LE LAIT AU PAYS BASQUE EN 1918.
Pendant la première Guerre Mondiale, il y a un grand problème d'approvisionnement en laitage pour les habitants du Pays Basque.
Voici ce que rapporta à ce sujet La Gazette de Biarritz-Bayonne et Saint-Jean-de-Luz, dans
plusieurs éditions :
- le 13 mars 1918, sous la plume de son Directeur, Louis-Etienne Seitz :
"Toujours à propos du lait.
Nous avons reçu de M. J. d’Arcangues la lettre suivante :
Dans la "Gazette" du 10 mars, un article paraissait : "Laissez-nous le lait".
Un groupe de personnes animées d’un affectueux intérêt a bien voulu y répondre en adressant une lettre à M. Seitz, lettre qui fut insérée et que le directeur du journal fit suivre d’un commentaire, cette fois, tout à notre éloge.
Je tiens sans tarder à exprimer toute notre reconnaissance à celui ou à ceux qui prirent cette aimable initiative et à leur dire au nom de mon frère qui n’est pas ici, et au nom de toute ma famille, combien nous avons été touchés par ce témoignage d’une amitié que nous ne saurons oublier.
J’ajouterai qu’il faut croire, en constatant la différence de ton des deux articles dont nous avons eu l’honneur de faire les frais, que M. le directeur de la "Gazette" a pris dans l’intervalle quelques renseignements supplémentaires, et je dois dire, très nécessaires au respect de la vérité.
Comte J. D’Arcangues.
Nous n’avons rien à modifier à nos conclusions. Il n’y a d’ailleurs pas à rechercher entre nos articles du 10 et du 12 mars une "différence de ton". La même courtoisie, le même parti-pris d’union sacrée et de recherche du bien public caractérisent l’un et l’autre ; si le second contient des passages qui ont été agréables à l’amour-propre de M. J. d’Arcangues et de sa famille, c’est que l’occasion nous avait été donnée de rendre justice à des mérites reconnus et que nous aimons infiniment mieux relater des faits louables que discuter sur d’autres : nous sommes heureux d’avoir été agréables en étant justes et impartiaux.
Mais il faut revenir à la vraie question, celle du lait indispensable à la vie de la population et surtout des enfants et celle des fromages, dont on peut se passer, à la rigueur, en ces temps de restriction.
Nous espérons que, très prochainement, M. le comte d’Arcangues et sa famille nous donneront l’occasion de les féliciter pour l'abandon momentané d’une industrie devenue inopportune et de rassurer une population inquiète. Ils auront ainsi calmé certaines appréhensions et quelques colères dont nous avons entendu les échos ; ils auront gagné des sympathies qui ne demandent qu’à rester fidèles ; ils auront accompli un acte de patriotisme d’autant plus méritant qu’il comportera quelques sacrifices."
- le 21 mars 1918, sous la plume de son Directeur, Louis-Etienne Seitz :
"La question du lait.
Les lecteurs de la "Gazette" ont suivi avec une bienveillante faveur notre série d’articles sur le lait. Nous pouvons affirmer qu’il y a unanimité, parmi toutes les voix que nous avons entendues, pour approuver nos conclusions et réclamer la cessation, — au moins momentanée — des industries qui, dans notre région, provoquent la disette du lait en le récoltant pour la fabrication du beurre et du fromage.
Nous avions espéré, sur la foi de renseignements qui nous étaient parvenus, que la dernière en date des fromageries récemment créées, celle d’Arcangues, cesserait son exploitation et que le patriotisme et le souci de l’intérêt public l’emporteraient sur toute autre question d’intérêt ou d’amour-propre.
CHÂTEAU ARCANGUES - ARRANGOITZE PAYS BASQUE D'ANTAN |
Nous devons reconnaître qu’il n'en est rien encore et que la situation, loin de s’améliorer, s’aggrave chaque jour. De toutes parts, on nous demande de persévérer dans notre campagne ; on réclame une sanction ; on se plaint de la raréfaction d’un produit essentiel à l’alimentation des enfants et des malades.
Un pharmacien de Biarritz écrit :
Ma laitière m’annonce qu’elle ne me portera plus le lait car M. le marquis d’Arcangues va monter une fabrique de fromages de Camembert. Il paraît que M. d’Arcangues achètera le lait à plusieurs laitières à un prix raisonnable et leur donnera, en plus, du terrain pour la culture des pommes de terre...
Vous n’ignorez pas la difficulté que nous avons, nous autres ménagères, à nous procurer un peu de lait. Voilà pourquoi j’ai l'honneur de m’adresser à vous pour vous demander de juger s’il est rationnel que des enfants comme ma fillette d’environ 3 ans soient privés de lait tandis que tout celui de la région serait employé à fabriquer des fromages dont on peut très bien se passer.
Recevez, etc.
Un des médecins les plus distingués de notre station nous disait, il y a quelques jours, que des malades qu’il avait mis au régime lacté, et pour qui ce régime était peut-être une question de vie ou de mort, ne pouvaient se procurer du lait.
Le propriétaire d’un des plus grands hôtels de Biarritz, vient de se voir tout à coup supprimer le lait parce que le fermier qui le fournissait écoule tout son lait à la fromagerie d’Arcangues.
La laitière qui servait le directeur d’une très importante maison de commerce, directeur qui a plusieurs enfants en bas-âge, a cessé hier de fournir le lait habituel en invoquant la même raison.
Sans avoir eu à faire aucune enquête et rien qu’en recueillant les doléances qui nous viennent spontanément, nous pourrions citer de nombreux autres cas et nous tenons les noms et les faits à la disposition des autorités.
Les propriétaires de la fromagerie d’Arcangues ont beau prétendre qu’ils tiennent leur promesse de ne pas récolter de lait dans les villages immédiatement voisins de Biarritz ; Biarritz n’est pas tributaire seulement, pour le lait, de tel ou tel village plus proche, mais de toute la région circonvoisine et tant que les fermiers trouveront au domaine d’Arcangues un débouché très proche et très rémunérateur pour cette denrée d’alimentation, les laitières cesseront une à une de récolter et d’apporter ici le lait, et notre population, y compris enfants et malades, souffrira de plus en plus de la très pénible situation qui lui est faite.
On dit bien que si demain la fromagerie cessait son industrie, le lait serait perdu car les laitières ne trouveraient pas une rémunération suffisante pour la récolte du lait de ferme en ferme et pour son transport à Biarritz dans les familles.
LAITIERES PAYS BASQUE D'ANTAN |
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