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jeudi 6 janvier 2022

LE 6 JANVIER : LA FÊTE DE L'ÉPIPHANIE AUTREFOIS

 LA FÊTE DE L'ÉPIPHANIE.


Tous les 6 janvier, est célébrée par les Chrétiens, dans le monde, et en particulier au Pays Basque, la fête de l'Epiphanie.



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6 JANVIER EPIPHANIE FÊTE DES ROIS


Voici ce que rapporta à ce sujet le journal Les Annales Politiques et Littéraires, le 8 janvier 1905, 

sous la plume d'Anatole France, de l'Académie Française :



"Les origines du roi de la fève.



La fête de l'Epiphanie, que nous appelons communément fête des Rois et qui ne semble avoir, aujourd'hui, qu'un rang secondaire parmi les fêtes catholiques, était tenue en grand honneur dans l'Eglise primitive. On l'appelait le second Noël, et ce second Noël était plus vénéré que le premier. Au jour de sa nativité, disait-on, Jésus a été adoré par les bergers et les petits ; au jour de l'Epiphanie, il l'a été par les savants et les puissants du monde. Au jour de sa nativité, il a revêtu la misère du monde ; au jour de l'Epiphanie, il a manifesté sa divinité par la lumière de l'étoile qui a paru dans les cieux pour l'annoncer aux mages. Et un vieil auteur ajoute cette raison subtile, qu'à Noël le Sauveur est venu sur la terre, mais qu'à l'Epiphanie, les hommes sont venus à lui, "événement sans lequel le premier point eût été inutile", ajoute-t-il avec raison.



Les Eglises d'Orient, à cette date du 6 janvier, célébraient, à la fois, la naissance du Christ, qu'elles placent en ce jour, et son baptême dans les eaux du Jourdain ; et elles appelèrent cette fête Epiphanie, c'est-à-dire apparition, à cause de l'apparition de l'étoile aux mages et de l'apparition de la colombe au baptême du Jourdain. L'Eglise d'Occident, elle, se rappelait à la fois, en cette fête, et l'adoration des mages, et le miracle de la colombe de l'Esprit dans le ciel entr'ouvert, et le changement de l'eau en vin aux noces de Cana, et le fait merveilleux des cinq mille hommes nourris, au désert, par trois pains et deux poissons.



Cette fête, qui représentait tant de prodigieux témoignages de la puissance divine, revêtait une solennité toute particulière, et elle se célébrait avec plus de pompe que la Nativité, qui, depuis, a fort éclipsé son éclat. Lorsque l'empereur Julien, ne jugeant pas le moment venu de manifester son retour à l'ancienne religion, voulut détourner les bruits qui en couraient déjà, il choisit, pour se rendre à l'Eglise chrétienne, le jour de l'Epiphanie comme l'occasion la plus éclatante de faire profession de christianisme.



Mais des restes de traditions antiques et de réjouissances toutes charnelles vinrent s'ajouter de bonne heure à l'allégresse pieuse de l'Epiphanie, et ce fut ce mélange, sans doute, qui, dans la suite des temps, mit les autorités ecclésiastiques en défiance contre cette fête équivoque et lui fit perdre la splendeur de sa première gloire. La fête de l'Epiphanie tombait à peu près à la même époque que les saturnales, et les nouveaux convertis continuèrent naïvement, en l'honneur de l'adoration des mages et de l'Enfant Jésus, les festins et les bouffonneries auxquels ils se livraient d'abord en l'honneur de Saturne et de l'âge d'or. Même, l'usage de faire des rois en ce jour d'Epiphanie semble remonter aux âges primitifs du christianisme, puisque, au quatrième siècle, un père de l'Eglise grecque, saint Astérius, prêchant contre la fée des calendes, s'indigne à propos de l'usage qu'ont les soldats d'élire entre eux un roi de fantaisie. 




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— Ils font, dit-il, une représentation comique et burlesque de la puissance souveraine. Ils en font un spectacle, paraissant en public sur un char de triomphe, suivis et adorés par des courtisans et des gardes qu'ils se font à eux-mêmes par plaisir, et à qui ils donnent des noms et des qualités imaginaires.



Saint Astérius voyait, en ces pratiques, un outrage à la dignité royale. Du reste, il ne fut point le dernier prélat et le dernier docteur dont le zèle s'alluma contre la popularité et la joie de cette fête.



Aux premiers temps de l'Eglise gallicane, les évêques et les pasteurs invitaient leurs fidèles à solenniser cette fête avec le plus d'éclat possible, conseillant même aux gens des campagnes de se rendre, en ce jour, aux églises des villes, comme il se faisait, pour plus de cérémonie, à Pâques et à la Pentecôte. On sonnait les cloches vers le soir, parce que l'ange qui annonçait la naissance du Christ apparut aux bergers au commencement de la nuit, et parce que les mages présentèrent leurs offrandes à l'Enfant avant de se livrer au sommeil. Au son des cloches, les fidèles se réunissaient dans les sanctuaires et y passaient plusieurs heures en prières, pour se préparer, maintenant, à la fête. Mais bientôt, au lieu de s'assembler dans les églises, on prit l'habitude de s'assembler dans les mairies et d'y faire un banquet, tradition, directe encore, des agapes ou festins pieux où les premiers chrétiens mangeaient en commun dans les églises, à l'issue des offices. Le concile d'Auxerre dit expressément :

Quiconque aura une dévotion à faire ou une vigile, qu'il la fasse dans l'église et non ailleurs, ni dans les mairies, ni auprès des buissons et des haies, ni à certains arbres affectés et proches des fontaines.



Comme pour réagir contre cet abus, nombre de dévotes personnes se mirent à jeûner en la vigile de l'Epiphanie ; l'usage en dura longtemps : au dix-septième siècle, dans certaines églises qui avaient conservé plus purement les antiques traditions, les diacres et les sous-diacres, ce jour-là, paraissaient à l'autel revêtus de chasubles relevées, ornement rituel des jours de pénitence. L'Eglise grecque observe encore ce jeûne, aujourd'hui.



Mais, en Occident, malgré les protestations de quelques docteurs, la fête de l'Epiphanie s'éloigna de plus en plus de toute idée de macération et devint de plus en plus un jour de réjouissances qui n'avaient plus nul caractère pieux. Cette licence toute profane envahit même les églises.


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6 JANVIER EPIPHANIE FÊTE DES ROIS

Jean Belethus, qui écrivait au douzième siècle, dit, dans un Rational des Offices Divins


Il y a des églises où c'est la coutume que même les évêques et les archevêques jouent, dans les cloîtres et dans les monastères, avec leurs inférieurs jusqu'à s'abaisser au jeu de boules, de sacs ou de paume; et de cette liberté, qu'on appelle la décembre, pour être comme une suite de la vieille tradition qui se gardait, parmi les païens, de donner liberté, en ce mois, aux serviteurs et aux servantes, à qui l'on permettait de faire pair et compagnon avec leurs maitres en se réjouissant tous ensemble. Or, quoiqu'il y ait de grandes et célèbres églises, comme celle de Reims, qui retiennent encore cette coutume, il semble, toutefois, qu'on ferait mieux de l'abolir et de ne pas jouer.



Le clergé, dit-il encore, faisait dans les églises, entre Noël et le jour des Rois, des danses solennelles : les diacres faisaient les leurs en la fête de saint Etienne, qui était diacre ; les prêtres, à la fête de saint Jean l'Evangéliste, en qui le sacerdoce était joint à l'apostolat ; les petits clercs, qu'on nomme enfants de choeur, à la fête des Innocents, et les sous-diacres à la Circoncision ou au jour des Rois.



Cette fête des sous-diacres, célébrée au jour de l'Epiphanie ou la veille, c'est la fameuse Fête des Fous.



On sait à quelle parodie de ses dignités et de ses rites se livra l'Eglise dans cette fête, durant tout le moyen âge. Avec toute sorte de cérémonies ridicules, on élisait, dans chaque église cathédrale, un évêque, un archevêque ou un pape des fous ; portant mitre, crosse et croix épiscopale, l'évêque des fous officiait dans l'église et donnait sa bénédiction au peuple ; cependant, les prêtres et les clercs, en habit séculier, revêtus de costumes de mascarade et de comédie, le visage barbouillé ou caché sous des masques hideux ou grotesques, dansaient dans le choeur ; ils mangeaient du boudin et des saucisses sur l'autel ; ils jouaient aux dés et aux cartes sous les yeux du célébrant ; ils faisaient brûler, dans l'encensoir, des morceaux de vieilles savates.



Puis, après la messe, montés sur un sale tombereau, ils s'en allaient par les rues et, s'arrêtant aux carrefours, donnaient la comédie à la populace qui les entourait, à grand renfort de gestes et de paroles dont la décence était moins grande que la bouffonnerie. Le tout se terminait par des mascarades, des danses et des festins publics ; on s'y déguisait aussi en rois et en officiers de parade, ainsi qu'il apparaît dans les articles du concile de Bâle.



Et cette fête était fort chère à la grossièreté du peuple des villes. Ce fut elle, sans doute, et les banquets auxquels elle donnait lieu qui firent abandonner presque généralement le jeûne de la Vigile. Ces mascarades résistèrent longtemps aux efforts des docteurs de Sorbonne ; si bien établie était cette Fête des Fous, qu'on la mentionnait au livre des offices divins et des prédicateurs disaient, en chaire, qu'elle était aussi approuvée de Dieu que la fête de la Conception de la Vierge Marie. Elle se maintint quatre cents ans contre ses adversaires ; au quinzième siècle, enfin, le concile de Bâle l'interdit définitivement et défendit, à l'avenir, toutes profanations de ce genre.



Repoussées ainsi des églises, les réjouissances de l'Epiphanie, les chansons et les danses se réfugièrent aux maisons des fidèles. L'usage de faire un roi dans le banquet de l'Epiphanie, de le tirer au sort, de l'acclamer quand il boit, pourrait bien être un reste de la Fête des Fous.



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6 JANVIER EPIPHANIE FÊTE DES ROIS



Cette fête des Rois, qui succéda à la Fête des Fous, était très populaire, en France. La jovialité picarde et flamande s'y déployait aussi largement ; mais l'usage de créer un "roi de famille" n'était inconnu ni dans le royaume de Naples ni à Florence, comme il apparaît par le témoignage de Paul Jove.



En Angleterre, la fête était plus longue : les gens de qualité tenaient table ouverte de Noël jusqu'à l'Epiphanie ; durant l'année, on faisait engraisser douze boeufs à cet effet, et, chaque jour, on en tuait et on en mangeait un. On élisait, pour maître, un des serviteurs de la maison, en l'honneur de Jésus-Christ qui voulut naître esclave, et on envoyait aux pauvres de quoi vivre abondamment durant ces douze jours. Mais la piété n'était que le prétexte ; la gaieté de la fête dégénérait bien vite ; on n'entendait, dans les rues et les maisons, que cris et chansons d'ivresse. Aussi, les protestants prenaient-ils avantage de ce spectacle pour dire que l'Eglise catholique apprenait, à ses fidèles, à célébrer les fêtes de la religion par l'ivrognerie et la débauche.


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EPIPHANIE A ST JEAN DE LUZ - DONIBANE LOHIZUNE
PAYS BASQUE D'ANTAN

Ces festins étaient, pourtant, exclusivement laïques, et l'Eglise et le clergé gardaient, pour ces réjouissances, la défiance qu'autorisait leur origine. Les conciles en censurèrent plus d'une fois l'usage et les docteurs le flétrirent."




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