BAL DU SIÈCLE EN 1953 À ANGLET.
Au soir du premier septembre 1953, 3 000 personnes invitées envahissent le golf de Chiberta, à Anglet.
Le marquis de Cuevas (Jorge Cuevas Bartholin) remet au goût du jour les ballets de Monte-
Carlo, dans les années quarante, en leur
insufflant tout à la fois la force de sa passion et
l’immense fortune de son épouse, Margaret Rockefeller Strong.
Fantasque et follement mondain, George de las Cuevas
de Bustillo y Teran, huitième marquis
de Piedra Blanca de Guana de Cuevas, né
en 1885 à Santiago du Chili, avec un père Espagnol
et une mère Danoise, colle parfaitement à cette
période d’après-guerre aussi pressée de panser
ses plaies que de rattraper le
temps perdu.
Le "Tout-monde" se nourrit alors d’extravagances et de
surenchères.
Au grand bal de son ami et néanmoins rival Charles de Bestegui, donné en 1951
à Venise, le
marquis répondit le 1er septembre 1953 par un grand bal champêtre au golf Chiberta, à
Anglet.
Ce dernier, qui coûta plus de quarante millions de l’époque,
rassembla trois mille invités et
donna naissance à la plus grande fête jamais
donnée dans notre région.
“L’événement du siècle” comme on disait alors, aussi
bien pour son importance artistique que
par son caractère mondain,
médiatique…et polémique !
On note à ce sujet pas moins de quinze mille articles
de journaux…
La chrétienté s’en offusque et se déclare “ insultée par cet étalage
de luxe barbare”.
C’est par ces mots que le Vatican avait condamné ce bal
extravaguant dont l’organisateur
s’absoudra en faisant don des denrées
restantes au couvent des Bernardines.
La grande Cécile Sorel s’est d’ailleurs
décommandée :“Mon degré de foi chrétienne m’interdit
d’aller à cette soirée”
avait-elle déclaré.
La soirée évoque une fête champêtre du XVIIIe siècle.
La
machine est énorme, elle comprend des centaines de tréteaux, des parquets pour
la danse.
Chaque décor, chaque scène a reçu un soin particulier.
Le marquis a
veillé à tous les détails…
Son bal devra être véritablement féerique, même si,
pour ce faire, il a fallu déployer des
centaines de mètres de riches et lourds
velours à travers les pins, festonner le club-house de
girandoles…
La villa du
golf, couverte de croisillons de bois et de lierre, semble cousine des
bergeries du
Trianon, et les torchères brûlent au poing des valets espacés le
long d’une large allée de sable
blond.
Trois orchestres (dont deux prêtés par
le casino Bellevue) animent la soirée.
Les invitations, imprimées en sept
couleurs afin d’être infalsifiables, portent la mention
essentielle : costume
XVIIIe obligatoire !
Les invités sont venus, vêtus dans l’esprit de l’époque.
Le cadre grandiose convient parfaitement aux vêtements somptueux, aux soieries
brodées, aux
perruques poudrées ornées de diamants, à la lueur des
torches portées par des valets de pied.
Certains invités ont rivalisé
d’imagination dans leur costume et leurs atours, la palme revenant
à Zizi
Jeanmaire, arrivée à dos de chameau, vêtue d’un bikini de diamants.
ZIZI JEANMAIRE 1ER SEPTEMBRE 1953 ANGLET PAYS BASQUE
ZIZI JEANMAIRE 1ER SEPTEMBRE 1953 ANGLET PAYS BASQUE
Elle
incarnait Antinea, le diamant du Désert.
Le torero, Luis Dominguin était en
Casanova, le mannequin Bettina en prêtre inca…
TORERO LUIS DOMINGUIN ANGLET 1953
Les bijoux des invités, estimés
à plusieurs centaines de millions, étaient surveillés discrètement
par deux
cent cinquante policiers en livrée de laquais.
Quant au couvent des
Bernardines, il avait fourni les trente moutons et les vingt vaches
parqués pour la nuit dans un enclos.
Le buffet est digne des Mille et une nuits.
Le
marquis, habillé par Pierre Balmain (le front ceint d’une couronne de raisins
d’or, sceptre
en main, son long manteau de pourpre ayant appartenu à AlphonseXIII) représente le roi de
la Nature avance vers le trône qui l’attend… gagne
alors la scène et y annonce les entrées, dites
“entremets”, composées pour les
seize buffets.
Une succession de scènes historiques ou à thème s’enchaîne qui
rappellent des tableaux vivants
du XVIIe et du XVIIIe siècles, costumées et
réglées comme une chorégraphie par Maurice
Escande, le sociétaire de la Comédie
Française et venu tout exprès de Paris.
On passe de Fragonard aux fastes des palais de
Castille, l’Orient se mêle à l’Espagne, la
Pompadour descend d’un carrosse, une
bergère et ses moutons, Gabrielle Dorziat mène le
cortège d’une fantastique et
débridée commedia dell’arte, et le jeune comte Guy d’Arcangues
déguisé en
gentilhomme des îles, porte l’apogée du défilé vers les Antilles…
GABRIELLE DORZIAT ANGLET 1953
En pleine
fête galante, un incident mit aux prises l’ex-roi de Yougoslavie et le marquis
O’Raily,
puis ce fut l’intrusion d’un anarchiste espagnol inconnu qui proféra
des injures et contraria
quelque peu l’organisateur.
Avant d’ouvrir le bal, un
projecteur s’alluma sur le lac, éclairant un étonnant radeau traîné
par des
cygnes et portant lentement les danseuses vers la rive.
L’étoile Rosella Hightower inspirée par ces circonstances inouïes
fut une princesse cygne
inoubliable, alors que George Skibine dansait
l’imprudent chasseur avec une grande noblesse
plastique.
DANSEUR GEORGES SKIBINE
Tel fut ce jour-là, le
Lac des Cygnes, un spectacle ahurissant… dans un cadre qui ne l’était pas
moins.
…
Le pas de deux et la musique de Tchaïkovski achevèrent de subjuguer le
public.
"Ainsi valsèrent les milliardaires, jusqu'à l’aube, dans le tourbillon
des satins, des dentelles et
des velours !”. Lady Oliver Harvey, ambassadrice
de Grande Bretagne aura le mot de la fin :
"Ce bal efface tous les autres".
Trois mille personnes avaient dépensé cent mille francs par tête, en moyenne,
pour dire :
"J’y étais".
Carlo, dans les années quarante, en leur insufflant tout à la fois la force de sa passion et
l’immense fortune de son épouse, Margaret Rockefeller Strong.
Fantasque et follement mondain, George de las Cuevas de Bustillo y Teran, huitième marquis
de Piedra Blanca de Guana de Cuevas, né en 1885 à Santiago du Chili, avec un père Espagnol
et une mère Danoise, colle parfaitement à cette période d’après-guerre aussi pressée de panser
ses plaies que de rattraper le temps perdu.
marquis répondit le 1er septembre 1953 par un grand bal champêtre au golf Chiberta, à
Anglet.
Ce dernier, qui coûta plus de quarante millions de l’époque, rassembla trois mille invités et
donna naissance à la plus grande fête jamais donnée dans notre région.
“L’événement du siècle” comme on disait alors, aussi bien pour son importance artistique que
par son caractère mondain, médiatique…et polémique !
On note à ce sujet pas moins de quinze mille articles de journaux…
La chrétienté s’en offusque et se déclare “ insultée par cet étalage de luxe barbare”.
C’est par ces mots que le Vatican avait condamné ce bal extravaguant dont l’organisateur
s’absoudra en faisant don des denrées restantes au couvent des Bernardines.
La grande Cécile Sorel s’est d’ailleurs décommandée :“Mon degré de foi chrétienne m’interdit
d’aller à cette soirée” avait-elle déclaré.
La soirée évoque une fête champêtre du XVIIIe siècle.
La machine est énorme, elle comprend des centaines de tréteaux, des parquets pour la danse.
Chaque décor, chaque scène a reçu un soin particulier.
Le marquis a veillé à tous les détails…
Son bal devra être véritablement féerique, même si, pour ce faire, il a fallu déployer des
centaines de mètres de riches et lourds velours à travers les pins, festonner le club-house de
girandoles…
La villa du golf, couverte de croisillons de bois et de lierre, semble cousine des bergeries du
Trianon, et les torchères brûlent au poing des valets espacés le long d’une large allée de sable
blond.
Trois orchestres (dont deux prêtés par le casino Bellevue) animent la soirée.
Les invitations, imprimées en sept couleurs afin d’être infalsifiables, portent la mention
essentielle : costume XVIIIe obligatoire !
Les invités sont venus, vêtus dans l’esprit de l’époque.
Le cadre grandiose convient parfaitement aux vêtements somptueux, aux soieries brodées, aux
perruques poudrées ornées de diamants, à la lueur des torches portées par des valets de pied.
Certains invités ont rivalisé d’imagination dans leur costume et leurs atours, la palme revenant
à Zizi Jeanmaire, arrivée à dos de chameau, vêtue d’un bikini de diamants.
ZIZI JEANMAIRE 1ER SEPTEMBRE 1953 ANGLET PAYS BASQUE |
ZIZI JEANMAIRE 1ER SEPTEMBRE 1953 ANGLET PAYS BASQUE |
Elle incarnait Antinea, le diamant du Désert.
Le torero, Luis Dominguin était en Casanova, le mannequin Bettina en prêtre inca…
TORERO LUIS DOMINGUIN ANGLET 1953 |
Les bijoux des invités, estimés à plusieurs centaines de millions, étaient surveillés discrètement
par deux cent cinquante policiers en livrée de laquais.
Quant au couvent des Bernardines, il avait fourni les trente moutons et les vingt vaches
parqués pour la nuit dans un enclos.
Le buffet est digne des Mille et une nuits.
Le marquis, habillé par Pierre Balmain (le front ceint d’une couronne de raisins d’or, sceptre
en main, son long manteau de pourpre ayant appartenu à AlphonseXIII) représente le roi de
la Nature avance vers le trône qui l’attend… gagne alors la scène et y annonce les entrées, dites
“entremets”, composées pour les seize buffets.
du XVIIe et du XVIIIe siècles, costumées et réglées comme une chorégraphie par Maurice
Escande, le sociétaire de la Comédie Française et venu tout exprès de Paris.
On passe de Fragonard aux fastes des palais de Castille, l’Orient se mêle à l’Espagne, la
Pompadour descend d’un carrosse, une bergère et ses moutons, Gabrielle Dorziat mène le
cortège d’une fantastique et débridée commedia dell’arte, et le jeune comte Guy d’Arcangues
déguisé en gentilhomme des îles, porte l’apogée du défilé vers les Antilles…
GABRIELLE DORZIAT ANGLET 1953 |
En pleine fête galante, un incident mit aux prises l’ex-roi de Yougoslavie et le marquis O’Raily,
puis ce fut l’intrusion d’un anarchiste espagnol inconnu qui proféra des injures et contraria
quelque peu l’organisateur.
Avant d’ouvrir le bal, un projecteur s’alluma sur le lac, éclairant un étonnant radeau traîné
par des cygnes et portant lentement les danseuses vers la rive.
L’étoile Rosella Hightower inspirée par ces circonstances inouïes fut une princesse cygne
inoubliable, alors que George Skibine dansait l’imprudent chasseur avec une grande noblesse
plastique.
DANSEUR GEORGES SKIBINE |
Tel fut ce jour-là, le Lac des Cygnes, un spectacle ahurissant… dans un cadre qui ne l’était pas
moins. …
Le pas de deux et la musique de Tchaïkovski achevèrent de subjuguer le public.
"Ainsi valsèrent les milliardaires, jusqu'à l’aube, dans le tourbillon des satins, des dentelles et
des velours !”. Lady Oliver Harvey, ambassadrice de Grande Bretagne aura le mot de la fin :
"Ce bal efface tous les autres".
Trois mille personnes avaient dépensé cent mille francs par tête, en moyenne, pour dire :
"J’y étais".
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