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mercredi 24 octobre 2018

LA TRADITION AU PAYS BASQUE NORD EN AOÛT 1897


LA TRADITION EN 1897.


A la fin du vingtième siècle, des scientifiques et des ethnologues étudient les traditions des territoires de toute la France, et en particulier du Pays Basque.




biarritz autrefois
BIARRITZ 1897
PAYS BASQUE D'ANTAN

Je vous ai déjà parlé dans un article précédent de cette fête en 1897, voici ce que rapporta à son 

tour le journal Le Soleil, dans son édition du 12 août 1897 : 


"La tradition.



Il faudrait être bien aveugle pour ne pas voir ce mouvement qui nous pousse à ressaisir nos vieilles traditions nationales. La centralisation avec ses excès de toute sorte nous a évidemment harassés, exténués. Son uniformité crispante, sa main mise sur toute chose, nous agace comme un collier qui nous empêche de respirer. Nous avons besoin d’air et de lumière. Et c’est ainsi, sous l'inspiration de ce sentiment rénovateur, que nous saisissons toutes les occasions de courir la province, d’étudier nos vieilles coutumes, nos monuments, de retrouver cette existence d’autrefois où l'on s’imprégnait dès l'enfance des émotions premières, des légendes populaires, des souvenirs de l'histoire. Nous recherchons, en un mot, nos origines avec une ardeur tout instinctive, sans mot d’ordre : ce qui prouve que nous obéissons à la curiosité providentielle d’une race qui ne veut pas périr et qui tient après tant de commotions à savoir où furent les conditions de sa force et de sa suprématie. 



Elle est donc importante, cette manifestation qui va avoir lieu à partir du 15 août prochain en plein pays basque, à Saint-Jean-de-Luz. Nous manquerions aussi à tous nos devoirs de chroniqueur, de journaliste ayant le souci de l’actualité, si nous ne la signalions pas, en faisant connaître son but si noble et si patriotique. 



saint jean de luz autrefois
LA TRADITION AU PAYS BASQUE 1897
PAYS BASQUE D'ANTAN



C'est une société de formation relativement récente, la Société d'ethnographie nationale et d'art populaire, qui en a eu l’idée et qui n’en est pas d’ailleurs à son coup d’essai. Elle pratique la récidive, car l’an dernier, à la suite d’assises retentissantes tenues en Poitou, un magnifique volume a été le résultat de son enquête. Tout ce qui pouvait intéresser le passé de notre grande province du Centre, histoire, littérature, costumes, mœurs, tout a été recueilli avec piété et la volonté non pas seulement d’empêcher d’antiques usages de périr, mais encore de les faire renaître. Et ce qu’elle a fait dans le Poitou, la Société d'ethnographie va le tenter de nouveau dans le pays basque. 




Ce coin de France est on ne peut mieux choisi. Il est un de ceux où les habitants ont été le moins atteints par la centralisation, où les traditions ont été conservées le plus religieusement. Un grand romancier, cette année même, dans un de ces récits émouvants et poétiques comme il en a consacré à la Bretagne, nous a promenés sur ces côtes si attachantes du littoral océanique où viennent expirer les poétiques montagnes basques. Mais, il a fait preuve d’observateur, non d’historien. Et l’histoire de cette contrée mystérieuse déconcerte encore les ethnographes et les érudits. Quelle est celte race qui s’est ainsi perpétuée depuis des siècles sur le versant les Pyrénées espagnoles et sur celui des Pyrénées françaises, parlant une langue qui ne ressemble ni à l’espagnol ni au français, ne se laissant jamais assimiler par les populations du voisinage? Constitue-t-elle la dernière famille des Ibères primitifs ? Ces Basques sont-ils les descendants de ces Vascons qui conquirent la Novempopulanie et infligèrent aux armes de Charlemagne la défaite cruelle de Roncevaux? Ou bien, ne sont-ils que les fils transformés des Phéniciens qui à coup sûr connurent ces parages, y fondèrent des colonies ? Autant de questions à élucider.




Et peut-être que le meilleur système pour arriver à ce résultat est-il celui qu’emploie la Société d'ethnographie nationale, qui va dresser comme un méticuleux inventaire de ce qui existe, de ce qui se dit, de ce qui se fait, de ce qui se chante et se danse dans le pays basque. Que signifie, par exemple, ce défi hautain que, du haut de la montagne où il surveille ses animaux, le plus petit berger adresse encore à un ennemi imaginaire, tout au moins inconnu de nous ? Superbe, il le provoque par ses cris et ses gestes à quelque combat, à une revanche dont la race sortira victorieuse. Et dans les églises, que de traces d’habitudes cultuelles qu’on ne retrouve nulle part ailleurs, comme, par exemple, ce tapis des veuves où se groupent pendant les offices celles qui n’ont plus d’époux et qui doivent lui rester fidèles même après la mort. Dans l’Inde, les veuves ne s’immolaient-elles pas ? Dans le pays basque, elles forment comme une caste à part, qui renonce au mariage. C’est un autre genre de mort, que ce sacrifice de toute pensée d’union. Puis, il y a des chants de guerre, des chants d’amour, qui produisent quand on les écoute les mêmes impressions que ces divagations rêveuses et bizarres des Tziganes. 



pays basque autrefois
LA TRADITION AU PAYS BASQUE 1897
PAYS BASQUE D'ANTAN



On peut deviner, avec des pionniers comme ceux qui dirigent la Société d'ethnographie nationale et parmi lesquels figurent MM. Gaston Paris, Theuriet, Gaston Deschamps, Gustave Boucher, Bonnat, Huysmans, Georges Lafenestre, quel sera le riche butin plus tard recueilli et le beau volume que l’on nous réserve pour nos étrennes de 1898.  




Le programme de ces fêtes de la science qui dureront huit jours est rédigé de main de maître. Sur la couverture, on a eu l’esprit de donner un magnifique instantané de l’un de ces rudes vieillards basques que l’on rencontre avec tant de joie sur les routes. Solide, le visage de traits nobles et énergiques, l’œil perçant du montagnard, coiffé du béret national, la main appuyée sur le makila, — la canne qui sert à se défendre, à s’appuyer et à diriger le bétail qu’on ramène de la foire, — cet échantillon d’une grande race nous apparaît au coin d’un roc, sur un versant de montagne d’où l’on découvre au loin l’immense Océan. Que de réflexions et de rêves sous ce front ! Plus d’une fois, il a songé comme les ancêtres hardis aux expéditions périlleuses dans les régions inconnues, mais toujours avec la ferme volonté de revenir sur cette côte bénie où jadis régna l’indépendance. Comment oublier les gaies farandoles, le jeu de pelote, le son de la cloche du village natal, la maison paternelle, et souvent la petite amie d’enfance, la "Gracieuse" avec laquelle on échangeait le soir, sous le beau ciel, au murmure du lac immense, quelques serments d’amour ? Ramountcho de M. Pierre Loti n’est qu’une page délicieuse arrachée à la vie basque par un coloriste ; mais que de choses inévitablement négligées, que d’histoires touchantes encore à cueillir aux buissons du chemin, que de tableaux à retenir ! Les fêtes prochaines de Saint-Jean-de-Luz faciliteront ce grand travail de reconstitution d’une province, qui ne sera lui-même que la partie d’une grande œuvre en préparation. 




C’est à peu près la même marche d’études qu’en Poitou pour mettre en relief les traditions populaires, l’hagiographie, la flore, la géologie, l’imagerie, les mascarades. Il y a une section des études religieuses où se traiteront des sujets comme ceux-ci : l’âme basque, la maison, la famille et la tombe basques, la sorcellerie — bohémiens et cascarots, — les Basques devant la civilisation européenne. Il y a aussi une section d’histoire qui se propose de passer en revue des questions ou des faits qui intéressent les annales de la France. C’est ainsi que M. Paul Pougaud nous entretiendra du mariage de Louis XIV, des anciens régiments de marche basques, sujet tout d’actualité à l’instant où l’on étudie avec acharnement la réorganisation de notre armée. Les séances de la section littéraire, d’ethnographie, ne seront pas moins intéressantes. Et les distractions en plein air ne manqueront pas, avec tous ces concours de danses, de chant, de musique populaire, de parties de pelote, tout cela dans le cadre ravissant de Saint-Jean-de-Luz avec ses maisons d’architecture pyrénéenne, sa vieille église, la grande maison où dormit Louis XIV, ce port qui vit tant de flottes et d’où partirent tant de grands marins."







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