles de cheveux blancs retombant en désordre sur un front sec et plissé, types ressuscités parmi nous de la Mégère païenne. "Etrangers par la langue et les mœurs, dit M. de Rochas, mis au ban de la société par leurs méfaits, les bohémiens sont restés jusqu'à ce jour des déclassés. Les cagots, au contraire, séparés de la société par mesure d'hygiène d'abord et par le préjugé ensuite, ont repris leur place parmi leurs compatriotes, dont ils n'ont jamais été que les victimes, tandis que les autres en étaient et en sont restés jusqu'à un certain point les ennemis."



II 

C'est à la fin du treizième siècle que l'existence des cagots des Pyrénées, des gahets et capots de Guyenne et de Languedoc, et des cacous de Bretagne est historiquement constatée pour la première fois par des documents authentiques. Ils figurent, en 1266, au "livre d'or" de la cathédrale de Bayonne parmi les censitaires de Sainte-Marie pour la somme annuelle de six deniers. Dans la charte de fondation du village de Montaut, en 1308, par Marguerite de Foix, nous les voyons placés sous la juridiction exclusive de l'abbé de Saint-Pé, tandis que les autres habitants sont mis sous la juridiction mixte de cet abbé et du seigneur de Béarn. Le 14 novembre 1287, noble dame Rose du Bourg lègue par testament vingt sous aux "Gaffets de Bordeu" (Bordeaux). Le 20 mai 1300, Pieyre Amanieu, chevalier, captal de Buch, lègue aux mêmes cinquante sous d'or. Le 2 avril 1328, noble dame Asalbide de Bordeaux, épouse de noble et puissant baron Pierre de Grailly, vicomte de Benauges et de Castillon, "a leyssat à tot lo communal dels Gafets de Bordeu detz libras una veiz pagaduyras. Item a layssat à totas las maysons dels Guafetz de las honors de Benauges, dé Castelhon sur Dordogne et dé Castilhon dé Medoc, detz libras." Quant aux cacous de Bretagne, c'est en latin que nous a été conservé le plus ancien monument de leur existence. Il consiste en un statut de l'évêque de Tréguier, de 1436, qui règle la façon dont ils doivent être traités dans les églises. Les Agotes d'Espagne apparaissent à la même heure de l'histoire.



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AGOTS DE NAVARRE
PAYS BASQUE D'ANTAN



Des deux côtés des Pyrénées, l'obscurité qui entoure le berceau des cagots est restée également profonde et la malédiction qui pesait sur eux également implacable.


"En Béarn, Navarre et Aragon, dit un prêtre navarrais du commencement du dix-septième siècle, il y a une race de gens séparée des autres en tout et pour tout, comme s'ils étaient lépreux et quasi excommuniés. On les appelle communément agotes. Ils ne s'asseyent jamais à table avec les habitants. On croirait s'empoisonner en buvant en un verre qu'ils auraient approché de leurs lèvres. A l'église ils ne peuvent dépasser le bénitier.




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BENITIER DE CAGOTS
65 SAINT-SAVIN



Traiter de mariage avec eux serait chose aussi inouïe et abominable que si un chrétien traitait de mariage avec une mauresque ; et dans les siècles passés, il ne s'est jamais rencontré d'homme ou de femme assez misérable et de sentiments assez bas pour contracter alliance avec eux. La passion et la rage sont arrivées à tel point qu'on leur impute des infirmités qu'ils n'ont pas, comme d'être punais, d'avoir un flux de sang et de semence, de naître avec un petit bout de queue et autres absurdités de ce genre, qui, quoique contraires à ce qui se voit et se sent tous les jours, se répandent malgré tout et par tradition de père en fils pour attiser la haine, l'horreur et la répulsion contre ces misérables gens." 



Chez les historiens qui ont parlé des parias français, nous retrouvons les mêmes traits. Ainsi, suivant eux, les prêtres refusaient d'entendre les cagots en confession et de leur administrer les sacrements. Ils n'entraient pas à l'église par la grande porte ; une petite entrée leur était destinée, ainsi qu'une place à l'écart de la foule des fidèles ; de même dans les processions ; leur dépouille était enfouie dans un cimetière spécial ou dans un coin isolé du cimetière commun. Aussi dur pour eux que le pouvoir ecclésiastique, le pouvoir civil leur défendait de marcher nus pieds, d'entrer au moulin pour moudre le grain, d'aller laver aux fontaines ou lavoirs qui servaient aux autres habitants, de boire aux mêmes vases que ces derniers, de danser et de jouer avec eux, d'élever des bestiaux ou de se livrer au labourage. Les seuls métiers qui leur fussent permis étaient ceux de charpentier dans le Midi et de cordier en Bretagne. Les premiers étaient tenus de faire les cercueils et de construire les potences ; les seconds devaient fournir au bourreau la corde des pendus.



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BOHEMIENS 19EME SIECLE



Sous l'inspiration de M. du Bois-Baillet, intendant du Béarn, Louis XIV essaya, en 1683, d'adoucir la situation des cagots. 

"La liberté, est-il dit dans la déclaration royale pour leur affranchissement, ayant toujours été l'apanage de ce royaume et un des principaux avantages de nos sujets, l'esclavage et tout ce qui en pourrait donner des marques en ayant été banni, nous avons appris avec peine qu'il en reste encore quelque marque dans notre royaume de Navarre et dans les provinces qui étaient autrefois connues sous le nom de Novempopulaine qui, sont celles qui dépendent des diocèses d'Auch, Bayonne, Dax, Lescar, Oloron, Aire et Tarbes, dans lesquels il y a une certaine classe de gens qui y son considérés en quelque manière comme des esclaves, estant assujettis à de certains services attachés à suivre une même profession, séparés du commerce des autres hommes...


Désirant effacer toutes les marques de l'esclavage qui peuvent encore rester sur les terres de notre obéissance, entretenir l'égalité entre nos sujets et lever toutes les distinctions qui, n'estant establies que sur une erreur populaire, ne servent qu'à troubler la concorde entre nos sujets : à ces causes, nous avons éteint et supprimé toutes les distinctions qui pourraient exister entre les dits chrestians, cagots et nos autres sujets, pour qu'ils jouissent à l'advenir des mêmes privilèges et advantages ; et, à cet effet, abolissons les dits noms de chrestians, cagots, agots et capots, faisant défense, à peine de cinq cents livres d'amende, d'appeler ainsi par injure nos dits sujets affranchis par les dites lettres. Voulons qu'ils soient admis aux ordres sacrés et reçus dans les monastères, qu'ils soient placés dans les paroisses de leur demeure indifféremment avec les autres habitants, qu'ils puissent aller à l'offrande, prendre et rendre le pain béni, chacun à leur tour, et que les séparations qui sont dans les églises des places qu'ils occupent seront abattues et les portes d'entrée bouchées. 


"Prions et ordonnons aux évêques des diocèses ci-dessus marqués de tenir la main à l'exécution des deux précédents articles.


Permettons à nos sujets affranchis de choisir leurs habitations où bon leur semblera, même dans les villes ; voulons qu'ils puissent être choisis pour toutes les charges des communautés dans lesquelles ils feront leur demeure, tant honorables qu'onéreuses, qu'ils soient appelés aux assemblées des communautés dont ils font partie ; levons les défenses qui leur sont faites, tant par les coutumes des lieux que par les arrêts de nos parlements de contracter mariage avec nos autres sujets ; laissons liberté de choisir telle profession qu'il leur plaira, lesquels métiers ils pourront exercer et y être reçus maîtres, suivant l'usage des lieux, sans aucune distinction d'avec nos autres sujets, etc., etc. A nos amés et féaux conseillers, les gens tenant nos cours de parlement de Toulouse, Guyenne et Pau."



Malheureusement pour les pauvres cagots, la volonté royale fut moins forte que le préjugé populaire. Aux lettres patentes du roi Louis XIV le peuple répliqua par des chansons passionnément insultantes.



Les malheureux y répondirent dans leur patois plaintif :


Pour être des cagots, 

Nous n'en sommes pas moins les fils du père Adam

Dieu nous a créés comme les autres ; 

Il ne nous a point rejetés.

Nous travaillons pour gagner notre pain

Et pour gagner plus tard le ciel.



A l'époque de la Révolution, le préjugé populaire, battu en brèche depuis Louis XIII par le pouvoir royal, commençait à décroître, mais il était loin d'être anéanti. Toutefois, un Béarnais, qui écrivait en 1792, Hourcastremé, affirme que les cagots pouvaient prendre depuis longtemps le métier qui leur convenait et "qu'il n'y avait pas de bonne fête à Navarreins et dans les environs sans que le violon de Campagnet (famille de cagots musiciens) fît danser la compagnie." Quant aux emplois publics, ils leur étaient tous ouverts. Dufrêne, qui, après  avoir été employé dans les bureaux des affaires étrangères, fut nommé receveur général à Rouen par Necker, était un cagot du Béarn. Le gouvernement de la République n'eut donc point à édicter de disposition légale nouvelle en faveur des cagots ; la monarchie ne lui avait rien laissé à faire à cet égard. Mais si, en droit, ils ne gagnèrent rien à la Révolution, ces parias y gagnèrent, en fait, de pouvoir supprimer, à la faveur des troubles qui en furent la suite, les actes de l'état civil qui constataient l'ignominie de leur naissance. Quelques-uns d'entre eux se signalèrent, à cette époque, dans l'armée et même dans l'administration. Sous la monarchie constitutionnelle de Louis XVI Dufrêne était devenu intendant général de la marine et des colonies, puis directeur du Trésor public (1790) et Conseiller d'Etat. Sous la République, député de Paris en 1797, disgracié sous le Directoire pour sa sévérité en matière de contrôle financier, Bonaparte le rappela après le 18 brumaire, à la direction du Trésor public. Par sa haute probité et l'ordre admirable qu'il établit dans la comptabilité, il contribua, dans ce poste élevé, à rétablir le crédit national. L'intègre cagot mérita le buste, qui, à sa mort, en 1801, lui fut élevé dans la grande salle du Trésor public.


"Depuis le commencement du siècle, dit M. V. de Rochas, il n'y a plus de cagots, c'est-à-dire de parias, mais seulement des descendants de cagots. Ce n'est pas à dire que le préjugé soit complétement effacé. Les petites portes à l'église de maint village sont à peine bouchées ; le petit bénitier à peine desséché, et les corps des derniers maudits à peine consumés dans le coin réservé du cimetière.


Il reste encore des témoins de ces humiliantes distinctions, et j'ai pu recueillir leurs souvenirs. Mais il est consolant d'ajouter que les préjugés s'effacent en raison directe du carré des distances, surtout depuis 1830, même dans les vallons les plus reculés de nos montagnes. Les alliances mixtes, qui naguère encore souffraient des difficultés, n'en ressentent presque plus et la fortune égalise parfaitement les rangs."



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BOHEMIENS 19EME SIECLE



III

Si les écrivains sont d'accord sur la situation faite aux cagots par le préjugé populaire, ils s'entendent moins entre eux sur la physionomie de ces malheureux et surtout sur leur origine. Tandis que les uns affirment que "le cagot a l'haleine et la sueur puantes, qu'il est taché en quelque sorte de ladrerie, et qu'on le reconnaît à son oreille courte et arrondie, ainsi qu'à l'absence du lobule où s'attachent les pendeloques" ; tandis que le docteur Esquirol, M. Littré, M. Cénac-Moncaut, M. Bouillet dans son Dictionnaire, etc., les représentent comme "affectés d'une sorte de crétinisme", d'autres, s'appuyant sur l'observation directement personnelle et locale, soutiennent de leur côté qu'il faut faut bien se garder de les confondre avec les crétins et les goitreux, et que "les villages où l'on voit le plus grand nombre de ces derniers sont précisément ceux où il n'existe point de cagots." "Je défie, dit par exemple M. Dabadie, médecin à Buziet, près Oloron, qu'on distingue en rien les cagots des autres habitants ; comme ces derniers, ils présentent des teints et des traits différents. Ils se portent aussi bien que nous, et il en est qui sont parvenus à la plus extrême vieillesse. Ici même, je connais toutes les familles cagotes, et, proportion gardée, je ne trouve pas plus de goitres chez elles que chez les autres".



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LIVRE DICTIONNAIRE UNIVERSEL D'HISTOIRE ET DE GEOGRAPHIE
PAR M-N. BOUILLET




"Il est impossible, dit de son côté M. Lâa, médecin à Arudy, dans la vallée d'Ossau, de faire quelque différence entre la caste des cagots et nous." Le témoignage des médecins du pays basque ne diffère pas de celui de leurs confrères du Couserans, de la Bigorre, du Lavedan et du Béarn.


Les agots ou cagots, affirme l'auteur de la Description des Pyrénées, ne diffèrent des Basques d'ancienne origine, ni sous le rapport du physique, ni sous celui des mœurs ; on ne les connaît que par la tradition qui indique que telle ou telle famille est agote ou que tel ou tel individu lui appartient." "Les faits que je viens de rapporter, dit enfin Palassou, le savant correspondant de l'ancienne Académie des sciences et de l'Institut national, attestent que les cagots possèdent une aussi bonne santé que les autres habitants. On voit chez eux des familles entières à blonde chevelure, au teint beau et frais, à la taille haute et dégagée ; on en remarque d'autres où la couleur brune domine et chez lesquelles la force et l'adresse se déploient admirablement, quoique les individus soient d'une stature moyenne. Tous ces dons de la nature leur sont communs avec les habitants originaires de ce pays."



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LIVRE DESCRIPTION DES PYRENEES
PAR ETIENNE-FRANCOIS DRALET 1813



Le préjugé ne pouvant pas s'expliquer par la seule répugnance qu'inspiraient les côtés extérieurs des cagots, on a cherché dans l'infamie présumée de leur origine la cause de l'aversion populaire et de l'ostracisme dont ils ont été si longtemps l'objet. Mais sur ce point surtout les opinions se sont divisées. Celle que M. V. de Rochas vient d'exprimer dans son récent volume nous paraît la plus conforme à la logique et à la vérité. Nous la ferons connaître au lecteur dans un second article, en même temps que les systèmes qu'il s'applique à réfuter."



A suivre...



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mardi 5 décembre 2023

UN VOYAGE AU PAYS BASQUE EN NOVEMBRE 1897 (quatrième partie)


UN VOYAGE AU PAYS BASQUE EN 1897.


Le Pays Basque est, depuis longtemps, une terre d'excursions pour les voyageurs du monde entier.



pays basque autrefois labourd religion église cimetière
EGLISE ET CIMETIERE ITXASSOU
PAYS BASQUE D'ANTAN


Voici ce que rapporta à ce sujet la revue mensuelle La Revue du Palais, le 1er novembre 1897, sous 

la plume de Georges Haume :



"En Pays Basque


... Eh bien, ces ornements d’autel, deux candélabres, un saint sacrement, si lourds qu’on les soulève avec peine, le maire voudrait les obtenir pour les garder, pieuses reliques communales, à la mairie, là-haut, sur la Place, tandis que le curé les garde au presbytère, afin de s’en servir à l’église, les jours de grande solennité....



Le pays basque était autrefois infesté de sorciers, qui troublaient la conscience des meilleurs fidèles, fomentaient la haine et l’envie dans les familles, et même de commune à commune. Le curé m’assure que, quelques années avant la Révolution, un de ces sorciers, après un procès solennel au Parlement de Bordeaux, fut brûlé à Bayonne, au faubourg Saint-Esprit qui était réservé aux Juifs.



Je ne sais si le sacristain d’aujourd’hui égalerait son devancier en héroïsme. Mais il jouit d’une grande importance, étant à là fois sacristain, chantre, barbier et fabricant de gants pour le jeu de la pelote. Je vais, ce matin, me confier à son rasoir.



Il habite non loin de nous. La route traversée, je longe le champ de fougères où chaque soir l’aîné des Camino mène paître les vaches. Par un chemin creux qui, tournant à droite, passe à l'ombre de ce coteau, je pénètre entre deux escarpements très élevés de roches, fleuris de coquelicots et tapissés d’herbes. Au fond du ravin, cascade un ruisseau que franchit un pont étroit, mal bâti, et qui tout de même résiste depuis des siècles. Dans tin pré, çà et là, des hêtres et des platanes. Derrière un rideau de chênes, apparaît la maison basque, bien isolée, les murs blanchis à la chaux et quadrillés de bandes transversales formées par des poutrelles brun foncé. Ils aiment à se sentir jalousement chez eux, les Basques, à posséder le lopin de terre que les aïeux ont élu et à s’y croire seuls au monde. Le recueillement des choses, loin de la route, est si profond qu'on entend le murmure du ruisseau, le frémissement du feuillage, le crincrin d'un grillon dans la luzerne, jusqu’au bourdonnement de la ruche qui est placée là-bas, au bout du potager. Le soleil chauffe ici comme dans une serre, mais une voix très forte anime ce coin de nature primitive : c’est la rivière qui court dans un lit tourmenté de roches énormes, de troncs renversés, ployés par les tempêtes.



pays basque autrefois maison etxea
FERME BASQUE
PAYS BASQUE D'ANTAN


J'entre, par l’unique porte du logis, dans la cuisine où la femme allume des sarments pour faire cuire la soupe, pendant que l’enfant dort dans son berceau, sous des étagères garnies de vivres et de vaisselle. La figure blanche et paisible, elle me répond par signes, et me montre son mari en train de confectionner, auprès d’une haute fenêtre, des gants de pelote, des chichtras.



L'homme, en pantalon de drap noir et en bras de chemise, me salue, en français. Une marche à gravir : me voici dans l’atelier où des gravures de jeux de pelote et des affiches de fête tapissent les murs, où sont disposés sur des étagères les gants à raccommoder, des osiers, des morceaux de cuir. L'homme demeure grave, parle peu, même lorsque, assis sur le siège étroit de la chaise, les joues barbouillées de savonnade, un petit linge blanc posé sur mon épaule, je l’interroge. Pourtant, sa tâche de barbier accomplie, il veut bien me renseigner sur cet art de gantier, dont il est fier.



— Je ne crains aucune comparaison dans toute la Biscaye, me dit-il. Tenez, voici des gants qui valent vingt, trente francs. Le prix dépend de leurs dimensions, de leur solidité, de leurs parures.



J’examine ces longs outils, un peu lourds. Car ce sont des outils de bataille, ces sortes de pelles en osier recourbé, ces mains de colosse recouvertes de cuir à la paume, et dont les doigts semblent crispés. Chez moi, en Languedoc, on ne fait pas tant de façon. Les joueurs, sur un espace de trois à quatre cents mètres de long, se renvoient la balle avec ces petits tambourins, qui sont tout simplement des cerceaux de bois tendus d'une peau d’âne. Et je vous jure que la balle vole très loin, tantôt très haut, tantôt très bas, selon la malice des joueurs qui s’efforcent de tromper ou de surprendre leurs adversaires. Les Basques, dans leur fierté, s’imaginent que ces jeux de paume leur sont spéciaux. A vrai dire, ce qui leur est particulier, c’est la pelle d’osier qu'ils s'attachent au poignet et qui facilite beaucoup le jeu.



Il n’y a pas de grands domaines dans la Biscaye. Chaque famille possède des lambeaux de terre, dans un desquels elle habite, de préférence auprès d’un cours d’eau ou d'une source. Nous ne trouvons ici qu’un château, de construction récente. La blancheur de ses murs éclate presque en face de nous, au penchant d’une colline, de l’autre côté de la Nive. De riches industriels de Bordeaux l’habitent une partie de l’année, le temps de chasser dans les bois. Les paysans, ici, tirent toutes leurs ressources de la terre. Economes, industrieux, ils expédient dans les grandes villes, jusqu’à Paris, les fruits de leurs enclos, leur bétail très apprécié, le mouton surtout.



Les femmes sont peu portées aux rêves. Elles travaillent, fidèles à l’époux, autant que jalouses de la maison où elles sont entrées. On prononce de bonne heure les fiançailles des jeunes gens, comme dans toutes les campagnes, en obéissant surtout aux goûts des deux familles, à des considérations d’intérêt.



Je remarque dans l’auberge l’existence sournoise des deux fils du maître : ils se détestent ; ils n’échangent entre eux que les mots nécessaires. L aîné, svelte, maigre, me sourit doucement, avec une mélancolie qui semble appeler un sentiment de tendresse. C’est qu’on ne l’aime guère dans la maison. Il s’efforce de conserver, en sa qualité d’aîné, une certaine suprématie : il soigne les bêtes et conduit le char. Le malheureux est souvent interrompu dans son travail : il "tombe du haut mal, du mal de la terre", l’épilepsie. Son frère, un trapu, balourd, la figure mangée de cheveux, essaie parfois de nous sourire, en montrant ses dents blanches. Quand il nous croit absents, nous l’entendons dans l’étable rebuter son aîné, se révolter d'une voix brutale qui fait peur. Tous les deux, ainsi que leur jeune sœur, et la mère, mangent avec les domestiques, à la cuisine où une longue table est chargée de victuailles. Chacun vient à son heure, dans un intervalle de l’ouvrage, remplit son assiette de pain et de fricot, puis va s’asseoir sur une chaise, dans un coin. Le maître, qui va dans les champs donner un coup de main ou visiter des camarades, se rend chez lui à midi précis. Il arrive, coiffé de son béret sombre, en sabots, en bras de chemise, son grand corps aux larges épaules appuyé sur un bâton de cornouiller. Il va lentement, flâneur, inspectant deçà delà les cultures, afin de dicter ses ordres tout à l'heure ou d’adresser quelques réprimandes. Son épouse lui a préparé, au fond du couloir, dans une salle silencieuse et fraîche, son repas bien chaud, le pain, le vin, les assiettes blanches qui reluisent sur une nappe blanche. Il mange à son aise, écoute les bavardages de l’épouse qui, debout, allant et venant, le sert avec respect.



Depuis mon arrivée, je demande inutilement à voir un cagot, un spécimen de cette race maudite qui fut pendant des siècles tenue en servitude. Mes questions gênent ces Basques orgueilleux. Ils avouent péniblement l'existence des cagots dans le passé. Ils affirment qu'on n’en rencontre plus un seul descendant. Pourtant, je rencontre à Itsatsou et aux environs quelques faces blondes aux cheveux de chanvre, aux oreilles sans lobe. Et souvent se révèle, pour ainsi dire, devant ma curiosité, la trace des préjugés que les Basques nourrissaient contre ces parias.



On entend, pour la première fois, parler des cagots, au Xe siècle, sur le versant septentrional des Pyrénées Occidentales, dans le pays basque surtout. Le moyen âge les regardait comme des hommes livrés à tous les vices, des sorciers, des hérétiques, des anthropophages même. Ils vivaient dans des hameaux reculés, des cagoteries, que surveillaient, placés sur des éminences, des petits châteaux flanqués de tours et couronnés de créneaux. Ils étaient astreints à porter un costume spécial, une chaussure rouge, une casaque rouge marquée d'une patte d’oie ou de canard de couleur tranchante, afin qu'on pût les apercevoir de loin et les éviter. Jamais il n’était donné à un cagot d’effacer l’ignominie de sa naissance, et sa mère, fût-elle du plus pur sang basque, ne pouvait se relever aux yeux des siens de la déchéance encourue par un mariage impie. Car on vit de ces mariages entre deux individus des races ennemies. Le cagot, en certains villages, s'enrichissait, et il parvenait, bien que fort rarement, à séduire par sa fortune la fille d’un Basque. Il s’enrichissait, parce que, profilant de la stupidité de ses voisins crédules, il savait défricher les terres délaissées, planter les bois, entretenir les prairies. Souvent aussi, il vendait des sachets qui préservaient de tous les maux ; il prédisait l’avenir, jetait de mauvais sorts, donnait des herbes dont la vertu faisait vaincre à la lutte et à la course.



pais vasco antes navarra agotes
LIVRE HISTOIRE DES CAGOTS
PAR OSMIN RICAU



Dans les premières années du règne de Louis XVI, un riche cagot de Saint-Jean-Pied-de-Port prenait à l’église de l'eau bénite dans le bénitier défendu. Un soudard qui le guettait, lui coupa la main avec son sabre. La main sanglante demeura jusqu'au dimanche suivant fixée sur la porte de l’église. Toute fonction était interdite aux parias, hormis celles de bûcherons et de charpentiers. L’Église et l’État les repoussaient de tous les emplois. On leur désignait les sources où ils devaient puiser. Dans beaucoup de villages de ces Pyrénées, il y a encore la Fontaine des Cagots. On leur interdisait de porter toute espèce d’armes, à l’exception d’un couteau sans pointe. Ils ne prenaient part aux bals que comme ménétriers, joueurs de flûte ou de tambour de basque. La pèche leur procurait de grands bénéfices. Ils ne pouvaient acheter que le lundi, ne devaient jamais entrer dans les tavernes, y prendre du vin ni y toucher les hanaps et les brocs. Ils ne pouvaient entrer dans l’église, pour assister aux offices, que par une porte étroite ; et ils se tenaient hors de la nef, bien à l’écart des fidèles. J’ai vu à Luz, dans le Béarn, un trou pratiqué dans la muraille du rempart qui entourait le cimetière de l’église : c’est par ce trou que les cagots s’introduisaient, en rampant comme des bêtes, dans la partie de l’église qui leur était assignée. Les prêtres faisaient difficulté de les ouïr en confession, de leur administrer les sacrements. Dans les processions, ils marchaient les premiers. On ne sonnait leur angélus qu’après l’angélus ordinaire. Dans le cimetière, une ligne de démarcation les éloignait, de crainte que leurs cendres ne souillassent celles des races pures. Le prêtre et le rébellion, chargés d’inscrire sur les registres de l’état civil et sur ceux du fisc les noms des cagots qui naissaient, se mariaient, mouraient, étaient devenus propriétaires à force d’intelligence et de travail, oubliaient rarement d’accompagner ces noms de la qualification qui les vouait au mépris et à la haine. On reconnaissait facilement les cagots à leur teint livide, à leurs oreilles sans lobe, leurs yeux bleus ou olivâtres enfoncés dans de petites orbites. Ils offraient un contraste frappant avec les parias d’une autre race maudite, les Bohémiens ou Zingaris, qui vivaient dans leur communauté, sans qu’il se produisît jamais un mélange des deux races.


pais vasco antes navarra agotes
BENITIER DES CAGOTS
65 ST SAVIN

En 1460, une déclaration solennelle de la Vicomté du Béarn assimila les cagots aux lépreux, leur défendant de marcher pieds nus, de peur de contagion, et les condamnant, en cas de désobéissance, à avoir les pieds percés avec un fer rougi au feu. L’opinion la plus accréditée affirme que les cagots de la Biscaye furent les débris des Visigoths, dont les armes de Clovis détruisirent la puissance. La dénomination de chrétiens qu’on leur appliquait par dérision, confirme encore l’opinion qu’ils étaient des hérétiques convertis.



Mes Basques ne veulent pas maintenant entendre parler de leurs cagots. Bah ! Il n'y en a plus, me disent-ils. Qui s’en souvient ? Ont-ils la honte, le remords, d’avoir, pendant des siècles, stupidement persécuté leurs semblables, des créatures résignées qui aimèrent autant qu’eux la patrie commune ?



Un jour de soleil, je veux aller à Bidarray voir, sur son mont de l’Artza, dans la grotte rouge, la stalactite qui simule un torse humain. Cette stalactite s’appelle Bidarray le Père ; Bidarray le Fils se trouve dans une grotte semblable, mais moins spacieuse, sur le versant espagnol. Ce Bidarray le Père reçoit fréquemment la visite des malades de la contrée. Ceux-ci montent dans le désert de la montagne, par des sentiers pénibles. Là-haut, sur le pic, ils prononcent des prières et leurs vœux, puis, après avoir recueilli dans des linges blancs l’eau qui suinte de la roche, ils se mouillent les mains et le visage. Pour être guéris, ils doivent en repartant déposer aux abords de la grotte leurs linges humides."




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