"PATAUGAS" UNE CHAUSSURE MYTHIQUE.
C'est une chaussure de légende, connue dans le monde entier, qui a fait la fierté de la capitale de la Soule et de l'espadrille Basque.
C'est le 12 mai 1995 que les établissements Giraudier dernier fabricant de ces chaussures de
légende ont été mis en redressement judiciaire et ses 35 derniers employés licenciés, mettant fin
à une histoire de près de cinquante ans.
La chaussure Pataugas était un compagnon increvable pour les randonneurs du monde entier,
pour les chasseurs et les pêcheurs, ainsi que le godillot du fantassin en Indochine et en Algérie.
PATAUGAS ARMEE FRANCAISE ALGERIE |
De nombreux marcheurs, que ce soit le scout anonyme jusqu'au Président de la République
François Mitterrand grimpant la roche de Solutré, près de Macon, les ont portés et appréciés.
Cette marque est devenue un nom commun, comme Frigidaire, Bic, Klaxon ou quelques autres.
MITTERRAND EN PATAUGAS AVEC ROCARD |
L'aventure de Pataugas a commencé à Mauléon (Maule en Basque) en 1948.
Son créateur, René Elissabide est un enfant du pays.
Terrible, comme il se doit. Aux idées géniales et aux multiples faillites.
RENE ELISSABIDE CREATEUR DE PATAUGAS |
Les plus anciens en parlent avec respect, parfois une pointe d'ironie, et encore beaucoup
d'admiration.
«M. René»? Un touche-à-tout vibrionnant, à l'origine de la prophylaxie de la tuberculose
bovine, auteur de plus de 60 brevets; producteur de chaussettes en laine des Pyrénées, de
produits insecticides, d'espadrilles; créateur d'un apéritif (le Retap) et, durant la guerre, d'un
savon (le Devor) à base de résine des Landes, de sciure et de soude caustique - un vrai
décapant!
Ce Géo Trouvetou se transforme également en notable local: conseiller général du canton
pendant dix-neuf ans, député suppléant, propriétaire d'un journal («Le Miroir de la Soule»),
défenseur du folklore et initiateur d'une liaison routière vers l'Espagne...
Entre autres choses!
Mais Pataugas couronne son oeuvre.
Dans les années 30, déjà, Elissabide a lancé la sandale Regum - «RE» pour ses initiales et
«gum» à cause de la semelle de caoutchouc.
SANDALE REGUM |
SANDALE REGUM |
Ce sont des enfants espagnols qui l'ont inspirée à l'industriel: une poignée de marmots d'un
village de la vallée de Roncal chaussés d' «abarcas», joli nom pour désigner les vieux bouts de
pneu qu'ils fixaient à leurs pieds par des lacets.
Adaptée et améliorée - avec l'aide d'un technicien du caoutchouc, un certain Giraudier - la
charentaise Regum fait un malheur.
Ce n'est encore pourtant qu'un galop d'essai.
En 1948, de retour d'un voyage d'études aux Etats-Unis, le Basque imagine un brodequin de
toile, léger mais très résistant, apte à une utilisation intensive.
Quelque chose entre la sandale de jute et la très grosse chaussure de montagne.
Le Pataugas est né (ainsi dénommé après que Pataugex ou Patagom eurent été éliminés) et,
dans la foulée, une nouvelle façon de marcher: «Je n'évite pas les flaques. Je les cherche!» dit la
réclame.
RECLAME PATAUGAS |
Le succès est immédiat.
De 10 ouvriers en 1949, l'affaire en emploie plus de 400, pour la seule fabrication, dès le milieu
des années 50.
Chaque jour, 4 000 paires sortent des ateliers, deux ou trois wagons sont expédiés de la petite
gare de Mauléon.
Rien ne paraît pouvoir perturber la production.
Ainsi, le 7 septembre 1950, un incendie ravage l'usine. Quinze jours plus tard, l'activité
reprend.
USINE PATAUGAS MAULEON PAYS BASQUE |
En 1952, pendant près de deux mois, une grève générale paralyse l'ensemble des entreprises du
pays, sauf Pataugas, où les salaires sont substantiels.
Coûte que coûte, il faut satisfaire les commandes.
Et d'abord celles de l'armée française, qui équipe les «p'tits gars» en partance pour l'Indochine
puis l'Algérie.
CHAUSSURE PATAUGAS DE MAULEON PAYS BASQUE |
.
Avec un sens aigu de la communication, René Elissabide soutient le mouvement à grand
renfort de campagnes publicitaires et de promotion.
Le monsieur a la bosse du commerce.
Il organise un grand prix du Pataugas cycliste, un tour de Lille des garçons de café, chaussés
comme il se doit.
Du «Chasseur français» à «France-Soir», il multiplie les réclames, et l'on voit, par exemple,
Xavier Echaniz, le bûcheron, alors «l'homme le plus fort du monde», porter des Pataugas, des
«chaussures pour les travaux de force»...
Elissabide a surtout deux formidables idées: il utilise de solides marcheurs qui travaillent dans
sa fabrique - les «trois Etche» (Etcheverry, Etchegoyen, Etchebarne) - pour accomplir de longs
raids à travers la France et l'Europe.
"LES TROIS ETCHE" DE PATAUGAS |
Les gaillards sont chaussés de mocassins Iowa - une autre invention du Basque! - mais les
caravanes publicitaires qui les suivent jusqu'à Strasbourg, Londres, Lille, San Remo,
Gibraltar... vantent, à chaque étape, les inusables Pataugas.
Sans Elissabide, très mondain, toujours entouré de jolies femmes, jamais Charlie Chaplin, Luis
Mariano, Gabrielle Dorziat et Fernandel n'auraient connu Mauléon.
MOCASSIN IOWA 1956 |
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire