UNE EXPOSITION DE PEINTRES À BAYONNE EN 1866.
L’histoire de l’école de Peinture à Bayonne au cours du 19ème siècle reste mal connue et il faut attendre 1871 pour que l’école municipale de Dessin et de Peinture de Bayonne prenne toute son envergure.
Voici ce que rapporta à ce sujet le journal Moniteur des Arts, le 2 novembre 1866 :
"Correspondance.
Exposition de Bayonne.
15 octobre 1866.
La Société artistique de Bayonne, fondée eu I862, vient d’avoir sa troisième exposition. Je ne connais pas encore les résultats définitifs de cette nouvelle campagne, mais il me semble douteux qu’elle soit bien fructueuse. Le public flottant qui vient ici, quoi qu’il appartienne à l'élite de la société française et étrangère, n’achète pas de tableaux en voyage, et les ressources privées de la Société sont loin de constituer un capital en rapport avec le nombre des artistes convoqués. Que faire, en effet, avec 108 souscripteurs ?
Vous savez, sans doute, que MM. Bonnat et Achille Zo sont nés à Bayonne, et ces deux artistes ont le bon goût de prêter aux solennités artistiques de leur ville natale un concours très actif.
M. Bonnat expose une Petite Mendiante et un Portrait, où l'on retrouve toujours les mêmes qualités et les mêmes défauts : un sentiment et un coloris pleins de charme, joints à une exécution incomplète. Ce sont des esquisses très heureuses auxquelles il manque seulement un dessin soutenu pour en faire des tableaux. Après son succès de cette année, M. Bonnat est tenu d’exécuter, à l'avenir, autre chose que des ébauches.
MENDIANTS EN ITALIE PEINTRE LEON BONNAT |
Quant à M. Achille Zo, personne ne l'accusera de noyer la ligne dans la pâte. La moindre toile de ce peintre consciencieux est aussi étudiée que ses grandes machines. Il y mène tout de front : la composition, la correction et la couleur. N'oublions pas de rappeler aussi que M. Zo donne à tout ce qu'il fait le caractère local. Dans les scènes espagnoles qu'il affectionne tout naturellement, le soleil inonde la toile ; les silhouettes se détachent en vigueur dans la lumière ; enfin, sa palette variée rend très exactement le côté réel et pittoresque du costume. L’artiste s’est créé ainsi une originalité incontestable.
BOHEMIENS EN VOYAGE 1861 PAR ACHILLE ZO |
En dehors des artistes du crû, sur lesquels j ai pensé devoir insister, bien que vous ayez souvent l’occasion de rencontrer leurs œuvres à Paris et ailleurs, j’ai été frappé à la vue d’un grand tableau intitulé : Dernière heure de l'Apôtre infidèle, par Mme Sélim. Je n’aurais jamais cru qu'un pinceau de femme pût exécuter une œuvre aussi puissante, à la fois comme conception et comme facture. Il s’agit évidemment de Judas, se trouvant face à face avec le remords, après la trahison. L’apôtre infidèle se débat au milieu des tortures de sa conscience troublée, et subit, dans cette terrible agonie de l'âme, un supplice plus cruel mille fois que la mort. L'ensemble de la scène réalise, avec une vigueur peu commune, cet épisode grandiose du Nouveau Testament, et nous estimons que ce tableau mériterait à tous égards d’entrer dans un musée ou dans une église.
Outre cette page frappante, Mme Sélim expose trois autres ouvrages qui montrent son talent sous des aspects bien différents. Dans la Carmélite en prière, c'est le sentiment religieux pur et calme ; dans la Légende de l'enfance, c'est la poésie servie par un pinceau qui sait être délicat quand le sujet l'exige ; enfin, dans la Tête d'étude au fusain, c’est la tradition de l’art sérieux.
FEMME EN PRIERE PAR MME PAUTHONNIER-SELIM HONORINE |
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire