LA CIRCULATION DES CITOYENS ESPAGNOLS EN IPARRALDE EN 1873.
Pendant la troisième Guerre Carliste, des mesures de restriction de circulation sont appliquées aux ressortissants espagnols sur le territoire français.
Voici ce que rapporta à ce sujet le quotidien L'Univers, dans plusieurs éditions :
- le 21 avril 1873 :
"On lit dans la Semaine de Bayonne :
Notre honorable préfet et le digne M. Lespy, son secrétaire général, ont travaillé le saint jour de Pâques à la confection d'un nouvel arrêté sur les Espagnols, reçu à Bayonne lundi matin. La pièce est ce qu'elle devait être émanant d'un préfet de M. Thiers et d'un républicain de la veille : elle proclame le règne de l'arbitraire et édicté de nouvelles rigueurs.
Sous l'empire un Espagnol ne pouvait résider à la frontière s'il n'était muni d'un permis de séjour, que le préfet était libre de refuser. Cette première garantie est devenue insuffisante sous la République. L'an passé, M. Lespy a rendu obligatoire l'immatriculation au consulat espagnol. Cette fois il n'y a plus permis ni immatriculation qui tiennent : avec tous les papiers du monde un Espagnol peut être déclaré suspect, et interné comme tel. Suspect et interné, nous nageons pleinement dans les traditions républicaines.
Déjà la mise à exécution de cet ordre a commencé : il y avait hier à la citadelle un Espagnol de quinze ans venu en France avec sa mère, son jeune frère et deux sœurs. La mère avait des passeports pour tous ses enfants. Il est suspect et nous ne savons si l'on pourra le faire relâcher. Hier un autre Espagnol, menacé d'internement, est venu se plaindre au consulat ; il est immatriculé, a son permis de séjour, et le consul a écrit en sa faveur une lettre pour obtenir qu'on le laisse tranquille. Rien n'y fera ; et s'il insiste, il sera empoigné.
VUE GENERALE SAINT-JEAN-DE-LUZ 1873 PAYS BASQUE D'ANTAN |
Les maires de la frontière se sont réuni lundi à Saint-Jean-de-Luz sous la présidence de M. de Larralde, maire d'Urrugne et conseiller général ; M. Leremboure, conseiller d'arrondissement pour le canton, assistait à la réunion. Une protestation contre ces mesures despotiques, qui font le plus grand tort au pays en obligeant les Espagnols à s'éloigner de la France, sera envoyée à M. Thiers. Les maires font fausse route : c'est à la commission de permanence qu'ils doivent s'adresser ; elle seule peut nous faire rendre justice.
Jusqu'à présent, sept communes dans notre arrondissement sont interdites aux Espagnols : Hendaye, Biriatou, Urrugne, Ascain, Sare, Itsassou, Ainhoa. Mais il n'y a pas de motif pour s'en tenir là, et les autres villages doivent redouter un nouvel arrêté qui viendra les ruiner.
Nous oubliions que la pièce est confidentielle, ce qui semblerait démontrer qu'on tient à ce que ce chef-d'œuvre soit peu connu du public. Il nous a été impossible d'en obtenir lecture ou copie de la sous-préfecture ; nous l'avions lue la veille ailleurs par le plus grand des hasards. Néanmoins nous croyons facile de nous la procurer pour mercredi prochain."
PORT DE BAYONNE 1873 PAYS BASQUE D'ANTAN |
- le 28 avril 1873 :
"... Si M. de Goulard a été très net dans l'affaire où était mêlé M. Jules Simon, nous regrettons d'avoir à constater que le ministre de l'intérieur s'est montré beaucoup moins ferme dans la question des carlistes réfugiés en France, et à propos des mesures de rigueur récemment ordonnées contre eux. C'est M. Adnet qui a présenté à ce sujet quelques observations. Et ce qui lui en a fourni le texte, c'est une protestation imprimée de tous les maires du canton de Saint-Jean-de-Luz, qu'ils viennent d'envoyer au gouvernement.
JULES SIMON DEPUTE DE LA MARNE DE FEVRIER 1871 A DECEMBRE 1875 |
Dans ce document, les maires du canton de Saint-Jean-de-Luz se plaignent vivement des tracasseries qui sont multipliées contre les Espagnols résidant près de la frontière et qui ont pour le commerce, l'agriculture et l'industrie de ces contrées le plus fâcheux résultat. Les signataires représentent, que dans ces pays les Espagnols résidant, et pour ainsi dire établis à demeure, représentent le tiers de la population C'est en partie grâce à eux que s'alimente le commerce et que se soutient l'agriculture. N'est-ce pas aller directement à rencontre de ce double intérêt que d'adopter contre eux un système de persécutions d'autant plus injustes, que leur attitude politique n'offre rien qui prête matière à ces excès de l'arbitraire ou qui les puisse justifier ?
JEAN JOSEPH MARIE EUGENE ADNET DEPUTE HAUTES-PYRENEES DE FEVRIER 1871 A MARS 1876 |
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