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mercredi 17 juin 2020

LA MORT D'ISAAC ALBENIZ À CAMBO-LES-BAINS EN LABOURD AU PAYS BASQUE EN MAI 1909 (deuxième et dernière partie)


LA MORT D'ISAAC ALBENIZ EN 1909.


Isaac Manuel Francisco Albéniz y Pascual est un pianiste et compositeur espagnol, né le 29 mai 1860 à Camprodon (Gérone, Espagne) et mort le 18 mai 1909 à Cambo-les-Bains (Basses-Pyrénées).


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ISAAC ALBENIZ




Voici ce que rapporta la presse, dans Le Mercure de France, le 16 juin 1909 :




"...Peu à peu Albeniz sent le néant et l’inutilité de la carrière de virtuose pour quiconque porte en soi une âme soucieuse de s’exprimer ; la sienne était belle et harmonieuse : il l’allait prouver. 




Ses instincts de novateur, son dédain des idées reçues, son amour du combat de la vie, l’attirèrent vers cette jeune école française qui était à peu près le seul centre musical en Europe où l’on se souciât de ne pas marcher dans les pas de Beethoven ou de Wagner. 




C’est vers 1890 qu’il vint à Paris ; il devait alors y passer la plu part des dix-neuf dernières années qui lui restaient à vivre. Si l’Espagne avait vu naître sa première personnalité, celle du virtuose, il appartenait à la France de voir naître l’œuvre qui restera et qui, tout imprégnée de l’âme espagnole, compte parmi les plus belles fleurs de cette époque musicale si riche en beautés et en charmes. Il abandonna la virtuosité à laquelle il devait ses succès et vaillamment se mit à élaborer ces quatre cahiers d’ "Ibéria", où respirent" les plus belles qualités de la race, où persiste la fraîcheur d’une sève populaire. 



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IBERIA D'ISAAC ALBENIZ

Son caractère primesautier, sa bonté et sa générosité sans pareille eurent tôt fait de lui créer des sympathies qui se renforcèrent bientôt d’une admiration égale de la part des meilleurs de nos musiciens d’avant-garde. 




Il était impossible de penser à Albeniz, de parler de lui sans éprouver une impression de vie saine et noble, de bonté débordante. 




Pauvre Albeniz ! Je le verrai toujours tel qu’en cet après-midi de dimanche, il y a près de deux ans, chez Mlle Selva. Il y avait là Vincent d’Indy, Poujaud, Octave Maus, Roussel, Séverac, Gustave Bret, Pierre Coindreau, René et Carlos de Castéra : on attendait Paul Dukas. C'était quelques jours après la première d’Ariane et Barbe-Bleue. Quand Dukas entra, Albeniz organisa aussitôt une ovation quelque peu cacophonique. Je verrai toujours Albeniz jouant au piano une improvisation tintamarresque, accompagné par les hurrahs des assistants. Albeniz chantant, criant, riant, faisant plus de bruit à lui tout seul que tout le monde et plus heureux encore que tout le monde du succès d’Ariane et Barbe-Bleue. Ensuite, ce jour là, il joua des parties de son 3e cahier d'Ibéria qui était sur le point de paraître. La difficulté de ses œuvres surpassait maintenant ses moyens d’ancien virtuose : mais n’importe, il chantait les notes qu’il n’arrivait pas à faire à temps, il expliquait, il riait, s’attendrissait, il vivait. La page colorée et pittoresque surgissait, splendide et vigoureuse. Nous n’entendrons plus cet être extraordinaire, turbulent et bon, grand cœur et bel artiste, donnant, dans une époque de mercantilisme et d’arrivisme, le spectacle du plus entier détachement de l’intérêt immédiat. 


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PAUL DUKAS

Nous le savions malade ; on espérait encore : on l’avait connu si vivant. Il s’en est allé mourir sur la frontière de ses deux patries, l’espagnole et la française, où il comptait des admirations égales, des attachements aussi ardents, des sympathies aussi vives. 




II était venu en France puiser dans un milieu certaines idées, certaines formes d’écriture, mais son œuvre reste bellement, noblement, franchement espagnole ; presque plus andalouse d’inspiration que catalane, à la fois pleine de fougue et nonchalante, abondante et contenue, riche d’harmonies graves et charmante de veine mélodique. 




La sûreté de son métier ne sent nulle part la gêne ; dans cette forme consciente et précise, son âme abondante et débordante sait se trouver à l’aise. 




Il nous était aussi cher que les nôtres : les Debussy, les Ravel, les Séverac, les Roussel, les Schmitt, tous nos jeunes qui rendent à la France musicale le prestige d’un art vraiment français. Nous voyions en lui non seulement le créateur admirable d’une série d’impressions musicales, l’auteur de cette forte suite symphonique, "Catalonia", de la trilogie du "Roi Arthur" (qui reste vraisemblablement inachevée), nous voyions en lui le paysagiste espagnol le plus merveilleux de son temps, et surtout l’un des ouvriers les plus dignes, les plus grands de cette renaissance musicale espagnole vers laquelle tous ceux qui se soucient de la musique tournent à cette heure leurs regards. 



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CATALONIA D'ISAAC ALBENIZ

Un grand esprit et un grand cœur se sont éteints que l'on ne remplacera pas : il a vu la vie se retirer par un jour de Mai éblouissant, sur la frontière des Pyrénées. Il lui fut épargné de terminer ses jours par un de ces jours sinistres d’hiver dans les villes, il s’est éteint comme il avait vécu, dans le soleil. La mort a quelquefois de ces délicatesses ; elle devait bien cette dernière et douloureuse douceur à celui qui n’avait cessé d’aimer passionnément la beauté et la vie."

 


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