AINHOA EN 1925.
En 1925, la commune d'Ainhoa compte environ 650 habitants.
RUE PRINCIPALE AINHOA 1923 PAYS BASQUE D'ANTAN |
Voici ce que rapporta à ce sujet la publication La Côte basque : revue de l'Euzkalerria, du 22
février 1925, sous la plume d'Abel Brunet :
"Tourisme et archéologie.
Une visite à Ainhoa.
Si le touriste trouve en Pays Basque les attraits les plus agréables et les plus divers, l’archéologue y rencontre des éléments incomparables d’études. Au point de vue ethnographique, d’abord, la lumière n’est pas faite, bien que l’une des opinions les plus vraisemblablement étayées fasse remonter l’origine des Basques à une migration d’incas, lesquels auraient découvert notre sol avant que Christophe Colomb ne découvrit l’Amérique. Viennent ensuite les coutumes, les traditions, la langue, la chorégraphie, qui ont leur histoire à laquelle s’ajoutent peu à peu de nouveaux détails. Vient enfin l’étude de l’architecture et du "style basque" tant au point de vue monumental qu’à celui de la décoration et du mobilier.
Sans qu’il soit besoin de se livrer aux patientes recherches et aux savantes études auxquelles s’adonnent pour le plus grand intérêt de tous quelques érudits, les simples voyageurs à l’esprit curieux peuvent à la fois trouver en Pays Basque au cours de leurs randonnées des "visions" pittoresques et évocatrices dans lesquelles se trouvent réunies l’esthétique du paysage et l’intérêt de l’ancienneté et de la couleur locale.
De Saint-Jean-de-Luz, allez simplement à Ciboure, cette admirable petite cité Basque à peine enlaidie par quelques maisons modernes, voyons ses maisons, son église à la cour curieuse et sa vieille fontaine. Montons à Bordagain et contemplons la vieille croix de pierre Basque. Redescendons sur le Socoa, en traversant le curieux pont de pierre sur lequel passa une voie romaine afin de parvenir au fort moyenâgeux qui limite de ce côte la baie de St-Jean-de-Luz : partout nous trouvons l’empreinte basque jointe aux divers souvenirs du passé le plus lointain, ayant toujours pour cadre de beauté, soit la mer mouvante, soit le festonnement fier et lointain des monts.
VILLAS AICE ERROTA SAINT-JEAN-DE-LUZ 1925 PAYS BASQUE D'ANTAN |
Que nous allions à Ascain ou à Urrugne, partout le pittoresque intéressant nous environne ; en nul endroit la terre basque ne déçoit l’esthète ou l'archéologue.
Il est cependant un village euskarien qui mérite particulièrement d’attirer l'attention, et par sa situation, et par son caractère, et par ses souvenirs, je veux parler d’Ainhoa, qui est peut-être la perle des villages basques de la région de Saint-Jean-de-Luz.
Sa situation topographique très spéciale, en fait un site en tous points délicieux. Il est presque complètement entouré par de ravissantes montagnes aux contours onduleux, douces à contempler, verdoyantes dans les parties basses, quelquefois agrestement sauvages sur les hauteurs, lesquelles sont ceintes de rochers granitiques qui leur font de majestueuses et lourdes couronnes.
La rue principale, presque unique, offre des deux côtés aux regards émerveillés le spectacle d’un ensemble de vieilles maisons d’un style basque absolument pur, alignées avec la fantaisie chère aux constructeurs anciens de nos régions. Un calme impressionnant y règne, calme spécial, qui n’est pas celui de Bruges-la-Morte de Rodenbach, nature qui semble être en hiver le recueillement devant la majesté des monts, et en été, l’assoupissement heureux sous le soleil caressant le sol natal et illuminant les vieux souvenirs. Parfois, les chars tirés par les grands bœufs escortés du bouvier au long aiguillon, formant un tableau archaïque et de grand caractère dévalent lourdement et lentement les pentes, pour rentrer les moissons, les bois et les divers produits de la montagne ou de la plaine, voisine d’un seul côté, douce et onduleuse.
RUE PRINCIPALE AINHOA PAYS BASQUE D'ANTAN |
Ils s’annoncent par le grincement prolongé de leurs roues, souvent pleines, qui seules troublent la paix profonde qui enveloppe d’un même suaire mystique et la campagne et les habitations. Si vous avancez, vous apercevez la haute silhouette du clocher d’Aïnhoa, beffroi du passé. L’église sévère est à votre droite, le calvaire d’Aïnhoa est à votre gauche, accroché au flanc de la montagne, avec sa petite chapelle blanche comme une communiante toute petite devant l’autel majestueux des monts... Tout près, c’est la triple croix symbolique.
ATTELAGE AINHOA PAYS BASQUE D'ANTAN |
CROIX AINHOA PAYS BASQUE D'ANTAN |
Après avoir, de droite à gauche, contemplé l’église et le calvaire, si nous regardons par l’échancrure que, droit devant nous, ouvre la rue, nous apercevons les montagnes espagnoles, car Aïnhoa est près de la frontière et non loin du passage de Dancharinea. C’est par là qu’il faut faire le voyage de la capitale de la Navarre pour y assister aux célèbres fêtes de la San Firmin, en harmonieux synchronisme avec leur ambiance. C’est là une route de beauté que chaque saison, telle une fée nouvelle, dote de présents splendides. Au coucher du soleil, c’est une admirable vision que le spectacle merveilleux de ces croupes couleur d'émeraude que le mois d’octobre revêt d'une armure vieil or au carapaçonne de cuivres divers. Les meilleurs peintres connaîtront des nuances ignorées en initiant leurs regards aux inimitables colorations qu'offrent les paysages traversés par la route de Saint-Jean-Pied-de-Port et par celle des Aldudes, pittoresques, sinueuses, ou la beauté souveraine des choses est constamment secondée par l'inattendu.
PONT INTERNATIONAL DANCHARIENEA AINHOA PAYS BASQUE D'ANTAN |
De Saint-Jean-de-Luz à Ainhoa, le touriste va de visions en visions délicieuses et grandioses. Si l'on prend par Ascain, montant ensuite le superbe col de St-Ignace, on arrive au sommet par une route en corniche, et de là se découvre le splendide panorama de la vallée et des horizons que l’altitude recule.
En descendant, de jolis vallons s’ouvrent et s’abaissent à gauche, puis c’est la belle et curieuse descente sur le village de Sare, une des merveilles du Pays Basque, très pittoresquement situé, intéressant par de multiples détails, et surtout par ses vieilles et typiques arcades.
PLACE ET ARCADES SARE PAYS BASQUE D'ANTAN |
Pour voir toutes ces splendeurs, il n’y a guère que cinquante kilomètres à faire, aller et retour de Saint-Jean-de-Luz. Mais, si l’on désire éviter la fatigue, il faut aller par chemin de fer à Cambo, et de là, il n’y a que huit kilomètres à faire pour aller à Aïnhoa, afin d’en admirer les beautés et d’y manger les excellentes et célèbres truites de la Nive, en passant par le beau site du Pas-de-Roland.
PAS DE ROLAND ITXASSOU PAYS BASQUE D'ANTAN |
Voici une esquisse générale d’une excursion à Aïnhoa, et une impression d’ensemble, mais revenons à ce village basque si particulier pour les archéologues et les amants du Passé, qui y éprouveront une impression rare dans une ambiance toute spéciale.
Près de l’église d’Aïnhoa, faisant presque corps avec elle, se trouve le cimetière. Ce n’est point un cimetière banal, mais un pieux enclos où les morts sont gardés par le souvenir matérialisé de tout le passé national basque, évoqué par les murs, l’enclos rustique, les inscriptions en langue euskarienne, les vieilles tombes, dont plusieurs sont des "types" de tombes basques. Il faut citer particulièrement la pierre tombale dressée sur le lieu de l’éternel repos du vieux peintre basque Etchegoya, stèle dont l’orbe se détache sur un embroussaillement de fleurs simples. Les gros murs de l’église, les vieilles pierres tombales, les larges dalles irrégulières de l’allée centrale, la végétation rustique des murailles et du sol, le cadran solaire voisin de la tour vous ramènent vers naguère, vers un naguère profondément et intimement lié à la terre des basques.
EGLISE ET CIMETIERE AINHOA PAYS BASQUE D'ANTAN |
L’impression qui se dégage du cimetière d’Aïnhoa, bien que très différente, ne peut être comparée qu’à celle qui s'empare du voyageur qui promène sa rêverie dans les extraordinaires Aliscamps d’Arles ; c'est autre chose, et c’est aussi beau, ce qui n’est pas peu dire.
LES ALISCAMPS ARLES BOUCHES-DU-RHÔNE D'ANTAN |
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