Libellés

mercredi 27 novembre 2024

L'ÉVASION D'ALLEMAGNE DE TROIS PRISONNIERS DE GUERRE BASQUES EN NOVEMBRE 1918 (première partie)

DES BASQUES PRISONNIERS DE GUERRE EN ALLEMAGNE S'ÉVADENT EN NOVEMBRE 1918.


Quelques jours avant l'Armistice du 11 novembre 1918, des Basques, prisonniers en Silésie prussienne, décident de s'évader du camp de Sprottau.




pays basque histoire première guerre mondiale prisonniers allemagne
CAMP DE PRISONNIERS DE SPROTTAU
SILESIE PRUSSIENNE 1914 1918



Le camp de Sprottau, en Silésie prussienne, situé au Sud-Est de Francfort-sur-l'Oder a accueilli 

des milliers de prisonniers de nationalité française, anglaise, italienne et russe.

Il a été construit pour une capacité de 10 000 hommes. 



Au 16 avril 1916, suite à une visite du Comité International de la Croix-Rouge, il contient 1 100 

Russes et Français et son Commandant est le Colonel von Wacholtz.

Le camp est établi sur un terrain sablonneux et sec, dans une contrée boisée.

Il y a deux sortes de baraques : 

1° les Erdbaracken, en planches revêtues de carton bituminé, de 2m 50 de hauteur et 3m 50 de ligne médiane, avec un cube d'air suffisant pour 100 occupants. Le chauffage est assuré par de petits poëles en fonte et l'éclairage par des lampes électriques.


2° les nouvelles baraques, destinées au lazaret de tuberculeux, de dimensions intérieures (10 X 12 X 4), donnant un cube d'air de 18 m2 par lit.



pays basque histoire première guerre mondiale prisonniers allemagne
BOULANGERIE CAMP DE SPROTTAU
SILESIE PRUSSIENNE 1914 1918



Le camp de Sprottau a été désigné comme lazaret central pour les tuberculeux des autres camps. Les autres prisonniers sont peu à peu évacués, en dehors de ceux qui sont nécessaires au service du camp. La présence de ces nombreux malades a changé sans doute l'aspect et la vie du camp, avec la grande difficulté de pourvoir à l'alimentation renforcée indispensable pour le traitement de cette maladie.



pays basque histoire première guerre mondiale prisonniers allemagne
BARAQUE DE CONVALESCENCE SPROTTAU
SILESIE PRUSSIENNE 1914 1918



Voici ce que rapporta au sujet de l'évasion de ce camp par trois Basques le quotidien local La 

Gazette de Biarritz-Bayonne et Saint-Jean-de-Luz, le 2 décembre 1918 :



"Evadés d'Allemagne.



Trois prisonniers de guerre, dont un Bayonnais, Cossid, et un Biarrot, Touzaa, ayant réussi à s'évader d'Allemagne ont eu l'aimable pensée d'écrire pour la "Gazette" le récit de leur intéressante odyssée. Nous en commençons aujourd'hui la publication :



"Nous avions depuis longtemps l'intention de nous évader, mais la situation d'un camp de Sprottau, en Silésie, où nous étions internés à environ 800 kilomètres de la frontière Suisse ou de celle de Hollande, nous avait toujours empêchés de mettre notre cher projet à exécution. Mais nous apprenons que les Tchèques ont déclaré au Reichsrath autrichien qu'ils sont les amis de l'Entente, et deux jours après que la Bohême a proclamé son indépendance, notre décision est prise.



Nous sommes environ à 80 kilomètres du Riesengebirrg, qui nous sépare de l'Autriche. Nous sommes trois : Delahodde, Touzaa et Cossid. Le premier est l'interprète officiel du camp, et il possède la langue allemande d'une manière parfaite. Ayant pu se procurer des effets civils auprès d'une jeune Allemande, très accessible, comme beaucoup de ses semblables, au prestige des Français, il va représenter le fermier venant au camp pour y chercher deux prisonniers et les conduire au travail. Chacun de nous parvient à quitter le camp isolément et à des heures différentes ; puis nous nous rejoignons à l'extérieur de la ville.




pays basque histoire première guerre mondiale prisonniers allemagne
SALUTATIONS DE SPROTTAU
SILESIE PRUSSIENNE


A Sprottau, nous passons inaperçus ; mais, de crainte d'être reconnus à la gare, nous décidons de prendre nos billets au village de Mallmitz, situé à huit kilomètres plus loin. N'allons-nous pas rencontrer un officier ou un Allemand quelconque qui nous connaisse ? C'est le coeur serré que nous faisons cette étape presque décisive, chargés de nos sacs de travailleurs et suivis de notre "propriétaire" aux lunettes d'or et au visage rasé qui, par instants, pour faire accélérer notre allure, nous lance le "louss" brutal qui caractérise la race.




pays basque histoire première guerre mondiale prisonniers allemagne
SALUTATIONS DE MALLMITZ
BASSE-SILESIE



En gare de Mallmitz, on nous délivre nos billets contre présentation de faux papiers établis sur des imprimés dérobés au bureau du camp.



Jusqu'à Breslau, notre voyage se fait sans encombre. Nous nous amusons même à écouter les conversations des "Fritz" qui semblent fort peu se soucier de l'avis collé sur les parois : "Attention aux espions !" Les esprits autrefois si passifs, nous paraissent extraordinairement surchauffés, surtout dans ce fond de la Silésie. Imprécations contre le kaiser, réflexions sur les dirigeants et les diplomates qui ne sont choisis que parmi les "Von" et non parmi les plus capables, comme en France, en Angleterre et en Amérique.



En gare de Breslau, nous avons affaire à la police, qui, à deux reprises différentes, vérifie nos papiers et interroge notre "propriétaire". Nous croyons un instant la partie perdue ; mais Delahodde parle tellement bien l'allemand, qu'on ne peut reconnaître en lui un étranger. Même un brave et gros gendarme abandonne un instant l'air de grave importance que ses pareils affectent là-bas, pour nous dire en plaisantant : "Bonchour Mossieu !"



La gare où nous devons nous embarquer pour la frontière est située à l'autre bout de la ville que nous traversons. Après quelques instants, nous remarquons avec émotion qu'un homme nous suit ostensiblement à quelque distance, sans doute un policier ; nous nous croyons pris. Voilà l'homme sur nos talons ; il nous fait signe d'arrêter, et, quand il nous a rejoints, c'est dans le plus pur français qu'il nous interpelle. Sa voix tremble d'émotion. Celui que nous prenions pour un policier, n'est autre chose qu'un malheureux Messin exilé par les Boches depuis 1914. Quatre ans, il a vécu, comme des milliers d'Alsaciens-Lorrains, loin de sa famille, libre en Silésie, mais surveillé à chacun de ses pas. Il nous dit son malheur, ses souffrances et sa haine ; mais aussi son espérance. Il a vu deux Français : malgré la défense formelle, il n'a pu résister au désir de leur parler dans sa chère langue maternelle. Nous nous tenons pourtant sur nos gardes, car on n'est jamais trop méfiant en pareille aventure, et lui montrant du geste notre propriétaire qui, en comédien consommé, ne sourcille pas, nous lui disons : "Vous pouvez y aller, il ne pige pas". Mais les badauds (il y a partout des badauds) intéressés par notre groupe, commencent à s'arrêter. Une pression de main rapide, et nous nous éloignons à regret de notre ami inconnu qui, demeuré sur place, regarde tristement s'éloigner ces deux prisonniers et leur maître dans lesquels il est loin de supposer trois évadés. Nous éprouvons comme un regret de ne pouvoir le mettre dans la confidence.



A la gare, on nous apprend que le train du soir, celui qui doit nous conduire à Fell Hammer, village situé à 15 kilomètres de la frontière, est supprimé. Nous voici tenus de coucher à l'hôtel, circonstance défavorable et dangereuse, qui nous oblige à donner nos noms exacts déjà inscrits sur les papiers qu'il nous faut produire. Notre "propriétaire" déclare s'appeler Langer et appartenir à la religion protestante. Nous avons peine à retenir notre rire, lorsque nous restons seul. Le lendemain matin, nous prenons, sans encombre, le train de 5 heures, et vers 10 heures, nous arrivons à Fell Hammer.



Nous traversons rapidement le village et, sitôt que nous traversons un bois, nous nous y enfonçons et choisissons un endroit où nous ne puissions pas être découverts. C'est le dimanche 3 novembre. L'effort à produire sera grand pour traverser les monts de Bohême ; aussi, puisons-nous largement dans nos vivres et, après avoir enterré tous les objets et les effets qui ne nous sont pas indispensables, nous étudions notre itinéraire avec le plus grand soin et en écrivons les moindres détails. Cela nous est facile, car nous avons pu nous procurer une excellente carte au 1/150 000."



A suivre...








Merci ami(e) lecteur (lectrice) de m'avoir suivi dans cet article.

Plus de 6 000 autres articles vous attendent dans mon blog :

https://paysbasqueavant.blogspot.com/


N'hésitez pas à vous abonner à mon blog, à la page Facebook et à la chaîne YouTube, c'est gratuit !!!

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire