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vendredi 11 février 2022

SAINT-JEAN-DE-LUZ EN LABOURD AU PAYS BASQUE EN 1839 (deuxième partie)

SAINT-JEAN-DE-LUZ EN 1839.


En 1839, la commune de Saint-Jean-de-Luz compte environ 3 300 habitants et est administrée par le Maire Bonapartiste Joachim Labrouche.



pays basque luz 1852
SAINT-JEAN-DE-LUZ 1852
PAYS BASQUE D'ANTAN




Voici ce que rapporta à ce sujet le journal Courrier de la Côte-d'Or, le 15 octobre 1839 : 



"Souvenirs des Pyrénées.



"... La ville de Saint-Jean-de-Luz se résume dans sa longue rue pavée de cailloux blancs, et bordée de maisons inégales dont les fenêtres aux larges croix de pierre attestent une haute antiquité. De petits magasins où sont entassées pêle-mêle toutes les nécessités du commerce moderne, semblent se cacher sous d’énormes auvents, ou derrière des châssis de papier. On rencontre çà et là de belles et modernes constructions, mais nues et silencieuses ; à leurs fenêtres se montrent au plus petit bruit l’œil curieux d’une fille du pays, au teint cuivré, aux yeux noirs, la tête aux longs cheveux tressés d’une Espagnole, ou l’uniforme correct d’un militaire en cantonnement. Des ruelles étroites partent de cette rue principale, comme des branches se détachent du tronc de l’arbre, et conduisent le regard sur le sable de la grève.



L’église, vaste et élevée, ressemble à toutes les églises du pays basque : trois étages de galeries de bois en parcourent la nef ; des nattes habituellement noires sont jetées pêle-mêle sur le pavé, et désignent des places réservées, et qui passent parfois, comme un héritage, de génération en génération. Auprès de ces nattes on remarque de longues et minces chandelles de cire que les femmes allument pendant les offices. Elles s’agenouillent et prient sur ces nattes, tandis que les hommes se tiennent dans les galeries dont nous avons parlé. Dans les villes et les bourgs les plus considérables du pays basque, quelques chaises commencent à s’introduire dans les églises, et à interrompre fâcheusement cette vieille et religieuse coutume. Le maître-autel est appuyé contre le chevet de l’église, et enrichi de colonnes et de statuettes dorées ; les nervures de la voûte sont ogivales, et donnent pour date la cathédrale de Saint-Jean-de-Luz la dernière période du moyen âge. Des orgues, quelques tableaux parmi lesquels il faut admirer un Ecce Homo, qu’un pinceau badigeonneur vient de retoucher cruellement, enfin une certaine somptuosité de détails, lui donnent un caractère simple et riche à la fois, qui emprunte à l’église espagnole et à la paisible chapelle basque.



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EGLISE ST-JEAN-DE-LUZ
PAYS BASQUE D'ANTAN





A l’extrémité de la rue dont nous avons parlé, s’ouvre une vaste place où de beaux édifices attestent les richesses de cette ville autrefois commerçante. On peut voir, à gauche, la maison habitée par Louis XIV en 1660 ; sur la façade qui regarde la Nivelle, quelques statues ornent des entrecolonnement placés au second étage ; plus loin, c’est le pont de la Nivelle qui continue la grande route d’Espagne ; le quai d’encaissement de la rive droite, du côté de Saint-Jean-de-Luz, est déjà cruellement inutile ; celui de la rive gauche, du côté de Ciboure, résiste encore ; mais les pierres se disjoignent, et laissent passer dans leurs interstices des plantes parasites. L'embouchure de la rivière est presque entièrement fermée par les sables que la mer y charrie incessamment.




pays basque port quais labourd
QUAIS DE ST-JEA-DE-LUZ ET CIBOURE
PAYS BASQUE D'ANTAN



La partie de la ville qui touche à la plage, au nord-ouest, semble être au lendemain d’une tempête : tout y est bouleversé et sauvage ; les môles construits sous le règne de Louis XVI y montrent leurs gigantesques débris ; plus loin, c’est le cimetière assis à la naissance des hauteurs de Sainte-Barbe, des corbeaux s’abattant sur les pierres tumulaires, une côte nue et déserte, le bruit des lames qui se brisent, et qui ferment brusquement l’horizon. Depuis un siècle, et pendant ces terribles tempêtes dont nous avons parlé, deux rues entières ont disparu, ne laissant pour vestige que entassements de sable et de cailloux. Les dents de la mer ont pénétré profondément dans les chairs de cette ville, dont la gloire et la prospérité se sont éteintes à la fois. Les ruines mêmes s’effacent sur ce sol si violemment tourmenté, et l'on chercherait vainement aujourd’hui les restes d’un couvent qu’on apercevait encore sur le rivage il y a peu d’années.



Saint-Jean-de-Luz et Ciboure envoient chaque année de robustes jeunes filles vendre à Bayonne de grandes quantités de sardines dont la pêche, en occupant encore ses habitants, a survécu à toutes ces sources de prospérité aujourd’hui taries ; ces actives basquaises parcourent rapidement la ville avec des cris stridents et particuliers qui racontent les bonnes qualités de leur marchandise, et elles retournent le soir même dans leurs familles, grâce à des jambes halées et nerveuses qui défient les meilleurs coureurs.




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KASKAROTS
PAYS BASQUE D'ANTAN




socoa cascarots 1852
KASKAROTS ET FORT DE SOCOA 1852
PAYS BASQUE D'ANTAN


Un petit bras de mer que les marées et les tempêtes peuvent agrandir facilement, s’avance, pour ainsi dire, comme un avant-poste de l’Océan à la rencontre de la Nivelle. Les eaux de la rivière et du golfe forment alors un large chenal divisé en deux bras par une petite île, où, sur l’emplacement d’un ancien couvent de Récollets, un bureau de douane s’ouvre aujourd’hui. En face de Saint-Jean-de-Luz, et à l’extrémité des deux ponts en bois qui continuent la grande route d’Espagne, Ciboure ne mérite plus le nom de ville. C’est un pêle-mêle de chétives maisons coupées par des rues étroites et tortueuses, et au-dessus desquelles domine le clocher de l’église paroissiale, lourde et bizarre construction qu’on prendrait pour un monument chinois. Il y a un siècle à peine, ce bourg de 1 700 habitants en contenait plus de 10 000, et envoyait des navires au Groenland et à Terre-Neuve.



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RECOLLETS CIBOURE
PAYS BASQUE D'ANTAN



La population de Ciboure se compose en grande partie de pêcheurs ; on y rencontre aussi quelques-uns de ces Gitanos que le langage populaire du pays appelle Ytouac ou Egyptocouac, Egyptiens, et dont l’avenir a déjà soulevé de graves questions locales. Cette colonie nomade, qui vit si singulièrement au pied des Pyrénées, depuis la Navarre jusqu’à la mer, est une des physionomies étranges de ce coin de terre si richement accidenté. Dans quelques parties de l’Europe orientale, les Bohémiens sont esclaves ; dans les Pyrénées, ils sont libres comme les isards et les chevreuils de ces montagnes ; mais leur liberté est inquiète et souvent dangereuse. Pendant l’été, ils vivent habituellement au fond de quelque carrière abandonnée, sur la lisière d’une forêt, où ils se nourrissent de viandes mortes préparées et assainies avec des plantes aromatiques. Pendant l’hiver, ils s’établissent près de quelque village basque, et ils s’y occupent d’ouvrage de tannerie et de la tonte des mulets ; les enfants mendient, et vont colportant de porte en porte leurs haillons et leur penchant irrésistible pour le vol."




A suivre...




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