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mercredi 5 juin 2024

UN CRIME À JUXUE-JUTSI EN BASSE-NAVARRE AU PAYS BASQUE EN DÉCEMBRE 1835

UN CRIME À JUXUE EN 1835.


En 1835, la commune de Juxue, en Basse-Navarre compte environ 460 habitants, et est administrée par le Maire Laborde.




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BLASON DE JUXUE-JUTSI BASSE-NAVARRE
PAYS BASQUE D'ANTAN




Voici ce que rapporta à ce sujet le quotidien Le Droit, le 26 mars 1836 :



"Cour d'Assises des Hautes-Pyrénées (Tarbes). 

Présidence de M. Ferrier, conseiller à la Cour royale de Pau.

Audience des 17 et 18 mars.

(Correspondance particulière.) 

Tentative de parricide. — Condamnation par le Jury des Basses-Pyrénées. — Acquittement par le Jury des Hautes-Pyrénées. 



Cette importante affaire a occupé, pendant deux jours, la Cour d’assises des Hautes-Pyrénées ; le public en a suivi les débats avec un intérêt mêlé de curiosité. L’accusation était dirigée contre un homme né au sein d’une population dont les habitudes, les mœurs et le caractère, mais principalement le langage, font un peuple à part au milieu de la nation française.



L’accusé est basque d’origine ; il est né à Juxue, dans la Navarre, son nom est Pierre Garat, dit Harispe ; il est âgé de 31 ans, charpentier de profession.



Traduit, le mois de décembre dernier, devant la Cour d’assises des Basses-Pyrénées, il y fut condamné aux travaux forcés à perpétuité. Sur son pourvoi, la déclaration du jury a été annulée par la Cour de cassation et la cause renvoyée aux assises de ce département.



Pierre Garat, né à Juxue, comme on vient de le dire, habitait depuis deux années environ, une autre commune du pays Basque, celle de Hotta, où il s’est marié. Avant de quitter la maison de son père, il avait eu avec lui des discussions, relativement à la succession de sa mère. Quoique d’un mince intérêt, ces discussions avaient allumé dans son cœur une haine profonde contre l’auteur de ses jours. Il ne dissimulait pas les sentiments qui l’animaient ; il le traitait, de fripon, de coquin, disant qu'il avait la figure d’un réprouvé. Il lui avait adressé à lui-même ces expressions révoltantes.



Aux outrages, il ajoutait les menaces. Un témoin lui a entendu dire qu’il lui casserait les os et lui ferait autant de trous qu'à un crible ; un autre, que son père serait cause qu’il ferait une mauvaise fin, mais qu’il ne lui pardonnerait pas ; un troisième, qu’une nuit, il s’était levé deux fois de son lit pour le châtier, mais qu’il avait réfléchi ; que plus tard, il trouverait l'occasion de se satisfaire.



Bernard Garat, père de l’accusé, fut en effet obligé de déserter une nuit sa demeure et de chercher asile dans la maison d’un voisin.



Cependant, leur réconciliation paraissait avoir été opérée par l’intermédiaire du prêtre de la paroisse ; ils avaient transigé sur leurs contestations. Le père avait acquis pour 75 fr. la part revenant à son fils dans la succession de sa mère ; de son chef, il lui avait promis une somme de 50 fr., en avancement d’hoirie, et de plus, une autre somme de 75 fr., dans le cas où il viendrait à se marier.



Peu de temps après, Garat fils contracta un mariage dans la commune de Hotta, et depuis il ne revint que deux fois dans la maison de son père. La première fois pour y voir Elizabeth, sa sœur aînée, qui était malade, et la seconde, pour engager, mais inutilement, son père à se retirer auprès de lui.



D’après l’accusation, Garat fils conservait toujours dans son cœur, le ressentiment qu’il avait manifesté avant son mariage ; il nourrissait en même temps un sentiment profond de jalousie contre sa sœur Elizabeth, objet de la prédilection de son père.



A la fin du mois de mai 1835, ou dans les premiers jours du mois suivant, il rencontra dans un cabaret un habitant de Juxue ; il lui demande si son père et sa sœur Elizabeth sont toujours d'accord. Sur sa réponse affirmative, il s’écrie : ils ne le seront pas longtemps. Mon père n'a pas la figure d'un homme, mais d’un diable ; je le traverserai avant longtemps de deux balles. Tu verras avant longtemps, dit-il, à cette personne, qui voulait le ramener à de meilleurs sentiments. Pierre Garat, dans ce moment était, il est vrai, en état d’ivresse.



Quelques jours auparavant, il s’était adressé à deux autres personnes différentes pour se procurer des pistolets, disant à l’une qu’il en avait besoin pour accompagner des contrebandiers, et à l’autre qu’il voulait s’en servir pour une noce.



Telles étaient les dispositions de Garat fils, poursuit l’accusation, lorsque le 16 juin dernier, vers huit heures du soir, Bernard Garat père, revenu de son travail, est atteint par derrière d’un coup de feu, au moment même où il ouvrait la porte de sa maison demeurée déserte toute la journée ; il tombe frappé de deux balles qui lui ont traversé les reins.



A cette explosion, aux cris plaintifs de la victime, Elizabeth, sa fille, accourt la première. Ses cris, mêlés à ceux de son père, attirent les voisins. L’infortuné vieillard est baigné dans son sang. On le porte dans un lit, on le questionne sur son malheur. Il a entendu un léger bruit avant l’explosion, mais il n’a pas vu son assassin ; il n’accuse personne.



Bernard Garat père était un ouvrier laborieux, un parfait honnête homme, un galant homme, déclarent tous les témoins. Jamais il n’eut de discussion avec personne, si ce n’est avec sou fils. Et déjà chacun tout bas, au fond du cœur, accuse le fils du meurtre de son père.



On s’aperçoit bientôt que la maison a été dévalisée. Une armoire placée à l’étage supérieur est enfoncée. Tout ce quelle elle contenait, hormis un vieux drap de lit, a disparu. Les papiers de famille étaient dans une autre petite armoire, au rez-de-chaussée ; cette armoire, dont Garat père tenait la clé dans celle du premier, a été ouverte et refermée, mais les papiers ne s’y trouvent plus. Un fusil, qu’il avait emprunté depuis trois ans et chargé lui-même de deux balles, a été enlevé aussi. Oh ! dit-il, sans doute que le voleur s'en est servi pour me frapper.



La justice, informée de ce fatal événement, se transporte, le lendemain 17, au domicile du malheureux Garat. Le fils, que sa sœur Elizabeth a fait prévenir du malheur de leur père, arrive aussi au moment où le médecin, appelé à lui donner des soins, opérait l'extraction de l’une des deux balles arrêtée dans la cuisse droite. Il demeure froid, indifférent, à la vue de son père en proie aux souffrances les plus atroces. Ses sœurs, tout le monde est dans l’affliction : lui seul est insensible à ce spectacle de douleur. Retiré dans un coin, pas une larme n’échappe de ses yeux, pas une parole de consolation dans ce moment suprême.



La justice, dont les soupçons contre lui ont été éveillés par la rumeur publique, ordonne son arrestation. On l’interroge. Il nie le crime. On lui demande ce qu’il a fait la veille, où il était à l’heure que l’attentat a été commis. Il répond qu’il a travaillé toute la matinée de son état de charpentier, qu’il est allé ensuite à la recherche de son cheval, égaré sur les montagnes depuis quelque temps, et qu’il est rentré vers dix heures du soir.



On interroge aussi les sœurs, le père, qui a survécu jusqu’à ce jour à la gravité de ses blessures, comme par miracle, a dit le docteur chargé de les constater, mais qui ne peut y résister longtemps encore. Le vieillard n’accuse pas son fils. Il rappelle seulement les dissentiments et la mésintelligence qui éclataient entre eux après le décès de sa mère, et les paroles outrageantes qu’il lui adressait à cette époque.



Cependant Garat fils est sous la main de la justice. De nouveaux indices de culpabilité vont bientôt s’élever contre lui.



Quatre jours après le crime, le 20 juin, un enfant a découvert quelques effets an milieu des broussailles. Ce sont les effets enlevés de la maison de Garat père. Son linge, ses hardes, ses outils de charpentier, ses papiers, son fusil. Le fusil était déchargé. Parmi ces objets, on trouve une serviette enveloppant des fourchettes et des cuillers en fer, marquée P A. Elizabeth la reconnaît. Elle l’a donnée, dit-elle, à son frère, quelque temps après la mort de leur mère. Elle en a donné de pareilles à chacune de ses deux sœurs, Justine et Marie, mais avec des marques différentes.



Le jour du crime, Pierre Garat a été vu passant dans les communes d’Ibarre, Prunus et St-Just, qui séparent Hotta de Juxue. Il a pris le chemin de traverse qui conduit à cette dernière commune.



Le soir, entre onze heures et minuit, un meunier de St-Just, cherchant des mulets qu’il a perdus, a rencontré, sur le chemin de Juxue, un homme marchant à pas précipités, et portant sur son col un panier au bout d’un bâton. Il chemine avec lui quelque temps ; il lui parle ; il l’observe : à sa taille, à sa voix, il croit, sans pouvoir l’affirmer, que cet inconnu était Garat fils.



C’est sur les présomptions de culpabilité résultant de ces diverses circonstances, qu’une accusation de parricide a été portée contre lui.



Ces présomptions, ainsi qu’on l’a dit, avaient paru suffisantes au jury des Basses-Pyrénées, pour le déclarer coupable de ce crime, avec préméditation et guet-à-pens, en reconnaissant néanmoins qu’il existait en sa faveur des circonstances atténuantes.



Nonobstant l’arrêt de la Cour de cassation, qui a annulé cette déclaration et les débats qui l’avaient précédée, ce préjugé était formidable pour l’accusé.



De nouveaux débats se sont ouverts, où l'on a vu figurer des hommes étrangers à nos contrées, et dont l’idiome inconnu a été traduit à MM. les jurés par l’interprète attaché à la Cour d’assises des Hautes-Pyrénées.



M. Bouvet, substitut du procureur du roi, chargé de porter la parole dans cette grave accusation, en a présenté les charges avec une grande énergie. Nous regrettons de ne pouvoir reproduire l’exorde, dans lequel il a dépeint l’énormité du crime et l'horreur qu’il a inspiré à tous les peuples dans tous les temps, ce crime qu’un grand législateur de l’antiquité n'avait pas puni, parce qu'il le croyait impossible.



La défense de l’accusé était confiée à Me Lebrun. Ses efforts ont été couronnés d’un plein succès.



M. le président a résumé les débats avec une facilité d’élocution et une impartialité remarquables. Dix minutes après, le jury a prononcé un verdict d’acquittement à l'unanimité."



(Source : Wikipédia).



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