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mardi 1 novembre 2022

LA PÊCHE À SAINT-JEAN-DE-LUZ EN LABOURD AU PAYS BASQUE EN NOVEMBRE 1924

LA PÊCHE À SAINT-JEAN-DE-LUZ EN 1924.


En 1922, est introduit à Saint-Jean-de-Luz le filet tournant ou bolinche.


pays basque autrefois port labourd
PORT DE SAINT-JEAN-DE-LUZ 1923
PAYS BASQUE D'ANTAN



Cela quadruple le tonnage pêché en poisson bleu, sardine et anchois, qui prennent désormais 

de très loin la première place dans l'activité du port.



Voici ce que rapporta à ce sujet la revue hebdomadaire La Côte basque : revue illustrée de 

l'Euzkalerria, le 2 novembre 1924, sous la plume de Georges Velloni :



"Le Pays Basque économique et pittoresque.


La Pêche à Saint-Jean-de-Luz.



Si l’attention du touriste est attirée par les sinuosités curieuses de nos côtes, l’infini de l’Océan et les courbes altières dont les Pyrénées festonnent l’horizon, elle est également retenue à Saint-Jean-de-Luz par un coin pittoresque qu’une vie intense anime plusieurs fois par jour, élément d’intérêt dont il est trop rarement fait mention : le port.



Véritable Janus, Saint-Jean-de-Luz possède deux visages : la ville moderne, quartier de villégiature bordant la mer et le boulevard Thiers, avec ses hôtels, ses jolies villas, ses attractions, et la ville autochtone, la ville basque aux vieilles maisons curieuses, à l’église typique, aux rues fantasques, née à l’embouchure de la Nivelle, lieu de refuge des pêcheurs.



pays basque autrefois boulevard labourd
BOULEVARD THIERS SAINT-JEAN-DE-LUZ
PAYS BASQUE D'ANTAN



Ce deuxième visage de Saint-Jean, le plus intéressant, a été décrit, admiré, reproduit dans maintes oeuvres d’art, mais sa raison d’être, le port, n’a guère trouvé de glorifications que sous le pinceau des maîtres paysagistes locaux. Nul ne l'a vanté comme il mérite de l'être, tant au point de vue attractif qu’au point de vue économique.



Au point de vue attractif, le port de Saint-Jean intéresse l’étranger par son aspect et son cadre. Sur les parapets s’étalent les vastes filets aux fines mailles, bleus ou bruns, que bordent des flotteurs en liège, sur les quais évoluent les pêcheurs vêtus de bleu, de rouge ou de marron, fiers et robustes lutteurs des mers qui rapportent pour trophées les poissons aux écailles brillantes ; avec eux de robustes basquaises et des types intéressants de vieillards solides au poste. Parmi ceux-ci, il faut citer une figure célèbre dans toute la région, celle de Catherine Sarrasquette, connue sous le nom de Kattalin. Cette vigoureuse aïeule, âgée de 91 ans, semble être la mère de la grande famille de pêcheurs qui s’agite au long du quai sur lequel elle travaille depuis soixante ans et où elle fit toujours l’enchère jusqu’à ces derniers temps. Actuellement encore, elle y prend part en amateur, mais continue à suivre le marché en femme de métier qui ne laisse pas sa place aux autres. Ayant appris que son effigie paraîtrait dans nos colonnes, elle se déclara heureuse de savoir que sa photo irait à Paris, à défaut d’elle-même, dont le rêve était de connaître la capitale.



pays basque autrefois pêcheur kattalin
KATTALIN ESKERRA
PAYS BASQUE D'ANTAN



Autour d’elle, c’est le va et vient laborieux de gens actifs et satisfaits de voir leurs efforts entretenir la prospérité du port — car le petit port de Saint-Jean est prospère, la pêche est bonne en mer et les travailleurs y sont heureux. — Parmi eux, depuis que la sardine se porte davantage vers nos régions, se glissent de nombreux pêcheurs bretons venus avec leurs femmes, dont les costumes si pittoresques dans leur pays semblent un anachronisme en pays basque. Le pourcentage des bretons augmente de jour en jour et il est à craindre qu’il ne devienne excessif par rapport aux gens du pays.



Pour servir de cadre à cette vie locale et précieuse, les demeures basques des quais, la maison de Louis XIV, celle de l’Infante, Ciboure et son église servant de socle à la colline de Bordagain, la jetée des pêcheries, et, à l’opposé de la mer, les rives de la Nivelle et les profils des premiers monts pyrénéens que domine la Rhune, forment un ensemble digne d’être signalé, capable de captiver les voyageurs les plus blasés. Sous un beau soleil, c’est de la gaieté, de la simplicité, de la vie saine, et de jolies lignes dans de la lumière.



Mais au-dessus de tout ceci, plane l’intérêt de l’industrie qui fit naître et prospérer St-Jean, celle de la pêche, qu’évoquent les hommes courageux des quais et les petits chalutiers à vapeur qui balancent leurs coques voisines sur l’eau clapotante du port auquel ils apportent la moisson de la mer.



La pêche fut toujours fructueuse sur nos côtes, et, peu à peu, elle se spécialisa lorsque se fondirent les entreprises ayant pour but de faire le commerce de gros des espèces de poissons les plus nombreuses. Le thon, la sardine et le maquereau dominant de beaucoup, on en fit la pêche en grand ; celle du thon a plutôt lieu en été, et nous arrivons à l’heure actuelle dans la pleine saison de la pêche à la sardine et au maquereau. Celle-ci est fort active en ce moment es suit une progression qu’indiquent éloquemment les chiffres des deux dernières semaines, concernant la sardine.



Du 9 au 15 octobre ont été pêchés 3 554 000 poissons représentant un poids total de 104 820 kilos, vendus au prix de 491 130 francs.



Du 16 au 25 octobre, ont été pêchés 5 305 000 poissons d’un poids total de 169 150 kilos, vendus au prix de 635 775 francs.



Les bateaux partent de nuit, entre 11 h. et 3 h. du matin, selon l’heure de la marée, et reviennent le lendemain dans l’après-midi.



Le poisson est pesé pour chaque bateau, à l’arrivée, puis débarqué sur les quais dans des casiers de dimension uniforme, contenant chacun un poids égal pour les maquereaux et une quantité d’unités semblable pour les sardines : 200 ou 250 par casier, selon la grosseur des poissons. Ceux-ci sont aussitôt vendus aux enchères sur le quai. L’enchère a généralement pour point de départ le dernier cours de la veille.



Quarante-six bateaux font journellement la pêche à la sardine et appartiennent en majorité aux principaux mareyeurs, MM. Badiola et Cie, Pascal Elissalt, Laffiteau, Plisson, Létamendia, etc. Plusieurs petits patrons se partagent des bateaux ou sont propriétaires d’un seul. A côté d’eux, se trouvent des revendeurs de gros, tels que Mme Veuve Bourdil, dont la maison est fort importante, des usines de mise en boîte et d’expédition ; parmi les principales se trouvent l’usine des Récollets, appartenant à M. Plisson, et les usines Chancerelle, représentées également en Bretagne.


pays basque autrefois sardines bretagne
SARDINES ALFRED CHANCERELLE CONCARNEAU



Si l'arrivée des bateaux et les ventes aux enchères constituent un spectacle intéressant, plus intéressant encore est celui de la pêche elle-même auquel assistent souvent des privilégiés. Il n’est aucun de nos mareyeurs qui n’ait accordé avec beaucoup d’amabilité à quelques personnes la faveur de monter sur un chalutier et de prendre part aux émotions du départ nocturne et de la pêche au large. La pêche la plus intéressante à suivre est celle du thon, d’abord parce qu'elle a lieu dans la belle saison, ensuite parce qu'elle dure plus longtemps : les chalutiers qui font cette pêche restent généralement un jour et demi à deux jours en mer.



Toute médaille ayant son revers, il en existe un pour l’industrie de la pêche à Saint-Jean-de-Luz : l’insuffisance de l’aménagement du port, lequel n’est pas adapté à l’importance du trafic actuel, d’où résultent diverses incommodités.



Lorsque les chalutiers rentrent au port, ils sont obligés, faute de points de débarquement assez vastes et assez nombreux, de se ranger les uns derrière les autres et de s’amarrer bord à bord, ce qui force les pêcheurs à se muer en gymnastes pour débarquer leur pêche, et à les transborder plusieurs fois lorsqu’ils sont les derniers arrivés. L’insuffisance de profondeur est parfois gênante et l’encombrement qui résulte de l’exiguïté des jetées complique le chargement du charbon ; enfin les prises d’eau sont trop peu nombreuses et mal placées.



Ce défectueux état de choses préoccupe, constamment les particuliers et le remède en a été étudié par les pouvoirs publics. Plusieurs projets ont été faits, dont trois représentent une formule exacte.



Le premier, datant de 1920, proposait le dragage du bassin et le désenrochement de la passe. Le second, dû à une délibération du Conseil Municipal de Ciboure, date de 1922 ; son plan est vaste, car il envisage la création d’une ceinture de quais et celle d’un nouveau bassin. Le prix de revient qui s’élèverait à une dizaine de millions en a empêché l’exécution. Le troisième enfin, qui date de cette année, est celui qu’a adopté le Conseil Municipal de St-Jean-de-Luz, et se rapproche sensiblement de celui de 1920 ; on espère que le service des Ponts et Chaussées le réalisera le plus promptement possible.



Il est à souhaiter que le vœu concernant l’amélioration et l’extension des quais de débarquement joint au rapport, soit un jour exaucé. Pour cela il faudra une collaboration étroite entre les services publics et l’ingéniosité privée, car pour faire œuvre utile dans le cadre restreint auquel on a été forcé de se limiter, il faut que la direction des travaux soit confiée à une habile et savante initiative.



Espérons que ces résultats seront complètement obtenus et à brève échéance, dans l’intérêt de l’extension de la pêche maritime de notre région, qui en est l’industrie par excellence, et en constitue, avec le tourisme, la principale source de richesse."









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