À TRAVERS LA RÉPUBLIQUE BASQUE EN 1937.
Pendant la guerre civile espagnole, appelée aussi guerre d'Espagne, du 17 juillet 1936 au 1er avril 1939, de nombreux correspondants de presse ont publié leurs reportages.
Voici ce que rapporta à ce sujet l'hebdomadaire Regards, le 21 janvier 1937 :
"A travers la République Basque.
Par notre envoyé spécial J. - E. Pouterman. Photos Chim.
Où tout un peuple - catholiques, communistes et socialistes - lutte contre Franco.
Nous forçons le blocus.
Nous sommes à bord du "Aya Mendi" depuis bientôt quatre jours. Partis de Bordeaux dimanche à 3 heures de l'après-midi, nous espérions être à Bilbao le lendemain matin.
Mais notre capitaine transporte, en plus d'une vingtaine de passagers, une cargaison dont la valeur est de plusieurs millions, et il est très prudent. Au lieu d'emprunter la route battue, il est parti au grand large. Il faut louvoyer pour éviter les pirates de Franco et les croiseurs de Hitler.
La nuit est claire, la lune brille, aucun nuage n'assombrit le ciel. Ah ! que le capitaine préférerait à cette belle nuit un brouillard épais et même une tempête violente !... Nous avançons tous feux éteints. Mais, à quoi bon ? Il fait clair comme le jour. L'on peut nous voir de très loin. N'importe ! C'est notre quatrième nuit en mer, il est temps que nous entrions à Bilbao.
Minuit. Deux ou trois passagers rôdent sur le pont. Les canots de sauvetage sont prêts depuis la veille. Un officier les inspecte une fois de plus. C'est le boute-en-train du quart des officiers, mais, en ce moment, il a plutôt l'air préoccupé. Le capitaine est en haut sur sa passerelle. Depuis 5 heures de l'après-midi, il ne quitte pas son poste. Armé d'une jumelle, il scrute le ciel.
Tout à coup, un feu apparaît à l'horizon. Le capitaine se penche vers le second et lui passe sa jumelle. Un ordre bref retentit. Nous augmentons de vitesse. Le feu à l'horizon disparaît. Quelques minutes passent. Un autre feu jaillit au même endroit, puis un second, un troisième. Pêcheurs ? Bateaux ennemis ? "Kœnigsberg" ? On n'en sait rien. Nous avançons toujours sans ralentir.
CROISEUR LEGER KÖNIGSBERG |
Je descends dans le bureau du capitaine transformé en cabine. Trois matelas entassés l'un sur l'autre me servent de couchette. Je vais dormir, le matin est encore loin.
Un rayon de lumière venant de dessous la porte me réveille. On a donc rallumé l'électricité ! il est 5 heures du matin. Je me précipite sur le pont. Tous les passagers sont déjà debout. Nous sommes en vue du port de Bilbao. Enfin ! L' "Aya Mendi", battant pavillon républicain, a forcé le "blocus".
Quelques heures plus tard, nous débarquons. Partis de Bordeaux dimanche, nous avons atteint la capitale basque jeudi matin. Cette traversée ne doit durer normalement qu'une quinzaine d'heures...
Les pirates à l'oeuvre.
La République Basque se trouvait aux prises depuis plus d'une semaine avec les forces navales du Reich hitlérien. On connaît les mésaventures du "Palos", du "Soton", du "Blackhill". J'ai voulu me rendre compte sur place des circonstances dans lesquelles s'étaient produits ces incidents.
CARGO BASQUE SOTON 1937 |
On me fit voir tout d'abord, dans un entrepôt du port de Bilbao, les caisses saisies par les autorités républicaines à bord du vapeur allemand "Palos" qui se dirigeait vers Séville. Une trentaine de colis en tout, dont seize contenant du celluloïde en tablette et huit des postes de T.S.F. tout équipés pour le service de campagne. Je pus admirer ces appareils perfectionnés dont la destination militaire ne faisait aucun doute. Rien n'y manquait pour faciliter les communications entre différentes unités d'une troupe en campagne. L'ingéniosité technique des constructeurs allemands n'oublia même pas de décorer la surface des appareils aux couleurs de la monarchie espagnole.
COLIS SAISIS A BORD DU PALOS JANVIER 1937 |
Mais ce n'était pas tout. D'autres caisses contenaient l'équipement complet d'un moteur naval qui devait servir à mettre en marche le navire rebelle "Ciudad de Alicante". Les inscriptions sur les caisses en servaient de preuve. Ce fut cette "marchandise" que les communiqués allemands déclaraient n'avoir aucun rapport avec la contrebande de guerre. Et ce fut à cause d'elle que le "Koenigsberg" se livra à des actes de piraterie contre les navires marchands de la République espagnole.
CAISSES SAISIES A BORD DU CIUDAD DE ALICANTE JANVIER 1937 |
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