UNE TAXE SUR LES CHIENS EN 1855.
Le gouvernement de Napoléon III fait voter le 2 mai 1855 une loi qui établit une taxe municipale sur les chiens.
TAXE MUNICIPALE SUR LES CHIENS 1855 |
Les propriétaires de chiens doivent faire chaque année une déclaration en marie, seuls les
chiens étant nourris par leur mère étant exonérés.
Il s'agit d'une taxe perçue obligatoirement par les communes, selon un tarif entre 1 franc et 10
francs par chien, qu'elles doivent voter pour deux catégories : les chiens d'agrément ou servant
à la chasse (1ère catégorie) et les chiens servant à guider les aveugles, à garder les troupeaux ou
les habitations (2ème catégorie).
Voici ce que rapporta La Gazette de France, dans son édition du 6 avril 1855 :
"Taxe sur les chiens.
Voici le rapport fait par M. Lélut au nom de la Commission chargée d'examiner le projet de loi ayant pour objet l’établissement d'une taxe municipale sur les chiens :
Messieurs,
Vous connaissez tous l’historique de la loi qui fait l'objet de ce rapport, et nous ne ferons que vous la rappeler. Ce à quoi nous tenons avant tout, c'est à vous présenter à temps une loi utile, et à vous mettre à même de la voter.
Le projet d’une loi ayant pour objet l’établissement d'une taxe sur les chiens n’est pas nouveau dans les Chambres françaises. Il y a déjà traversé trois régimes, et sept ou huit sessions parlementaires. La proposition en fut faite pour la première fois, il y a onze ans, à la Chambre des députés, par l'honorable M. Remilly. Elle se produisit en 1844 à propos de la toi sur la chasse. La taxe qui en faisait la base ne portait que sur les chiens de chasse et offrait le caractère d'une taxe somptuaire. Le garde des sceaux d'alors fit remarquer que cette proposition serait peut-être plus acceptable si elle était généralisée, et si, de plus, elle se présentait comme un des articles de la loi de finances.
M. Rémilly reproduisit donc sa proposition sous une forme plus générale, dans la session de 1845, comme amendement au budget. Le sort de cette proposition n'en fut pas plus heureux, et elle fut rejetée, arec l'attache, il est vrai, d’une minorité notable.
Un an après, en 1846, fort des résultats d’une enquête faite par ordre du Gouvernement, et dans laquelle cinquante-deux conseils généraux s’étaient déclarés pour le principe de la taxe, le même député reproduisit sa proposition par la voie de l'initiative parlementaire. Elle fut discutée par la Chambre, mais au point de vue seulement de la prise en considération, et obtint, cette fois, les honneurs de l’épreuve douteuse. Enfin, eu 1847, M. Rémilly, toujours, vit sa proposition, d'abord prise en considération, puis soumise à l'examen d'une Commission dont l'honorable M. Etienne était rapporteur, et qui conclut à son adoption.
Discutée alors «u point de vue de l'adoption ou du rejet, gravement et sagement amendée, dans le cours même de la discussion, par l’honorable M. Vivien, il ne s’en fallut que d’une voix qu’elle ne fût convertie en loi. 129 voix se déclarèrent pour elle, autant contre : c’était échouer au port.
Survint la révolution de 1848, qui donna à la France et à ses assemblées bien d’autres sujets d'occupation. Toutefois, comme dans de pareils temps, il finit par y avoir place pour tout, même pour les choses utiles, au mois de janvier 1850, l’Assemblée législative eut à nommer une Commission chargée d'examiner au fond diverses propositions relatives à la taxe sur les chiens, et auxquelles avait déjà donné son laissez-passer à la Commission dite, en ce temps-là, d’initiative parlementaire.
Cette commission d'examen définitif, dont l'honorable M. Résal était le rapporteur, fit de ces propositions un ensemble, qui devint un projet de loi discuté dans les mois d’avril et de juin 1850. Ce projet de loi, après avoir heureusement traversé l'épreuve de la première et de la deuxième délibérations, succomba dans la troisième, sous le coup de quelques amendements, qui n’avaient pas même le mérite auquel on sacrifie trop souvent, en France, les choses les plus graves et les plus utiles.
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Les choses en étaient là, lorsqu'à la fin de votre dernière session, le Gouvernement vous présenta un projet de loi ayant le même objet que ceux dont nous venons de vous parler. La Commission nommée par vous pour l'examiner, se mit immédiatement à l'oeuvre, et, si elle eût pu disposer de quelques jours de plus pour s’entendre sur tous les points avec le Conseil d’Etat, elle fût parvenue, à cette époque, à soumettre ce projet de loi à votre délibération.
Cette année, d’autres empêchements indépendants de notre volonté, notre désir aussi de régler avec plus de maturité les points principaux d’une mesure qui touche, par plusieurs de ses côtés, aux principes de l'administration municipale, ont encore retardé, beaucoup plus que nous ne l’eussions voulu, l’accomplissement de notre tâche. Mais enfin, nous arrivons encore à temps pour présenter a votre assentiment une loi qui nous paraît éminemment utile, et voici quels sont, à nos yeux, les caractères de cette utilité.
Il y a environ trois millions de chiens en France, plutôt plus que cela que moins. C’est là le chiffre approximatif bien entendu, admis par l'administration et qu‘ont admis, soit d'après elle, soit d’après les renseignements puisés à d’autres sources, la plupart des hommes qui se sont occupés de la race canine, à un point de vue ou à un autre. La Société protectrice des animaux, par exemple, qui, pour le dire en passant, donne son entière adhésion à la loi, prétend que ce chiffre s’élève à plus de quatre millions. Mais tenons-nous en, cela suffit bien, à celui de trois millions.
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Or, et partant de cette évaluation, on peut se dire d'abord que ces trois millions d'animaux, en évaluant également au plus bas et en moyenne le prix journalier de leur nourriture (7 à 8 centimes), en mangent ou plutôt en dévorent plus de 80 millions par an. Diminuons, si on le veut, ce chiffre d’un quart. Restent 60 millions.
Supposons que le résultat de la taxe, taxe qui a ce singulier caractère de tendre à détruire la matière imposable, supposons que ce résultat soit, en effet, de réduire de moitié le nombre des chiens. Ce sera encore trente millions rendus à l’alimentation générale de l'homme ; et c’est là un premier résultat de la loi, qui n’est pas a dédaigner. Nous ne saurions, en effet, partager, au point de vue économique, l’opinion d'un poète illustre, jadis une des gloires de nos assemblées délibérantes. qui voit dans les chiens des consommateurs presque aussi précieux que leurs maîtres, et dont conséquemment il faut bien se garder de réduire le nombre.
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En second lieu, dans le cas où la loi aurait ce succès, que nous en attendons, de réduire de moitié le nombre de nos trois millions de chiens, il en resterait encore 1 500 000, chiffre assurément bien suffisant. Or. si, d'après une moyenne prise dans une échelle de taxe dont nous aurons à vous parler tout à l'heure, chacun de ces 1 500 000 chiens restant payait ou faisait payer à sou maître une taxe de 5 fr. seulement, ce seraient six à sept millions de francs qui viendraient tomber. chaque année, dans l’humble trésor des communes. Et, certes, ce second résultat de la loi a encore son degré d'importance.
Un troisième résultat, qui vaut encore la peine d'être pris en considération, c’est, avec la disparition de la moitié des chiens actuellement existant, et de leur moitié la plus abandonnée et la plus mauvaise, la cessation de la majeure partie des inconvénients, des accidents de toute sorte, qu'ils occasionnent sur la voie publique, et qu'accroît de plus en plus leur multiplication. Cela vaut encore, disions-nous, la peine d'être pris en considération.
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