L'AFFAIRE STAVISKY À BAYONNE EN 1934.
C'est une crise politico-économique qui secoue la France à la fin de décembre 1933.
STAVISKY |
Elle éclate brutalement, le samedi 23 décembre 1933, mettant en cause de nombreuses
personnalités dont le député maire de Bayonne, Dominique-Joseph Garat (celui-ci fait
partie du cartel des gauches).
Gustave Tissier, directeur du Crédit municipal, est inculpé pour faux, usage de faux,
détournement de deniers publics, vol de bijoux.
Le Mont-de-piété, placé sous tutelle du Ministre du Commerce, est habilité à prêter sur gages à
des intérêts très réduits.
Il est installé 1, rue Thiers depuis le printemps 1931.
Des bons-actions sont proposés à des petits et gros porteurs.
Il est géré par un conseil d'administration nommé par le Préfet sur proposition du conseil
municipal.
Le bureau de bienfaisance touche 25% des bénéfices, qui s'avèrent vite intéressants.
M. Tissier cumule les fonctions de directeur, caissier, comptable.
Il est sous le contrôle d'un ordonnateur dont il endort la confiance, lui faisant concéder des
bons en blanc.
Les conseillers mandatés s'étonnant de certaines pratiques du directeur, mis en éveil depuis
juillet par des petits porteurs, n'obtiennent aucune réponse à leurs demandes, le maire calmant
le jeu.
Néanmoins, ils ouvrent une enquête administrative, qui fait découvrir certaines malversations.
Sur le point d'être arrêté, M. Tissier vient avouer ses exactions au sous-préfet.
C'est alors la découverte d'un scandale financier sans précédent en France.
Le directeur falsifiait les bons, et détournait des sommes importantes et des bijoux gagés au
profit d'un groupe de personnalités.
Parmi elles, un certain Serge Alexandre, dit Stavisky, bien connu des casinos de la Côte
Basque, qui avait échoué dans une tentative similaire au Crédit municipal d'Orléans.
DEUX PHOTOGRAPHIES DE STAVISKY 1934 |
Il réussit mieux à Bayonne, faisant nommer son ami Tissier, endormant la confiance des
élus par sa qualité de diamantaire parisien, président de plusieurs conseils, sa prestance, son
charme, son intelligence.
Il possède de même une carte de commissaire de police au service des jeux émanant de la
Sécurité nationale !
Resté sourd aux conseils et mises en garde de M. Hirigoyen, maire de Biarritz, M.
Garat a cédé au charme et aux arguments de Stavisky.
L'enquête dévoile des ramifications en France et à l'étranger, des gros porteurs ayant été
abusés.
L'escroquerie pourrait dépasser les 500 millions de francs (environ 260 millions d'€).
Une somme colossale à une époque où le litre de lait, denrée la plus chère, coûte 1,20 franc
(0,60€) et la baguette 65 centimes (0,33€)
Finalement, l'escroquerie avoisinera les 270 millions de francs (140 millions d'€).
Le dimanche 7 janvier 1934, l'année du centenaire de la Caisse d'Epargne, c'est le coup de
tonnerre : Dominique-Joseph Garat est inculpé à son tour par le juge Bayonnais, M.
D'Uhalt.
Entendu depuis le samedi, il est accusé de vol de bijoux, faux, usage de faux, abus de confiance,
détournement de biens publics, recel et complicité d'escroquerie (fermez le ban !).
Ce que conteste son avocat Maître Campichi.
Il rejoint en prison M. Tissier, d'autres les accompagneront.
La presse nationale et internationale envahit Bayonne.
A un de ces envoyés spéciaux, un gardien déclare : "M. Garat est méconnaissable. Il est
effondré et pleure souvent. Il a du chagrin."
ARTICLE DU PETIT JOURNAL AFFAIRE STAVISKY 1934 |
On appelle bien vite la prison la "Villa Chagrin". Nom qui perdure aujourd'hui !
La prison est dépourvue de tout confort. Il n'y a pas de confort. Il n'y a pas de chauffage, de
commodités décentes.
On "modernise" précipitamment, installant notamment sanitaires et poêles.
On empiète sur le quartier des femmes pour créer des cellules supplémentaires.
Toutefois, M. Garat n'est pas trop malheureux en prison, bien nourri par des repas
commandés à un renommé restaurateur du quartier.
A Bayonne, la presse locale est affligée, elle sort plusieurs éditions par jour.
ARTICLE POLICE MAGAZINE AFFAIRE STAVISKY 1934 |
Des 4 journaux locaux, la Gazette du Biarrot Haristoy, détaille minutieusement les faits, le
Courrier de J. de l'Espée est tout heureux de ce qui arrive à Garat.
Peillic, dont l'attachement à sa ville est bien connu, titre un billet d'un pathétique "Pauvre
Bayonne !".
Le Sud-Ouest Républicain dont le directeur politique est Dominique-Joseph Garat lui-même,
tente de calmer le jeu, en vain.
A partir du 8 janvier, le nom de Garat disparaît de la fenêtre de la une de ce journal.
ARTICLE POLICE MAGAZINE AFFAIRE STAVISKY 1934 |
Ce qui n'empêche pas Guillaume De Hiriart de signer des éditos fustigeant la presse qui
calomnie sans preuve.
La Presse, plus à droite, attaque tous azimuts. Il ne fait pas dans la demi-mesure, écrivant que
le 6 février à Paris, lors de la manifestation politique, il y a eu 38 morts, 11 de plus que dans
la réalité.
ARTICLE L'ACTION FRANCAISE AFFAIRE STAVISKY 1934 |
M. Garat démissionne de son poste de maire le 11 janvier.
Maître Simonet assure l'intérim. Sept conseillers démissionnent.
Il y a des élections partielles en mars, remportées par la liste du Dr Jules Lafourcade qui
devient maire.
Stavisky est introuvable. On le dit embarqué à Lisbonne. En fait, il est dans un chalet à
Chamonix.
Interpellé le 8 février, sommé de se rendre à des policiers, l'escroc se serait suicidé d'une balle
de revolver dans la tête.
Opéré d'urgence, il ne survécut pas à ses blessures.
Le suicide est mis en doute, on parle d'assassinat. Le mystère n'est pas élucidé.
MANIFESTATION AFFAIRE STAVISKY 1934 |
Le Canard Enchaîné titre : "Alexandre se suicide d'un coup de revolver qui lui a été tiré à bout
portant." Puis, "il s'est tiré un coup de revolver depuis trois mètres. On savait qu'il avait le
bras long, mais quand même..."
ARTICLE LE CANARD ENCHAINE STAVISKY 1934 |
A Bayonne, des incidents surviennent lors des sorties de prison de Tissier pour des
raisons d'instruction.
A Paris, des émeutes dégénèrent le 6 février 1934.
Le ministre Daladier demande une plus grande fermeté à la police. Elle charge, mitraille en
l'air... 22 morts, plus d'un millier de blessés.
PARIS 6 FEVRIER 1934 |
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