LA JUSTICE EN 1926.
L'histoire de la justice en France recoupe partiellement celle du droit sans coïncider avec celle-ci, puisqu'elle traite plus spécifiquement de l'application des normes par les différentes juridictions.
PREMIER MAGISTRAT FLORY 1926 |
Voici ce que rapporte à ce sujet la Gazette de Bayonne, de Biarritz et du Pays basque, le 7
octobre 1926 :
"Les Tribunaux de département.
A propos de réformes.
— Le retour au système de 1793. — Les juges de paix et les juges de commerce.
Par un décret du 6 septembre dernier, qui a soulevé beaucoup de polémiques, le Gouvernement vient de supprimer les tribunaux d’arrondissement et de rétablir les tribunaux de département, institués par la Constitution du 5 Fructidor an III (22 août 1795), puis abolis par la loi du 27 ventôse, an VIII (18 mars 1800).
Il n’est pas sans intérêt de rappeler l’histoire de nos tribunaux de première instance. Avant la Révolution, chaque province avait, ses coutumes et sa législation. L'Assemblée Constituante effaça jusqu’aux noms des anciennes provinces. Le 22 Décembre 1789, elle décréta une nouvelle division territoriale en départements, subdivisés en districts, le district en cantons, le canton en municipalités ou communes.
Chaque district eut un tribunal de première instance composé de cinq juges, quatre suppléants, un ministère public et un greffier. Il n’y eut pas de président. Le Tribunal fut présidé par celui des juges qui avait réuni le plus de voix lors de l’élection car ils étaient élus par le Collège électoral du district. Chaque canton eut un juge de paix, création nouvelle de l’Assemblée Constituante.
PALAIS DE JUSTICE PARIS 1926 PHOTO EUGENE ATGET |
Ce régime ne dura pas longtemps. Le 22 août 1795, la Constitution de l’an 111 supprima le district. Le titre premier, article premier, est ainsi conçu : "La France est divisée en...départements..." L’article 216 s’exprime ainsi : "Il y a un tribunal civil par département" et l’article 220 : "Le Tribunal civil se divise en sections".
Ainsi, aux tribunaux de districts, la Constitution de l'an III substitue des tribunaux de département, composés de 20 juges au moins, élus pour cinq ans. Et Dalloz apprécie ainsi cette innovation : "Ce système, où les juges étaient si peu à portée des plaideurs, ne pouvait durer ; il tomba sous le régime de la Constitution de l’An VIII."
Il faut croire que l'histoire est un éternel recommencement : M. le Président Poincaré vient de rétablir le système de 1795. Il avait duré jusqu’au 18 mars 1800.
La loi du 27 ventôse an VIII décida, dans son article 1 :
"Les tribunaux civils et criminels du département et les tribunaux de police correctionnelle sont supprimés ; néanmoins, ils continueront leurs fonctions jusqu’à l’installation de nouveaux tribunaux."
Article 2. — Il n'est rien innové d'ailleurs aux lois concernant les juges de paix et les juges de commerce, lesquels continueront à exercer leurs fonctions jusqu'à ce qu'il en ait été autrement ordonné.
Article 6. — Il sera établi un tribunal de première instance par arrondissement communal."
AVOCATE SUZANNE BLUM 1926 |
Cette organisation nous régissait encore en août dernier. Le décret du 6 septembre nous ramène au régime du Tribunal départemental, avec quelques sections supplémentaires dans certains arrondissements particulièrement importants. Rappelons les trois premiers articles de ce décret :
"Article I. — Les Tribunaux civils d’arrondissement sont supprimés.
Article 2. — Il y a, dans chaque département, un Tribunal de première instance dont la compétence est substituée à celle des Tribunaux d’arrondissement.
Article 3. — Le Tribunal de première instance est, dans certains départements, divisé en sections, dont chacune a un siège, un ressort, un greffe et un personnel de magistrats distincts".
La réforme était prévue, et attendue depuis longtemps. Il fallait toute l'autorité et toute la décision de M. le Président Poincaré pour la réaliser. Il est certain qu’aujourd'hui les difficultés et les délais de déplacement ne sont pas comparables à ce qu'ils étaient au 18ème, ni même au début du 19ème siècle. Une modification profonde s’imposait. Le législateur avait déjà dû modifier récemment les délais de distance prévus par le Code Napoléon en matière de procédure civile. Les vieilles routines de l’ancien temps n’étaient plus en harmonie avec les progrès actuels de la locomotion et des communications de toutes sortes.
Indépendamment même des économies importantes que la nouvelle organisation judiciaire procurera au Trésor, les plaideurs auront tout à y gagner. La justice sera mieux rendue, les magistrats et leurs auxiliaires mieux recrutés. Espérons surtout que les décisions se feront attendre moins longtemps et que la centralisation des services contribuera à rendre plus expéditive, en attendant qu'elle soit à son tour remaniée et modernisée, une procédure civile dont la lenteur est devenue proverbiale.
AVOCATE SUZANNE BLUM 1926 |
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