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dimanche 31 mars 2024

LA FÊTE DE PÂQUES AUTREFOIS

LA FÊTE DE PÂQUES AUTREFOIS.


Pâques est la fête la plus importante du christianisme.

Elle commémore la résurrection de Jésus, que le Nouveau Testament situe le surlendemain de la Passion, c'est-à-dire "le troisième jour".

La date de Pâques est fixée au premier dimanche après la première pleine lune qui suit le 21 mars, donc au plus tôt le 22 mars et au plus tard le 25 avril.



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LUNDI DE PÂQUES 2 AVRIL 1934
DANSEURS DE BARCUS



Voici ce rapporta à ce sujet le quotidien Le Petit Journal illustré, le 12 avril 1936, sous la plume de 

Jean Lecoq :


"Traditions du jour de Pâques.



On ne se soucie pas toujours de connaître les origines des traditions qui s’attachent aux différentes fêtes de l’année. Les raisons premières, les causes profondes de ces coutumes ont pourtant leur intérêt. Voulez-vous que nous interrogions là-dessus les "folkloristes", les savants qui pratiquent la science des légendes, et qui s’évertuent à chercher jusque dans les plus lointaines civilisations, au plus profond de l’âme des peuples, le germe de ces traditions qui sont venues jusqu’à nous ?



Demandons-leur d’où vient la fête de Pâques. Ils nous répondront que le mot hébreu "pascal" signifie "passage" et que la Pâque fut créée par Moïse pour rappeler la sortie d'Egypte et le passage de la mer Rouge. Car Pâques fut une fête juive avant de devenir une fête chrétienne. Ce jour-là, dans les familles juives, on tuait le mouton gras et on le mangeait en famille.


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PÂQUES JUIVES
ILLUST S SEEBERGER


Les traditions de bonne chère sont celles qui se transmettent le plus sûrement. Celle du mouton passa d’une religion à l’autre. Jusqu’au XVIe siècle, on apportait, dans les églises, des agneaux tout rôtis, que le prêtre bénissait, et qui servaient de plat de résistance aux repas du jour de Pâques.



Mais le mouton a disparu de nos fêtes pascales. La seule tradition chrétienne qui ait subsisté, c’est celle de l’œuf.



Nos "folkloristes" vous diront encore que l’usage d’échanger des œufs le jour de Pâques remonte aux premiers temps du christianisme. Ils voient dans l’œuf, à cause du phénomène de l’éclosion, un symbole de la résurrection du Christ. De là vint, disent-ils, la coutume de porter au temple et de faire bénir par les prêtres des œufs que l’on distribuait ensuite à sa famille et à ses amis.



Or, il est vrai que cette tradition existe chez tous les peuples des différentes communions chrétiennes.



On la retrouve en France, dans les siècles passés. Au moyen âge, elle est, pour les clercs des universités, l’occasion de fêtes spéciales. Le jour de Pâques, la jeunesse savante se formait en cortège pour aller, de maison en maison, quêter des œufs par les rues. 




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QUÊTEUR DE LARD ET D'OEUFS
SAINT-JEAN-DE-LUZ CARNAVAL 1913



Un œuf de 25 000 francs-or. 


Plus tard, l’usage se répandit, parmi la noblesse, d’échanger des œufs qui étaient de véritables joyaux. Le Roi en distribuait de pleines corbeilles à ses courtisans. Boucher, le grand peintre du XVIIIe siècle, adorna de compositions libertines des œufs de Pâques destinés à Mme Victoire, fille de Louis XV.



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PORTRAIT DE FRANCOIS BOUCHER
Par Gustaf Lundberg — http://www.femme-classic-art.com/Fran%C3%A7ois-Boucher/Fran%C3%A7ois-Boucher-self-Portrait.html#sthash.Rv4PWo7e.dpbs; https://www.1000museums.com/art_works/gustaf-lundberg-portrait-of-francois-boucher-1703-70, Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=1454273


Ces œufs peints par Boucher sont perdus. Mais il existe d’autres spécimens de la peinture sur œufs, car ce fut, au siècle galant, pendant une longue période, le cadeau à la mode.



Quelques mois avant la guerre, j’ai vu vendre, à l'hôtel Drouot, un de ces œufs, qui faisait partie de la collection Bardac. C’était, à vrai dire, un œuf d’autruche, décoré d’une peinture de personnages dansant dans un parc, et monté sur un piédouche garni de bronze.



L’auteur de cette composition n’était pas un peintre illustre ; mais c’était, du moins, un spécialiste du genre : le peintre sur coquilles d’œufs par excellence. Il s’appelait Jean-Antoine Le Bel, demeurait rue Saint-Denis, vis-à-vis de la rue aux Fers, et faisait partie de l’Académie de Saint-Luc.



Au Salon de 1774, il exposa un autre œuf d’autruche, sur lequel était peint un sujet de Carnaval, et qui fut acheté par le roi Louis XV en personne. J’ignore à quel prix le peintre d’œufs de Pâques faisait payer ses œuvres ; mais il est certain qu’elles ont singulièrement augmenté de valeur en vieillissant. Dame !... la matière en est fragile et bien peu d’entre elles sont arrivées jusqu’à nous. L’œuf vendu à l’hôtel Drouot monta à plus de 25 000 francs. Des francs-or, naturellement. Avouez que ce n'est pas mal pour une simple coquille. 



Revenons à la tradition d’échanger des œufs de Pâques. A coup sûr, elle remonte dans la nuit des temps, et bien au delà de l’époque chrétienne, car les Chinois — les Chinois, qui semblent avoir tout connu et tout inventé — la pratiquent, dit-on, de temps immémorial et s’offrent chaque année des œufs au début du printemps.



Pourquoi des oeufs rouges ?


Mais pourquoi, à Pâques, est-il d'usage d'offrir des oeufs rouges ?...



Voici ce que m’a conté, pour répondre à cette question, un de mes amis, ancien membre de l'école d’Athènes, savant avisé et grand voyageur.



Ce savant, au cours d’un voyage de recherches archéologiques en Epire s’arrêta un jour au couvent grec des Saints-Pères. Conduit par un moine, il vit, dans l’église du monastère toute une série de tableaux dont les sujets étaient empruntés à l’Ancien et au Nouveau Testament.


"Afin de ne pas scandaliser le bon père qui m’accompagnait, me disait-il, je m’efforçais de lui montrer que tous les sujets que représentaient ces peintures m’étaient familiers ; et l’excellent religieux qui, d’abord, avait pris un air soupçonneux, commençait à me considérer avec quelque sympathie, lorsqu’un dernier tableau me fit hésiter.


J’apercevais bien un personnage présentant le type traditionnel de saint Pierre. En face de lui, une femme tenait des deux mains son tablier et l’ouvrait pour montrer au prince des apôtres des objets que je ne distinguais pas. dans la demi-obscurité de l’église.


— Et celui-ci, demandai-je, que représente-t-il ?

— Comment ? Tu ne le reconnais pas ?

— Non !  

— Tu ne vois pas que c'est sainte Madeleine montrant à saint Pierre ses œufs rouges ?



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22 JUILLET SAINTE MARIE MADELEINE


— Quels œufs rouges ? 

— Tu ne sais pas que saint Pierre, allant en hâte au tombeau, se croisa avec sainte Madeleine qui en revenait ?

— Certes, si, je sais cela... mais les œufs ?

— Alors, tu sais que sainte Madeleine dit à saint Pierre que le Christ était ressuscité ?... Mais que répondit-il ? Il répondit — car tu sais qu’il était incrédule — il répondit qu’il croirait cela quand les œufs de poule seraient rouges. Or, la sainte femme portait des œufs dans son tablier (le bon moine n'expliquait pas pourquoi elle s’était chargée de ces objets fragiles pour courir au tombeau... mais n’importe !... il n’y aurait plus de légende possible s’il fallait tout expliquer). Madeleine ouvrit donc son tablier : les œufs étaient devenus rouges, et saint Pierre fut forcé de croire à la résurrection. Voilà, conclut le révérend, pourquoi, à Pâques, on fait des œufs rouges."



Mon ami lui affirma, pour son excuse, qu’il avait lu tous les Evangiles, mais qu'il n'y avait jamais trouvé cette histoire.


— C’est que tu n’as pas bien lu, lui répondit le moine d’un ton bourru.



Le jour des cloches.




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JOYEUSES PÂQUES





Mais Pâques n’est pas seulement le jour des œufs ; c’est aussi le jour des cloches le jour où, après un long silence, elles recommencent à frapper l'air de leurs chants harmonieux.



Nous autres, Parisiens, dans le fracas de la grande ville, nous ne nous apercevons guère que les cloches se sont tues. A Paris, même au voisinage des églises, c’est à peine si l’on entend les plus gros bourdons. Mais, dans les campagnes, la voix des cloches est une voix familière, et leur silence, non plus que leur réveil, ne passent inaperçus.



Pâques est donc le grand jour pour les sonneurs de cloches, le jour solennel où, de toute la force de leurs bras, ils mettent en branle campanes et bourdons. Ce jour-là, le sonneur est le maître des régions éthérées ; il les emplit de la voix sonore de son carillon. En dépit d’un vieux dicton qui le représente comme un fervent ami de la rive bouteille, c’est surtout de musique aérienne que le sonneur se grise ce jour-là.



Au temps jadis, quand on fondait les cloches au pied même du clocher où elles devaient être logées, c’était l’époque qui précédait la fête de Pâques qu’on choisissait pour ce travail. Le jour de Pâques, on baptisait la cloche et on l’inaugurait. Le fondeur besognait dans le mystère. La nuit, on voyait rougeoyer les lueurs de son fourneau gigantesque ; et maintes histoires miraculeuses couraient sur son compte. Le sonneur aussi était le héros d’une foule de légendes. Mais le temps est passé de ces contes merveilleux. Pour les gens d’autrefois, la sonnerie des cloches était un chant — un chant dont on attendait impatiemment le réveil au jour de Pâques. C’était la voix de la foi qui montait au ciel comme un encens harmonieux. Pour les gens d'aujourd'hui, ce n’est, bien souvent, qu'un bruit — un bruit fâcheux qui les importune et trouble leur tranquillité. Quant aux légendes sur la fonderie et la sonnerie des cloches, aux belles légendes qui, jadis, faisaient frissonner les auditeurs à la veillée, seuls aujourd’hui s’en souviennent les fervents des traditions populaires, et aussi les poètes qui aiment la voix des cloches et le pittoresque des clochers.



Les trente-cinq dates de Pâques.


La date de Pâques, chacun sait ça, c’est le casse-tête chinois du calendrier. Cette fête mobile peut occuper trente-cinq dates différentes, entre le 22 mars au plus tôt, et le 25 avril au plus tard.



Comment est-elle déterminée ?... Voici : 


La résurrection du Christ avait suivi de près l’équinoxe du printemps : on décida donc de célébrer Pâques aux environs de l’époque où se produit ce phénomène. La résurrection ayant suivi une pleine lune, il fut entendu que la fête de Pâques serait célébrée chaque année le premier dimanche qui suit la pleine lune équinoxiale, c’est-à-dire la pleine lune qui vient immédiatement après le 21 mars. Il résulte de là que Pâques ne peut arriver avant le 22 mars, ni après le 25 avril. Si, en effet, la pleine lune a lieu le 21 mars, le dimanche suivant le plus rapproché tombera le 22. Si la pleine lune vient le 20 mars, ce ne serait pas la lune équinoxiale : celle-ci viendra le 18 avril ; et le dimanche suivant sera, au plus tard, le 25 avril. Ces deux dates extrêmes se produisent rarement. C’est ainsi que Pâques a été célébré le 22 mars 1818, et ne le sera plus à cette date qu'en l’an 2285. La fête a été célébrée le 25 avril en 1874, en 1885 et le sera de nouveau en 1943.



J’oubliais de vous dire que le statut de Pâques est l’oeuvre du Concile de Nicée, qui se tint en 1601. Il y a donc plus de trois siècles que la fête évolue ainsi entre ses trente-cinq dates.



Autrefois, quand elle tombait dans les derniers jours d’hiver, nos aïeux n’en étaient pas autrement incommodés et ne pensaient pas à s’en plaindre. C’est que la semaine sainte et les fêtes pascales étaient pour eux une période d’exercices religieux suivis de réjouissances familiales et de bombances au logis. Le lundi de Pâques, surtout, était un jour de grands festins. Peu importait qu’il fît froid ou qu’il plût au dehors. Le dos au feu, le ventre à table, on faisait bonne chère après une semaine de jeûne et de mortifications, et l’on ne souhaitait pas d’autres joies.



Mais, du jour où des moyens de transport plus faciles et plus réguliers développèrent le goût du tourisme, il en alla tout autrement.



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COLONIE DE VACANCES DE PÂQUES DANS LES PYRENEES


Les vacances de Pâques devinrent une période de villégiature. La pratique de la bicyclette, puis de l'automobile, consacra plus que jamais l'habitude de s'évader et de courir les routes à la recherche des premières sensations printanières, des premiers plaisirs du plein air, après la longue réclusion de l’hiver.



Aujourd’hui, la fête de Pâques, amenant avec elle une période de voyages d’agrément, de vacances pour les enfants, il serait souhaitable qu'elle pût coïncider réellement avec le réveil de la nature et le retour des beaux jours. Malheureusement, il n’en est pas souvent ainsi. L’équinoxe du printemps n’amène pas fatalement des températures printanières. Nous en avons la preuve presque chaque année. Au 21 mars, il gèle parfois aussi dur qu’en décembre.



Quand Pâques tombe fin mars ou au début d’avril, la fête a toutes les chances du monde d'être sabotée par l'impitoyable nature. Au contraire arrive-t-elle à la fin d’avril, il est probable qu’elle bénéficiera des premiers beaux jours.



Pâques stabilise.


C’est pourquoi la stabilisation de la fête de Pâques, à cette dernière date, serait accueillie dans tous les pays de la chrétienté comme une réforme heureuse entre toutes.



Nos voisins les Anglais, grands voyageurs devant l'Eternel, amis du tourisme, qui ne manquent jamais une occasion de quitter leur île brumeuse, n’ont cessé, depuis plusieurs années, de réclamer cette réforme.



En 1920, lord Desborough déposa à ce sujet un "bill" à la Chambre des Lords. L’étude de ce projet fut alors ajournée, à la demande de l’archevêque anglican de Canterbury, qui suggéra de surseoir au débat jusqu’à ce que les autorités des diverses Eglises se fussent prononcées sur la question. Le prélat invoquait une correspondance qu’il avait eue avec le cardinal-archevêque de Westminster pour montrer que le changement ne pouvait aboutir sans un complet accord entre les Eglises et le pouvoir civil.


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WILLIAM HENRY GRENFELL 1921
THE LORD DESBOROUGH


Mais un autre prélat anglais, l’évêque catholique de Salford, se déclarait partisan du projet et affirmait que le Pape pouvait, d’un trait de plume, ordonner la réforme. Depuis lors, on avait annoncé que le Concile devait se tenir à Rome, sous la présidence du cardinal Mercier, pour mettre au point la question et juger s’il y a lieu de modifier, dans le sens des aspirations modernes, le statut de Pâques fixé, jadis, par le Concile de Nicée.





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CARDINAL DESIRE-JOSEPH MERCIER



Mais le cardinal Mercier est mort ; et la question reste toujours pendante.



Enfin, on nous a dit, en ces dernières aînées, nées, que la Société des Nations avait pris l’affaire en mains. La Société des Nations n’est-elle pas, en effet, la plus haute émanation du pouvoir civil, la voix même des peuples... Et la stabilisation de la fête de Pâques n’intéresse-t-elle pas en même temps tous les pays soumis à la loi du Christ ?



Malheureusement, la Société des Nations a, en ce moment, d’autres chats à fouetter. Mais le jour où il lui sera possible de se faire, auprès des autorités religieuses, l’avocat de la réforme, celle-ci serait, sans doute, rapidement accomplie.



Et, dès lors, nous aurions l’espérance de pouvoir, plus que naguère, célébrer sous un ciel plus clément, par une température plus favorable aux plaisirs touristiques, la fête de la résurrection."




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